Cass. crim., 19 mai 2016, n° 15-82.047
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
M. Germain
Avocat général :
M. Valat
Avocat :
SCP Rousseau et Tapie
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de faux et usage de faux en écriture, l'a condamné à la peine de deux ans d'emprisonnement assortis à concurrence de quinze mois d'un sursis avec mise à l'épreuve d'une durée de trois ans avec obligations de l'article 132-45 1°, 2°, 3° et 5° du code pénal, a condamné M. X... à payer à la société Goiffon représentée par la Selarl AJ Partenaires la somme de 309 926 euros à titre de dommages et intérêts ;
" aux motifs propres que sur les faits de faux et usage, la défense soutient que les seules personnes entendues lors de l'enquête sont des salariés de la société Goiffon ; que s'agissant d'infractions présumées commises au sein de l'entreprise, les salariés sont évidemment les premiers à pouvoir en témoigner ; que la défense, qui met en exergue l'absence d'audition de M. Y..., dont elle semble présumer qu'elle lui aurait été favorable, et des destinataires des courriels, ne les a pas pour autant fait citer comme témoins, ni apporté par attestations ou autres (mise à part une attestation d'un nommé Z..., se disant chargé du développement commercial de Terra Flora), qu'il aurait été facile à M. X... d'obtenir, le moindre commencement de preuve de ce que le témoignage de ces derniers pourrait remettre en cause les éléments recueillis au cours de l'enquête ; qu'aucun élément ne permet de mettre en question le témoignage des salariés entendus et notamment celui de Mmes A... et B... assistantes commerciales qui étaient les plus proches collaboratrices du prévenu ou celui de M. C..., responsable du développement ; que s'agissant de sa contestation des pièces versées au-dossier par la partie civile, il convient de noter que M. X..., qui conteste ces pièces, n'a aucunement déposé plainte du chef de faux et usage ou tentative d'escroquerie au jugement du fait de leur usage en justice par la partie civile ; que ces pièces seront donc appréciées par la cour comme mentionné ci-dessous ; que sur les faux et usage de faux : sur le dossier de la société Clarins, il résulte des éléments de la procédure qu'en novembre 2008, M. X... a fait état à M. Y..., directeur de l'entreprise Goiffon, et M. C..., d'un courriel daté du 25 novembre 2008 émanant soi-disant de Mme Catherine D... (responsable des achats Clarins), confirmant l'attribution à Goiffon SA pour 2009 de deux marchés de fabrication de flacons 200 ml de configurations différentes ; qu'il résulte du courrier adressé par la société Clarins à Soupletude, maison mère de la société Goiffon, et mis en copie à Mme D..., que celle-ci n'a pu émettre le courriel litigieux, ayant le 25 novembre 2008 quitté l'entreprise avant l'heure d'envoi mentionnée sur celui-ci, et que Mme E..., supposée être destinataire en copie de ce message, n'en avait trouvé aucune trace dans ses archives ; que le 1er décembre 2008, M. X... a informé par mail MM. Y..., C... et Mme B... de ce que Clarins allait leur faire parvenir les contrats (pièce n° 11 de la partie civile) ; que suite à cette information, M. C..., qui a également fait état dans sa déclaration d'une validation orale par M. X... d'un plan d'article, avait passé le 18 décembre 2008 commande des moules et périphériques à la société Gianni Moules, pour un montant de 40 656, 88 euros ; que le 11 février 2009, M. X... a adressé en copie à M. C... et M. Y... un mail prétendument adressé par lui (et en réalité jamais parvenu à ses destinataires compte tenu des modifications d'adresse des destinataires qui ne peuvent qu'être volontaires s'agissant d'un procédé utilisé sous des formes diverses sur trois adresses) à M. F..., Mmes D... et E... (pièce 13), de la société Clarins, remerciant ces derniers d'avoir fait le nécessaire pour que la société Goiffon reçoive dès le lendemain matin les différents éléments afin de réaliser les premières étapes de validation ; que M. X..., qui a participé le 24 avril 2009 à une réunion des cadres de Soupletude, était noté comme présent lors de cette réunion au cours de laquelle a été évoqué ce marché, le compte rendu de réunion faisant état d'une production de 9 millions de flacons par an et de premières livraisons en juin 2009 ; que dans ces conditions, ce n'est que par une extraordinaire mauvaise foi que M. X..., qui a reconnu par ailleurs dans ses conclusions qu'il avait envoyé à la direction du groupe Soupletude deux projets de budget 2008-2009 et 2009-2010 faisant état d'une production de 6 millions de flacons pour le premier et de 3 millions pour le second, peut soutenir que la validation des marchés ne devait se faire qu'après validation technique, alors qu'au plus tard lors de la réunion du 24 avril 2009, il n'a pu ignorer que M. C... avait passé le 18 décembre 2008 commande des moules et périphériques à la société Gianni Moules ; que selon son assistante Mme B..., M. X..., en octobre 2009, avait fini sur la demande qu'elle lui en faisait depuis plusieurs mois par lui donner un numéro de commande que lui aurait donné le service achats de Clarins par téléphone, ce qui l'avait conduite à éditer le 8 octobre 2009 une première facture (pièce n° 16), qu'elle avait remise au prévenu comme celui-ci le lui avait demandé, en soutenant qu'il devait la remettre en main propre au service achats de Clarins, puis une seconde du 10 décembre 2009, factures dont le non-paiement avait conduit le service comptable de la société Goiffon à interroger la société Clarins qui leur avait révélé qu'aucune commande n'avait été passée avec elle ; qu'il résulte suffisamment de ces éléments qu'au moins le mail daté du 25 novembre 2008 émanant soi-disant de Mme D..., confirmant l'attribution à Goiffon SA pour 2009 de deux marchés de fabrication de flacons 200 ml de configurations différentes, est un faux imputable au prévenu ; que sur les faits évoqués par la partie civile sous l'intitulé Cadum n° 1, il résulte des éléments de la procédure qu'en mai 2009, la société Cadum connaissant des problèmes avec son fournisseur, avait envisagé le transfert d'un moule existant au profit de Goiffon, ou la création d'un moule neuf ; qu'en juin 2009, M. X... avait demandé à M. C... de réaliser une maquette de flacons à partir d'un exemplaire existant de 400 ml, maquette ensuite envoyée au client par ce dernier ; que quelques jours plus tard, M. X... avait indiqué oralement à M. C..., selon le témoignage de ce dernier, que la maquette était validée ; que le moule avait alors été commandé, le 30 juin 2009, par la société Goiffon auprès de la société Moules et outillages mécaniques, pour un montant de 24 946 euros hors taxe ; que dans le même temps, le 18 juin 2009, M. X... avait envoyé un mail à Cadum, pour les informer que « rien n'avait encore été fait car aucun ordre de votre part pour cela » (pièce n° 36) ; qu'en phase de test des premiers échantillons de flacons, M. C... demandait des précisions à Cadum, et, notamment, l'envoi de capsules pour les tests ; que les services de Cadum lui répondaient qu'il s'agissait d'une erreur, qu'aucune commande de flacons n'était planifiée, Cadum, en la personne de Mme G..., expliquant à M. C..., dans son mail du 9 juillet 2009 à 9 heures 09 : « Nous évoquons ensemble avec Didier uniquement la possibilité de passer chez vous » et confirmant à 9 heures 22, suite à des objections de M. C... : « Vous vous êtes bien trompé. Nous ne planifions pas de commande chez vous » ; que devant les demandes d'explications par M. C..., M. X... lui adressait en copie ainsi qu'à M. Y... et à Mme A... un mail soi-disant envoyé à Cadum (pièce n° 32), en la personne de Mme G..., dont l'adresse avait été modifiée au niveau de l'orthographe du nom devenu G... et la finale de l'adresse, modifiée, en « fr », au lieu de « com », et dont celle-ci n'avait donc jamais été destinataire : « pour que tout cela soit bien clair et compris de tous suite à notre entretien téléphonique nous