CA Montpellier, 5e ch. civ., 2 novembre 2022, n° 19/04805
MONTPELLIER
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Les Cousins (SCI)
Défendeur :
Sodisca (SAS), Banque Européenne de Crédit Mutuel (Sté), Fenwick Lease (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gaillard
Conseillers :
Mme Azouard, Mme Carlier
Avocats :
Me Camillerapp, Me Fontaine, Me Vinckel
FAITS et PROCÉDURE ' MOYENS et PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SAS Sodisca qui exploite le supermarché Super U est locataire d'un ensemble immobilier en l'état de quatre baux commerciaux dont deux conclus avec la SCI Les Cousins. Le premier a été conclu à la date du 28 décembre 2007 entre la SCI Les Cousins, représentée par [B] [H] et la société Sodisca représentée par [U] [H], concernant l'ensemble immobilier à usage de supermarché, les emplacements de parking pour la clientèle et une station-service. Le deuxième bail a été conclu le 27 septembre 2013 entre la SCI Les Cousins représentée par [U] [H] et la société Sodisca représentée par [Z] [X] concernant des locaux à usages de bureaux et services.
L'article 4 du bail commercial en date du 27 septembre 2013 relatif à la destination des lieux a prévu que les locaux pris à bail pourront être éventuellement utilisés par le preneur pour exercer toutes activités commerciales dans le cadre de l'exploitation commerciale d'un supermarché sous réserve de la réalisation de plusieurs conditions suspensives telles que:
- l'obtention de toutes les autorisations administratives et réglementaires d'urbanisme et de toutes les autorisations relatives au respect des normes et des règles de sécurité en vigueur,
- l'obtention par le bailleur d'une autorisation expresse de la copropriété [Adresse 9] en changement de la destination des locaux objet du contrat de bail d'un usage de bureaux à un usage commercial.
En application de ces dispositions et pour faire suite à la demande de la SAS Sodisca souhaitant pouvoir réaliser une activité de drive dans les locaux objets du bail de 2013 la SCI a demandé que soit inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée générale de la copropriété la Pompignane l'autorisation de réaliser une communication entre le bâtiment G et le bâtiment A suivant des plans joints.
Cette résolution a été adoptée par l'assemblée générale du 28 mars 2014.
Le 3 octobre 2014, la SCI Les Cousins a assigné en référé la SAS Sodisca, le syndicat des copropriétaires la Pompignane et [U] [Y] en sa qualité de responsable unique de la sécurité du centre commercial 753 la Pompignane au motif d'un trouble illicite crée par des travaux non définitivement autorisés afin d'obtenir la remise en état des lieux à l'identique sous astreinte avant d'être déboutée le 15 janvier 2015 par le président du tribunal de grande instance de Montpellier.
Le 9 avril 2015, la SCI Les Cousins a assigné la SAS Sodisca et [U] [Y] en sa qualité de responsable unique de la sécurité du centre commercial 753 la Pompignane le tribunal de grande instance de Montpellier poursuivant le même objectif de la condamnation à la remise en état à l'identique.
Cette procédure a été jointe à une action du syndicat des copropriétaires à l'encontre de la SCI Les Cousins et de certains copropriétaires à l'encontre du syndic de copropriété en nullité de l'assemblée générale du 28 mars 2014.
Par jugement en date du 8 septembre 2016 le tribunal de grande instance de Montpellier a dit irrecevables les demandes incidentes de la SCI Les Cousins à l'encontre de la SAS Sodisca comme ne se rattachant pas aux prétentions originaires en nullité d'une assemblée générale.
Le 29 décembre 2016, la SCI Les Cousins a fait assigner la société Sodisca, la banque européenne de crédit mutuel et la société FENWICK LEASE aux fins de voir principalement prononcer la résiliation du bail commercial en date du 27 septembre 2013, obtenir l'expulsion de la société Sodisca et la condamner à payer une indemnité d'occupation. La SCI demande également que la société Sodisca soit condamnée sous astreinte à la remise en état à l'identique à ce qu'ils étaient lorsqu'ils ont été donnés à bail et à la remise en l'état du lot 1403 privatif non inclus dans le périmètre des baux.
