Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-25.802
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
M. Riffaud
Avocat général :
Mme Guinamant
Avocats :
SCP Foussard et Froger, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 17 octobre 2019), la société Logiflam ayant été mise en liquidation judiciaire le 26 mai 2015, l'un de ses cogérants, M. I..., a été, sur la requête du ministère public, condamné à supporter une partie de l'insuffisance d'actif. Une mesure d'interdiction de gérer a également été prononcée contre lui.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et le troisième moyen, pris en sa première et sa deuxième branches, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Et sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
3. M. I... fait grief à l'arrêt de le condamner à supporter partie de l'insuffisance d'actif, alors « que seule une faute intentionnelle, à l'exception de la négligence peut être retenue ; qu'en se bornant à évoquer un désintérêt sans constater qu'ils étaient en présence d'une faute intentionnelle, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
4. L'arrêt retient que M. I... ne peut se borner à affirmer qu'il n'avait pas connaissance des aspects juridiques, administratifs, comptables et financiers de la société Logiflam et que son désintérêt, qu'il revendique, ne retire rien au fait qu'il a été dirigeant de droit de cette société du 14 août 2009 au 2 avril 2015 et, qu'à ce titre il lui appartenait de participer à la gestion, dans tous ses aspects. Il constate qu'il ne pouvait légitimement ignorer que la société avait éprouvé des pertes et que des « cotisations Pro-BTP et URSSAF » étaient en souffrance de longue date. Il relève enfin, que la concomitance entre sa démission de ses fonctions de gérant et la date de dépôt de la déclaration de cessation des paiements indique qu'il était pleinement conscient des difficultés financières de la société et a sciemment omis de procéder à la déclaration de cessation des paiements.
5. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a fait ressortir que le désintérêt de M. I... pour la gestion de la société Logiflam et l'omission d'en déclarer l'état de cessation des paiements excédaient la simple négligence, a légalement justifié sa décision.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. M. I... fait grief à l'arrêt de prononcer contre lui une mesure d'interdiction de gérer, alors « que ni le ministère public, ni le liquidateur ne faisaient état d'un comportement similaire à la tête d'une autre société, à savoir la société Flam écologie ; que l'arrêt a été rendu en violation de l'article 7 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 7 du code de procédure civile :
8. Selon ce texte, le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat.
9. Pour condamner M. I... à une interdiction de gérer dont il fixe la durée à sept ans, l'arrêt retient l'importance de sa responsabilité dans la situation actuelle de la société Logiflam et le fait qu'il ait reproduit avec son autre société, la société Flam écologie, les conditions ayant conduit à sa déconfiture.
10. En statuant ainsi, alors que le comportement fautif de M. I... en sa qualité de gérant de la société Flam écologie n'était invoqué ni par le ministère public ni par le liquidateur, la cour d'appel, qui a fondé sa décision sur un fait qui n'était pas dans le débat, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. I... à une interdiction de gérer, l'arrêt rendu le 17 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée.