Cass. 2e civ., 19 décembre 2019, n° 18-25.333
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Avocats :
SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, SCP Richard
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 431-2 du code de la sécurité sociale et 2241 du code civil ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur interrompt la prescription à l'égard de toute autre action procédant du même fait dommageable ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. C... (la victime), salarié de la société Goodyear Dunlop Tires France, puis de la société Goodyear Dunlop Tires Amiens Sud, venant aux droits de la première à compter du 12 mars 2009, a déclaré le 17 mars 2008 une maladie professionnelle prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme (la caisse) ; que son état a été déclaré consolidé le 28 juillet 2009 ; qu'il a saisi la caisse, le 26 avril 2011, d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Goodyear Dunlop Tires Amiens Sud ; qu'un procès-verbal de non conciliation a été établi le 7 septembre 2011 ; qu'il a saisi, le 31 juillet 2013, une juridiction de sécurité sociale d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société Goodyear Dunlop Tires France ;
Attendu que pour déclarer son action prescrite, l'arrêt retient que si la victime fait valoir à juste titre que la victime d'un accident ou d'une maladie professionnelle peut agir soit contre la société à laquelle son contrat de travail a été transféré, soit contre la société qui l'employait au moment de la survenance de l'accident ou de la maladie, force est de constater que la victime n'a engagé aucune action à l'encontre de la société Goodyear Dunlop Tires France avant le 31 juillet 2013 ; que l'alternative qui lui est ouverte d'agir contre l'un ou l'autre de ses employeurs successifs ne peut avoir pour effet qu'une action à l'encontre de l'un interrompe la prescription à l'égard de l'autre ; que dès lors, si elle vaut action en justice, interruptive de prescription à l'égard de l'employeur qu'elle vise, la requête qu'il a adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Somme à l'encontre de la société Goodyear Dunlop Tires Amiens Sud le 26 avril 2011 n'a pu interrompre la prescription de l'action à l'encontre de la société Goodyear Dunlop Tires France à laquelle elle n'est pas opposable ; que les conditions dans lesquelles le contrat de travail de la victime a été transféré d'une société à l'autre sont indifférentes dès lors que les sociétés Goodyear Dunlop Tires France et Goodyear Dunlop Tires Amiens Sud sont des personnes juridiques distinctes ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les deux actions en reconnaissance de faute inexcusable engagées successivement par la victime procédaient du même fait dommageable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée.