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Décisions

CJUE, 4e ch., 12 mai 2022, n° C-719/20

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Comune di Lerici

Défendeur :

Provincia di La Spezia,

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

M. C. Lycourgos

Juges :

M. S. Rodin, M. J.–C. Bonichot, Mme L. S. Rossi, Mme O. Spineanu–Matei

Avocat général :

M. M. Campos Sánchez-Bordona

Avocats :

Me A. Fantappié , Me M. Clarich, Me P. Piciocchi, Me D. Anselmi, Me A. Lolli

CJUE n° C-719/20

11 mai 2022

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 12 de la directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE (JO 2014, L 94, p. 65).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant le Comune di Lerici (commune de Lerici, Italie) à la Provincia di La Spezia (province de La Spezia, Italie) au sujet de l’approbation, par cette dernière, d’un plan attribuant à ACAM Ambiente SpA la gestion du service des déchets de cette commune jusqu’à l’année 2028.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’Union

3 L’article 12 de la directive 2014/24 prévoit :

« 1. Un marché public attribué par un pouvoir adjudicateur à une personne morale régie par le droit privé ou le droit public ne relève pas du champ d’application de la présente directive lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

a) le pouvoir adjudicateur exerce sur la personne morale concernée un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services ;

b) plus de 80 % des activités de cette personne morale contrôlée sont exercées dans le cadre de l’exécution des tâches qui lui sont confiées par le pouvoir adjudicateur qui la contrôle ou par d’autres personnes morales qu’il contrôle ; et

c) la personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par les dispositions législatives nationales, conformément aux traités, qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée.

Un pouvoir adjudicateur est réputé exercer sur une personne morale un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, au sens du premier alinéa, point a), s’il exerce une influence décisive à la fois sur les objectifs stratégiques et sur les décisions importantes de la personne morale contrôlée. Ce contrôle peut également être exercé par une autre personne morale, qui est elle-même contrôlée de la même manière par le pouvoir adjudicateur.

2. Le paragraphe 1 s’applique également lorsqu’une personne morale contrôlée qui est un pouvoir adjudicateur attribue un marché au pouvoir adjudicateur qui la contrôle, ou à une autre personne morale contrôlée par le même pouvoir adjudicateur, à condition que la personne morale à laquelle est attribué le marché public ne comporte pas de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par les dispositions législatives nationales, conformément aux traités, qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée.

3. Un pouvoir adjudicateur qui n’exerce pas de contrôle sur une personne morale régie par le droit privé ou le droit public au sens du paragraphe 1 peut néanmoins attribuer un marché public à cette personne morale sans appliquer la présente directive, lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

a) le pouvoir adjudicateur exerce, conjointement avec d’autres pouvoirs adjudicateurs, un contrôle sur la personne morale concernée, analogue à celui qu’ils exercent sur leurs propres services ;

b) plus de 80 % des activités de cette personne morale sont exercées dans le cadre de l’exécution des tâches qui lui sont confiées par les pouvoirs adjudicateurs qui la contrôlent ou par d’autres personnes morales contrôlées par les mêmes pouvoirs adjudicateurs ; et

c) la personne morale contrôlée ne comporte pas de participation directe de capitaux privés à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle ou de blocage requises par les dispositions législatives nationales, conformément aux traités, qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur la personne morale contrôlée.

Aux fins du premier alinéa, point a), les pouvoirs adjudicateurs exercent un contrôle conjoint sur une personne morale lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

i) les organes décisionnels de la personne morale contrôlée sont composés de représentants de tous les pouvoirs adjudicateurs participants, une même personne pouvant représenter plusieurs pouvoirs adjudicateurs participants ou l’ensemble d’entre eux ;

ii) ces pouvoirs adjudicateurs sont en mesure d’exercer conjointement une influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de la personne morale contrôlée ; et

iii) la personne morale contrôlée ne poursuit pas d’intérêts contraires à ceux des pouvoirs adjudicateurs qui la contrôlent ;

4. Un marché conclu exclusivement entre deux pouvoirs adjudicateurs ou plus ne relève pas du champ d’application de la présente directive, lorsque toutes les conditions suivantes sont réunies :

a) le marché établit ou met en œuvre une coopération entre les pouvoirs adjudicateurs participants dans le but de garantir que les services publics dont ils doivent assurer la prestation sont réalisés en vue d’atteindre les objectifs qu’ils ont en commun ;

b) la mise en œuvre de cette coopération n’obéit qu’à des considérations d’intérêt public ; et

c) les pouvoirs adjudicateurs participants réalisent sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par la coopération ;

5. Le pourcentage d’activités visé au paragraphe 1, premier alinéa, point b), au paragraphe 3, premier alinéa, point b), et au paragraphe 4, point c), est déterminé en fonction du chiffre d’affaires total moyen ou d’un autre paramètre approprié fondé sur les activités tel que les coûts supportés par la personne morale ou le pouvoir adjudicateur concerné pour ce qui est des services, fournitures et travaux pendant les trois années précédant l’attribution du marché.

