ADLC, 30 novembre 2022, n° 22-D-22
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à des pratiques mises en œuvre par la Ligue de Football Professionnel dans le secteur de la vente des droits de diffusion télévisuelle de compétitions sportives
L’Autorité de la concurrence (section II),
Vu la lettre, enregistrée le 2 novembre 2021 sous les numéros 21/0085 F et 21/0086 M, par laquelle la société beIN Sports France a saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’édition des chaînes premium en France et a sollicité, en outre, le prononcé de mesures conservatoires ;
Vu la lettre, enregistrée le 24 décembre 2021 sous les numéros 21/0097 F et 21/0098 M, par laquelle la société Groupe Canal Plus a saisi l’Autorité de la concurrence de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la télévision payante et a également sollicité le prononcé de mesures conservatoires ;
Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 102 ; Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L. 420-2 ;
Vu l’avis n° 2022-07 de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique du 16 mars 2022 rendu sur le fondement de l’article R. 463-9 du code de commerce ;
Vu la décision du 14 janvier 2022, par laquelle la rapporteure générale adjointe a procédé à la jonction de l’instruction des affaires n° 21/0085 F-21/0086 M et n° 21/0097 F- 21/0098 M ;
Vu les observations présentées par la société beIN Sports France, la société Groupe Canal Plus, la Ligue de Football Professionnel et le commissaire du Gouvernement ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Les rapporteurs, la rapporteure générale adjointe, les représentants des sociétés beIN Sports France, Groupe Canal Plus, de la Ligue de Football Professionnel, et le commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 17 mai 2022 ;
Adopte la décision suivante :
Résumé1
Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence rejette les saisines au fond des sociétés beIN Sports France (ci-après « beIN Sports ») et Groupe Canal Plus (ci-après « GCP »), datées respectivement des 2 novembre et 24 décembre 2021, pour défaut d’éléments suffisamment probants, et, par voie de conséquence, les demandes de mesures conservatoires accessoires à ces saisines.
Ces saisines faisaient suite à une première saisine de l’Autorité par GCP en 2021, dans laquelle GCP reprochait à la Ligue de Football Professionnel (ci-après « LFP ») d’avoir remis en jeu, dans la nouvelle consultation qu’elle a organisée en 2021, les seuls droits de diffusion de la Ligue 1 précédemment emportés par Mediapro lors de l’appel à candidatures de 2018 et repris par la LFP à la suite de la défaillance de Mediapro, et pas le lot 3, acquis en 2018 par beIN Sports et sous-licencié à GCP.
Dans sa décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021, l’Autorité a rejeté cette saisine pour défaut d’éléments suffisamment probants, dans la mesure où les éléments avancés ne permettaient pas de démontrer l’existence de pratiques de discrimination ou d’imposition de conditions de transaction inéquitables constitutives d’un abus de position dominante aux dépens de GCP. Elle a, notamment, estimé que le lot 3 étant dissociable des autres lots, il n’avait pas à être remis en jeu et que les conditions d’attribution de chacun des lots ne permettaient pas de conclure à l’existence d’une discrimination contraire à l’article 102 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne ou à l’article L. 420-2 du code de commerce. Cette analyse a été confirmée par un arrêt du 30 juin 2022 de la cour d’appel de Paris.
Les présentes saisines concernaient la conclusion par la LFP, en juin 2021, d’un contrat par lequel cette dernière, à la suite d’une négociation de gré à gré diligentée après l’échec en février de la même année d’un appel à candidatures, a cédé à Amazon les droits de diffusion de la Ligue 1, précédemment acquis par Mediapro.
Selon les saisissantes, l’octroi des anciens lots de Mediapro pour les saisons 2021-2022 à 2023-2024 à Amazon pour 250 millions d’euros par saison constituait un abus de discrimination, dans la mesure où, dans le même temps, elles étaient tenues de diffuser les matchs du seul lot 3 pour 332 millions d’euros par saison.
Pour rejeter les saisines, l’Autorité a considéré que les saisissantes n’apportaient pas suffisamment d’éléments probants permettant de conclure qu’elles ont été discriminées dans la procédure qui a conduit à la sélection d’Amazon pour la reprise des anciens lots de Mediapro. Au contraire, il apparaît que beIN et GCP ont eu l’opportunité de participer à la consultation de 2021, ce qu’elles ont choisi de ne pas faire, et qu’elles ont pu, dans la procédure de gré à gré qui a suivi, déposer une offre conjointe pour la reprise des lots remis en jeu, dans les mêmes conditions que les autres candidats.
BeIN et GCP n’apportent pas non plus d’éléments de nature à démontrer que la LFP aurait dû, comme elles le prétendent, privilégier leur offre par rapport à celle formulée par Amazon.
Enfin, la LFP étant tenue de remettre en jeu les droits de diffusion de la Ligue 1 au terme de cycles relativement courts (quatre ans actuellement), l’Autorité a également estimé que les saisissantes n’apportaient pas non plus suffisamment d’éléments permettant d’indiquer que la LFP aurait pu être tenue d’ajuster le prix du lot 3 pour que celui-ci reflète le niveau de prix – inférieur à celui résultant de l’appel d’offres de 2018 – finalement retenu pour les lots de Mediapro après la défaillance de cette dernière.
I. Constatations
A. LES SAISINES
1. Par lettre du 2 novembre 2021, enregistrée sous le numéro 21/0085 F, la société beIN Sports France (ci-après « beIN Sports ») a saisi l’Autorité de la.concurrence (ci-après l’ « Autorité »), sur le fondement des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après « TFUE »), de pratiques mises en œuvre par la Ligue de Football Professionnel (ci-après « LFP ») sur le marché de l’acquisition des droits de diffusion télévisuelle de la Ligue 1. Cette saisine est assortie d’une demande de mesures conservatoires sur le fondement de l’article L. 464-1 du code de commerce, introduite le même jour par document distinct, enregistrée sous le numéro 21/0086 M.
2. Par lettre du 24 décembre 2021, enregistrée sous le numéro 21/0097 F, la société Groupe Canal Plus (ci-après « GCP ») a saisi l’Autorité, sur le fondement des articles L. 420-2 du code de commerce et 102 du TFUE, de pratiques mises en œuvre par la LFP. Cette demande est également assortie d’une demande de mesures conservatoires sur le fondement de l’article L. 464-1 du code de commerce, introduite le même jour par document distinct, enregistrée sous le numéro 21/0098 M.
3. Par une décision du 14 janvier 2022, la rapporteure générale adjointe a joint les deux affaires.
4. Consultée dans le cadre de la présente affaire sur le fondement des dispositions de l’article
R. 463-9 du code de commerce, l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ci-après l’ « ARCOM ») a rendu, le 16 mars 2022, l’avis n° 2022-07.
B. LE SECTEUR
1. L’ORGANISATION DU SECTEUR DE L’AUDIOVISUEL ET SES EVOLUTIONS RECENTES
5. Pour une analyse de l’organisation du secteur de l’audiovisuel et de ses facteurs d’évolution, l’Autorité renvoie à son avis n° 19-A-04 du 21 février 20192, ainsi qu’à sa décision n° 21-D-12 du 11 juin 20213.
