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Décisions

Cass. com., 25 mars 2020, n° 18-20.079

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Vaissette

Avocat général :

Mme Henry

Avocats :

SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Foussard et Froger

Amiens, du 24 mai 2018

24 mai 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 24 mai 2018, RG n° 16/05797),la société Compagnie de financement et de conseils COFIC Saint Quentin (la société COFIC Saint Quentin), associée unique de la société Compagnie financière de Constance COFIC Paris (la société COFIC Paris), a décidé le 28 octobre 2015 de dissoudre cette dernière conformément aux dispositions de l'article 1844-5, alinéa 3, du code civil. Cette décision a été publiée dans un journal d'annonces légales le 18 novembre 2015 et deux créanciers ont formé opposition le 16 décembre suivant.
La société COFIC Saint Quentin a été mise en sauvegarde par un jugement du 4 décembre 2015, publié le 20 décembre suivant, puis la procédure de sauvegarde a été étendue, en raison de la confusion de leurs patrimoines, aux sociétés Jol Press, Jol Group et COFIC Paris par un jugement du 22 janvier 2016, publié le 7 février 2016.
Le Comptable, responsable du recouvrement spécialisé de l'Aisne, agissant sous l'autorité de la directrice départementale des finances publiques de l'Aisne (le comptable des impôts), créancier de la société COFIC Paris, a déclaré sa créance à la procédure de sauvegarde le 30 mars 2016 et le juge-commissaire en a prononcé l'admission.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.

Et sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
3. Les sociétés COFIC Saint Quentin, COFIC Paris, Jol Group et Jol Press, font grief à l'arrêt de rejeter leurs contestations et d'admettre la créance du comptable des impôts pour la somme de 672 000 euros, alors :

« 1°/ qu'en cas de dissolution de la société dont toutes les parts sociales sont réunies en une seule main, ses créanciers qui n'ont pas fait usage de la faculté d'opposition à la dissolution dans les trente jours suivant la publication de celle-ci sont réputés renoncer à leur créance à son encontre ; qu'il s'ensuit qu'en cas d'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'encontre de celle-ci, ils ne sont pas recevables à déclarer leur créance à cette procédure ; qu'en estimant que le comptable des impôts était recevable à déclarer sa créance à la procédure par l'effet de son extension à la société COFIC Paris, bien que celle-ci ne pouvait plus être débitrice faute d'opposition de la part de ce créancier, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile, l'article L. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article 1844-5, alinéa 3, du code civil ;

2°/ qu'en cas de dissolution de la société dont toutes les parts sociales sont réunies en une seule main, suivie de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde successivement à l'encontre de l'associé unique puis de cette société, les créanciers de la société qui n'ont pas fait usage de la faculté d'opposition à la dissolution dans les trente jours suivant la publication de celle-ci doivent déclarer leur créance à la procédure de l'associé unique ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que le délai d'opposition à la dissolution de la société COFIC Paris expirait le 18 décembre 2015 et que le délai de déclaration des créances de la société COFIC Saint Quentin expirait le 20 février 2016, en l'état d'une publication du jugement d'ouverture de la sauvegarde de la société COFIC Saint Quentin en date du 20 décembre 2015 ; qu'en retenant que le comptable des impôts était recevable à déclarer sa créance à la procédure le 30 mars 2016, la cour d'appel a violé les articles L. 622-24, L. 622-26, R. 622-24 du code de commerce, ensemble l'article 1844-5, alinéa 3, du code civil. »

Réponse de la Cour

4. D'une part, aucun texte n'établit une présomption de renonciation à son droit ou une perte de ce dernier par le créancier d'une société, dont la dissolution est décidée par l'associé unique, qui ne forme pas l'opposition ouverte par l'article 1844-5, alinéa 3, du code civil, de sorte que l'arrêt retient à bon droit que l'absence d'opposition du comptable des impôts est indifférente et ne peut modifier la situation juridique des parties à la date de l'ouverture de la sauvegarde de la société COFIC Saint Quentin.

5. D'autre part, après avoir relevé qu'au jour de l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société COFIC Saint Quentin, le 4 décembre 2015, la décision de dissolution n'avait pas emporté transmission universelle du patrimoine de la société COFIC Paris à son associée unique et que la société COFIC Paris n'avait pas perdu sa personnalité morale, puisque le délai d'opposition ouvert aux créanciers, dont le point de départ était la publication de la décision de dissolution intervenue le 18 novembre 2015, était encore en cours et qu'un créancier avait fait opposition, l'arrêt en déduit exactement que le comptable des impôts , créancier de la société COFIC Paris, n'était pas tenu de déclarer sa créance au passif de la sauvegarde de la société COFIC Saint Quentin dans le délai de deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture de cette procédure. Puis, faisant une exacte application des textes cités par le moyen, l'arrêt retient qu'en l'absence de décision du juge saisi de l'opposition d'un des créanciers de la société COFIC Paris, la transmission universelle du patrimoine de celle-ci à la société COFIC Saint Quentin n'était pas intervenue au jour du jugement du 22 janvier 2016 constatant la confusion de leurs patrimoines et étendant la sauvegarde de la seconde à la première, de sorte que le comptable des impôts était recevable à déclarer sa créance le 30 mars 2016, dans le délai de deux mois suivant la publication du jugement d'extension.

6. Le moyen n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.