Cass. 2e civ., 18 février 2016, n° 14-28.827
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Liénard
Avocat :
SCP Tiffreau, Marlange et de La Burgade
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 octobre 2014) et les productions, que M. X..., agissant en qualité de syndic de faillite de la société Etablissements Victor Perona, se fondant sur un jugement rendu le 28 mai 1985 par un tribunal de grande instance ayant condamné la SCI L'Athena (la société) à payer diverses sommes, a fait délivrer à cette dernière un commandement de payer valant saisie immobilière ; que par un jugement d'orientation, un juge de l'exécution a fixé le montant de la créance et a ordonné la vente forcée ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution étaient réunies, de dire que M. X..., ès qualités, poursuivait la saisie immobilière au préjudice de la société pour une créance liquide et exigible d'un montant de 44 602, 90 euros en principal, intérêts et frais arrêtés au 31 juillet 2008, outre intérêts et frais postérieurs jusqu'à parfait paiement, dont à déduire un paiement fait le 13 juin 2014 à hauteur de 32 472, 11 euros, soit un solde restant dû s'élevant à 22 142, 41 euros au 2 juillet 2014, outre intérêts, frais et accessoires postérieurs jusqu'à parfait paiement, et d'ordonner la vente forcée des biens et droits immobiliers saisis dans les parties divises et indivises d'un ensemble immobilier sis à Saint-Laurent-du-Var,..., lieu-dit ..., alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte clairement du jugement définitif du 28 mai 1985 du tribunal de grande instance de Grasse, comme l'avait d'ailleurs retenu le jugement entrepris, qu'à la suite de l'ordonnance du juge de la mise en état du 6 juin 1984, la société avait versé la provision de 36 448 francs, à déduire de la somme due à la SA Perona de 74 080 francs ; qu'en affirmant que le juge n'aurait pas formellement constaté le paiement effectif de la provision précitée d'un montant de 36 448 francs, la cour d'appel a dénaturé le jugement susvisé du 28 mai 1985, et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'il résulte des conclusions d'appel de la société, d'une part, qu'hormis le jugement du 28 mai 1985 du tribunal de grande instance de Grasse, elle n'était pas en mesure de rapporter la preuve comptable du paiement de cette provision intervenue il y a trente ans, dès lors que l'obligation légale de conservation des archives de comptabilité est de dix ans, d'autre part, qu'après sa condamnation par le juge de la mise en état, dans son ordonnance exécutoire par provision, le syndic de la société Victor Persona n'avait pas déposé de conclusions pour se plaindre d'une absence de paiement des sommes ordonnées, ce qui démontrait que le paiement de la provision de la somme de 36 448 francs avait bien eu lieu ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé, d'une part, que les motifs par lesquels le tribunal a indiqué dans le jugement du 28 mai 1985 qu'il convenait de condamner la société à payer la somme de 74 080 francs, « somme à laquelle sera retranchée celle de 36 448 francs, versée par la SCI Athena à la suite de l'ordonnance du juge de la mise en état » ne traduisait pas la constatation formelle par le juge du paiement effectif de la provision et, d'autre part, après avoir rappelé que c'est à celui qui se prétend libéré d'une l'obligation qu'il incombe d'en apporter la preuve, que la société ne démontrait pas avoir payé la provision, c'est par une appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, a pu, par une décision motivée, hors de toute dénaturation du jugement, statuer comme elle l'a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que l'exécution des mesures propres à assurer la conservation d'une créance ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l'obligation ; que le juge de l'exécution a le pouvoir d'ordonner la mainlevée de toute mesure d'exécution inutile ou abusive ; que la société faisait notamment valoir qu'il était « évident que la procédure de saisie immobilière engagée par Me X... excède ce qui se révélait nécessaire pour obtenir le paiement des causes du jugement du 28 mai 1985 » ; qu'en effet, « le principal de la créance liquidée est de 5 736, 94 euros », et « l'ensemble immobilier appartenant à la SCI L'Athena est valorisé à 2 000 000 euros, soit trois cent cinquante fois supérieur au montant de la créance » ; que M. X... n'ignorait pas que la société percevait des loyers, et qu'une « simple saisie-attribution des comptes bancaires de la SCI L'Athena ou entre les mains de ses locataires, tiers détenteurs, était très suffisante pour recouvrer la créance » ; qu'en se bornant à affirmer que les poursuites de M. X... n'auraient eu aucun caractère abusif, sans se prononcer sur ce qui précède et sans rechercher si la procédure de saisie immobilière qu'il avait ainsi engagée n'excédait pas « ce qui se révélait nécessaire pour obtenir le paiement des causes du jugement du 28 mai 1985 », la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 111-7 et L. 121-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a retenu que M. X... n'avait pas abusé de son droit de saisir ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.