avons bien lancé un moule pour votre flacon 400 ml conformément à votre commande » ; que le 4 novembre 2009, suite à un mail de Mme A..., Cadum indiquait à celle-ci que les commandes étaient prématurées (pièce n° 33) ; que le 17 novembre 2009, Cadum envoyait un mail à M. X..., confirmant que, selon leurs négociations, il n'y aurait aucun changement de tarif jusqu'au 31 décembre 2010 (pièce n° 37) ; que le 9 décembre 2010, un second moule était commandé pour un montant de 21 000 euros hors taxe (pièce n° 35) ; que le même jour, M. X... envoyait à Mme A... un mail, indiquant les nouveaux tarifs à appliquer à Cadum (pièce n° 34), en augmentation très nette par rapport à ceux mentionnés dans le mail envoyé par Cadum, le 17 novembre 2010 (pièce n° 37) ; que selon la partie civile, les moules commandés seront très peu utilisables, car suite à un mail envoyé à M. X... en novembre 2009 par Cadum, ces derniers l'avaient informé de la fin de commercialisation de ces produits en février 2010, ainsi que de mise en stock de 73200 pièces déjà produites par Goiffon (pièces n° 40 et 41) ; qu'en raison des négociations conclues entre M. X... et Cadum, la perte supportée par Goiffon sur l'exercice 2010, était estimée à 150 000 euros, en ne répercutant pas la hausse des matières premières, outre la perte du client ; qu'il résulte de ces éléments qu'au moins le courriel prétendument envoyé à Mme G... et celui envoyé à Mme A... mentionnant une hausse de tarification sont des faux imputables au prévenu ; que sur les faits évoqués par la partie civile sous l'intitulé Cadum n° 2 qu'il résulte des éléments de la procédure qu'en juin 2009, M. X... avait demandé à M. C... d'effectuer deux études de flacons (250 et 500 ml) pour Cadum, études soi-disant validées par le client le 25 novembre 2009 par email que celui-ci avait montré notamment à Mme A... ; que cependant, l'email de confirmation daté du 25 novembre 2009 à 14 heures 52'27 " a été falsifié par M. X... qui en a modifié le texte en reprenant un email précédent du 24 novembre à exactement la même heure, produit au dossier, la falsification apparaissant notamment à travers la modification de la taille et de la police de caractères ; que le 26 novembre 2009, date de la signature de validation par Cadum, fausse selon la partie civile, du plan de flacon (l'absence de commande ayant été confirmée oralement à M. C...), les outillages étaient commandés pour un montant de 29 000 euros hors taxe (pièces n° 46 et 48), et des essais réalisés pour un montant de 4 000 euros hors taxe ; que le 18 janvier 2010, M. C... avait été informé par le service client de Cadum, qu'aucune commande de moule n'avait été effectuée ; qu'il résulte de ces éléments que le mail de Cadum était un faux imputable au prévenu ; que sur les faits évoqués par la partie civile sous l'intitulé Aelslife, il résulte des éléments de la procédure que M. H... a signalé à M. X... un nouveau prospect, la société Aelslife, qui envisageait de commander à la société Goiffon 750 000 flacons destinés à contenir du gel hydro-alcoolique (pièce n° 49) ; que M. X... informait son employeur de ce que le financement de ce marché était soumis à des aides de l'ONU ; que le 10 juin 2009, M. X... avait transféré un mail d'Aelslife à son assistante Mme A..., dans lequel Aelslife donnait son accord pour lancer la production des flacons et indiquait que la commande officielle arriverait par courrier (pièce n° 50) ; que la production de flacons était lancée ; que le mail à Mme A... s'avérera être un faux, M. X... en ayant modifié le texte, ce dont la société Goiffon s'apercevra lorsque, n'ayant aucune confirmation par courrier, elle contactera la société Aelslife, qui démentira la validation de cette commande (pièce n° 51) par mail adressé le 17 juin 2009 à M. X..., lui demandant de notifier clairement et sans ambiguïté ce fait à sa direction et en interne ; que faute de commande écrite, la production sera stoppée par M. Y... au bout de 50 000 pièces réalisées, qui