La banque européenne de crédit mutuel et la société FENWICK LEASE n'ont pas constitué avocat.
Le jugement rendu le 25 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier énonce dans son dispositif :
Déclare irrecevable l'action introduite par la SCI Les Cousins en résiliation du bail commercial en date du 27 septembre 2013.
Déboute la société Sodisca de sa demande en dommages et intérêts;
Condamne la SCI Les Cousins à payer à la société Sodisca la somme de 7 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamne la SCI Les Cousins aux entiers dépens.
Le jugement considère tout d'abord que la SAS Sodisca est bien fondée à soulever l'irrecevabilité de l'action de la SCI Les Cousins.
Le jugement observe ensuite que l'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux, le commandement devant à peine de nullité mentionné ce délai.
Il ajoute que l'article 17 du bail du 27 septembre 2013 intitulé Clause résolutoire prévoit expressément que le bail sera résilié de plein droit notamment en cas d'inexécution d'une seule des conditions du bail, un mois après une mise en demeure restée infructueuse.
Ainsi pour les premiers juges la SCI Les Cousins ne justifiant pas avoir mis en demeure la SAS Sodisca pour inexécution d'une ou plusieurs conditions prévues à l'article 4 du contrat de bail, son action doit être déclarée irrecevable.
Le jugement expose enfin que la demande indemnitaire de la société Sodisca n'est pas justifiée.
La SCI Les Cousins a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 10 juillet 2019.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 7 juin 2022.
Les dernières écritures pour la SCI Les Cousins ont été déposées le 19 avril 2022.
Les dernières écritures pour la société Sodisca ont été déposées le 10 mai 2022.
La banque européenne de crédit mutuel et la société FENWICK LEASE n'ont pas constitué avocat devant la cour.
Le dispositif des écritures pour la SCI Les Cousins énonce en ses seules prétentions :
Réformer le jugement querellé en toutes ses dispositions.
Prononcer la résiliation du bail liant la société Les Cousins à la société Sodisca au jour de la délivrance de l'assignation.
Dire en conséquence que Sodisca est occupant sans droit ni titre à compter de cette date et prononcer son expulsion.
Condamner la société Sodisca à porter et payer depuis cette date à la SCI Les Cousins, une indemnité d'occupation équivalente au loyer alors en cours, soit sur la base annuelle de 90 000 € HT + charges, indexée sur l'indice du coût de la construction courant depuis le 27 septembre 2013.
Condamner la société Sodisca à la remise en état des lieux à l'identique de ce qu'ils étaient lorsqu'ils lui ont été donnés à bail par la SCI Les Cousins le 27 septembre 2013, sous astreinte de 10 000 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de huit jours courant à compter de la signification de la décision à intervenir;
Condamner la société Sodisca à la remise en état du lot 1403 privatif, propriété de la SCI Les Cousins non inclus dans le périmètre des baux à l'identique de ce qu'il était avant que la SAS Sodisca n'en entreprenne l'aménagement, sous astreinte de 10 000 € par jour de retard à l'expiration d'un délai de huit jours courant à compter de la signification de la décision à intervenir;
A titre subsidiaire,
Ordonner la fermeture du guichet actuel du Drive exploité par la SAS Sodisca sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt;
Ordonner sous les mêmes conditions d'astreinte la remise en état initial des locaux en bureaux et service tel qu'à la prise d'effet du bail;
Condamner sous les mêmes conditions d'astreinte la société Sodisca à la remise en état du lot 1403 non inclus dans le périmètre des baux;
Débouter la Sodisca de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
Entendre la banque européenne de crédit mutuel formuler toutes observations utiles en tant que créancier inscrit, sur les mérites de la demande de résiliation plus avant formulée.
Dire que l'arrêt lui sera opposable.
Condamner Sodisca à porter et payer à la SCI Les Cousins la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
Sur l'irrecevabilité de son action pour absence de commandement préalable la SCI soutient principalement que l'article L. 145-41 du code de commerce n'est applicable que dans le cas où il est demandé de constater le jeu de la clause résolutoire du bail et non lorsqu'il s'agit de faire juger un ensemble de manquements du preneur aux règles contractuelles de fonds.
