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Décisions

Cass. crim., 28 mai 2008, n° 07-85.063

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. DULIN

Avocat :

SCP Piwnica et Molinié

Montpellier, du 28 juin 2007

28 juin 2007

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-10 du code pénal, 1er, 2 et 6 du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985, préliminaire, 85, 86, 575 alinéa, 2, 1° et 5°, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat- instructeur disant n'y avoir lieu à suivre sur la plainte des parties civiles du chef de concussion ;

" aux motifs que l'arrêt ordonnant l'ouverture de l'information, en date du 10 mai 2001, avait écarté la qualification de concussion au motif que les honoraires des mandataires ne peuvent être assimilés à des droits ou contributions, impôts ou taxes ; que ce jour, malgré la demande présentée au mémoire des parties civiles, la chambre de l'instruction, maintenant sa première analyse, considère toujours qu'il n'apparaît pas que la qualification de concussion puisse être retenue pour les faits dénoncés ;

" 1°) alors que les juridictions d'instruction ont, quelles que soient les réquisitions du ministère public, l'obligation d'informer sur la plainte de la partie civile ; que constitue un refus d'informer une décision par laquelle la juridiction d'instruction considère, par une fausse interprétation de la règle de droit, que les faits déférés ne peuvent légalement comporter une poursuite sous la qualification visée dans la plainte de la partie civile ; que, contrairement à ce qu'a estimé la chambre de l'instruction dans ses motifs repris de son précédent arrêt du 10 mai 2001, lesquels n'ont reçu aucune approbation de la Cour de cassation, il résulte sans ambiguïté des dispositions combinées des articles 1er, 2 et 6 du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985 et 432-10 du code pénal que les émoluments perçus par les administrateurs judiciaires, mandataires de justice chargés en tant que tels d'une mission de service public, sont constitutifs de « droits » en sorte que leur perception indue caractérise le délit de concussion et que par conséquent les motifs susvisés de l'arrêt attaqué procèdent d'une décision de refus d'informer irrégulière ;

" 2°) alors qu'une décision irrégulière de refus d'informer met en évidence le caractère inéquitable de la procédure et par conséquent la violation tant des dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme que de l'article préliminaire du code de procédure pénale " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 626-12 du code de commerce, 121- et 121-7 du code pénal, 575, alinéa 2, 6°, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat- instructeur disant n'y avoir lieu à suivre sur les faits de malversation et tentative reprochés à Me Z... et complicité de ce délit reprochée à Michel A... par la plainte des parties civiles ;

" aux motifs que sur les délits de malversation reprochés, l'article L. 626-12 du code de commerce vise tout administrateur, représentant des créanciers, liquidateur ou commissaire à l'exécution du plan qui : 1°) a porté volontairement atteinte aux intérêts du créancier et du débiteur, soit en utilisant à son profit des sommes perçues dans l'accomplissement de sa mission, soit en se faisant attribuer des avantages qu'il savait n'être pas dus ; 2°) a fait dans son intérêt des pouvoirs dont il disposait un usage qu'il savait contraire aux intérêts des créanciers ou du débiteur ; que sur ce point les parties civiles soutiennent que Me Z... a commis le délit de malversation en se faisant attribuer des honoraires dits de résultat pour les actions menées contre les banques ; qu'il convient de rappeler que les honoraires dits de résultat pour l'action menée contre les banques ont été autorisés, suite à la demande de Me Z... par le juge- commissaire ; que le fait que ce magistrat ait décidé que ces honoraires correspondent à sa mission juridictionnelle et sa décision ne peut pas être, à défaut, de démonstration de l'existence d'un concert frauduleux, contestée par la voie pénale et les critiques pouvant être apportées devaient l'être par l'exercice des voies de recours prévues par la loi ; que rien n'établit qu'au moment où il a sollicité des honoraires de résultat, Me Z... savait que de tels honoraires ne pouvaient être dus et que, éventuellement, il portait atteinte aux intérêts des créanciers ou du débiteur ;