seront vendues à un autre client ; qu'aucune commande d'outillage n'avait été effectuée, la fabrication de ces flacons s'effectuant sur un moule standard appartenant à Goiffon ; qu'il résulte de ces éléments que le mail d'Aelslife transmis par M. X... à son assistante Mme A..., dans lequel Aelslife donnait son accord pour lancer la production des flacons, était un faux imputable au prévenu ; que sur les faits évoqués par la partie civile sous l'intitulé Terra Flora qu'il résulte des éléments de la procédure que le 9 janvier 2009, M. X... a transféré un email d'Orix Partners (soi-disant partenaire de Terra Flora) à Mme A..., confirmant une commande de 30 000 flacons de 500 ml, à 33 euros les cent pièces, mail signé M. Z... (pièce n° 54) ; qu'une sérigraphie spécifique était réalisée pour un montant de 1 000 euros hors taxe ; que les flacons étaient fabriqués sur un moule standard de l'entreprise, puis stockés, dans l'attente d'un lieu de livraison ; que le 10 juillet 2009, sur les instructions de M. X..., Mme A... facturait 25 840 flacons à 0, 16 euros pièce (soit la moitié de ce qu'il était prévu dans le contrat) ; que M. X... a admis que c'était lui qui avait dû donner cette tarification à Mme A..., même s'il ne se souvenait pas de la renégociation du prix ; que l'attestation de M. Z..., qu'il produit, est contradictoire avec la commande ferme révélée par le mail ci-dessus, contradiction sur laquelle M. Z... n'apporte aucune explication, alors que M. X..., qui était en possession des éléments de la procédure lorsqu'il a sollicité cette attestation, pouvait parfaitement demander au témoin de donner toutes explications sur la signification de ce mail ; qu'au mois de janvier 2010, la société Goiffon s'apercevait que le mail de confirmation de commande d'Oryx Partners était un faux ; qu'à la suite d'un message reçu par une de ses connaissances dans cette société, M. X... avait modifié le texte du courriel en attribution de marché, courriel qu'il avait ensuite transmis à Mme A... ; que les faits de faux et usage apparaissent avérés ; que sur les faits évoqués par la partie civile sous l'intitulé Guetta, il résulte du dossier que le 28 juillet 2008, M. X... avait envoyé un mail à son assistante Mme B... faisant état d'une proposition tarifaire faite à Fingerprint, pour la fabrication mensuelle de 100 000 flacons et de leur capsule (pièce n° 58) ; que dans les jours suivants, M. X... avait déclaré oralement à son employeur que la commande était validée ; que le 14 octobre 2008, l'outillage avait été commandé pour un montant de 16 000 euros hors taxe (pièces n° 59 et 60) ; que des essais avaient été réalisés pour un montant de 2 000 euros hors taxe ; qu'en février 2009, M. X... avait informé M. C... de ce que la maquette du décor destinée au flacon allait être élaborée par la société Dragon Rouge, cabinet de Design, qui la transmettrait ensuite à l'entreprise Goiffon ; que le 18 mai 2009, M. X... avait demandé à Mme A... de facturer l'outillage (18 000 euros hors taxe) à la société Dragon Rouge, en lui donnant une note manuscrite, sur laquelle figurait une adresse à Paris, qui après vérification s'avérait inexistante (pièces n° 61 et 62) ; qu'il avait demandé à Mme A..., que cette facture lui soit remise, pour qu'il la remette en main propre au client ; qu'il avait été découvert dans l'ordinateur portable de M. X..., un mail que celui-ci s'était envoyé à lui-même, daté du 18 décembre 2009, signé JDB (non identifié), dans lequel il était indiqué que le règlement du moule s'effectuerait lorsque la commande serait confirmée (pièce n° 63) ; que la note manuscrite de M. X... ayant généré l'édition sur ses instructions de la facture de Goiffon à Dragon Rouge du 18 mai 2009 est un faux ; qu'il résulte des éléments relevés ci-dessus que M. X... utilisait pour persuader son employeur de l'existence de commandes ou prétendre résoudre des contestations de clients sur l'existence de celles-ci de documents faisant état d'indication fallacieuses, ou de