Sur l'irrecevabilité de la demande de remise en état pour autorité de la chose jugée elle oppose concernant l'ordonnance de référé du 15 janvier 2015que celle-ci n'a pas l'autorité de la chose jugée et que le jugement au fond du 8 septembre 2016 a déclaré ses demandes reconventionnelles irrecevables en ce qu'elles ne se rattachent pas aux prétentions originaires en nullité d'une assemblée générale.
Sur le fond la SCI Les Cousins soutient tout d'abord en substance la cour renvoyant les parties à ses écritures pour de plus amples développements
-que la société Sodisca a procédé sans autorisation à la réalisation d'une communication entre le bâtiment G et le bâtiment A entrainant de graves conséquences
-que pour obtenir les autorisations requises la SAS aurait dû déposer un dossier plus vaste visant l'ensemble de l'exploitation commerciale c'est à dire le supermarché et le Drive dans la mesure où suite à la réalisation d'une communication entre les bâtiments G et A un incendie survenant dans l'un ou l'autre des locaux se propagerait dans l'autre avec des risques majeurs pour les occupants des logements situés dans les étages supérieurs,
-que les travaux ne sont pas conformes aux préconisations de la commission de sécurité
-que les travaux ont été entrepris sans que les recours contre la décision d'assemblée générale n'aient été purgés.
Concernant ses demandes relatives au lot privatif 1403 la SCI soutient que la SAS Sodisca l'a aménagé sans autorisation de la copropriété en parking privatif et qu'en outre ce lot n'est pas inclus dans le périmètre des baux conclus entre les deux sociétés.
L'appelante affirme que le preneur a ainsi aménagé en toute illégalité sur ce lot un parking servant à accueillir la clientèle du Drive et ce sans son aval.
La SCI ajoute que contrairement à ce que prétend la SAS le bail du 27 septembre 2013 est un nouveau bail indépendant du précédant conclu entre la SCI Les Cousins et Pôle Emploi et que dans le bail de septembre 2013 il n'a jamais été question d'inclure dans l'assiette du bail le lot 1403 la SAS Sodisca pouvant bénéficier d'autre places de parking.
Le dispositif des écritures pour la société Sodisca énonce en ses seules prétentions :
Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action introduite par la SCI Les Cousins en résiliation du bail commercial en date du 27 septembre 2013, condamné la SCI Les Cousins à payer à la société Sodisca la somme de 7 500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Sodisca de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive.
Condamner la SCI Les Cousins à payer à la société Sodisca la somme de 150 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et trouble de jouissance.
A titre subsidiaire,
Déclarer irrecevable la demande de la SCI Les Cousins de remise en état des locaux et du parking.
Débouter la SCI Les Cousins de l'ensemble de ses demandes.
Condamner la SCI Les Cousins à payer à la SAS Sodisca la somme de 15 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
La société Sodisca à titre principal fait valoir l'irrecevabilité de l'action de la SCI en résiliation du bail sur le fondement de l'article L. 145-41 du code de commerce et sur le fait que la SCI ne justifie pas avoir mis en demeure son preneur pour inexécution d'une ou plusieurs des conditions prévues à l'article 4 du contrat de bail.
La société Sodisca pour voir déclarer irrecevable la demande de remise en état des locaux et du parking se fonde sur l'autorité de la chose jugée, soutenant que ces demandes ont d'ores et déjà été rejetées à deux reprises: par l'ordonnance de référé rendue le 15 janvier 2015 par le président du tribunal de grande instance et par le jugement du 8 septembre 2016 rendu par le tribunal de grand instance au fond et devenu définitif.
A titre subsidiaire sur le fond la société Sodisca soutient que contrairement à ce que prétrend la SCI il n'y a eu aucun changement de destination puisque les locaux pris à bail pourront être éventuellement utilisés pour exercer toute activité commerciale dans le cadre de l'exploitation commerciale d'un supermarché et que le règlement de copropriété mentionne que les lots concernés sont des locaux à usage commercial.
