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Décisions

CA Versailles, 15e ch., 3 mars 2021, n° 20/02715

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Selarl Axyme (ès qual.), Connected World Services France (SAS)

Défendeur :

Unedic AGS CGEA IDFO

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Capra

Conseiller :

M. Pinoy

Cons. prud’h. Nanterre, du 2 déc. 2016, …

2 décembre 2016

FAITS ET PROCÉDURE,

Mme X a été engagée à compter du 6 août 2007 en qualité de conseiller commercial débutant, statut employé niveau 2 échelon 3 coefficient 190, par la société Phone House. Elle a été classée ensuite conseiller commercial confirmé, statut employé niveau 3, échelon 1, coefficient 205. Elle a été en congé maternité du 26 novembre 2012 au 17 mars 2013, en congé maladie du 18 mars au 16 avril 2013, en congés payés du 18 avril au 21 mai 2013, en congé parental à temps partiel du 22 mai au 10 septembre 2013 et en congé maladie à compter du 11 septembre 2013.

Après information/consultation jusqu'au 6 septembre 2013 des institutions représentatives du personnel sur son projet de réorganisation visant la cessation définitive de ses activités de distribution entraînant des licenciements économiques collectifs et sur le plan de sauvegarde de l'emploi, la société Phone House a notifié à Mme X son licenciement pour motif économique, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 29 octobre 2013, et lui a proposé d'adhérer au congé de reclassement, ce qu'elle a accepté. Le congé de reclassement a pris fin le 7 novembre 2014.

Les relations entre les parties sont soumises à la convention collective nationale des commerces et services de l'électronique audiovisuel et équipement ménager.

Contestant son licenciement, Mme X a saisi par lettre recommandée avec demande d'avis de réception expédiée le 30 septembre 2014 le conseil de prud'hommes de Nanterre.

La société Phone House a changé de dénomination sociale et a été dénommée la société Connected World Services France, dite ci-après la société CWS France.

Par jugement de départage en date du 2 décembre 2016, le conseil de prud'hommes de Nanterre a :

- dit le licenciement de Mme X sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société CWS France à payer à Mme X la somme de 13 208 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement,

- dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 1154 du code civil relatives à la capitalisation des intérêts échus,

- ordonné le remboursement par la société CWS France aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme X à compter du jour de son licenciement au jour du jugement, à concurrence de quinze jours,

- condamné la société CWS France à payer à Mme X la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné la société CWS France aux dépens.

La société CWS France a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 24 décembre 2016.

Cette société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 10 janvier 2019, qui a désigné la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., en qualité de liquidateur judiciaire.

Par ordonnance du 5 juin 2019, le conseiller de la mise en état a ordonné le sursis à statuer sur les demandes des parties jusqu'au prononcé des arrêts de la cour de cassation sur les pourvois formés par la société CWS France contre les arrêts prononcés par la cour d'appel de Versailles le 22 août 2018 dans des affaires l'opposant à d'autres salariés contestant également leur licenciement pour motif économique.

Ces pourvois ayant été rejetés par arrêts non spécialement motivé de la cour de cassation du 22 janvier 2020, l'affaire a été réinscrite au rôle sur demande de l'intimé le 1er décembre 2020.

Par conclusions déposées au greffe le 29 décembre 2020, la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, demande à la cour :

À titre principal, d'infirmer le jugement entrepris, de dire que le licenciement pour motif économique de Mme X repose sur une cause réelle et sérieuse et de débouter l'intéressée de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

À titre subsidiaire, de limiter le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme 9 906 euros ;

En tout état de cause, de débouter Mme X de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de toutes ses autres demandes et de la condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de son avocat, Maître Christophe D., sur le fondement des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe le 5 janvier 2021, Mme X demande à la cour :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'infirmer en ce qu'il a limité le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de de 13 208 euros, de condamner la société CWS France à lui payer la somme de 19 812 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de fixer cette créance au passif de celle-ci ;

- de condamner la société CWS France à lui payer les intérêts au taux légal avec capitalisation ;

- de condamner la société CWS France à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de fixer cette créance au passif de celle-ci ;

- de condamner la société CWS France aux dépens ;

- de dire que les condamnations sont opposables à l'AGS et garanties par elle.