6. Il convient seulement de rappeler ici que les chaînes de télévision peuvent, pour alimenter leurs grilles de programmes, soit produire leurs propres programmes, soit acquérir auprès de tiers des droits de diffusion de contenus choisis en fonction de leur thématique et de leur ligne éditoriale. L’essentiel de leurs revenus provient, quand elles sont payantes, des abonnements, ainsi que des recettes publicitaires et d’éventuelles rémunérations versées par les distributeurs des chaînes.
7. Les évolutions technologiques récentes, notamment le développement de l’IPTV (télévision par Internet) et de l’Internet haut débit, ont permis l’apparition de nouveaux acteurs, parmi lesquels des opérateurs proposant des services de vidéo à la demande par abonnement (ci-après « VàDA »), comme Netflix, Prime Video, ou encore Disney+. Si l’activité de ces nouveaux acteurs était initialement centrée sur les films de cinéma et les séries, certains d’entre eux, comme Amazon, ont commencé à proposer à leurs clients une part croissante de contenus sportifs. Enfin, la diffusion en OTT (pour « over the top »), permet désormais aux opérateurs de distribuer directement leurs contenus aux consommateurs disposant d’une connexion internet à haut débit.
2. LA REGLEMENTATION APPLICABLE AUX DROITS SPORTIFS
8. Comme rappelé dans la décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021, à laquelle il est renvoyé pour de plus amples détails 4, la commercialisation des droits sportifs est encadrée par le code du sport. L’article L. 333-1 dudit code prévoit que les fédérations sportives « sont propriétaires du droit d’exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu’[elles] organisent ». Par ailleurs, « [t]oute fédération sportive peut céder aux sociétés sportives, à titre gratuit, la propriété de tout ou partie des droits d’exploitation audiovisuelle des compétitions ou manifestations sportives organisées chaque saison sportive par la ligue professionnelle qu’elle a créée, dès lors que ces sociétés participent à ces compétitions ou manifestations sportives. La cession bénéficie alors à chacune de ces sociétés ».
9. L’article L. 331-2 du même code dispose que « les droits d’exploitation audiovisuelle cédés aux sociétés sportives sont commercialisés par la ligue professionnelle dans des conditions et limites précisées par décret en Conseil d’État. Cette commercialisation est effectuée avec constitution de lots, pour une durée limitée et dans le respect des règles de concurrence ».
10. Les articles R. 333-2 et R. 333-3 du code du sport apportent les précisions suivantes sur le processus d’attribution de ces droits. Leur commercialisation doit être « réalisée selon une procédure d’appel à candidatures publique et non discriminatoire ouverte à tous les éditeurs ou distributeurs de services intéressés (…). Les droits sont offerts en plusieurs lots distincts dont le nombre et la constitution doivent tenir compte des caractéristiques objectives des marchés sur lesquels ils sont proposés à l’achat. Chaque lot est attribué au candidat dont la proposition est jugée la meilleure au regard de critères préalablement définis dans l’avis d’appel à candidatures. Les contrats sont conçus pour une durée qui ne peut excéder quatre ans. La ligue doit rejeter les propositions d’offres globales ou couplées ainsi que celles qui sont assorties d’un complément de prix ».
C. LES ENTREPRISES CONCERNEES PAR LA SAISINE
1. LA LIGUE DE FOOTBALL PROFESSIONNEL
11. La LFP est une association régie par la loi du 1er juillet 1901. Elle est composée de l’ensemble des clubs français professionnels de football et est chargée, par délégation de la Fédération Française de Football, d’organiser, gérer, règlementer et promouvoir les compétitions de football professionnel masculin, dont la Ligue 1. Elle a reçu mandat exclusif des clubs professionnels pour commercialiser de manière centralisée les droits de la Ligue 1 et de la Ligue 2 et procède, à cette fin, à des appels à candidatures pour une durée de quatre ans.
12. La LFP centralise les revenus associés à la Ligue 1 et la Ligue 2. Ceux-ci sont répartis entre ces deux championnats par une décision de son Assemblée Générale, puis répartis entre les clubs d’un championnat donné après discussion entre ces clubs.
2. BEIN SPORTS FRANCE
13. La société beIN Sports est active depuis 2012 dans le secteur de l’édition de chaînes de télévision payante en France.
14. Elle édite trois chaînes premium (beIN Sports 1, beIN Sports 2 et beIN Sports 3), ainsi que sept canaux événementiels qui lui permettent de diffuser des retransmissions de compétitions sportives, des émissions d’information sportive ainsi que des magazines et reportages consacrés au sport.
15. Elle dispose notamment d’une partie des droits de la Ligue 1 (le lot 3 de l’appel d’offres de 2018, qui a finalement été sous-licencié à GCP et est donc exploité par ce dernier, voir ci-dessous paragraphes 18 et 28) et de la Ligue 2, ainsi que des droits de diffusion d’autres championnats de football et d’autres compétitions sportives.
16. beIN Sports a signé début 2020 un accord de distribution exclusive avec GCP, en vertu duquel GCP distribue lui-même les chaînes beIN Sports et les propose à des distributeurs tiers (notamment les fournisseurs d’accès à Internet) qui les commercialisent à leurs clients.
3. GROUPE CANAL PLUS
17. La société GCP, contrôlée par le groupe Vivendi, est active dans l’édition, l’agrégation et la distribution de chaînes et de services de télévision payante par le biais de l’ensemble des plateformes de diffusion (TNT, ADSL/Fibre, satellite, mobile et Internet).
18. Au niveau amont, le groupe GCP occupe une position particulièrement forte en matière d’acquisition de droits de diffusion d’évènements sportifs. Il dispose en effet de nombreux droits sportifs, parmi lesquels les droits de la Ligue des Champions (depuis 2021), du championnat anglais de football (Premier League), du championnat français de football féminin (D1), du championnat français de première division de rugby (Top 14), de la Formule 1 et du championnat du monde de moto. GCP exploite par ailleurs, à la suite de la conclusion d’un contrat de sous-licence avec beIN Sports, le lot 3 de l’appel à candidatures de 2018 portant sur la Ligue 1 (voir ci-après, paragraphes 24 à 28).
19. Au niveau intermédiaire de l’édition de chaînes, GCP édite des chaînes premium (Canal+ et ses diverses déclinaisons) et des chaînes thématiques (cinéma, jeunesse, etc.). GCP édite également des chaînes gratuites (C8, CNews, CStar).
20. Au niveau aval, GCP distribue des offres de télévision payante. Ses offres sont structurées autour de la chaîne Canal+, qui peut être complétée par les déclinaisons de cette chaîne (Canal+ Sport, Cinéma, Séries, Family) éditées par GCP ou par des tiers. GCP distribue également des services de VàDA édités par lui-même ou par des tiers (Canal+ Séries, Netflix, Disney+). Enfin, GCP distribue le bouquet multithématique Panorama. Les offres précitées sont accessibles directement par satellite, via Internet, mais aussi sur les box des fournisseurs d’accès à Internet (ci-après « FAI »). Dans ce dernier cas, GCP conserve cependant la relation directe avec les abonnés : on parle alors d’autodistribution.