" alors que, dans leur mémoire régulièrement déposé, les parties civiles faisaient valoir que le défaut de notification de l'ordonnance de taxe du 1er juillet 1999 rendue par Michel A... en qualité de juge-commissaire aux sociétés et entreprises du groupe X... concernées (c'est- à- dire aux débiteurs) ne pouvait que révéler un concert frauduleux entre Me Z... et Michel A... dont l'objet était d'empêcher quiconque d'exercer une voie de recours qui aurait nécessairement mis en lumière l'illégalité de la rémunération exceptionnelle allouée à Me Z... (soit un honoraire cinq fois plus élevé que l'application de l'article 18 du décret n° 85-1390 du 27 décembre 1985) et qu'en ne s'expliquant pas sur cette argumentation péremptoire, la décision de la chambre de l'instruction ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 626-12 du code de commerce, 121-6 et 121-7 du code pénal, préliminaire, 575, alinéa 2, 1° et 6°, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat- instructeur disant n'y avoir lieu à suivre sur les faits de malversation et complicité de ce délit reprochés à Me B... et à Michel A... par la plainte des parties civiles ;

" aux motifs que sur le délit de malversation, l'article L. 626-12 du code de commerce vise tout administrateur, représentant des créanciers, liquidateur ou commissaire à l'exécution du plan qui : 1°) a porté volontairement atteinte aux intérêts des créanciers et du débiteur, soit en utilisant à son profit des sommes perçues dans l'accomplissement de sa mission, soit en se faisant attribuer des avantages qu'il s'avère n'être pas dus ; 2°) a fait dans son intérêt des pouvoirs dont il disposait un usage qu'il savait contraire aux intérêts des créanciers ou du débiteur ; que sur ce point, les parties civiles soutiennent que Me B... a commis le délit de malversation en se faisant rémunérer toutes les contestations formulées à l'encontre des différentes déclarations de la créance H... ; que les honoraires de Me B... relatifs aux contestations de la créance H... correspondent à l'application stricte d'un tarif réglementaire, qu'on ne peut donc affirmer que le représentant des créanciers savait qu'ils n'étaient pas dus et que les contestations ont empêché l'inscription au passif de la créance H... dans trente huit sociétés ; que ces contestations n'ont pas été faites pour porter atteinte aux intérêts des débiteurs ;

" 1°) alors que, dans leur mémoire régulièrement déposé, les parties civiles soutenaient qu'il se déduisait des termes de la lettre adressée le 11 février 1992 au juge- commissaire (indiquant que « la même déclaration de créances a été reproduite dans la totalité des redressements judiciaires du groupe X... alors que la somme de 2 584 495 francs est due que pour l'affaire Colette X... et que dans les autres procédures, aucune somme est due à H... » que Me B... était parfaitement conscient que trente- six des trente- sept déclarations de créances de la société H... procédaient d'une erreur matérielle manifeste du créancier dans sa déclaration impliquant que le représentant des créanciers était conscient qu'il ne pouvait prétendre toucher trente- sept fois le droit proportionnel pour la contestation d'une unique créance et qu'en énonçant « qu'on ne peut affirmer que le représentant des créanciers savait que les honoraires perçus par lui n'étaient pas dus » sans s'expliquer sur ce chef péremptoire du mémoire des parties civiles, l'arrêt attaqué ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;

" 2°) alors que, dans la motivation de leur plainte expressément reprise dans leur mémoire régulièrement déposé, les parties civiles invoquaient la lettre précitée adressée par Me B... à Michel A... par laquelle le mandataire de justice informait le juge- commissaire de l'anomalie résultant de la multiplicité injustifiée des déclarations de créances H..., lettre établissant par elle- même que la décision par laquelle avait été autorisé le versement indu de trente- sept droits proportionnels (aboutissant à la perception par le mandataire de justice de droits à hauteur de 5 517 379,80 francs pour la contestation d'une unique créance de 2 584 495 francs) ne pouvait résulter que d'un concert frauduleux et qu'en omettant de s'expliquer sur ce chef péremptoire du mémoire des parties civiles, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;

Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-6, 121-7 et 432-12 du code pénal, 85, 86, 575, alinéa 2, 1° et 6°, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du magistrat- instructeur disant n'y avoir lieu à suivre sur les faits de prise illégale d'intérêt et complicité de ce délit dénoncées par la plainte des parties civiles ;