Lorsque, en raison de la date de création ou de début des activités de la personne morale ou du pouvoir adjudicateur concerné ou en raison d’une réorganisation de ses activités, le chiffre d’affaires, ou un autre paramètre fondé sur les activités tel que les coûts, n’est pas disponible pour les trois dernières années ou n’est plus pertinent, il suffit de montrer que le calcul des activités est vraisemblable, notamment par des projections d’activités. »

4 Aux termes de l’article 18, paragraphe 1, de cette directive :

« Les pouvoirs adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied d’égalité et sans discrimination et agissent d’une manière transparente et proportionnée.

Un marché ne peut être conçu dans l’intention de le soustraire au champ d’application de la présente directive ou de limiter artificiellement la concurrence. La concurrence est considérée comme artificiellement limitée lorsqu’un marché est conçu dans l’intention de favoriser ou de défavoriser indûment certains opérateurs économiques. »

5 L’article 67, paragraphe 4, de ladite directive dispose :

« Les critères d’attribution n’ont pas pour effet de conférer une liberté de choix illimitée au pouvoir adjudicateur. Ils garantissent la possibilité d’une véritable concurrence et sont assortis de précisions qui permettent de vérifier concrètement les informations fournies par les soumissionnaires pour évaluer dans quelle mesure les offres répondent aux critères d’attribution. En cas de doute, les pouvoirs adjudicateurs vérifient concrètement l’exactitude des informations et éléments de preuve fournis par les soumissionnaires. »

6 L’article 72 de la même directive énonce :

« 1. Les marchés et les accords-cadres peuvent être modifiés sans nouvelle procédure de passation de marché conformément à la présente directive dans l’un des cas suivants :

[...]

d) lorsqu’un nouveau contractant remplace celui auquel le pouvoir adjudicateur a initialement attribué le marché :

[...]

ii) à la suite d’une succession universelle ou partielle du contractant initial, à la suite d’opérations de restructuration de société, notamment de rachat, de fusion, d’acquisition ou d’insolvabilité, assurée par un autre opérateur économique qui remplit les critères de sélection qualitative établis initialement, à condition que cela n’entraîne pas d’autres modifications substantielles du marché et ne vise pas à se soustraire à l’application de la présente directive ; ou

[...]

4. Une modification d’un marché ou d’un accord-cadre en cours est considérée comme substantielle au sens du paragraphe 1, point e), lorsqu’elle rend le marché ou l’accord-cadre sensiblement différent par nature de celui conclu au départ. En tout état de cause, sans préjudice des paragraphes 1 et 2, une modification est considérée comme substantielle lorsqu’une au moins des conditions suivantes est remplie :

a) elle introduit des conditions qui, si elles avaient été incluses dans la procédure initiale de passation de marché, auraient permis l’admission d’autres candidats que ceux retenus initialement ou l’acceptation d’une offre autre que celle initialement acceptée ou auraient attiré davantage de participants à la procédure de passation de marché ;

[...] »

7 L’article 90, paragraphe 1, de la directive 2014/24 est ainsi libellé :

« Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 18 avril 2016. Ils communiquent immédiatement à la Commission le texte de ces dispositions. »

 Le droit italien

8 L’article 1er, paragraphes 611 et 612, de la legge n. 190 – Disposizioni per la formazione del bilancio annuale e pluriannuale dello Stato (legge di stabilità 2015) [loi no 190 relative aux dispositions pour la formation du budget annuel et pluriannuel de l’État (loi de stabilité 2015)], du 23 décembre 2014 (GURI no 300, du 29 décembre 2014 – Supplément ordinaire no 99, p. 1), prévoit :

« 611. Sans préjudice des dispositions prévues à l’article 3, paragraphes 27 à 29, de la loi no 244 du 24 décembre 2007 telle que modifiée, et à l’article 1er, paragraphe 569, de la loi no 147 du 27 décembre 2013 telle que modifiée, afin de garantir la coordination des finances publiques, la réduction des dépenses, la bonne administration et la protection de la concurrence et du marché, les régions, les provinces de Trente et de Bolzano, les collectivités locales, les chambres du commerce, de l’industrie, de l’artisanat et de l’agriculture, les universités et les établissements d’enseignement supérieur publics, ainsi que les autorités portuaires, à compter du 1er janvier 2015, engagent un processus de rationalisation des sociétés et des participations détenues directement ou indirectement dans des sociétés, afin d’en réduire le nombre avant le 31 décembre 2015, en tenant notamment compte des critères suivants :

[...]

d) regroupement de sociétés de services publics locaux d’importance économique ;

[...]