faux e-mails, soit par modification du texte d'un e-mail précédemment reçu du client prétendu, soit, s'agissant des e-mails prétendument envoyés au service achat des clients, par modification de l'adresse de ses interlocuteurs en remplaçant la terminaison " fin par " net " ou par " com " (ou inversement), ou en modifiant un caractère du nom des destinataires du message, qui ne recevaient jamais ceux-ci, l'adresse n'étant pas valide ; que M. X... imprimait ensuite le message, qu'il présentait à son employeur et ses assistantes ; que la fréquence de l'utilisation du procédé dans les dossiers soumis à la cour ne laisse aucun doute sur la volonté frauduleuse de M. X..., ces altérations de la vérité ayant des conséquences, matérielles et juridiques, très préjudiciables pour l'employeur, qui était amené à croire à la conclusion de contrats en réalité inexistants, et à engager les démarches de fabrication y afférentes ; qu'il y a lieu de confirmer la déclaration de culpabilité de chefs de faux et usage pour les six premiers dossiers évoqués ci-dessus ;
" et aux motifs adoptés que si l'enquête de gendarmerie reprend les éléments de l'enquête interne de la société Goiffon et a pour base de travail les documents retrouvés selon la plaignante dans l'ordinateur du prévenu, l'origine et le caractère litigieux des pièces produites par la partie civile est confirmé par plusieurs témoignages ; qu'ainsi les assistantes commerciales de M. X... ont pu s'exprimer tant sur ses méthodes de travail, sur les réclamations qui lui étaient faites par sa hiérarchie que sur chacune des commandes litigieuses (PV 3 Céline B... et 5 A... Sylviane), que ces proches collaboratrices précisent bien dans leurs déclarations que certains mails, qui aujourd'hui sont identifiés comme de faux documents, leur ont été remis directement par M. X... (dossier Clarins pièces n° 10, 11 et 13 de la partie civile, dossier Cadum pièces 32 de l'enquête gendarmerie), que s'agissant par exemple du plus gros contrat obtenu par M. X... pour l'entreprise auprès de Clarins (9 millions de flacons) il avait souhaité remettre lui-même une première facture au client, ce contrat avait été négocié par M. X... qui ne pouvait ignorer les conséquences financières pour l'entreprise des commandes de moules sur la base de contrats imaginaires puisqu'il assistait chaque mois aux réunions de développement de la société où toutes ces questions étaient évoquées ; que le témoignage de M. C... (PV 4) responsable développement de l'entreprise permet également de démontrer que M. X... de par son statut de responsable commercial pouvait tout à fait déclencher la fabrication d'un moule, confirmer la validation d'un prototype ou d'une commande au service développement et générer des commandes de moules plus importantes ou lancer une fabrication en série, qu'ainsi pour le dossier « Cadum 1 » c'est M. X... qui a validé la commande et déclenché la commande de trois moules et de périphériques et pour le dossier « Cadum 2 » qui a transféré à ce service des mails du « client » confirmant son accord pour le lancement de la fabrication des moules (pièces 43 et 44 gendarmerie) ; qu'ainsi les personnes entendues affirment que les documents identifiés comme des faux et retrouvés ensuite dans son ordinateur leur ont été adressés ou remis directement par le prévenu de sorte que la fabrication et l'usage de ces documents lui est imputable ; qu'en outre selon la société plaignante, et le témoignage de Mme B... (PV 3) M. X... aurait reconnu les faits qui lui sont reprochés devant le directeur de l'entreprise M. Y..., ce-dernier n'a cependant pas été entendu dans le cadre de la présente enquête de gendarmerie ; qu'enfin l'enquête révèle que ce mode opératoire a déjà été utilisé par M. X... auprès d'un précédent employeur : Mondi Packaging sis à Saint Quentin (02), que l'enquête de la police judiciaire de Lille est versée au dossier et permet de constater qu'en 2002 M. X... a falsifié des mails de clients afin de faire croire à