Par conclusions déposées au greffe le 5 janvier 2021, l'Unedic, délégation AGS-CGEA d'Ile de France Ouest demande à la cour :

- d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement de Mme X sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société CWS à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse et de débouter Mme X de ses demandes ou, subsidiairement, de ramener l'indemnité allouée à de justes proportions ;

- en tout état de cause, de :

. la mettre hors de cause s'agissant des frais irrépétibles de procédure,

. dire que l'ouverture de la procédure collective a arrêté le cours des intérêts légaux,

. fixer l'éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société,

. dire que le CGEA, en sa qualité de représentant de l'AGS, ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6, L. 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-15, L. 3253-19 à 21 et L. 3253-17 du code du travail,

. dire que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte-tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

La cour renvoie, pour l'exposé des moyens des parties, aux conclusions susvisées.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée par ordonnance du 6 janvier 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1- Sur le licenciement

Il sera rappelé à titre liminaire que le principe de sécurité juridique ne saurait consacrer un droit acquis à une jurisprudence immuable, l'évolution de la jurisprudence relevant de l'office du juge dans l'application du droit.

Il résulte de l'article L. 1233-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, que constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise ou à une cessation d'activité.

Si l'entreprise fait partie d'un groupe, la cause économique du licenciement s'apprécie au niveau du secteur d'activité du groupe dans lequel elle intervient.

La lettre qui mentionne la cause économique du licenciement et ses conséquences sur l'emploi du salarié répond aux exigences légales, sans qu'il soit nécessaire qu'elle précise le niveau d'appréciation de la cause économique quand l'entreprise appartient à un groupe. C'est seulement en cas de litige qu'il appartient à l'employeur de démontrer, dans le périmètre pertinent, la réalité et le sérieux du motif ainsi invoqué.

La lettre de licenciement notifiée par la société The Phone House, aujourd'hui CWS France à Mme X, qui mentionne que le licenciement a pour cause économique la suppression de l'emploi de la salariée consécutive à la réorganisation de l'entreprise justifiée par la nécessité de la sauvegarde de sa compétitivité répond aux exigences légales.

Il appartient dès lors à la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, anciennement dénommée The Phone House, de justifier du périmètre du groupe auquel celle-ci appartient et du secteur d'activité au niveau duquel doit s'apprécier la cause économique invoquée dans la lettre de licenciement.

Le périmètre du groupe à prendre en considération à cet effet est l'ensemble des entreprises unies par le contrôle ou l'influence d'une entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 2331-1 du code du travail, sans qu'il y ait lieu de réduire le groupe aux entreprises situées sur le territoire national.

L'article L. 2331-1 du code du travail dispose :

"I.- Un comité de groupe est constitué au sein du groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante, dont le siège social est fixé sur le territoire français, et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

II.-Est également considérée comme entreprise dominante, pour la constitution d'un comité de groupe, une entreprise exerçant une influence dominante sur une autre entreprise dont elle détient au moins 10 % du capital, lorsque la permanence et l'importance des relations de ces entreprises établissent l'appartenance de l'une et de l'autre à un même ensemble économique. L'existence d'une influence dominante est présumée établie, sans préjudice de la preuve contraire, lorsqu'une entreprise, directement ou indirectement :

- peut nommer plus de la moitié des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise ;

- ou dispose de la majorité des voix attachées aux parts émises par une autre entreprise,

- ou détient la majorité du capital souscrit d'une autre entreprise.

Lorsque plusieurs entreprises satisfont, à l'égard d'une même entreprise dominée, à un ou plusieurs des critères susmentionnés, celle qui peut nommer plus de la moitié des membres des organes de direction, d'administration, ou de surveillance de l'entreprise dominée est considérée comme l'entreprise dominante, sans préjudice de la preuve qu'une autre entreprise puisse exercer une influence dominante."

L'article L. 233-3 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-842 du 26 juillet 2005 dispose :

"I.- Une société est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme en contrôlant une autre :

1° Lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ;

2° Lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société ;

3° Lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette société ;

4° Lorsqu'elle est associée ou actionnaire de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société.

II.- Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40% et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne".

Il est établi que la société Carphone Warehouse PLC, société mère de la société Carphone Warehouse Europe, dont elle détient 100% du capital social et qui détient elle-même 100% du capital social de la société CWS France, et la société Virgin Group ont créé une joint-venture via la société Omer Telecom Limited, dont chacune détient 46% du capital social, tandis que 8% du capital social sont détenus par la société Financom et les dirigeants de la société Omea Telecom SAS, filiale à 100% de la société Omer Telecom Limited, exerçant une activité d'opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO) commercialisant des produits et services de téléphonie mobile sous la marque Virgin Mobile.

La gestion paritaire d'une joint-venture n'exclut pas l'appartenance de celle-ci à un groupe.