612. Les présidents des régions et des provinces autonomes de Trente et de Bolzano, les présidents des provinces, les maires et les autres organes dirigeants des administrations prévus au paragraphe 611, dans leurs domaines de compétence respectifs, définissent et approuvent, avant le 31 mars 2015, un plan opérationnel de rationalisation des sociétés et des participations détenues directement ou indirectement dans des sociétés, les modalités et les délais de mise en œuvre, ainsi que la présentation détaillée des économies à réaliser. Ce plan, accompagné d’un rapport technique spécifique, est transmis à la chambre régionale de contrôle compétente de la Cour des comptes et publié sur le site internet institutionnel de l’administration concernée. Avant le 31 mars 2016, les organes indiqués dans la première phrase établissent un rapport sur les résultats obtenus, qui est transmis à la chambre régionale de contrôle compétente de la Cour des comptes et publié sur le site internet institutionnel de l’administration concernée. La publication du plan et du rapport constitue une publicité obligatoire au titre du décret no 33 du 14 mars 2013 ».

9 Aux termes de l’article 3 bis, paragraphe 2 bis, du decreto-legge n. 138 – Ulteriori misure urgenti per la stabilizzazione finanziaria e per lo sviluppo (décret-loi no 138 établissant d’autres mesures urgentes de stabilisation financière et de développement), du 13 août 2011 (GURI no 216, du 16 septembre 2011, p. 89, ci-après le « décret-loi no 138/2011 ») :

« L’opérateur économique ayant succédé au concessionnaire initial, à titre universel ou particulier, par suite d’opérations entre sociétés effectuées selon des procédures transparentes, y compris des fusions ou acquisitions, sans préjudice du respect des critères qualitatifs initialement établis, poursuit la gestion des services jusqu’aux échéances prévues [...] »

10 L’article 7, paragraphe 5, du decreto legislativo n. 175 – Testo unico in materia di società a partecipazione pubblica (décret législatif no 175 portant texte unique en matière de sociétés à participation publique), du 19 août 2016 (GURI no 210, du 8 septembre 2016, p. 1), dispose :

« Lorsque l’acte constitutif requiert la participation d’associés privés, la sélection de ces derniers se fait par voie de procédure de passation de marché public, conformément à l’article 5, paragraphe 9, du décret législatif no 50 de 2016 ».

 Le litige au principal et la question préjudicielle

11 Le 15 juin 2005, par une décision qualifiée expressément d’« attribution in house », la commune de Lerici a attribué à ACAM la gestion du cycle intégré des déchets dans cette commune jusqu’au 31 décembre 2028, cette gestion étant, plus spécifiquement, confiée à sa filiale ACAM Ambiente. À cette date, ACAM était une société anonyme dont l’actionnariat était exclusivement réparti entre plusieurs communes, dont la commune de Lerici.

12 Le 12 juillet 2013, ACAM a été contrainte de conclure avec ses créanciers un accord de restructuration. Dans le cadre de cet accord, ACAM a recherché, parmi les autres sociétés à participation publique assurant la gestion de services publics en activité sur le marché italien, une société adéquate en vue de réaliser une opération de regroupement. À l’issue de l’appel d’offres public lancé à cet effet, ACAM a choisi d’opérer un regroupement avec IREN SpA qui opère sur l’ensemble du territoire italien, est sous contrôle public et est cotée en bourse.

13 En application d’un accord d’investissement spécifique, conclu le 29 décembre 2017, les communes actionnaires d’ACAM ont cédé à IREN leurs actions d’ACAM et ont acquis une part correspondante d’actions d’IREN en souscrivant à une augmentation de capital qui leur était réservée. Par l’intermédiaire des filiales d’ACAM, devenues ses propres filiales, IREN a continué à gérer les services qui avaient été initialement confiés à ces filiales.

14 Après avoir, le 21 février 2017, exprimé son intention de ne pas approuver le regroupement entre ACAM et IREN, la commune de Lerici a décidé, le 19 janvier 2018, de n’accepter l’accord d’investissement qu’en ce qui concerne la cession de ses actions d’ACAM à IREN, et les lui a effectivement cédées le 11 avril 2018.

15 Par décision du 6 août 2018, la province de La Spezia, désormais compétente pour gérer le service intégré des déchets urbains pour les communes de son ressort territorial, dont fait partie la commune de Lerici, a approuvé la mise à jour du plan de zone pour la gestion intégrée des déchets urbains de la province, en ce qu’il a désigné ACAM Ambiente comme gestionnaire du service pour cette commune, jusqu’au 31 décembre 2028, en vertu d’une attribution in house.

16 La commune de Lerici a introduit un recours contre cette décision, estimant que les conditions de l’exception in house n’étaient plus réunies. Par son jugement 847/2019, le Tribunale amministrativo regionale per la Liguria (tribunal administratif régional pour la Ligurie, Italie) a rejeté ce recours.

17 La commune de Lerici a interjeté appel de ce jugement devant le Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie).

18 En premier lieu, celui-ci souligne que, si cette commune était compétente pour attribuer, au cours de l’année 2005, le contrat litigieux à ACAM, cette compétence a désormais été transférée aux provinces, lesquelles sont, à l’heure actuelle, chargées du service de la gestion intégrée des déchets urbains au profit de l’ensemble des communes de leur ressort territorial.

19 En deuxième lieu, cette juridiction relève que l’opération de regroupement, en cause au principal, a été conclue sur le fondement de l’article 1er, paragraphes 611 et 612, de la loi no 190, du 23 décembre 2014, dont l’objectif est de contenir les dépenses publiques en limitant les participations des organismes publics dans des sociétés. Cette opération était, par ailleurs, justifiée compte tenu du fait qu’ACAM avait conclu un accord de restructuration de sa dette. Dans un tel cas de figure, l’article 3 bis, paragraphe 2 bis, du décret-loi no 138/2011 prévoit la poursuite, jusqu’aux échéances prévues, de la gestion des services, qui avaient été confiés à l’attributaire initial, par l’opérateur économique qui lui succède.

20 En troisième lieu, la juridiction de renvoi estime qu’il existe des doutes sur la compatibilité de cette réglementation avec l’article 12 de la directive 2014/24, relatif à l’exception in house dans le cadre de l’attribution des marchés publics.

21 En effet, l’opération de regroupement, réalisée en l’occurrence, a eu pour conséquence que le service de gestion des déchets urbains de la commune de Lerici, qui avait initialement été attribué, sans appel à la concurrence, à ACAM, sur laquelle il n’est pas contesté que cette commune exerçait, conjointement avec d’autres communes, un contrôle analogue à celui qu’elle exerçait sur ses propres services, au sens de la jurisprudence de la Cour, est désormais attribué à IREN, et, à travers celle-ci, à sa filiale ACAM Ambiente, sans qu’un tel contrôle de la commune de Lerici subsiste à l’égard de l’une ou de l’autre de ces sociétés. En effet, non seulement la participation dans IREN que cette commune avait acquise était tout à fait négligeable, mais en outre, depuis que ladite commune a cédé cette participation, tout lien entre la même commune et IREN a disparu.

22 Or, la province de La Spezia a décidé d’attribuer directement le service destiné à la commune de Lerici, sans appel à la concurrence. Il conviendrait donc de déterminer si cette attribution directe est conforme aux règles du droit de l’Union relatives à la passation des marchés publics.

23 Selon la juridiction de renvoi, il y a lieu, plus particulièrement, d’examiner si le fait que le choix d’ACAM de fusionner avec IREN a été précédé d’un appel d’offres public doit être pris en compte dans un tel contexte.

24 À cet égard, cette juridiction estime que l’objectif ultime des règles de droit de l’Union pertinentes est de promouvoir la concurrence, et que ce résultat est atteint, dans le cadre de l’attribution de services publics, lorsque plusieurs opérateurs sont en concurrence, ou sont en mesure de l’être, pour obtenir le marché en cause, quelle que soit la qualification juridique de l’instrument permettant d’atteindre cet objectif. Dans ces conditions, ladite juridiction est encline à considérer qu’il importe peu que l’attribution d’un service donné ait lieu au moyen d’une procédure d’appel d’offres portant précisément sur l’adjudication de ce service, ou au moyen d’une procédure d’appel d’offres ayant pour objet l’acquisition des actions de la société qui fournit ces services, la concurrence étant garantie dans les deux cas.