l'attribution de marchés auprès de la poste, le préjudice de l'entreprise était très élevé (PV 7) et M. X... a été condamné par le tribunal correctionnel des chefs d'escroquerie et usage de faux le 3 novembre 2009 à la peine de neuf mois d'emprisonnement avec sursis ; que les méthodes reprochées par la société Goiffon au prévenu sont rigoureusement identiques à celles utilisées auprès de Mondi Packaging, qu'il apparaît d'ailleurs que lors de son embauche chez Goiffon, il n'a pas indiqué le nom de son précédent employeur sur son curriculum vitae (pièce 73 partie civile) ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que les faits de faux et usage de faux reprochés à M. X... apparaissent constitués et établis par l'enquête, faits commis du 4 juin 2007 au 3 février 2010 à Izernore, qu'il convient donc de l'en déclarer coupable et d'entrer en voie de condamnation ;
" 1°) alors qu'il n'existe de faux punissable qu'autant que ce faux est de nature à causer un préjudice à autrui ; que s'agissant du dossier Clarins, en ayant considéré que le courriel du 25 novembre 2008 était un faux qui avait eu des conséquences préjudiciables pour l'employeur, cependant qu'elle avait constaté, d'une part, que ce courriel précisait qu'« il faudrait rapidement procéder aux tests d'une palette en boîte cloche sur une palette. Nous vous confirmerons très prochainement les commandes de moules nécessaires à ces marchés » et, d'autre part, que M. C..., qui avait fait état dans sa déclaration d'une validation orale par M. X... d'un plan d'article, avait passé le 18 décembre 2008 commande des moules et périphériques à la société Gianni Moules, ce dont il résultait que la commande de moules n'avait pas été faite à la suite à d'instructions données dans le courriel du 25 novembre 2008 et que ce dernier n'avait donc pu causer aucun préjudice à la société Goiffon, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors qu'il n'existe de faux punissable qu'autant que ce faux est de nature à causer un préjudice à autrui ; que s'agissant du dossier « Cadum 1 », en considérant que les courriels envoyés à Mme G... le 9 juillet 2009 et à Mme A... le 4 décembre 2009 étaient des faux qui avaient eu des conséquences préjudiciables pour l'employeur, pour en déduire que M. X... était coupable du délit de faux et usage de faux, après avoir pourtant constaté que M. C... avait commandé le moule pour un montant de 24 946 euros le 30 juin 2009 car M. X... le lui avait demandé oralement, ce dont il résultait que la commande de moules étant antérieure aux courriels envoyés à Mme G... et Mme A..., ils n'avaient donc occasionné aucun préjudice pour la société Goiffon, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 3°) alors que le motif hypothétique équivaut à un défaut de motif ; que s'agissant du dossier intitulé « Cadum 2 », en déduisant l'existence d'un faux de la seule modification de la police et de la taille des caractères courriel du 25 novembre 2009, la cour d'appel, qui a statué par un motif hypothétique, a violé les textes susvisés ;
" 4°) alors qu'il n'existe de faux punissable qu'autant que ce faux est de nature à causer un préjudice à autrui ; que s'agissant du dossier intitulé Aelslife, en considérant que le courriel envoyé à Mme A... était un faux qui avait eu des conséquences préjudiciables pour l'employeur, pour en déduire que M. X... était coupable de faux et usage de faux, après avoir pourtant constaté que les 50 000 pièces réalisées avaient été vendues à un autre client, ce dont il résultait que la société Goiffon n'avait subi aucun préjudice, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 5°) alors qu'il n'existe de faux punissable qu'autant que ce faux est de nature à causer un préjudice à autrui ; que s'agissant du dossier intitulé Terra Flora, M. X... soutenait devant la cour d'appel qu'« il s'agissait de flacons standards et il était donc tout à fait possible de les revendre à un autre client » (conclusions, p. 10) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen pourtant de nature à démontrer que le courriel du 9 janvier 2009, argué de faux, n'avait causé aucun préjudice à la société Goiffon, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 6°) alors qu'il n'existe de faux punissable qu'autant que ce faux est de nature à causer un préjudice à autrui ; que s'agissant du dossier intitulé Guetta, en déclarant M. X... coupable de faux, après avoir pourtant constaté d'une part, que ce sont sur les instructions orales de M. X... du 14 octobre 2008 que la commande de l'outillage a été faite et, d'autre part, que la note manuscrite du 18 mai 2009, demandant à M. A... de facturer l'outillage 18 000 euros, comportait une adresse erronée, ce dont il résultait que cette note relative uniquement à la tarification, qui avait été émise sept mois après la commande, n'avait pas pu occasionner un préjudice à la société Goiffon, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que pour dire établis les délits de faux et usage, l'arrêt retient que M Didier X..., responsable commercial de la société Goiffon, fournisseur de flacons en plastique pour les industries de la santé ou des cosmétiques, utilisait, pour persuader son employeur de l'existence de commandes ou prétendre résoudre des contestations de clients sur l'existence de celles ci, des documents faisant état d'indications fallacieuses, ou de faux e-mails, soit par modification du texte d'un courriel précédemment reçu du client prétendu, soit, s'agissant des courriels prétendument envoyés au service achat des clients, par modification de l'adresse de ses interlocuteurs en remplaçant la terminaison " fin par ". net " ou par ". com " (ou inversement), ou en modifiant un caractère du nom des destinataires du message, qui ne recevaient jamais ceux ci, l'adresse n'étant pas valide ; que M. X... imprimait ensuite le message, qu'il présentait à son employeur et ses assistantes ; que ces altérations de la vérité avaient des conséquences, matérielles et juridiques, très préjudiciables pour l'employeur, qui croyait à la conclusion de contrats en réalité inexistants, et engageait les démarches de fabrication ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19 et 132-24 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à la peine de deux ans d'emprisonnement assortis à concurrence de quinze mois d'un sursis avec mise à l'épreuve d'une durée de trois ans avec obligations de l'article 132-45 1°, 2°, 3° et 5° du code pénal ;
" aux motifs que comme relevé par le tribunal, les faits de faux et usage commis par le prévenu présentent un caractère de gravité certain en raison du préjudice très important subi par la victime, des circonstances de leur commission qui révèlent chez leur auteur une dangerosité certaine vis-à-vis de ses employeurs ; que les méthodes reprochées par la société Goiffon au prévenu sont identiques à celles utilisées par celui-ci auprès d'un précédent employeur Mondi Packaging, faits pour lesquels l'intéressé a été condamné le 3 novembre 2009 par le tribunal correctionnel de Saint-Quentin ; qu'une peine d'emprisonnement en partie ferme, à hauteur de neuf mois, s'impose dans ces conditions, toute autre peine étant manifestement inadéquate, dans la limite d'un quantum de vingt-quatre mois, le restant de la peine étant assorti d'un sursis avec mise à l'épreuve d'une durée de trois ans avec notamment obligation de soins sur le plan psychologique, le prévenu ayant manifestement au vu de la succession des affaires de même type le concernant et de la multiplicité des faits dans la présente procédure, un rapport aléatoire avec la vérité, et d'indemniser la victime ; que les éléments versés au dossier du prévenu, et notamment son nouveau contrat de travail, ne permettent pas à la cour, compte tenu de l'absence de précision sur les horaires effectués, de prononcer en l'état un aménagement de la partie ferme de la peine d'emprisonnement ;