21. GCP dispose également d’offres de gros, qu’il propose à des distributeurs tiers qui les commercialisent eux-mêmes auprès de leurs clients.
4. AMAZON
22. La société Amazon est une entreprise dont l’activité s’est considérablement diversifiée ces dernières années. Initialement active dans le commerce en ligne, Amazon a ainsi lancé l’offre Amazon Prime Video, accessible aux abonnés du service « Amazon Prime », ou indépendamment de ce service depuis 2016. En France, cette offre est liée à un abonnement Amazon Prime (offre de livraison rapide et illimitée pour 49 euros par an initialement, et 69,90 euros par an depuis le 5 septembre 2022). Elle donne accès à un catalogue de films et de séries, y compris originaux. La société revendiquait 200 millions d’abonnés dans le monde en février 20215.
23. Amazon a récemment commencé à diffuser en direct certains évènements sportifs, notamment, en France, les matchs en soirée du tournoi de tennis de Roland Garros depuis 2021, et, plus récemment encore, certains droits des championnats de Ligue 1 et de Ligue 2.
D. LES DROITS DE LA LIGUE 1 ET LEUR ATTRIBUTION POUR LA PERIODE 2020-2024
1. LA PROCEDURE D’APPEL A CANDIDATURES DE 2018
24. Pour une description plus précise des modalités d’exploitation des droits de diffusion audiovisuels de la Ligue 1 et la procédure d’appel d’offres de 2018, l’Autorité renvoie à la décision n° 21-D-126.
25. Il convient en l’espèce de rappeler que les droits de la Ligue 1 pour la période 2020-2024 ont fait l’objet d’un appel à candidatures organisé par la LFP. Conformément aux dispositions du code du sport, la LFP a procédé à la constitution de plusieurs lots pour couvrir l’ensemble des droits de la Ligue 1. Sept lots au total, numérotés de 1 à 7, ont ainsi été définis.
26. Plusieurs candidats se sont positionnés sur les différents lots, dont beIN Sports, GCP, et le groupe audiovisuel espagnol Mediapro.
27. Au terme de cette procédure d’appel à candidatures, Mediapro est devenu attributaire des lots 1, 2, 4, 5, et 7 pour un montant de près de 780 millions d’euros par saison. beIN Sports a remporté le lot 3 pour un montant d’environ 332 millions d’euros par saison et Free le lot 6, pour un montant d’environ 50 millions d’euros par saison. GCP n’a remporté aucun lot.
2. LA SOUS-LICENCE DU LOT 3
28. L’appel à candidatures de 2018 de la LFP prévoyait la possibilité, pour un attributaire, de céder ou de sous-licencier des lots. beIN Sports a, ainsi, sous-licencié le lot 3 à GCP par un accord annoncé en novembre 2019 et conclu le 11 février 2020. Cet accord prévoyait que GCP paie à beIN Sports un montant équivalent au montant d’attribution du lot 3 à beIN Sports en 2018, soit 332 millions d’euros par saison. Il était couplé à un accord de distribution exclusive des chaînes beIN Sports par GCP, prévoyant un minimum garanti par année.
3. LA DEFAILLANCE DE MEDIAPRO
29. La société Mediapro Sport France (ci-après « Mediapro ») fait partie d’un groupe audiovisuel important qui, avant 2018, n’était pas actif en France sur les marchés de l’acquisition de droits sportifs ou de l’édition et de la commercialisation de chaînes.
30. En vue de l’exploitation des droits de la Ligue 1 dont il a été attributaire, Mediapro a lancé la chaîne Téléfoot quelques jours avant le début de la saison 2020-2021 de Ligue 1. Téléfoot a été créée en partenariat avec le groupe TF1. Cette chaîne était distribuée par les principaux FAI (Orange, SFR, Free, Bouygues Télécom).
31. Rapidement toutefois, Mediapro a rencontré des difficultés de paiement. Après s’être acquittée en août 2020 de la première échéance, Mediapro a, dès la mi-septembre 2020, sollicité de la LFP une réduction du montant des droits et/ou de nouveaux échéanciers, ce que la LFP a refusé. Mediapro n’a pas payé l’échéance suivante du 5 octobre 2020. Le 19 octobre 2020, une procédure de conciliation entre Mediapro et la LFP a été ouverte par le tribunal de commerce de Nanterre. Mediapro n’a pas honoré l’échéance du 5 décembre 2020.
32. Le tribunal de commerce de Nanterre a homologué un accord du 22 décembre 2020, par lequel la LFP et Mediapro sont convenus « de résilier par anticipation le contrat conclu entre la LFP et Mediapro », moyennant le versement d’un solde de tout compte par Mediapro. La LFP a, de ce fait, « recouvré la propriété pleine et entière des droits qui avaient été concédés à Mediapro »7.
4. LA CONSULTATION DE MARCHE LANCEE LE 19 JANVIER 2021
33. Le 19 janvier 2021, la LFP a lancé deux consultations de marché relatives aux droits d’exploitation audiovisuelle des championnats respectivement de la Ligue 1 (ci-après « consultation 2021 ») et de la Ligue 2. Ces consultations se sont clôturées le 1er février 2021. Elles portaient exclusivement sur les droits anciennement détenus par Mediapro (les lots 1, 2, 4, 5 et 7 s’agissant de la Ligue 1), pour la période courant du 5 février 2021 jusqu’à la fin de saison 2023-2024. Les droits qui faisaient l’objet de la consultation étaient organisés en lots8.
34. GCP et beIN Sports n’ont pas participé à cet appel d’offres. La LFP a reçu des offres de trois groupes internationaux (Amazon, Discovery9 et DAZN10), mais a déclaré cette consultation infructueuse le 1er février 2021, les prix de réserve n’ayant pas été atteints.
35. Parallèlement à sa saisine de l’Autorité (voir ci-après paragraphes 37 à 39), GCP a alors introduit plusieurs actions en justice, certaines visant à obtenir l’annulation de la consultation de janvier 2021. GCP, en présence de beIN Sports qui soutenait ses prétentions, a ainsi assigné à bref délai la LFP devant le tribunal de commerce de Paris le 26 janvier 2021, aux fins notamment d’obtenir l’annulation de la consultation de janvier 2021 en ce qu’elle n’incluait pas le lot 3. Par jugement du 11 mars 2021, le tribunal a débouté GCP et beIN Sports de l’intégralité de leurs demandes, aux motifs notamment de l’indisponibilité du lot 3 ainsi que de l’absence de démonstration par GCP de ce que le code du sport obligerait la LFP « dans l’hypothèse de la défaillance de tel allocataire des droits à reprendre l’intégralité des droits concédés à d’autres acteurs, pour relancer un processus complet ».