25 Dans ces conditions, le Consiglio di Stato (Conseil d’État) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 12 de la directive 2014/24 s’oppose-t-il à une réglementation nationale qui impose un regroupement de sociétés de services publics locaux d’importance économique, à la suite duquel l’opérateur économique qui a succédé au concessionnaire initial, par suite d’opérations entre sociétés effectuées selon des procédures transparentes, y compris des fusions ou acquisitions, poursuit la gestion des services jusqu’aux échéances prévues, lorsque :

a) le concessionnaire initial est une société attributaire “in house” sur la base d’un contrôle analogue à participations multiples ;

b) l’opérateur économique qui lui succède a été sélectionné par un appel d’offres public ;

c) à la suite de l’opération de regroupement des sociétés, les conditions du contrôle analogue à participations multiples ne sont plus remplies à l’égard de l’une des collectivités locales qui ont à l’origine attribué le service en question ? »

 Sur la question préjudicielle

 Sur la recevabilité de la question

26 Conformément à l’article 94 du règlement de procédure de la Cour, toute demande de décision préjudicielle contient « un exposé sommaire de l’objet du litige ainsi que des faits pertinents, tels qu’ils ont été constatés par la juridiction de renvoi ou, à tout le moins, un exposé des données factuelles sur lesquelles les questions sont fondées », « la teneur des dispositions nationales susceptibles de s’appliquer en l’espèce et, le cas échéant, la jurisprudence nationale pertinente », ainsi que « l’exposé des raisons qui ont conduit la juridiction de renvoi à s’interroger sur l’interprétation ou la validité de certaines dispositions du droit de l’Union, ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige au principal ».

27 En l’occurrence, contrairement à ce que soutient le gouvernement autrichien, la décision de renvoi contient une description du cadre factuel et réglementaire du litige au principal suffisante pour satisfaire aux exigences de l’article 94 du règlement de procédure.

28 Ainsi, d’une part, la décision de renvoi reprend la teneur des dispositions nationales applicables au litige au principal. D’autre part, la description, par la juridiction de renvoi, des décisions du 15 juin 2005 et du 6 août 2018 ainsi que de l’appel d’offres lancé par ACAM est suffisante pour comprendre les raisons du choix des dispositions du droit de l’Union dont cette juridiction demande l’interprétation ainsi que le lien qu’elle établit entre ces dispositions et la législation nationale applicable au litige qui lui est soumis.

29 Il s’ensuit que la question soumise à la Cour est recevable.

 Sur le fond

30 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la directive 2014/24 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation ou à une pratique nationale en vertu de laquelle l’exécution d’un marché public, attribué initialement, sans appel à la concurrence, à une entité in house, sur laquelle le pouvoir adjudicateur exerçait, de manière conjointe, un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, soit poursuivie automatiquement par l’opérateur économique ayant acquis cette entité, au terme d’une procédure d’appel d’offres, lorsque ce pouvoir adjudicateur ne dispose pas d’un tel contrôle sur cet opérateur économique.

31 À titre liminaire, il ressort, premièrement, de la décision de renvoi que, au cours de l’année 2005, la commune de Lerici a attribué, jusqu’à l’année 2028, la gestion de son service de déchets à ACAM, la gestion opérationnelle de ce service étant confiée à sa filiale, ACAM Ambiente. À la date de cette attribution, le capital d’ACAM était détenu exclusivement par certaines communes, dont la commune de Lerici.

32 Selon la juridiction de renvoi, le contrat ainsi attribué à ACAM constituait un marché public de services, et cette attribution avait pu être réalisée sans appel à la concurrence au motif, notamment, que la commune de Lerici exerçait, avec les autres communes actionnaires, un contrôle conjoint sur ACAM analogue à celui que ces communes exerçaient sur leurs propres services, au sens de la jurisprudence de la Cour (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2008, Coditel Brabant, C‑324/07, EU:C:2008:621, point 50). Il y a lieu de répondre à la question préjudicielle en se fondant sur cette prémisse.

33 À cet égard, il importe de rappeler que la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services (JO 1992, L 209, p. 1), qui était applicable lors de la conclusion du contrat entre la commune de Lerici et ACAM, n’imposait pas à un pouvoir adjudicateur d’engager une procédure de passation d’un marché public lorsqu’il exerçait sur l’entité attributaire un contrôle analogue à celui qu’il exerçait sur ses propres services et que cette entité réalisait l’essentiel de son activité avec le ou les pouvoirs adjudicateurs qui la détenaient. En effet, dans le cas d’une telle attribution in house, le pouvoir adjudicateur est réputé avoir recours à ses propres moyens dès lors que, même si l’entité attributaire est juridiquement distincte de lui, elle peut, en pratique, être assimilée aux services internes de celui-ci (voir, en ce sens, arrêts du 11 janvier 2005, Stadt Halle et RPL Lochau, C‑26/03, EU:C:2005:5, point 49, ainsi que du 18 juin 2020, Porin kaupunki, C‑328/19, EU:C:2020:483, point 66).

34 Par ailleurs, en cas de recours à une entité détenue en commun par plusieurs autorités publiques, la Cour a jugé que le « contrôle analogue », au sens du point précédent, pouvait être exercé conjointement par ces autorités (voir, en ce sens, arrêts du 13 novembre 2008, Coditel Brabant, C‑324/07, EU:C:2008:621, point 50, et du 8 mai 2014, Datenlotsen Informationssysteme, C‑15/13, EU:C:2014:303, point 27).

35 Deuxièmement, il ressort également de la décision de renvoi que, après avoir conclu, au cours de l’année 2013, un accord de restructuration avec ses créanciers, ACAM a décidé de lancer un appel d’offres public afin de sélectionner un opérateur économique avec lequel se regrouper. Cette procédure a abouti à la sélection d’IREN qui a acquis l’intégralité des actions d’ACAM détenues par les communes actionnaires. Ces dernières ont acquis une part correspondante d’actions d’IREN, à l’occasion d’une augmentation de capital de cette société qui leur était réservée, la commune de Lerici n’ayant, pour sa part, décidé d’accepter l’accord mentionné ci-dessus qu’en tant qu’il impliquait la cession de ses actions d’ACAM.

36 Conformément à l’article 3 bis, paragraphe 2 bis, du décret-loi no 138/2011, ACAM Ambiente, désormais détenue intégralement par IREN, a continué d’assurer le service de gestion des déchets des communes anciennement actionnaires d’ACAM, y compris de la commune de Lerici.

37 Ces précisions liminaires étant faites, il convient de relever que, lorsqu’un marché public a, comme en l’occurrence, été attribué, sans mise en concurrence, à une société à capital public conformément à la jurisprudence mentionnée aux points 33 et 34 du présent arrêt, l’acquisition de cette société par un autre opérateur économique, pendant la durée de validité de ce marché, est susceptible de constituer un changement d’une condition fondamentale du marché nécessitant une mise en concurrence (voir, en ce sens, arrêts du 6 avril 2006, ANAV, C‑410/04, EU:C:2006:237, points 30 à 32, ainsi que du 10 septembre 2009, Sea, C‑573/07, EU:C:2009:532, point 53).

38 En effet, une telle modification peut aboutir à ce que l’entité attributaire ne puisse plus être en pratique assimilée aux services internes du pouvoir adjudicateur, au sens du point 34 du présent arrêt, et, partant, à ce que l’exécution du marché public concerné ne puisse plus être poursuivie sans un appel à la concurrence, ce pouvoir adjudicateur ne pouvant plus être réputé avoir recours à ses propres moyens.

39 En l’occurrence, l’acquisition d’ACAM par IREN étant intervenue au cours de l’année 2017, à savoir après l’échéance du délai de transposition par les États membres de la directive 2014/24, tel qu’il est fixé à son article 90, paragraphe 1, c’est au regard des dispositions de cette dernière directive qu’il convient d’examiner si une telle modification nécessitait une mise en concurrence (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, Sisal e.a., C‑721/19 et C‑722/19, EU:C:2021:672, point 28 ainsi que jurisprudence citée).

40 À cet égard, premièrement, l’article 72, paragraphe 1, sous d), ii), de la directive 2014/24 prévoit qu’un marché public peut être modifié, sans procéder à une nouvelle procédure de passation de marché conformément aux exigences de cette directive, lorsque le contractant initial est remplacé par un nouveau contractant, à la suite, notamment, de l’acquisition du premier par le secondpour autant que ce dernier remplit les critères de sélection qualitative établis initialement et à condition que cela n’entraîne pas d’autres modifications substantielles du marché et ne vise pas à se soustraire à l’application de ladite directive.

41 Il ressort, dès lors, du libellé de cet article 72, paragraphe 1, que son champ d’application est limité à l’hypothèse dans laquelle le successeur du contractant original poursuit l’exécution d’un marché public ayant fait l’objet d’une procédure de passation initiale conforme aux exigences imposées par la directive 2014/24, parmi lesquelles figure le respect des principes de non-discrimination, d’égalité et de concurrence effective entre les opérateurs économiques, tels qu’ils sont notamment rappelés et concrétisés à l’article 18, paragraphe 1, et à l’article 67, paragraphe 4, de cette directive.