Elle soutient aussi ne pas avoir violé le contrat de bail en ce qu'elle a:
-obtenu le permis de construire purgé de tout recours,
-obtenu l'autorisation de l'assemblée générale du 28 mars 2014 comme prévu par les clauses du bail, rappelant que les décisions de l'assemblée générale sont exécutoires par provision,
-les travaux du Drive ont fait l'objet de plusieurs votes favorables de l'assemblée générale de la copropriété.
Elle ajoute avoir aussi respecté les normes de sécurité invoquant qu'elle a conclu un contrat avec le Bureau VERITAS afin d'être assistée dans l'aménagement du Drive et fait observer que le permis de construire qu'elle a obtenu intègre aussi les règles de sécurité si bien qu'elle n'avait nullement besoin d'une autorisation.
Elle précise que concernant les travaux de communication entre les deux bâtiments qu'il ne s'agit pas d'une partie commune mais d'une partie privative car il s'agit d'une cloison à l'intérieur du supermarché
En ce qui concerne le lot 1403 et le fait qu'il ne ferait par partie du contrat de bail la SAS Sodisca soutient que l'assiette du bail comprend nécessairement les parkings qui sont indispensables et inhérents à son activité commerciale d'exploitation d'un supermarché.
Elle ajoute que c'est la SCI Les Cousins qui a porté devant la copropriété le projet du Drive si bien qu'elle avait parfaitement connaissance du sens de circulation et qu'en outre les plans de la copropriété ne mentionnent nullement un lot 1403.
Pour la SAS Sodisca l'absence de places de parking au contrat de bail constitue à l'évidence une erreur matérielle que la SCI essaie d'exploiter avec mauvaise foi car la commune intention des parties était nécessairement d'inclure les places de parking dans l'assiette du bail.
Elle ajoute que le lot 1403 issu de la subdivision du lot 1401 est une partie privative et les constructions qui s'y trouvent sont également des parties privatives dont le copropriétaire peut user comme il l'entend à partir du moment où le règlement de copropriété est respecté ce qui est le cas pour des places de stationnement pour le Drive.
Sur son préjudice la SAS Sodisca soutient que la SCI n'a de cesse d'empêcher son preneur d'exercer son activité n'exécutant pas ainsi de bonne foi la convention qui lie les parties et empêchant une jouissance paisible du bien objet du contrat de bail et rendant bien fondée sa demande en dédommagement.
MOTIFS
Sur la résiliation du bail du 27 septembre 2013:
Il est constant que la SCI Les Cousins poursuit la résiliation judiciaire du bail commercial du 27 septembre 2013 au motif que le preneur la SAS Sodisca a commis des manquements graves et répétés à ses obligations contractuelles et en particulier en procédant à des travaux de modifications des lieux loués sans obtenir les autorisations nécessaires de la copropriété et des administrations comme prévues au contrat de bail.
Les premiers juges ont déclaré irrecevable la SCI Les Cousins en sa demande de résiliation judiciaire du bail aux torts du preneur aux motifs de non respect des dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce et de l'article 17 du bail.
Il ressort en effet de la lecture de l'article L. 145-41 du code de commerce que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux.
Si comme le soutient la SCI Les Cousins cet article porte sur la mise en jeu de la clause résolutoire par le bailleur ce qu'elle ne demande pas et non sur la demande de résiliation judiciaire du bail pour manquement par le preneur à ses obligations contractuelles il est cependant constant que si le bailleur pour solliciter la résiliation judiciaire du bail vise des manquements du locataire expressément prévus par le bail qui contient une clause résolutoire il doit respecter les dispositions de l'article L. 145-41 du code de commerce c'est à dire faire délivrer au preneur un commandement avant toute action judiciaire.
En l'espèce il n'est pas contesté que la SCI Les Cousins sollicite la résiliation judiciaire du bail en se fondant sur le manquement par la SAS Sodisca des clauses du bail et plus spécialement de l'article 4 sur les conditions dans lesquelles le preneur est autorisé à exercer dans les locaux pris à bail « toutes activités commerciales dans le cadre de l'exploitation commerciale d'un supermarché, de réserves pour le supermarché, de drive avec une éventuelle extension de la surface de vente d'un supermarché ».