36. Les échanges entre la LFP et GCP se sont néanmoins poursuivis et ont conduit à « un accord global concernant les droits audiovisuels » de Ligue 1 (et de Ligue 2) pour la seule fin de saison 2020-2021, soit 14 journées de championnat (sur un total de 38), accord qui a été publiquement annoncé le 24 février 2021 et qui prévoyait l’octroi à GCP des droits anciennement accordés à Mediapro, moyennant, entre autres, le versement par GCP d’une somme forfaitaire de 35 millions d’euros, payée en sus des sommes dues au titre du lot 3.
E. LA PREMIERE SAISINE DE L’AUTORITE PAR GCP, LA DECISION N° 21-D-12 DU 11 JUIN 2021 ET L’ARRET DE LA COUR D’APPEL DE PARIS DU 30 JUIN 2022.
37. Le 29 janvier 2021, GCP a saisi l’Autorité de certaines pratiques de la LFP. GCP reprochait alors à la LFP d’avoir abusé de sa position dominante sur le marché amont de l’acquisition des droits de la Ligue 1, en décidant d’organiser une consultation de marché limitée aux droits restitués par Mediapro, sans remettre sur le marché les droits du lot 3. Selon GCP la non-inclusion du lot 3 était, en premier lieu, constitutive d’une discrimination abusive et, en second lieu, imposait à GCP des conditions de transaction inéquitables.
38. Dans sa saisine, GCP soutenait également que tout accord qui résulterait de la consultation de 2021 serait contraire aux articles 101 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.
39. Enfin, GCP sollicitait le prononcé de mesures conservatoires sous la forme d’une injonction à la LFP, d’une part, de mettre en place une nouvelle procédure d’appel à candidatures portant sur l’ensemble des droits de la Ligue 1, et, d’autre part, de suspendre l’exécution des contrats résultant de l’appel à candidatures.
40. Dans sa décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021, l’Autorité a rejeté la saisine de GCP pour défaut d’éléments suffisamment probants.
41. S’agissant de la prétendue existence de conditions de transaction inéquitables, l’Autorité a relevé que les éléments soumis par GCP, de même que ceux recueillis lors de l’instruction, révélaient que la décision de la LFP de ne pas remettre en concurrence le lot 3 était un choix nécessaire et proportionné, et que, de plus, le contrat unissant beIN Sports et la LFP était régulièrement formé, avait force obligatoire et était encore en vigueur. Cette décision ne paraissait par ailleurs pas déraisonnable, dans la mesure où elle était à la fois nécessaire et proportionnée par rapport à l’objectif qu’elle poursuivait, à savoir préserver les intérêts de la LFP et ceux des clubs à la suite de la défaillance de Mediapro, dans un contexte de crise sanitaire contribuant à dégrader leurs perspectives de revenus11.
42. L’Autorité a également conclu qu’aucun élément de la saisine et du dossier d’instruction n’était susceptible de démontrer que la non-inclusion du lot 3 dans la consultation 2021 créerait une discrimination à l’encontre de GCP. Il ressortait en effet des éléments du dossier que les consultations lancées par la LFP, aussi bien en 2018 qu’en 2021, étaient conçues de manière à assurer leur caractère transparent et non discriminatoire pour tous les candidats potentiels, ainsi, au demeurant, que le Conseil de la concurrence l’avait recommandé dans son avis n° 04-A-09 du 28 mai 200412. Par ailleurs, la circonstance que GCP supportait déjà, lors du lancement de la consultation 2021, la charge du lot 3 n’était pas pertinente dans l’analyse de l’existence d’une discrimination. Enfin, il apparaissait que GCP avait sciemment pris le risque en 2018 de ne pas remporter les lots 2 et 3, en formulant des offres d’un très faible montant, de manière à ce que les prix de réserve ne soient pas atteints, afin de tenter de faire échec à la procédure d’appel d’offres. L’Autorité a déduit de ces différents éléments que la consultation 2021 traitait de la même manière l’ensemble des candidats se trouvant dans une situation équivalente.
43. L’Autorité a, en conséquence, également rejeté les allégations d’ententes anticoncurrentielles résultant de l’abus de position dominante reproché à la LFP.
44. Le recours en annulation et/ou réformation formé par GCP contre cette décision a été rejeté le 30 juin 202213.
45. La cour d’appel de Paris a, en premier lieu, s’agissant des allégations de discrimination, validé le raisonnement de l’Autorité selon lequel la saisine de GCP était dépourvue d’éléments suffisamment probants14. Elle a, en effet, tout d’abord, rejeté la thèse de GCP selon laquelle les lots 1 à 3 étaient indissociables, aux motifs, notamment, où, d’une part, la constitution des lots lors de la procédure d’appel à candidatures de 2018 s’était faite, tant par leur nombre que par leur structure, de manière conforme aux exigences légales et aux caractéristiques du marché et, d’autre part, que l’attribution de chacun de ces lots avait fait l’objet d’une décision séparée et d’un contrat de cession individuel ayant vocation à être exécuté de manière indépendante et divisible.
46. La cour a, par ailleurs, relevé que la LFP n’était pas responsable de l’évolution des conditions de concurrence sur le marché, laquelle explique pour une large part la situation que GCP considère comme défavorable.
47. Ainsi, selon la cour, la LFP n’avait pas à remettre en jeu le lot 3 en même temps que les lots restitués par Mediapro et c’est, partant, à juste titre, que l’Autorité a examiné séparément les conditions d’attribution de chacun des lots et en a conclu que la saisine de GCP ne présentait aucun élément permettant de rendre vraisemblable une discrimination entre candidats potentiels pour chacun des lots concernés.
48. Concernant, en second lieu, les arguments de GCP tenant à l’imposition de conditions de transaction inéquitables, la cour les a également rejetés, en retenant notamment que la défense des intérêts matériels du football professionnel français, dévolue à la LFP, comprenait l’objectif de maximisation des recettes tirées de la commercialisation des droits de retransmission des compétitions de football professionnel, et que les éléments versés par GCP ne permettaient pas de considérer que le comportement de la LFP n’ait pas été nécessaire et proportionné à cet objectif, le contrat portant sur le lot 3 étant en cours d’exécution et la LFP n’ayant aucune obligation ni aucun intérêt à le résilier.15
F. L’ATTRIBUTION A AMAZON DES DROITS INITIALEMENT CONCEDES A MEDIAPRO
49. L’appel à candidatures de 2021 ayant été déclaré infructueux, ainsi qu’indiqué au paragraphe 34 ci-dessus, une phase de négociation de gré à gré s’est alors ouverte, dont le principe n’a pas été contesté en tant que tel par les parties saisissantes.
50. Comme rappelé plus haut, le 4 février 2021, la LFP a cédé les droits restitués par Mediapro à GCP pour les derniers matchs de la saison 2020-2021. La LFP a, dans le même temps, poursuivi les négociations de gré à gré pour les saisons 2021-2022, 2022-2023 et 2023-2024.
