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Décisions

CA Paris, 16e ch. B, 5 juin 2008, n° 07/08785

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Agencement Général du Bois (SARL), Credipar (SA), Banque Themis (Sté), M. le Trésorier de Bondy (és qual.), M. le Comptable du Tresor de Bondy (és qual.), M. le Comptable du Service des Impôts des Entreprises de Noisy-le-Sec (és qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bouly de Lesdain

Conseillers :

M. Zavaro, M. Maubrey

Avoués :

Me Buret, SCP Duboscq - Pellerin

Avocats :

Me Baucher, Me Bononec

TGI Bobigny, ch. 5 sect. 2, du 25 oct. 2…

25 octobre 2004

ARRÊT :

Contradictoire

Prononcé publiquement et solennellement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

Signé par M. Michel ZAVARO, Président de chambre, M. Renaud BOULY de LESDAIN, Président, étant empêché, et par Mlle Carole TREJAUT, Greffier, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Considérant que Madame D. est locataire depuis le 15 février 2004 d'un bâtiment à usage de menuiserie et de deux terrains à AULNAY-SOUS-BOIS ; Qu'elle a sous-loué les locaux à la société AGENCEMENT GENERAL DU BOIS (AG BOIS) le 1er juillet 1993 ; Que par ordonnance du 3 mai 2000, Monsieur J. a été désigné en qualité d'expert en raison de désordres en toiture consécutifs à la tempête du 26 décembre 1999 ; Que Madame D. et la société AG BOIS ont assigné le bailleur, Madame S. pour qu'elle soit condamnée à leur payer la somme de 557.106,30 francs en réparation de leur préjudice ; Que cette dernière leur a délivré le 28 février 2000 un congé avec refus de renouvellement de bail commercial sans indemnité d'éviction et le 7 mai 2001 un commandement visant la clause résolutoire du bail au motif que les lieux loués auraient fait l'objet de transformations sans autorisation du bailleur ; Que Madame D. a saisi le 25 mai 2001 le tribunal de grande instance de BOBIGNY pour faire annuler congé et commandement ;

Considérant que le tribunal de grande instance de BOBIGNY, par jugement du 12 juin 2002, a condamné Madame S. à payer des dommages-intérêts au titre de la réparation de l'installation électrique et du chauffage et l'a déboutée de sa demande en résiliation judiciaire du bail au motif qu'elle connaissait et tolérait la sous-location dont le bail contenait une autorisation de principe ; Que la Cour d'appel de PARIS par arrêt du 25 octobre 2004 rectifié le 7 février 2005 a confirmé le jugement déféré ;

Considérant que par arrêt du 11 juillet 2006, la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt de cette cour en ce qu'il a rejeté la demande de Madame S. tendant à faire prononcer la résiliation du bail au motif que la connaissance et la tolérance du bailleur ou l'autorisation de principe donnée à la sous-location ne peuvent être assimilées à son concours à l'acte exigé par l'article L 145-31 du Code de commerce ; Qu'elle a encore cassé l'arrêt pour contradiction de motifs en ce qu'il a débouté la bailleresse de ses demandes en réparation des conséquences des multiples violations des clauses du bail et en réparation du trouble de jouissance subi alors qu'il constatait que Madame S., âgée de 94 ans, avait subi depuis des années des pressions, des menaces continuelles, des insultes de la part des dirigeants de la société AG BOIS ainsi que des troubles de jouissance ;

Considérant que Madame S. et Madame D. sont décédées et que leurs héritiers sont intervenus à l'instance ; Que la société AG BOIS a été placée en redressement judiciaire et fait l'objet d'un plan de continuation ; Que les organes de la procédure sont intervenus à l'instance ;

Considérant que les consorts S. concluent que par l'effet du congé du 28 février 2000, les consorts D. sont occupants sans droit ni titre depuis le 1er septembre 2000 ; Qu'ils soutiennent à titre subsidiaire l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 7 juin 2001 et à titre plus subsidiaire la résiliation judiciaire du bail ; Qu'ils demandent l'expulsion sous astreinte des consorts D., la fixation d'une indemnité d'expulsion et la condamnation des consorts D. à leur payer 34.000 € à titre de dommages-intérêts en raison du traitement réservé à leur auteur, 3.000 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 32-1 du Code de procédure civile et 8.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ; Qu'ils demandent également la fixation de leur créance au passif de la société AG BOIS à la somme de 45.000 € ;

