Cass. crim., 14 février 2007, n° 06-81.924
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Lemoine
Avocat général :
M. Boccon-Gibod
Avocats :
Me Spinosi, SCP Nicolaÿ et de Lanouvelle, SCP Waquet, Farge et Hazan
Sur le moyen unique de cassation, proposé par la société civile professionnelle Nicolaÿ de Lanouvelle, pour Elisabeth X..., pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme,11 § 2 de la Déclaration universelle des droits de l'homme,111-2,111-3 et 111-4 du code pénal, 1er et 28 du code des marchés publics dans leur rédaction issue du décret n° 2001-231 du 21 février 2001,432-14 et 432-17 du code pénal,591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale : " en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Elisabeth X...coupable du délit d'atteinte à la liberté et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ;
" aux motifs que l'article 1er I du code des marchés publics, dans sa rédaction résultant du décret n° 2001-2010 du 7 mars 2001, dispose que les marchés publics sont des contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public mentionnées à l'article 2, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, qu'ils respectent les principes d'égalité d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures et que l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics sont assurés par la définition préalable des besoins, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence ainsi que par le choix de l'offre économiquement la plus avantageuse ;
que ces dispositions, qui concernent tous les marchés publics, n'opèrent aucune distinction, quant à leur application, entre ceux qui, en raison de leur montant, sont soumis à des formalités préalables, et ceux, qui, comme dans le cas présent, peuvent être passés sans ces formalités ; que, pour que soit constitué le délit retenu par la prévention, tel que prévu par l'article 432-14 du code pénal, il faut que la personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ait commis un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que, tel est précisément l'objet des dispositions réglementaires précitées qui énoncent expressément les principes et les obligations qui doivent être respectés dans la passation des marchés publics ;
qu'il est donc inexact d'affirmer, comme le fait Elisabeth X...dans ses conclusions, qu'aucune règle ayant pour objet de garantir l'égalité des candidats ne s'applique au marché litigieux dès lors que, selon cette prévenue, il n'existerait pas de « candidat » dans le cas des marchés sans formalités préalables où la collectivité se trouverait dans une situation identique à celle d'un simple acheteur privé pour la conclusion des contrats nécessaires à la satisfaction de ses besoins, ce qui exclurait la reconnaissance du délit de favoritisme constitué par l'avantage octroyé à un candidat par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir l'égalité des candidats ou la liberté d'accès dans les marchés publics ;
que les dispositions en contrariété desquelles l'acte incriminé par l'article 432-14 du code pénal sont bien celles que contient l'article 1er précité du code des marchés publics dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits ;
que si le fait, pour une personne investie de fonctions municipales par un mandat électif, de ne pas suivre l'avis des services administratifs de la commune dans le choix, qui lui appartient, d'un cocontractant au titre d'un marché public ne suffit pas à lui seul à caractériser la violation des dispositions ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics, il résulte des déclarations concordantes de Robert B...et d'Alain C...que des éléments d'informations précis et explicites avaient été fournis par ces fonctionnaires à Elisabeth X...non seulement sur des raisons d'ordre qualitatif qui permettaient de préférer la société Protectas ou la société Audit assurances à la société A.C. consultants sud-ouest, mais encore sur le caractère suspect de la baisse importante de l'offre de cette dernière dans sa réponse au second appel d'offres et sur le risque lié à la situation de Christian Z...;