51. Le 11 juin 2021, soit le jour même de la publication de la décision n° 21-D-12 précitée, GCP et beIN Sports ont transmis à la LFP une offre conjointe pour l’ensemble des droits de la Ligue 1 pour les saisons 2021-2022 à 2023-2024. Cette offre reposait sur un contrat tripartite comprenant la résiliation du contrat de 2018 entre la LFP et beIN Sports, et celle du contrat de sous-licence entre GCP et beIN Sports. Elle incluait le paiement d’une redevance fixe d’un montant total de 535 millions d’euros par saison, assortie, comme le prévoyait l’appel à candidatures de 2021, d’une redevance variable qui, selon les parties saisissantes, pouvait atteindre 78 millions d’euros par saison16.
52. Dans la même journée, la LFP a publié un communiqué annonçant l’octroi à Amazon des droits des anciens lots de Mediapro. Le montant de l’offre d’Amazon s’élevait à 250 millions d’euros par saison pour les anciens lots 1, 2 et 417. Cette somme devait, pour la LFP, s’ajouter à la somme versée par beIN Sports et/ou GCP pour le lot 3, soit 332 millions d’euros par saison, ce qui faisait de l’offre d’Amazon celle qui permettait à la LFP de bénéficier du revenu garanti le plus élevé (soit 573 millions d’euros, en prenant en compte les montants fixes proposés).
53. Le jour même de l’officialisation de ce contrat avec Amazon, GCP a publié un communiqué de presse indiquant : « CANAL+ ne diffusera donc pas la Ligue 1. À partir de la rentrée, CANAL+ proposera à ses abonnés, pour la première fois, les deux plus belles affiches de chaque journée de la Ligue des Champions et, dès le 11 août, la Supercup entre Chelsea et Villareal. La plus prestigieuse compétition européenne complètera une offre sport riche de Premier League, de TOP14, de Formule 1, ou encore de MotoGP, diffusés en intégralité ». Dans les mois qui ont suivi, GCP a confirmé cette stratégie en investissant dans des contenus sportifs autres que la Ligue 1. En avril 2022, elle a, par exemple, signé un accord exclusif pour la diffusion des courses de Formule 1 jusqu’en 2029. En juin 2022, elle a remporté pour 476 millions d’euros par saison la retransmission en France des grandes compétitions européennes de football (Ligue des Champions, Ligue Europa et Ligue Europa Conférence) pour la période 2024-2027.
54. S’agissant de la diffusion des matchs du lot 3, le 12 juillet 2021, GCP a annoncé à beIN Sports qu’il suspendait, pour inexécution, le contrat qui les liait, au motif que beIN Sports aurait manqué aux obligations qui pesaient sur elle au titre de la clause de coopération judiciaire prévue à l’article 3(g) du contrat. Aux termes de cett clause, beIN Sports devait prêter assistance à GCP en cas d’action juridique que cette dernière engagerait vis-à-vis de tiers concernant les droits faisant l’objet de leur accord de sous- licence et devait également, à la demande de GCP, mettre en œuvre toute action juridique que GCP jugerait appropriée contre tout tiers en rapport avec ces mêmes droits. beIN Sports a contesté sans succès cette suspension de l’accord de sous-licence devant le tribunal de commerce de Nanterre18, puis devant la cour d’appel de Versailles19. GCP a enfin notifié à beIN Sports, le 24 juillet 2021, la mise en œuvre de la clause résolutoire du contrat de sous- licence liant les deux sociétés, ce que beIN Sports a contesté avec succès en référé devant le tribunal de commerce de Nanterre20, puis devant la cour d’appel de Versailles à la suite de l’appel formé par GCP21.
55. Le 26 juillet 2021, beIN Sports a assigné la LFP devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir la caducité ou la résiliation du contrat de licence conclu pour le lot 3. L’affaire est actuellement pendante22.
56. Le 27 juillet 2021, la LFP a assigné, avec succès, beIN Sports en référé devant le tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir l’exécution de l’ensemble des obligations de son contrat de licence23, et, à la suite de l’appel formé par beIN Sports, a obtenu confirmation de cette ordonnance devant la cour d’appel de Paris24.
G. LES SAISINES DE beIN SPORTS ET DE GCP
57. Dans leur saisine au fond, beIN Sports et GCP reprochent à la LFP d’avoir abusé de sa position dominante en ce que, en attribuant, à Amazon, dans les conditions rappelées
II. Discussion
62. Le deuxième alinéa de l’article L. 462-8 du code de commerce énonce que « l’Autorité de la concurrence peut […] rejeter la saisine par décision motivée lorsqu’elle estime que les faits invoqués ne sont pas appuyés d’éléments suffisamment probants ».
63. En outre, l’article R. 464-1 de ce même code dispose que « la demande de mesures conservatoires mentionnées à l’article L. 464-1 ne peut être formée qu’accessoirement à une saisine au fond de l’Autorité de la concurrence ».
A. SUR LES MARCHES PERTINENTS
64. Sur ce point, l’Autorité renvoie à sa décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021, dans laquelle elle avait rappelé la distinction faite dans la pratique décisionnelle entre (i) les marchés amont de l’achat de droits de diffusion de contenus audiovisuels, et en particulier le marché de l’achat de droits de diffusion des matchs de Ligue 1, (ii) les marchés intermédiaires de l’édition et de la commercialisation de chaînes de télévision payante, et (iii) les marchés avals de la distribution de services de télévision payante33.
B. SUR LA POSITION DOMINANTE DE LA LFP
65. L’Autorité renvoie également à la décision susvisée, dans laquelle elle expose les raisons qui lui permettent de conclure que la LFP détient une position dominante sur le marché de l’achat des droits de diffusion des matchs de Ligue 1, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté par la LFP34.
C. SUR LA DISCRIMINATION ALLEGUEE
1. PRINCIPES APPLICABLES
66. De manière générale, comme rappelé dans la décision n° 21-D-12, l’interdiction de discrimination fait partie des principes fondamentaux du droit de l’Union et exige que des situations comparables ne soient pas assujetties à un traitement différencié, à moins qu’une telle différenciation soit objectivement justifiée35.
67. Plus spécifiquement, le c) du deuxième alinéa de l’article 102 TFUE qualifie de potentiellement abusives les pratiques pouvant consister à « appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ».
68. Dans sa décision n° 14-D-17, l’Autorité a souligné que la discrimination résulte du fait, pour un opérateur en position dominante, d’imposer des prix ou conditions différents à des acheteurs se trouvant dans des situations équivalentes, leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence36. Elle avait, dans cette décision, rejeté pour défaut d’éléments suffisamment probants l’argument tenant à l’existence d’une pratique de discrimination abusive, au motif notamment qu’il n’apparaissait pas en l’espèce que la différenciation tarifaire concernait des acheteurs en situation équivalente37.