Par conséquent la SCI Les Cousins, faute de justifier d'avoir mis en demeure pour inexécution d'une plusieurs des conditions de l'article 4 du bail par un commandement resté infructueux la SAS Sodisca, ne peut qu'être déclarée irrecevable en son action en résiliation du bail du 27 septembre 2013 confirmant par ces motifs ajoutés le jugement dont appel.
Sur la remise en état sous astreinte des lieux objets du bail:
La demande de la SCI Les Cousins de voir ordonner la remise en état des lieux à l'identique de ce qu'ils étaient lorsqu'ils ont été donnés à bail le 27 septembre 2013, sous astreinte, ne saurait être déclarée irrecevable au motif de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance de référé du 15 janvier 2015 qui n'a pas autorité de la chose jugée, ni au motif de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement devenu définitif rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier en date du 8 septembre 2016 lequel a déclaré irrecevable la SCI Les Cousins en sa demande de remise en l'état des lieux objets du bail à l'encontre de la SAS Sodisca car il s'agit là d'une irrecevabilité tenant uniquement à l'instance et non à l'action elle-même à savoir que les demandes de la SCI Les Cousins ne se rattachaient pas aux prétentions originaires en nullité d'une assemblée générale.
Toutefois en application tant des dispositions du code civile en son article 1730 qu'en application des dispositions du bail du 27 septembre 2013 en son article 6 -7°) le bailleur n'est pas recevable à solliciter la remise en état des lieux à l'identique avant la fin du bail si bien que l'action de la SCI Les Cousins en résiliation du bail ayant été déclaré irrecevable et le bail n'ayant donc pas pris fin la SCI Les Cousins n'est pas pas recevable en l'état à solliciter la remise en état à l'identique des lieux donnés à bail.
Par conséquent l'action de la SCI Les Cousins en remise en état des lieux à l'identique de ce qu'ils étaient lorsqu'ils ont été donnés à bail le 27 septembre 2013 sera déclarée irrecevable.
Sur la demande de fermeture du guichet actuel du Drive exploité par la SAS Sodisca sous astreinte et de remise en état initial des locaux en bureaux et service:
A titre subsidiaire si la résiliation du bail n'était pas prononcée la SCI Les Cousins sollicite la fermeture du guichet actuel du Drive.
La SCI Les Cousins fait valoir pour l'essentiel que non seulement l'activité de Drive n'est autorisée par le bail commercial que sous réserve du respect de certaines conditions suspensives et que en outre l'accès de la clientèle au supermarché doit se faire obligatoirement par les portes automatiques et l'allée de circulation du bâtiment ( c'est à dire par la galerie marchande) comme retenu par l'arrêt du 28 janvier 2002 alors que les clients du Drive accèdent à ce dernier par un autre sens de circulation.
En ce qui concerne le contrat de bail du 27 septembre 2013 liant les parties il ressort de sa lecture en particulier de l'article 4 destination des lieux B activités qui pourraient être exercées que contrairement à ce que soutient la SAS Sodisca l'activité de Drive n'est pas en tant que telle autorisée au bail mais que l'exercice de cette activité est possible sous réserve de la réalisation de certaines conditions suspensives.
En effet il sera rappelé que le bail du 27 septembre 2013 prévoit à l'article 4 destination des lieux A que les activités autorisées sans réserve pour les locaux sont à usage de bureaux et services et l'article 4 B prévoit lui que les locaux pris à bail pourront éventuellement être utilisés par le preneur « pour exercer toutes activités commerciales dans le cadre de l'exploitation commerciale d'un supermarché, de réserves pour le supermarché, de drive, avec une éventuelle extension de la surface de vente d'un supermarché ».
Cet article prévoit également que les activités mentionnées au paragraphe B ne pourront être éventuellement exercées par le preneur que sous réserve de la réalisation des conditions suspensives permis lesquelles au 4 B 2° l'obtention par le bailleur d'une autorisation expresse de la copropriété [Adresse 9] qui sera accordée par une assemblée générale des copropriétaires.