42 Une telle interprétation est corroborée par le paragraphe 4 de cet article 72, en vertu duquel une modification du marché est considérée comme étant substantielle lorsqu’elle introduit des conditions qui, si elles avaient été incluses dans la procédure initiale de passation de marché, auraient permis l’admission d’autres candidats que ceux retenus initialement ou l’acceptation d’une offre autre que celle initialement acceptée ou auraient attiré davantage de participants à la procédure de passation de marché, ainsi que par l’objectif d’ouverture des marchés publics à la concurrence la plus large possible que poursuivent les directives en la matière au bénéfice non seulement des opérateurs économiques, mais également des pouvoirs adjudicateurs (arrêt du 27 novembre 2019, Tedeschi et Consorzio Stabile Istant Service, C‑402/18, EU:C:2019:1023, point 39).

43 Partant, une modification du contractant, telle que celle en cause au principal, ne saurait, contrairement à ce que soutient le gouvernement autrichien, relever du champ d’application de l’article 72 de la directive 2014/24, puisque le marché public en cause au principal a été confié initialement à une entité in house, sans appel à la concurrence.

44 Deuxièmement, il convient de relever que l’article 12, paragraphes 1 à 3, de la directive 2014/24 reprend, notamment, les principes rappelés aux points 33 et 34 du présent arrêt, tout en précisant les conditions dans lesquelles les attributions in house échappent au champ d’application de cette directive.

45 Plus particulièrement, en vertu de l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2014/24, un marché public peut être attribué sans appliquer les procédures de passation prévues par cette directive pour autant que le pouvoir adjudicateur exerce, conjointement avec d’autres pouvoirs adjudicateurs, un contrôle sur l’attributaire, analogue à celui qu’ils exercent sur leurs propres services, que plus de 80 % des activités de cet attributaire sont exercées dans le cadre de l’exécution des tâches qui lui sont confiées par ces pouvoirs adjudicateurs ou par des personnes morales contrôlées par ces derniers et, enfin, que le capital de cet attributaire ne comporte pas de participation directe de capitaux privés, à l’exception des formes de participation de capitaux privés sans capacité de contrôle et de blocage qui sont requises par la législation de l’État membre concerné, en conformité avec les traités, et qui ne permettent pas d’exercer une influence décisive sur l’attributaire.

46 En outre, il ressort du dernier alinéa de cet article 12, paragraphe 3, que l’existence d’un contrôle conjoint, au sens de cette disposition, suppose, notamment, que tous les pouvoirs adjudicateurs soient représentés dans les organes décisionnels de l’entité contrôlée et puissent exercer conjointement une influence décisive sur les objectifs stratégiques et les décisions importantes de cette entité.

47 Or, il ressort du dossier soumis à la Cour, d’une part, que la commune de Lerici ne disposait, à la date de la décision faisant l’objet du recours devant la juridiction de renvoi, d’aucune participation dans le capital d’IREN, lequel est, par ailleurs, largement ouvert aux participations privées. D’autre part, elle n’apparaît pas comme étant représentée dans les organes décisionnels de cette société ni comme étant en mesure d’influer, fût-ce conjointement avec les autres communes qui détenaient ACAM, sur les objectifs stratégiques ou sur les décisions importantes d’IREN.

48 Il s’ensuit que les conditions prévues à l’article 12, paragraphe 3, de la directive 2014/24, permettant de considérer que l’attribution d’un marché public échappe au champ d’application des procédures de passation prévues par cette directive, n’apparaissent pas remplies, ce qu’il appartient toutefois à la juridiction de renvoi de vérifier.

49 Il ne ressort pas davantage du dossier soumis à la Cour qu’IREN entretiendrait avec la commune de Lerici des relations telles qu’il puisse être satisfait aux conditions posées à l’article 12, paragraphes 1 ou 2, de cette directive permettant de qualifier un tel marché d’« opération in house ».

50 Sous réserve des vérifications à opérer par la juridiction de renvoi, la poursuite par IREN de l’exécution du marché public au principal doit dès lors être considérée comme procédant de la modification d’une condition fondamentale du marché nécessitant une mise en concurrence, de telle sorte que la directive 2014/24 n’autoriserait IREN à poursuivre une telle exécution qu’après avoir été désignée comme attributaire dudit marché, au terme d’une procédure de passation conforme aux exigences de cette directive.

51 La circonstance qu’IREN a été sélectionnée par ACAM et, partant, par les communes détenant cette société, au terme d’une procédure d’appel d’offres public, ne modifie pas une telle conclusion.

52 En effet, il suffit de constater que, comme il a été souligné au point 47 du présent arrêt, à la date de la décision faisant l’objet du recours devant la juridiction de renvoi, la commune de Lerici ne détenait aucune participation, même indirecte, dans IREN.