69. Dans l’arrêt British Airways, la Cour de justice a rappelé que, pour prouver l’existence d’une pratique de discrimination abusive, il importe de « constater que le comportement de l’entreprise en position dominante sur un marché non seulement est discriminatoire, mais encore qu’il tend à fausser [ce] rapport de concurrence, c’est-à-dire à entraver la position concurrentielle d’une partie des partenaires commerciaux de cette entreprise par rapport aux autres »38.
2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
70. À titre liminaire, il convient de rappeler que, dans sa décision de 2021, l’Autorité avait estimé que le fait que GCP supportait déjà, lors de la consultation de 2021, la charge du lot 3 n’était pas pertinente pour établir l’existence d’une discrimination abusive. Cette approche, comme rappelé plus haut, a été validée par la cour d’appel de Paris.
71. Les parties prétendent ne pas remettre en cause cette conclusion. Elles affirment au contraire que leur saisine concerne des éléments sur lesquels l’Autorité n’avait pas statué dans sa décision de 2021. Elles opposent à cette fin la notion d’ « acquisition des droits », objet de la décision de 2021, qui se serait prononcée sur la discrimination entre candidats potentiels lors de la consultation de 2021, et celle d’ « exploitation des droits », objet des présentes saisines, la présente décision devant dès lors statuer sur la discrimination entre exploitants des droits.
72. S’il est constant que, dans sa décision de 2021, l’Autorité n’a pas pu se prononcer directement sur la manière dont la LFP a conduit la procédure de gré à gré, force est de relever que la distinction proposée par les parties entre acquisition et exploitation des droits est largement artificielle. En effet, les conditions d’exploitation des droits, et en particulier le montant des redevances qui y sont associées, dépendent des offres déposées par les soumissionnaires pour acquérir les différents lots.
73. D’ailleurs, les saisissantes reprennent en l’espèce, dans une large mesure, les mêmes arguments que ceux auxquels l’Autorité a déjà répondu en 2021. Ainsi, pour apprécier l’équivalence des situations entre GCP et Amazon, GCP allègue que le lot 3, qu’il exploite, et les lots 1, 2, et 4, exploités par Amazon, correspondraient à des prestations équivalentes, et que « l’équivalence des prestations est encore renforcée par les liens très étroits qui unissaient les Lots 1, 2, et 3 dans le cadre de l’Appel à candidatures 2018 »39. De même, beIN Sports soutient que le comportement discriminatoire allégué résulte directement du refus de la LFP de remettre en jeu le lot 3 lors de la Consultation de 2021 (« [l]e refus par la LFP de remettre sur le marché le Lot 3 devait inévitablement conduire à rendre le montant du Lot 3 complètement disproportionné par rapport au prix auquel les droits restitués par Mediapro seraient réattribués »40).
74. La formulation même des arguments des parties saisissantes démontre que leur saisine concerne encore essentiellement les conditions d’attribution des différents lots issus de la consultation de 2018. Il s’agit là d’éléments dont l’Autorité, confirmée par la cour d’appel de Paris, a déjà relevé le manque de valeur probatoire.
75. En substance, GCP et beIN Sports soutiennent que la LFP ne pouvait pas conclure, pour les lots restitués par Mediapro, le contrat avec Amazon au prix convenu avec celle-ci, du moins en maintenant dans le même temps le niveau de prix proposé par beIN Sports pour le lot 3 lors de l’appel à candidatures de 2018.
76. Toutefois, les éléments présentés dans leur saisine respective ne permettent pas de rendre vraisemblable la discrimination alléguée.
77. Tout d’abord, les parties ne remettent pas en cause le principe même de la négociation de gré à gré conduite par la LFP à la suite de l’échec de la consultation de 2021. De fait, alors qu’elles avaient refusé de participer à cette consultation, les saisissantes ont cherché à obtenir les lots remis en jeu en soumettant une offre conjointe à la LFP dans le cadre de cette négociation de gré à gré.
78. Par ailleurs, il ne ressort pas des éléments soumis par les parties saisissantes que la LFP aurait eu un comportement discriminatoire à l’égard des différents acteurs potentiellement intéressés. Comme rappelé dans la décision de 2021, tous ont eu la possibilité, lors de la consultation de 2021, réalisée dans des conditions transparentes et non-discriminatoires, de déposer une offre en vue de remporter les droits initialement concédés à Mediapro. De même, il est constant que, dans le cadre des négociations de gré à gré, la LFP a reçu deux offres, une offre conjointe des parties saisissantes, et une offre d’Amazon, et qu’il n’était pas déraisonnable d’accepter l’une ou l’autre de ces offres. Concernant l’offre d’Amazon, elle était celle qui garantissait, à la LFP et aux clubs de Ligue 1, le montant de revenus garantis le plus élevé (comme indiqué au paragraphe 52 ci-dessus). Par ailleurs, elle permettait la présence de plusieurs diffuseurs concurrents et l’entrée d’un nouvel acteur sur le marché d’acquisition des droits de diffusion de la Ligue 1.
79. GCP soutient, dans ses observations complémentaires, que la procédure d’attribution de gré à gré, telle qu’elle a été conduite par la LFP, était elle-même discriminatoire, ce qui aggraverait la discrimination tarifaire qu’elle allègue entre l’attributaire du lot 3 et Amazon41. À cette fin, il fait valoir que la LFP n’a fixé aucune règle ni aucun calendrier dans le cadre de cette procédure et que les différents candidats engagés dans des négociations de gré à gré ont ainsi été maintenus dans l’incertitude à la fois quant à l’existence d’offres concurrentes, aux critères de départage des offres et à la possibilité de surenchérir. Toutefois d’une part, GCP ne conteste pas que tous les candidats ont été placés dans les mêmes conditions vis-à-vis de la LFP et n’indique pas qu’elle aurait été traitée différemment des autres candidats. D’autre part, GCP ne saurait contester l’absence de formalisation des négociations de gré à gré engagées par la LFP dans un contexte caractérisé par la crise économique du football français et par l’urgence qui s’attachait à la reprise des lots anciennement détenus par Mediapro, sans contester le principe même de l’engagement de telles négociations, par nature informelles – ce qu’elle n’a pas fait, ainsi qu’indiqué au paragraphe 77. En tout état de cause, GCP a été en mesure de déposer une offre le 11 juin 2021, et ce suivant le calendrier qu’elle avait elle-même choisi, ainsi qu’il ressort des déclarations du président du directoire de GCP à l’assemblée générale de la LFP du 3 juin 202142. Ces arguments doivent donc être rejetés, dans la mesure où ils ne sont pas à même de caractériser un comportement discriminatoire.
80. Enfin, GCP prétend avoir été victime d’une asymétrie d’information puisqu’Amazon aurait été au courant du montant de l’offre de l’offre GCP/beIN Sports en raison de fuites dans la presse. Toutefois, GCP ne soumet aucun élément permettant de penser que cette situation résulte du comportement de la LFP.
81. Ainsi, les éléments au dossier indiquent que la décision de la LFP d’octroyer à Amazon les anciens lots de Mediapro présentait, dans ces circonstances, un caractère raisonnable et non- discriminatoire.