" aux motifs que les parties civiles soutiennent que Me B... a commis le délit de prise illégale d'intérêts, d'une part, en faisant attribuer à Me C... qui est sa concubine, des honoraires de résultat pour une action menée dans le cadre de la procédure collective visant le groupe X..., d'autre part, en faisant nommer et rémunérer un expert, François D..., qui est un parent au quatrième degré ; que les parties civiles soutiennent également que le délit de prise illégale d'intérêts peut être reproché à Me Z..., au moins en qualité de complice, parce qu'il a fait reprendre à son compte la convention d'honoraires signée avec Me C... et qu'il a consigné la demande de désignation de l'expert François D... ; que Me B... et Me Z... sont en l'espèce, comme il a été précisé ci- dessus, des personnes chargées d'une mission de service public et soumises, de ce chef, aux dispositions de l'article 432-12 du code pénal ; qu'il est constant que, tant Me B..., ès qualités de représentant des créanciers, et Me Z..., es qualités d'administrateur judiciaire puis de commissaire à l'exécution du plan de cession, avaient la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation et le paiement dans les entreprises du groupe X... ; que cet élément n'établit nullement qu'ils avaient la charge d'assurer la surveillance des opérations d'expertise de François D... ou des travaux de l'avocat Me C... ; que surtout le délit de prise illégale d'intérêts ne saurait être reproché à une personne chargée d'une mission de service public lorsque cette personne ne possède pas le pouvoir de décision quant à l'acte matériel pouvant constituer la prise illégale d'intérêts, même si elle possède la possibilité de proposer cet acte ; que la désignation des experts et la convention d'honoraires résultent de décisions du juge commissaire ou du président du tribunal de commerce, lequel d'ailleurs était avisé des liens de parenté ou d'alliance en cause, qu'à défaut de contestations par les voies de recours de ces décisions et alors qu'aucune concertation frauduleuse entre le magistrat et les organes de la procédure collective n'a pu être établie, il échet de dire que le délit de prise illégale d'intérêt ne peut être constitué ;

" 1°) alors que, pour décider que les faits n'étaient pas susceptibles de qualification pénale, l'arrêt attaqué s'est prononcé par un motif abstrait, insusceptible de se rattacher aux résultats de l'information, laquelle avait précisément pour objet de rechercher in concreto si le représentant des créanciers et l'administrateur judiciaire devenu ultérieurement commissaire à l'exécution du plan de cession avaient la charge d'assurer la surveillance des opérations d'expertise de François D... ou des travaux de l'avocat Me C... et que dès lors la motivation de l'arrêt procède d'un refus d'informer irrégulier ;

" 2°) alors que ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale l'arrêt dont la motivation procède d'une contradiction manifeste ; que la chambre de l'instruction, qui constatait que les magistrats qui avaient désigné l'expert François D... et attribué des honoraires de résultat à Me C... à la demande de Mes I... et Z..., personnes chargées d'une mission de service public, tout en connaissant les liens de parenté ou d'alliance entre ces personnes impliquant l'existence d'un intérêt fût-il indirect, s'est contredite en affirmant « qu'aucune concertation frauduleuse n'a pu être établie entre le magistrat et les organes de la procédure collective » et que dès lors la cassation est encourue " ;

Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 314-1 et 314-3 du code pénal, 575 alinéa 2, 5°, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a omis de statuer sur les faits d'abus de confiance visés par la plainte des parties civiles consistant dans le versement par les mandataires judiciaires d'honoraires aux cinq experts, Jacques E..., Meyer F..., François D..., Bernard G... et Pierre G... (d'un total de 4 008 182,00 francs) ;

" alors que les juridictions d'instruction doivent examiner tous les chefs d'inculpation visés dans la plainte de la partie civile quelles que soient les réquisitions du ministère public " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non- lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par les parties civiles appelantes, a exposé les motifs pour lesquels elle a estimé qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que les demandeurs se bornent à critiquer ces motifs, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de chambre de l'instruction en l'absence de recours du ministère public ;

Que, dès lors, les moyens sont irrecevables, et qu'il en est de même du pourvoi, par application du texte précité ;

Par ces motifs :

DÉCLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;