Cet article prévoit par ailleurs expressément que le preneur ne pourra en aucun cas procéder au changement de destination des locaux pris à bail que dans le cas où les conditions suspensives en l'occurrence celles visées au 2° auront été obtenues selon les modalités et les conditions ci-dessus énoncées et qu’elles devront être purgées de toutes voies de recours.
En application du contrat de bail il est constant que la SAS Sodisca a avisé son bailleur de son projet de création d'une Drive et que le 28 février 2014 la SCI Les Cousins a saisi le syndic de la copropriété [Adresse 9] d'une demande d'inscription à la prochaine assemblée du 28 mars 2014 d'une résolution pour voir statuer sur le projet de la SAS Sodisca avec en communication les supports et plans au dit projet.
L'assemblée générale du 28 mars 2014 a voté favorablement au projet proposé par la SAS Sodisca et inscrit à l'ordre du jour par le bailleur en la résolution 12.
Toutefois il est constant que le tribunal de grande instance de Montpellier par le jugement en date du 8 septembre 2016 a annulé cette assemblée générale, cette décision étant définitive pour n'avoir fait l'objet d'aucun recours.
Il n'est pas contesté sérieusement par la SAS Sodisca que celle-ci a pour autant réalisé son projet de Drive sans attendre comme le bail l'exige que la décision prise par l'assemblée générale soit purgée de toutes les voies de recours et qu'elle ne peut pas plus justifier que depuis une assemblée générale ultérieure a autorisé le dit changement de destination des locaux objets du bail de 2013 en Drive.
Par conséquent la cour ne peut que faire droit à la demande de la SCI Les Cousins de voir cesser une activité celle de Drive qui n'est pas expressément autorisée par le bail et qui ne remplit par les conditions posées par celui-ci pour l'être.
Il convient donc d'ordonner la fermeture du guichet actuel du Drive exploité par la SAS Sodisca dans un délai de 3 mois à compter de la présente décision et passé ce délai sous astreinte de 500 € par jour de retard.
Sur le lot 1403:
La SCI Les Cousins soutient que la SAS Sodisca occupe et a aménagé sans droit ni titre le lot 1403 lui appartenant pour l'accueil de ses clients, le changement de leurs véhicule alors que le lot 1403 n'est pas compris dans l'assiette du bail et qu'à tout le moins elle exerce sur ce lot une activité commerciale qui n'est pas autorisée par le bail sans réserve.
Il ressort de la lecture du bail commercial du 27 septembre 2013 que l'objet du contrat du bail consiste en la location de locaux à usage de bureaux et service, situés dans un immeuble immobilier sis [Adresse 9] à [Localité 3] cadastrés section AW n° [Cadastre 4], [Cadastre 5] et [Cadastre 7] d'une surface utile de 995,50 m² sur 2 niveaux ( un rez-de-chaussée de 481,40 m² et un étage de 514,10 m²) ces locaux correspondant aux lots privatifs du règlement de copropriété n°623 en totalité et n° 602 en partie le tout matérialisé sur un plan annexé au bail.
Il sera précisé que ces locaux situés dans le bâtiment G au niveau 0 et au 1er niveau étaient initialement affectés à un centre de remise en forme.
Le lot 1403 objet du présent débat, dont la propriété à la SCI Les Cousins n'est pas discutée, est un parking contiguë au bâtiment G et donc au lot 623 que la SAS Sodisca ne conteste pas utiliser.
Il ne peut être contesté comme le soutient la SCI Les Cousins que le contrat de bail de septembre 2013 ne mentionne pas expressément dans l'assiette du bail le lot 1403, toutefois il ressort de la lecture de l'état descriptif de division ( 3ème modificatif ) du 19 et 20 mai 1992 que le lot 1403 qui est issu d'une division du lot 1401 ( divisé en 1402 et 1403) est attenant aux bâtiments G et H avec droit d'usage exclusif.
Par ailleurs dans les annexes du bail il est joint le permis de construire obtenu par le bailleur le 3 décembre 1997 en vue de la modification et du changement de destination du local G initialement « Centre de remise en forme » et nouvellement « Assedics » sur lequel figure 37 places de stationnement.