53 Dans le cadre de l’exécution du marché public en cause au principal, IREN ne peut pas, dès lors, être assimilée à une société à capital mixte, détenue à la fois par le pouvoir adjudicateur, fût-ce indirectement, et par une entité ayant été sélectionnée par celui-ci, au terme d’une procédure transparente et ouverte à la concurrence, au sens de l’arrêt du 15 octobre 2009, Acoset (C‑196/08, EU:C:2009:628).

54 Partant, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les caractéristiques de la procédure d’appel d’offres public par laquelle IREN a été sélectionnée, cette procédure ne saurait, en tout état de cause, équivaloir, dans le cas du marché public en cause au principal, à une procédure d’attribution conforme aux exigences prévues par la directive 2014/24, IREN étant, aussi bien avant l’opération de regroupement avec ACAM qu’après que les autres communes ont pris part à son capital, une entité étrangère à la commune de Lerici.

55 Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que la directive 2014/24 s’oppose à ce que l’exécution d’un marché public ayant fait l’objet d’une attribution in house se poursuive, sans mise en concurrence, lorsque le pouvoir adjudicateur ne possède plus aucune participation, même indirecte, dans l’entité attributaire et ne dispose plus d’aucun contrôle sur celle-ci.

56 Il importe encore d’ajouter qu’une telle conclusion s’impose même dans l’hypothèse où, comme la décision de renvoi pourrait le laisser entendre, il conviendrait de considérer que le marché public en cause au principal a fait l’objet d’une nouvelle attribution par la province de La Spezia.

57 Il ressort en effet de la décision de renvoi que, le 6 août 2018, cette province, devenue compétente pour gérer le service des déchets des communes relevant de son ressort territorial, a approuvé la mise à jour du plan de zone pour la gestion intégrée des déchets urbains de la province, en ce qu’il attribuait à ACAM Ambiente la gestion du service des déchets pour la commune de Lerici jusqu’à l’année 2028.

58 Or, à supposer même que la décision du 6 août 2018 doive être analysée comme attribuant la gestion d’un tel service de déchets à ACAM Ambiente, filiale détenue intégralement par IREN, il n’en demeurerait pas moins qu’une telle attribution directe ne satisferait pas davantage aux exigences imposées par la directive 2014/24.

59 En effet, d’une part, il ne ressort pas du dossier soumis à la Cour que la province de La Spezia et ACAM Ambiente se trouvent dans une des situations énumérées à l’article 12 de cette directive. Il convient, notamment, de relever que cette province n’apparaît détenir aucune participation dans le capital d’IREN et, partant, dans celui d’ACAM Ambiente, ni disposer d’aucun pouvoir de contrôle sur ces entités.

60 Il s’ensuit que, sous réserve des vérifications à opérer par la juridiction de renvoi, l’article 12 de la directive 2014/24 n’apparaît pas pouvoir justifier que la province de La Spezia ait attribué, sans appel à la concurrence, un marché public de services à ACAM Ambiente.

61 D’autre part, eu égard aux éléments du dossier soumis à la Cour, une telle attribution n’apparaît pas davantage pouvoir être assimilée à l’attribution d’un marché public à une société d’économie mixte dans les conditions rappelées au point 53 du présent arrêt. Ainsi, il suffit de rappeler que, comme il a été souligné, au point 59 du présent arrêt, la province de La Spezia n’apparaît détenir aucune participation dans IREN et, partant, dans ACAM Ambiente.

62 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la directive 2014/24 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation ou à une pratique nationale en vertu de laquelle l’exécution d’un marché public, attribué initialement, sans appel à la concurrence, à une entité in house, sur laquelle le pouvoir adjudicateur exerçait, de manière conjointe, un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, soit poursuivie automatiquement par l’opérateur économique ayant acquis cette entité, au terme d’une procédure d’appel d’offres, lorsque ce pouvoir adjudicateur ne dispose pas d’un tel contrôle sur cet opérateur et ne détient aucune participation dans son capital.

 Sur les dépens

63 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

La directive 2014/24/UE du Parlement européen et du Conseil, du 26 février 2014, sur la passation des marchés publics et abrogeant la directive 2004/18/CE doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation ou à une pratique nationale en vertu de laquelle l’exécution d’un marché public, attribué initialement, sans appel à la concurrence, à une entité in house, sur laquelle le pouvoir adjudicateur exerçait, de manière conjointe, un contrôle analogue à celui qu’il exerce sur ses propres services, soit poursuivie automatiquement par l’opérateur économique ayant acquis cette entité, au terme d’une procédure d’appel d’offres, lorsque ce pouvoir adjudicateur ne dispose pas d’un tel contrôle sur cet opérateur et ne détient aucune participation dans son capital.