Considérant que l'administrateur judiciaire, commissaire à l'exécution du plan de la société AG BOIS, le représentant des créanciers de la société, la société et les consorts D. concluent que les consorts S. sont irrecevables à invoquer le congé et le commandement visant la clause résolutoire en l'état de la cassation partielle alors que Madame S. avait renoncé à le faire devant la cour d'appel de PARIS ; Qu'ils ajoutent que la sous-location consentie par Madame D. à la société AG BOIS est régulière bien que la bailleresse n'ait pas été invitée à participer à l'acte ; Qu'ils soulignent pour en justifier outre l'ancienneté de la sous-location et sa connaissance par la bailleresse, le fait que le cabinet FERRIERES, qui intervenait à l'acte en qualité de mandataire des bailleurs avait donné son accord à cette sous-location ;

SUR CE :

Considérant que l'arrêt d'appel ayant été cassé en ce qu'il rejetait la demande de Madame S. tendant à entendre prononcer la résiliation du bail, celle-ci est recevable à présenter n'importe quel moyen au soutien de sa demande en résiliation y compris l'acquisition d'une clause résolutoire ;

Considérant que le congé sans offre de renouvellement ni indemnité d'éviction du 28 février 2000 vise les constructions réalisées sans autorisation du bailleur par la société AG BOIS, sous-locataire de Madame D. et lui reproche d'entreposer des véhicules sur une parcelle de terrain ne faisant pas l'objet du bail et empêchant toute circulation ;

Considérant que ces griefs ne sont pas établis ; qu'il n'y a donc pas lieu de valider ce congé pour prononcer la résiliation du bail à sa date d'effet sans indemnité d'éviction ;

Considérant que le commandement visant la clause résolutoire du 7 mai 2001 porte également sur la transformation des lieux loués ; Que les griefs identiques ne sont, par la force des choses, pas plus établis que pour le congé ;

Considérant que les consorts S. poursuivent encore la résiliation judiciaire du bail en raison de la sous-location consentie par Madame D. à la société AG BOIS ; Que le bail contient une autorisation de principe de la sous-location totale ou partielle des locaux pour une durée ne pouvant pas excéder celle du bail ; Que le cabinet FERRIERES chargé pour le compte de la bailleresse de la gestion de son local, atteste que la sous-location a été faite avec son accord ;

Considérant que l'article L 145-31 alinéa 2 du Code de commerce dispose qu'en cas de sous-location autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l'acte ; Qu'il est constant que cette formalité n'a pas été respectée ; Qu'il n'est pas établi que le bailleur ait renoncé à se prévaloir de la violation de cette formalité ; Que celle-ci est sanctionnée par la résiliation judiciaire du bail ;

Considérant qu'il convient donc d'ordonner l'expulsion des consorts D. et de tous occupants de leur chef et de fixer l'indemnité d'occupation au montant du dernier loyer plus les charges ; Qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte pour assurer l'effectivité de la décision ;

Considérant que les consorts S. imputent à Madame D. décédée et à la société AG BOIS des violations multiples des clauses du bail, un abus de faiblesse sur une personne âgée de 94 ans et des troubles de jouissance en réparation desquels ils demandent des dommages-intérêts ; Que la seule violation des clauses du bail établie est réparée par la résiliation judiciaire du bail ; Que les autres griefs ne sont pas établis ; Qu'il apparaît au contraire que les relations entre les parties se sont tendues lorsque la propriétaire a été appelée à réparer les dommages immobiliers consécutifs à la tempête du 26 décembre 1999 ; Que cette circonstance ne saurait être imputée à la faute des locataires et ouvrir droit aux héritiers de Madame D. à des dommages-intérêts, aucune autre faute que la sous-location formalisée sans que le bailleur ait été appelé à l'acte, n'étant établie ;

Considérant que l'abus de procédure n'est pas établi et qu'il n'est pas inéquitable de laisser les consorts S. supporter leurs frais irrépétibles de procédure ;

PAR CES MOTIFS

Prononce la résiliation judiciaire du bail ;

Ordonne l'expulsion des consorts D. et celle de tous occupants de leur chef, si besoin est, avec l'assistance de la force publique ;

Autorise les consorts S. à faire transporter l'ensemble des meubles garnissant les locaux dans le garde-meubles de leur choix aux frais et risques des consorts D. ;

Condamne les consorts D. solidairement à verser aux consorts S. une indemnité d'occupation égale au dernier loyer contractuellement défini plus les charges jusqu'à la libération effective des lieux ;

Déboute les consorts S. de leurs autres demandes ;

Condamne les consorts D. aux dépens dont distraction au profit des avoués en la cause.