En outre il ne peut être contesté que même si le bail de septembre 2013 porte comme activités autorisés sans réserve : « bureaux et services » et même si les conditions suspensives n'ont jamais été réalisées pour l'exercice d'une activité commerciale annexe à celle de l'exploitation d'un supermarché comme le Drive que la commune intention des parties étaient l'utilisation des locaux donnés à bail pour le Drive ce qui suppose bien évidement la possibilité de disposer de places de parkings.
De la même façon le bailleur qui soutient aujourd'hui que l'assiette du bail ne comprenait pas de places de stationnement ne peut valablement expliqué comment il a pu à la demande de son preneur présenter à l'assemblée générale une résolution pour autoriser l'activité de Drive si son locataire ne disposait d'aucune place de stationnement contigües au local loué pour lequel il était demandé à la copropriété de pouvoir exercer l'activité de Drive.
Il s'évince donc de l'ensemble de ces éléments que le lot 1403 est bien compris dans l'assiette du bail du 27 septembre 2013 et la SCI Les Cousins ne pourra par conséquent qu'être déboutée de sa demande de remise en l'état du lot 1403, seule demande dont la cour est saisie par les prétentions figurant au dispositif des écritures de la SCI.
Sur la demande reconventionnelle de la SAS Sodisca en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et trouble de jouissance:
Devant le tribunal de grande instance la SAS Sodisca sollicitait déjà l'octroi d'une somme de 50 000 € pour procédure abusive.
Devant la cour elle porte cette demande à la somme de 150 000 € toujours sur le fondement de l'abus de procédure mais aussi sur le trouble de jouissance paisible.
Il sera d'abord rappelé que l'exercice d'une action en justice ou l'exercice d'une voie de recours constitue en principe un droit ne dégénérant en abus qu'en cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.
En outre une procédure ne peut être abusive au seul motif qu'elle n'est pas bien fondée si l'intention de nuire n'est pas démontrée.
Or en l'espèce la preuve de la mauvaise foi ou de l'intention de nuire de SCI Les Cousins n'est pas suffisamment démontrée, ce d'autant que ses prétentions ont été pour partie accueillies, pour que soit justifié sa condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive.
Par conséquent la décision de première instance sera confirmée en ce qu'elle n'a pas fait droit à la demande de condamnation de la SCI Les Cousins au paiement de dommages et intérêts sur ce point.
Devant la cour la SAS Sodisca invoque également le trouble de jouissance paisible pour fonder également sa demande de dommages et intérêts pour autant elle ne produit aucune pièce pour justifier de l'existence de son préjudice et du montant de la réparation qu'elle sollicite.
La SAS Sodisca sera donc déboutée de sa demande de dommages et intérêts complémentaires pour trouble de jouissance paisible.
Sur les demandes accessoires:
Le jugement dont appel sera également confirmé en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens.
En outre la SCI Les Cousins succombant au principal en son appel sera condamnée à payer la SAS Sodisca la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de la procédure d'appel.
La cour statuant par arrêt réputé contradictoire et rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme par ces motifs ajoutés le jugement rendu le 25 juin 2019 par le tribunal de grande instance de Montpellier, en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action introduite par la SCI Les Cousins en résiliation du bail du 27 septembre 2013, en ce qu'il a débouté la SAS Sodisca de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive et en ses demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens;
Y ajoutant,
Déclare irrecevable l'action de la SCI Les Cousins en remise en état des lieux à l'identique de ce qu'ils étaient lorsqu'ils lui ont été donnés à bail le 27 septembre 2013;
Déboute la la SCI Les Cousins de sa demande de remise en l'état du lot 1403;
Condamne la SAS Sodisca à la fermeture du guichet actuel du Drive dans un délai de 3 mois à compter de la présente décision et passé ce délai sous astreinte de 500 € par jour de retard;
Déboute la la SAS Sodisca de sa demande de dommages et intérêts complémentaires pour trouble de jouissance paisible;
Condamne la SCI Les Cousins à payer à la SAS Sodisca la somme 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
Condamne la SCI Les Cousins aux dépens de la procédure d'appel.