82. Il est également possible de relever, à titre subsidiaire, que, contrairement à ce que soutiennent les parties saisissantes, il n’est pas avéré que la LFP devait, à la suite de la conclusion du contrat avec Amazon, modifier le contrat passé avec beIN Sports pour la cession du lot 3, contrat qui, pour reprendre les termes de la cour d’appel de Paris dans son arrêt précité du 30 juin 2022, a vocation à être exécuté de manière indépendante et divisible43.
83. beIN Sports soutient en effet, en droit, que, quand les prestations en cause sont équivalentes, un abus de discrimination peut être constitué quand l’opérateur dominant pratique des prix différenciés créant un désavantage dans la concurrence, quand bien même ces prix ont été formés dans des circonstances différentes. De même, GCP prétend qu’il est indifférent que les contrats supports de la discrimination ne soient pas conclus simultanément, dès lors qu’ils ont vocation à être exécutés concomitamment pour des prestations équivalentes.
84. Au soutien de leur position, les parties invoquent plusieurs arguments.
85. En premier lieu, elles se réfèrent à une décision de la Commission européenne Bouygues Telecom, dans laquelle l’État avait abaissé les redevances contractuelles dues par les attributaires de licences de téléphonie mobile 3G issues d’un appel d’offres de 2001 pour les aligner avec celles prévues par un contrat conclu en 200244. Il convient toutefois d’indiquer que cette affaire concernait une question d’aides d’État, et non un abus de position dominante.
86. En deuxième lieu, elles invoquent certains auteurs, selon lesquels l’interdiction des abus de discrimination impose, pour les opérateurs dominants, que leurs contrats soient révisés « s’ils sont continus et coïncident dans le temps avec des contrats plus favorables »45. La citation choisie par GCP est cependant incomplète, puisqu’elle omet de mentionner que les contrats visés dans cette phrase étaient « des contrats d’approvisionnement de long terme ou des licences de long terme », ce qui n’est manifestement pas le cas en l’espèce46.
87. En troisième lieu, les parties saisissantes se réfèrent à différents précédents tirés de la jurisprudence européenne.
88. beIN Sports mentionne ainsi l’arrêt ITT Promedia du Tribunal de l’Union, aux termes duquel : « Peut également être constitutive d’un abus au sens de l’article [102 TFUE] la demande d’exécution d’une clause d’un contrat si, notamment, cette demande va au-delà de ce que les parties pouvaient raisonnablement attendre du contrat ou si les circonstances applicables lors de la conclusion du contrat ont entre-temps été modifiées »47. Dans cette affaire, le Tribunal a approuvé la décision de la Commission rejetant une plainte pour abus de position dominante. Il y était question de l’application d’un contrat de 1969, renouvelé en 1984 pour une période de 10 ans.
89. GCP se réfère quant à lui à l’arrêt Aéroports de Paris de la Cour de justice. Dans cette affaire, Aéroports de Paris avait sélectionné un prestataire de service pour certaines activités, après un premier appel d’offres organisé en 1988, et avait conclu avec cette entreprise un contrat de 25 ans débutant en 1990. À la suite de divergences avec cet opérateur, Aéroports de Paris avait, en décembre 1992, conclu un contrat comparable avec un second opérateur pour les mêmes activités, mais à des conditions financières plus avantageuses. La Commission, confirmée en cela par le Tribunal de l’Union et la Cour de justice, avait alors considéré que le refus, dans ces conditions, de réduire le niveau de redevance du premier opérateur était constitutif d’un abus de position dominante48.
90. L’Autorité, de son côté, a récemment adopté la décision n° 21-D-25 du 2 novembre 202149, relative à des prix différents appliqués à des prestations qui, en l’occurrence, étaient équivalentes. Dans cette décision, elle a constaté une différenciation tarifaire concernant l’approvisionnement en mélasse de La Réunion, tout en écartant l’existence d’un abus de position dominante, dans la mesure où la discrimination tarifaire n’était pas à même de créer un désavantage dans la concurrence. Dans cette affaire, le fournisseur de mélasse avait prévu, en 1996, un contrat à durée indéterminée avec une première distillerie. Il avait conclu par ailleurs, en 2011, un contrat d’approvisionnement avec une autre distillerie avec des tarifs plus élevés, ce contrat étant un contrat de 5 ans tacitement renouvelable sauf dénonciation effectuée avec un préavis de trois ans. Si l’Autorité a conclu que l’abus de discrimination n’était pas établi, elle a néanmoins sanctionné l’opérateur dominant pour avoir inséré, dans le contrat de 2011, une clause d’indemnité financière qui de facto empêchait la dénonciation du contrat et lui donnait un caractère quasi perpétuel.
91. Ainsi, l’Autorité a déjà eu l’occasion de constater que des prix formés à différentes époques étaient susceptibles de conduire à une situation de discrimination entre partenaires commerciaux dans une affaire où l’opérateur dominant avait utilisé son pouvoir de marché pour empêcher une renégociation des tarifs en question sur le long terme, s’affranchissant ainsi sur une durée potentiellement illimitée des mécanismes de marché.
92. En revanche, l’Autorité constate qu’en l’espèce les parties saisissantes n’ont pas apporté, dans leur saisine, d’éléments permettant de caractériser un abus de discrimination dans l’hypothèse où les contrats conclus, contrairement à l’hypothèse visée par les parties (voir ci-avant paragraphe 86) seraient de court ou de moyen terme et régulièrement remis en cause par des mécanismes de mise en concurrence.
93. Le code du sport impose à la LFP de limiter la durée de ses contrats de cession de droits à quatre ans au maximum, ainsi que rappelé plus haut aux paragraphes 10 et 11. Une telle limitation est cohérente avec les recommandations du Conseil de la concurrence dans ses avis n° 07-D-07 et 04-D-09, à l’occasion desquels le Conseil avait considéré que la limitation de la durée de ces contrats permettait d’atténuer les effets d’une éventuelle exclusivité dans la cession des droits50.
94. La limitation de la durée des contrats oblige la LFP à régulièrement remettre en concurrence les droits de diffusion de ses compétitions. De fait, les offres déposées par les différents soumissionnaires lors de la consultation de 2018, en ce compris beIN Sports pour le lot 3, l’ont été en prenant en compte l’horizon de moyen terme qui était celui du cycle de quatre ans choisis par la LFP en conformité avec le code du sport. Dans ces conditions, et au regard de la jurisprudence et de la pratique décisionnelle rappelées plus haut aux paragraphes 88 à 92, la LFP n’était pas tenue de réduire le prix payé pour le lot 3 pour éviter de créer une situation de discrimination tarifaire.
95. Ainsi, les arguments de GCP et beIN Sports sont insuffisants pour rendre vraisemblable une éventuelle infraction résultant de ce que la LFP n’a pas modifié à la baisse, à la suite de l’attribution des lots 1 et 2 à Amazon, le prix payé par beIN Sports pour le lot 3.