qu'à cet égard, qu'elles qu'aient pu être les informations données par celui-ci à Elisabeth X...quant à ses relations exactes et actuelles, ou à son absence de toute relation, avec la société A.C. consultants sud-ouest, les indications qui lui avaient été données par le directeur général adjoint des services et par le directeur des affaires juridiques devaient à tout le moins l'inciter à la prudence alors qu'elle agissait dans cette affaire en qualité de délégataire du maire, lequel avait été destinataire d'un courrier du 27 janvier 2003 émanant de Christian Z...lui proposant les services de A.C. consultants sud-ouest et mentionnant ses implantations régionales dont les références, au premier rang desquelles figure celle de A.C.C. sud-ouest, sont indiquées en bas de page ; qu'en outre, il est suffisamment établi par les déclarations concordantes des deux fonctionnaires précités qu'Alain C..., soutenu par Robert B..., avait clairement indiqué à Elisabeth X...que, selon lui, la société Protectas offrait des garanties de compétence et d'expérience supérieures à celles de A.C. consultants sud-ouest, qu'elle présentait en outre l'avantage d'une proximité géographique qui faisait défaut à la seconde et que Audit assurances, la moins-disante à l'origine, avait également des références intéressantes ;
que selon les déclarations de Elisabeth X...elle-même, il apparaît qu'elle a pris sa décision non pas en fonction des critères objectifs de choix découlant tant du niveau qualitatif des candidats que des conditions dans lesquelles ils avaient présenté leurs offres mais « pour faire plaisir » à un tiers avec lequel elle entretenait des liens d'amitié, portant ainsi atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats et procurant un avantage injustifié à la société A.C. consultants sud-ouest qui, tout en étant éloignée géographiquement de la commune contractante et en offrant des prestations jugées par les fonctionnaires territoriaux compétents inférieures à celles des autres candidats, avait eu connaissance des montants des premières offres, ce qui lui avait permis d'ajuster le prix de la sienne de façon à se trouver sur ce plan-là dans la position la plus favorable ;
qu'en conséquence, Elisabeth X..., qui a méconnu les dispositions réglementaires de l'article 1er du code des marchés publics, applicable à l'opération contractuelle effectuée par la commune de Saint-Brieuc, s'est rendue coupable du délit visé à la prévention ; que le jugement dont appel sera donc infirmé en ce sens ; " alors que nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi ;
que l'infraction de favoritisme suppose un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que dès lors, en se bornant, pour retenir la demanderesse dans les liens de la prévention, à s'en référer à l'article I du code des marchés publics dans sa rédaction issue du décret n° 2001-2010 du 7 mars 2001, lequel n'est que l'affirmation du principe fondamental d'égalité de traitement des candidats dans les marchés publics et délégations de service public et la détermination des objectifs poursuivis, c'est à dire la liberté d'accès à la commande publique, l'égalité de traitement et la transparence des procédures, sans constater la méconnaissance par Elisabeth X...d'une disposition législative ou réglementaire garantissant concrètement la mise en oeuvre de ce principe lors de la passation des marchés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" alors que l'infraction de favoritisme suppose un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que dans sa rédaction issue du décret n° 2001-2010 du 7 mars 2001 le code des marchés publics n'impose aucune formalité préalable pour la souscription des marchés d'un montant inférieur à 90 000,00 euros hors taxes ce qui exclut dans cette hypothèse que l'infraction soit constituée faute d'élément matériel ;
que, dès lors, en l'espèce où la cour a relevé que le montant de la prestation d'analyse confiée à la société A.C. consultants sud-ouest était fixée à 5 850,00 euros TVA comprise (arrêt p. 4 dernier paragraphe), elle ne pouvait retenir Elisabeth X...dans les liens de la prévention sans violer les textes susvisés ;
" alors que l'infraction de favoritisme suppose un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ;
qu'en se contentant de faire la critique des éléments subjectifs d'appréciation ayant incité Elisabeth X...à retenir pour la ville de Saint-Brieuc l'offre objectivement la plus avantageuse économiquement, sans même caractériser à son encontre une quelconque participation aux manoeuvres ayant conduit la société A.C. consultants sud-ouest à faire cette offre, la cour d'appel a privé sa décision d'insuffisance » ;