" 1°) alors qu'une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en se bornant à retenir, pour condamner M. X... à une peine d'emprisonnement ferme, le caractère de gravité des faits reprochés en raison du préjudice très important subi par la victime et le fait que toute autre sanction serait manifestement inadéquate, sans expliquer en quoi la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendaient cette peine nécessaire ni pour quelle raison toute autre sanction était manifestement inadéquate, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles susvisés ;
" 2°) alors qu'en tout état de cause, lorsqu'une peine d'emprisonnement sans sursis est prononcée en matière correctionnelle, cette peine doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet de l'une des mesures d'aménagement prévues aux articles 132-25 et suivants du code pénal ; qu'en prononçant à l'encontre de M. X... une peine d'emprisonnement ferme, sans justifier l'absence d'aménagement autrement que par l'absence de précision sur les horaires effectués dans le contrat de travail produit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles susvisés " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a prononcé une peine d'emprisonnement sans sursis par des motifs qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du code pénal ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil et 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à payer à la société Goiffon représentée par la Selarl AJ Partenaires la somme de 309 926 euros à titre de dommages et intérêts ;
" aux motifs propres que la société Goiffon représentée par la Selarl AJ Partenaires n'est pas appelante et ne peut donc aggraver le sort de l'appelant ; que le tribunal a exactement évalué son préjudice, au vu des éléments du dossier, à l'exception du dossier Ponroy Santé, la relaxe de ce chef conduisant à retirer des sommes allouées la somme de 21 500 euros demandée pour la fabrication du moule dans cette partie de l'affaire ; qu'il y a lieu d'allouer à la partie civile la somme de 309 926 euros, correspondant à la commande d'outillage et de moules sur les fausses attributions de marchés, le financement d'essais et la non-répercussion du coût de matières premières relativement aux faits retenus contre le prévenu ; que le tribunal a fait une exacte appréciation de la somme allouée au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale à la partie civile pour sa défense en première instance ; qu'il y a lieu, y ajoutant, de condamner M. X... à lui payer la somme de 1 500 euros pour sa défense en cause d'appel ;
" aux motifs à les supposer adoptés qu'il y a lieu de déclarer recevable en la forme la constitution de partie civile de la société Goiffon et AJ Partenaires, Me I...et MJ Services, Me J...et Me K... ; que la société Goiffon et AJ Partenaires, Me I..., partie civile, sollicite la somme d'un million deux cent vingt et un mille quatre cent vingt-six euros (1 221 426 euros) en réparation du préjudice qu'il a subi ;
" alors que lorsque plusieurs fautes ont concouru à la production du dommage, la responsabilité de leurs auteurs se trouve engagée dans une mesure que le juge apprécie ; que M. X... soutenait devant la cour d'appel que « concernant les préjudices matériels pour les dossiers Clarins, Cadum n° 1 et 2, Aelslife, Terra Flora, Guetta et Ponroy Santé, il s'avère que M. X... n'était pas à l'origine de la commande et de la production du matériel ; que les seuls à pouvoir passer la commande de moule étaient M. Y... et M. C... ; qu'il ne peut donc pas être reproché à M. X... les fautes imputables à ses supérieurs hiérarchiques qui n'ont pas attendu d'obtenir les contrats signés de validation afin de lancer la production » (conclusions, p. 5) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen de nature à limiter le montant de l'indemnité dûe à la société Goiffon en raison des fautes commises par celle-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, faute d'avoir été proposé devant les juges du fond, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.