96. À titre infiniment subsidiaire, il convient de relever que, au regard des principes déjà rappelés dans la décision n° 21-D-12, la LFP ne pourrait, en tout état de cause, pas réviser à la baisse le montant des redevances payées par beIN Sports pour l’exploitation du lot 3, sans que ce comportement soit discriminatoire vis-à-vis de toutes les entreprises ayant soumis une offre dans le cadre de l’appel à candidatures de 2018 en vue de remporter les droits de diffusion des matchs inclus dans le lot 3. À cet égard, la demande de beIN Sports consistant à soutenir que la LFP devait, à la suite de la conclusion du contrat avec Amazon, modifier le contrat passé pour la cession du lot 3, revient à poser à nouveau la question de l’obligation pour la LFP de remettre en concurrence le lot 3 concomitamment à l’attribution des lots précédemment détenus par Mediapro. Cette question a déjà été posée et traitée tant par l’Autorité dans sa décision n° 21-D-12 que par la cour d’appel de Paris, qui a validé l’analyse de l’Autorité dans son arrêt précité du 30 juin 2022.
97. Les éléments ainsi mis en avant par GCP et beIN Sports n’étant pas de nature à rendre vraisemblable un comportement répréhensible de la LFP lors de la conclusion du contrat avec Amazon, il convient de rejeter les saisines au fond pour défaut d’éléments suffisamment probants et, par voie de conséquence, les demandes de mesures conservatoires qui en sont l’accessoire.
NOTES
1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.
2 Avis n° 19-A-04 du 21 février 2019 relatif à une demande d’avis de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation de l’Assemblée nationale dans le secteur de l’audiovisuel.
3 Décision n° 21-D-12 du 11 juin 2021 relative à des pratiques mises en œuvre par la Ligue de Football Professionnel dans le secteur de la vente de droits de diffusion télévisuelle de compétitions sportives.
4 Décision n° 21-D-12, paragraphes 10 à 15.
5 Les données concernant les abonnés en France ne sont pas publiques.
6 Décision n° 21-D-12, paragraphes 30 à 48.
7 Voir décision n° 21-D-12, paragraphe 56.
8 Voir décision n° 21-D-12, paragraphes 64 à 67.
9 Discovery est un groupe international qui édite entre autres des chaînes de télévision payante à thématique sportive, notamment en France à travers la société Eurosport SAS (qui édite les chaînes Eurosport), ainsi que des services non-linéaires payants.
10 DAZN est une plateforme OTT à thématique sportive, active dans plusieurs dizaines de pays, et qui est accessible depuis la France.
11 Décision n° 21-D-12, paragraphes 118 à 125.
12 Avis n° 04-A-09 du 28 mai 2004 relatif à un projet de décret sur la commercialisation par les ligues professionnelles des droits d’exploitation individuelle des compétitions ou manifestations sportives.
13 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 30 juin 2022, Groupe Canal Plus, n° 21/13216 (GCP a formé un pourvoi contre cet arrêt).
14 Arrêt susvisé, paragraphes 85 à 96.
15 Arrêt susvisé, paragraphes 109 à 121.
16 Saisine 21/0085 F, cote 30, et saisine 21/0097 F, cote 18 VC, cote 829 VNC.
17 L’offre d’Amazon incluait également un montant de 9 millions d’euros par an pour les matchs de la Ligue 2.
18 Ordonnance du Président du Tribunal de commerce de Nanterre du 23 juillet 2021, n° 2021R00808.
19 Arrêt de la cour d’appel de Versailles du 31 mars 2022, n° 21/05040.
20 Ordonnance du tribunal de commerce de Nanterre du 5 août 2021, n° 2021R00835.
21 Arrêt de la cour d’appel de Versailles du 31 mars 2022, n° 21/05174.
22 Le 29 mars 2022, le juge de la mise en état du TJ de Paris a sursis à statuer dans l’attente de l’appel contre le jugement du 11 mars 2021 mentionné plus haut au paragraphe 34. Le 8 septembre 2022, la cour d’appel de Paris a autorisé beIN Sports et GCP à relever appel du jugement du 29 mars 2022.
23 Ordonnance du Président du Tribunal judiciaire de Paris du 4 août 2021, n° 21/55562.
24 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 10 juin 2022, n° 21/15778.
25 Saisine 21/0097 F, cote 38 VC, cote 850 VNC.
26 Saisine 21/0085 F, cote 50, et saisine 21/0097 F, cote 47 VC, cote 858 VNC.
27 Saisine 21/0085 F, cote 50 VC.
28 Saisine 21/0097 F, cote 47 VC, cote 858 VNC.
29 Saisine 21/0098 M, cote 68.
30 Saisine 21/0086 M, cote 6305.
31 Saisine 21/0086 M, cote 6305.
32 Saisine 21/0098 M, cote 68.
33 Décision n° 21-D-12, paragraphes 85 à 96.
34 Décision n° 21-D-12, paragraphes 101 à 105.
35 Voir entre autres, arrêt de la Cour du 7 juin 2005, VEWE, C-17/03, point 48 et jurisprudence citée.
36 Décision n° 14-D-17 du 20 novembre 2014 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la réparation navale de grande plaisance en Méditerranée, paragraphe 140.
37 Ibid., paragraphes 145 à 147.
38 Arrêt de la Cour du 15 mars 2007, British Airways/Commission, C-95/04, point 144 ; voir également arrêt de la Cour du 19 avril 2018, MEO/Serviçios de Communicaçoes e Multimédia, C-525/16, point 25.
39 Saisine 21/0097 F, cote 32 VC, cote 843 VNC.
40 Saisine 21/0097 F, cote 33 VC, cote 844 VNC.
41 Saisine 21/0086 M, cotes 6109 à 6112.
42 Saisine 21/0086 M, cote 2986.
43 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 30 juin 2022, paragraphe 85.
44 Arrêt de la Cour de justice du 2 avril 2009, Bouygues Telecom, C-431/07 P.
45 Robert O’Donoghe et Jorge Padilla, The Law and Economics of Article 102 TFEU, « Abusive Discrimination », Oxford : Bloomsbury Publishing, 2020, p. 974 (traduction libre de GCP, voir saisine de GCP, paragraphe 147).
46 Ibid. (traduction libre de beIN Sports, voir saisine de beIN Sports, paragraphe 116).
47 Arrêt du Tribunal de Union du 17 juillet 1998, ITT Promedia NV/ Commission, T-111/96, point 140.
48 Arrêt de la Cour de justice du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris contre Commission des Communautés européennes, C-82/01 P.
49 Décision n° 21-D-25 du 2 novembre 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’approvisionnement en mélasse à La Réunion. Cette décision fait actuellement l’objet d’un recours.
50 Avis n° 07-A-07 du 25 juillet 2007 relatif aux conditions de l’exercice de la concurrence dans la commercialisation des droits sportifs, paragraphes 44 et suivants ; avis n° 04-A-09 du 28 mai 2004 relatif à un projet de décret sur la commercialisation par les ligues professionnelles des droits d’exploitation audiovisuelle des compétitions ou manifestations sportives, paragraphe 96.