Sur le moyen unique de cassation, commun à ces deux demandeurs, proposé par Me Spinosi, pour Christian Z...et Daniel A..., pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme,111-4,121-6 et 121-7,321-1 et 432-14 du code pénal,28 du code des marchés publics,591 et 593 du code de procédure pénale : " en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables des faits qui leur étaient reprochés ; " aux motifs que l'article 1er I du code des marchés publics dans sa rédaction résultant du décret n° 2001-2010 du 7 mars 2001 dispose que les marchés publics sont des contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public mentionnées à l'article 2, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services, qu'ils respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures et que l'efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics sont assurés par la définition préalable des besoins, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence ainsi que par le choix de l'offre économiquement la plus avantageuse ;
que « ces dispositions, qui concernent tous les marchés publics, n'opèrent aucune distinction, quant à leur application, entre ceux qui, en raison de leur montant sont soumis à des formalités préalables, et ceux qui, comme dans le cas présent, peuvent être passés sans ces formalités » ;
que « pour, que soit constitué le délit retenu par la prévention, tel que prévu par l'article 432-14 du code pénal, il faut que la personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public ou investie d'un mandat électif public ait commis un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public » ;
que, « tel est précisément l'objet des dispositions réglementaires précitées qui énoncent expressément les principes et les obligations qui doivent être respectés dans la passation des marchés publics » ;
qu'« il est donc inexact d'affirmer, comme le fait Elisabeth X...dans ses conclusions, qu'aucune règle ayant pour objet de garantir l'égalité des candidats ne s'applique au marché litigieux dès lors que, selon cette prévenue, il n'existerait pas de « candidat » dans le cas des marchés sans formalités préalables où la collectivité se trouverait dans une situation identique à celle d'un simple acheteur privé pour la conclusion des contrats nécessaires à la satisfaction de ses besoins, ce qui exclurait la reconnaissance du délit de favoritisme constitué par l'avantage octroyé à un candidat par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir l'égalité des candidats ou la liberté d'accès dans les marchés publics » ;
que « les dispositions en contrariété desquelles peut être accompli l'acte incriminé par l'article 432-14 du code pénal sont bien celles que contient l'article 1er du code des marchés publics dans sa rédaction à l'époque des faits » ;
que « si le fait, pour une personne investie de fonctions municipales par un mandat électif de ne pas suivre l'avis des services administratifs de la commune dans le choix, qui lui appartient, d'un cocontractant au titre d'un marché public ne suffit pas à lui seul à caractériser la violation des dispositions ayant pour objet de garantir l'égalité d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics, il résulte des déclarations concordantes de Robert B...et de Alain C...que les éléments d'information précis et explicites avaient été fournis par ces fonctionnaires à Elisabeth X...non seulement sur les raisons d'ordre qualitatif qui permettaient de préférer la société Protectas ou la société Audit assurances à la société A.C. consultants sud-ouest, mais encore sur le caractère suspect de la baisse importante de l'offre de cette dernière dans sa réponse au second appel d'offres et sur le risque lié à la situation de Christian Z...» ;
qu'« à cet égard, quelles qu'aient pu être les informations données par celui-ci à Elisabeth X...quant à ses relations exactes et actuelles, ou à son absence de toute relation, avec la société A.C. consultants sud-ouest, les indications qui lui avaient été données par le directeur général adjoint des services et par le directeur des affaires juridiques devaient à tout le moins l'inciter à la prudence alors qu'elle agissait dans cette affaire en qualité de délégataire du maire, lequel avait été destinataire d'un courrier du 27 janvier 2003 émanant de Christian Z...lui proposant les services de A.C. consultants et mentionnant ses implantations régionales dont les références, au premier rand desquelles figure celle de A.C.C. sud-ouest sont indiquées en bas de page » ;
qu'« en outre, il est suffisamment établi par les déclarations concordantes des deux fonctionnaires précités que Alain C..., soutenu par Robert B..., avait clairement indiqué à Elisabeth X...que, selon lui, la société Protectas offrait des garanties de compétence et d'expérience supérieures à celles de A.C. consultants sud-ouest, qu'elle présentait en outre l'avantage d'une proximité géographique qui faisait défaut à la seconde et que Audit sssurances, la moins disante à l'origine, avait également des références intéressantes ;