La société Carphone Warehouse PLC, qui détient 46% des droits de vote de la société Omer Telecom Limited, sans que personne ne détienne directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne, est présumée exercer le contrôle de celle-ci. Il appartient dès lors à la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, de renverser cette présomption en rapportant la preuve que tel n'est pas le cas.

La Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, ne démontre pas que la société Virgin Group, bien que n'étant pas titulaire de la majorité des droits de vote, aurait, de fait, la maîtrise des décisions prises dans les assemblées générales de la société Omer Telecom Limited et exercerait une influence déterminante sur la gestion de cette dernière. Il n'est pas établi notamment qu'elle disposerait des votes de la société Financom et des dirigeants de la société Omea Telecom SAS.

La Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France ne renversant pas la présomption instituée par l'article L. 233-3 II du code de commerce, il convient de retenir que la société Carphone Warehouse PLC exerce bien une influence dominante sur la société Omer Telecom Limited et que celle-ci rentre dès lors dans le périmètre du comité de groupe et donc du groupe auquel la société CWS France appartient pour l'appréciation du motif économique.

Il est établi que la société Omea Telecom SAS une activité d'opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO) en concluant des accords avec les opérateurs de réseau mobile (MNO) pour acquérir des droits d'utilisation de leur réseau mobile, lui permettant de concevoir ses propres forfaits de téléphonie mobile à des prix attractifs qu'elle commercialise sous la marque Virgin Mobile sur internet et dans un réseau de boutiques ouvertes sous cette enseigne.

Il est établi que la société CWS France exerce une activité de distributeur de produits et de services de téléphonie mobile en commercialisant dans ses boutiques des téléphones mobiles et des accessoires de téléphonie mobiles de divers constructeurs ainsi que des forfaits de téléphonie mobile dont la vente lui est confiée par les opérateurs de réseau mobile (MNO), dans le cadre de contrats de distribution. Elle commercialise également, dans une proportion moindre, des produits et services Virgin Mobile.

Le secteur d'activité du groupe à prendre en compte pour apprécier le bien-fondé du motif économique invoqué ne saurait se réduire à la spécialisation d'une entreprise dans la vente d'un produit ou d'un service déterminé.

The Phone House aujourd'hui CWS France et Virgin Mobile interviennent sur le même marché dès lors qu'elles exercent une activité commune de distribution au détail de téléphonie mobile, la première en distribuant des forfaits de téléphonie mobile conçus par les opérateurs de réseau mobile et la seconde en distribuant des forfaits de téléphonie mobile qu'elle conçoit elle-même.

Le secteur d'activité du groupe Carphone Warehouse PLC à prendre en considération pour l'appréciation du motif économique doit dès lors être celui de la téléphonie et inclure l'activité développée sous la marque Virgin Mobile. Or si la situation économique de la société The Phone House aujourd'hui CWS France était effectivement impactée négativement par la résiliation en 2012 du contrat de distribution conclu avec la société Bouygues Telecom, par la résiliation en 2013 du contrat de distribution conclu avec la société Orange, par les effets d'une concurrence accrue entre les opérateurs de réseau mobile (MNO)avec l'arrivée sur le marché en janvier 2012 d'un quatrième opérateur, la société Free, et par l'émergence des MVNO, nouveaux acteurs low-cost, le groupe développait parallèlement l'activité Virgin Mobile, qui offrait de meilleures marges bénéficiaires, et il n'apparaît pas qu'une menace ait effectivement pesé alors sur la compétitivité du secteur de la téléphonie du groupe, qui bénéficiait d'une structure financière saine, avec une absence de dettes à long terme, et d'un très bon niveau de rentabilité. Il n'est pas démontré que la réorganisation mise en oeuvre n'était pas seulement destinée à accroître le niveau de rentabilité du groupe et que le secteur d'activité du groupe Carphone Warehouse PLC, auquel la société The Phone House, aujourd'hui CWS France, appartient, était effectivement exposé à des difficultés économiques prévisibles, qu'il convenait de prévenir par la réorganisation de l'entreprise.

Les éléments produits par la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, sont insuffisants pour rapporter la preuve de la réalité de la menace pesant sur la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel l'entreprise appartient de nature à justifier la réorganisation de celle-ci.

De plus, si le motif économique du licenciement doit s'apprécier à la date du licenciement, il peut être tenu compte d'éléments postérieurs pour cette appréciation.

Or la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, qui invoque l'analyse faite par celle-ci dans la note économique établie le 17 mai 2013 à l'intention des institutions représentatives du personnel pour justifier la réorganisation envisagée et produit une traduction très partielle des rapports annuels en langue anglaise du groupe Carphone Warehouse PLC pour 2013 et 2014, ne produit pas les bilans et comptes de résultats pour l'année 2013 de l'ensemble des sociétés du groupe Carphone Warehouse PLC relevant du même secteur d'activité que la société CWS France permettant à la cour d'apprécier la situation économique réelle de celui-ci à la date du licenciement.

Il s'ensuit que le licenciement de Mme X est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

Au moment de son licenciement, Mme X avait au moins deux années d'ancienneté et la société CWS France employait habituellement au moins onze salariés. En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, l'intéressée peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant des salaires bruts des six derniers mois précédant ses arrêts de travail pour maternité et maladie.

La Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France et la salariée invoquent tous deux un salaire mensuel brut moyen de 1 651 euros.

En raison de l'âge de la salariée au moment de son licenciement, 25 ans, de son ancienneté d'un peu plus de six ans dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée, de son aptitude à retrouver un emploi ainsi que des justificatifs produits, le conseil de prud'hommes a fait une exacte appréciation du préjudice matériel et moral qu'elle a subi en lui allouant la somme de 13 208 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2- Sur les intérêts

En application des dispositions combinées des articles L. 622-28 et L. 641-3 du code de commerce, le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en date du 10 janvier 2019, qui a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société CWS France, a arrêté le cours des intérêts légaux. La créance indemnitaire ne portera en conséquence intérêts au taux légal que du 2 décembre 2016, date du jugement déféré, jusqu'au 9 janvier 2019.

Il y a lieu d'ordonner la capitalisation de ces intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter de la date de la demande qui en été faite.

3- Sur l'intervention de l'AGS

Le présent arrêt sera opposable à l'AGS (AGS-CGEA d'Ile de France Ouest) dans la limite des dispositions des articles L. 3253-6 et suivants et D. 3253-5 du code du travail, lesquelles excluent en particulier l'indemnité de procédure. Cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement.

4- Sur le remboursement des indemnités de chômage à Pôle emploi

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il y a lieu de fixer au passif de la société CWS France le remboursement à Pôle emploi, partie au litige par l'effet de la loi, des indemnités de chômage qu'il a versées à Mme X à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de 15 jours.

5- Sur les dépens et l'indemnité de procédure

La créance des dépens et des frais résultants de l'application de l'article 700 du code de procédure civile, mise à la charge du débiteur, trouve son origine dans la décision qui statue sur ces dépens et frais et entrent dans les prévisions de l'article L. 621-32 du code de commerce lorsque cette décision est postérieure à l'ouverture de la procédure collective.

La Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CWS France, qui succombe pour l'essentiel dans la présente instance, doit supporter les dépens et être déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile. Il apparaît équitable de la condamner à payer à Mme X la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux lieu et place de la somme de 300 euros allouée à l'intéressée en première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes de Nanterre en date du 2 décembre 2016, sauf en ce qu'il a condamné la société Connected World Services France à payer à Mme X la somme de 13 208 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jugement, a dit qu'il sera fait application des dispositions de l'article 1154 du code civil relatives à la capitalisation des intérêts échus, a ordonné le remboursement par la société Connected World Services France aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à Mme X à compter du jour de son licenciement au jour du jugement, à concurrence de quinze jours et a condamné la société Connected World Services France à payer à Mme X la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau de ces chefs,

FIXE au passif de la liquidation judiciaire de la société Connected World Services France la somme de 13 208 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse due à Mme X,

DIT que cette somme produit intérêts au taux légal du 2 décembre 2016 au 9 janvier 2019,

ORDONNE la capitalisation de ces intérêts dans les conditions de l'article 1154 ancien du code civil à compter de la date de la demande qui en été faite,

FIXE au passif de la liquidation judiciaire la société Connected World Services France le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage qu'il a versées à Mme X à compter du jour de son licenciement, et ce à concurrence de 15 jours,

Y ajoutant :

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'AGS (CGEA d'Ile de France Ouest) dans les limites de sa garantie légale, laquelle ne comprend pas l'indemnité de procédure, et dit que cet organisme ne devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement,

CONDAMNE la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Connected World Services France, à payer à Mme X la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile aux lieu et place de la somme de 300 euros allouée à l'intéressée en première instance,

DÉBOUTE la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Connected World Services France, de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,

MET les dépens à la charge de la Selarl Axyme, prise en la personne de Me Jean-Charles D., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Connected World Services France.