que, « selon les déclarations de Elisabeth X...elle-même, il apparaît qu'elle a pris sa décision non pas en fonction des critères objectifs de choix découlant tant du niveau qualitatif des candidats que des conditions dans lesquelles ils avaient présenté leurs offres, mais pour « faire plaisir » à un tiers avec lequel elle entretenait des liens d'amitié, portant ainsi atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats et procurant un avantage injustifié à la société A.C. consultants sud-ouest qui, tout en étant éloignée géographiquement de la commune contractante et en offrant des prestations jugées par les fonctionnaires territoriaux compétents inférieurs à celles des deux autres candidats, avait eu connaissance des montants des premières offres, ce qui lui avait permis d'ajuster le prix de la sienne de façon à se trouver sur ce plan-là dans la position la plus favorable » ;
qu'« en conséquence, Elisabeth X..., qui a méconnu les dispositions réglementaires de l'article 1er du code des marchés publics, applicables à l'opération contractuelle effectuée par la commune de Saint-Brieuc, s'est rendue coupable du délit visé à la prévention » ;
que « le jugement dont appel sera donc infirmé » ;
qu'« en obtenant de Serge D..., dans les conditions exposées ci-dessus, les montants des premières offres, et en indiquant à Daniel A..., directeur général de la société A.C. consultants sud-ouest, à quel montant il devait fixer son prix lors de la seconde consultation, Christian Z...a facilité, par aide et assistance, la préparation et la consommation du délit commis par Elisabeth X...et dont il s'est, par la même rendu complice » ;
que « Daniel A...est le signataire de la convention passée le 26 février 2003 entre la ville de Saint-Brieuc et la société A.C. consultants sud-ouest dont il est le directeur général » ;
qu'« il est donc nécessairement le détenteur de ce contrat, conclu à l'issue d'échanges de lettres et de courriers électroniques qu'il avait eu personnellement avec les services compétents de la mairie de Saint-Brieuc » ;
qu'« étant convenu avec Christian Z...de ce que A.C. consultants ne soumissionnerait pas et ne percevrait pas la commission habituelle en raison du risque de « conflit d'intérêts entre les fonctions d'élu de Christian Z...et ses fonctions de dirigeant de société et ayant exactement suivi, dans la seconde détermination du prix, les indications de Christian Z...malgré l'importance de la baisse, il ne pouvait ignorer que l'opération était destinée à fausser, au profit de la société, la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans le marché public » ;
que « le délit de recel dont il est prévenu est donc établi » ;
qu'« en obtenant de Serge D... dans des conditions sus-énoncées les informations relatives aux montants des premières propositions et en exploitant ces renseignements pour dicter à Daniel A...le niveau auquel il devait baisser son prix, Christian Z...a fourni au dirigeant de la société A.C. consultants sud-ouest l'aide et l'assistance qui lui ont permis d'obtenir le marché et, par voie de conséquence, de commettre le délit de recel dont il s'est rendu coupable » ;
que « la complicité de recel doit donc être également retenue à l'encontre de Christian Z...» ;
" 1) alors que l'article 1er du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à la cause, se bornait à fixer les objectifs généraux recherchés par les rédacteurs de ce code dont la méconnaissance ne pouvait caractériser le délit de favoritisme ; que l'article 28 du même code, dans sa rédaction applicable, précisait expressément que les marchés dont le montant est inférieur à 90 000 euros étaient sans formalité ; qu'à défaut pour ce texte de prévoir aucune obligation précise, l'infraction de favoritisme ne pouvait être retenue en l'espèce, le marché ayant été passé pour un prix de 5 850 euros ;
" 2) alors qu'à tout le moins, le délit de favoritisme suppose la conscience d'accomplir un acte favorisant un candidat ; que l'article 1er du code des marchés publics prévoit que le responsable du marché doit choisir l'offre qui est économiquement la plus avantageuse ; que faute d'avoir recherché, comme il lui était demandé si l'offre de la société A.C.C. qui était la moins disante, n'était pas économiquement la plus avantageuse, ou si, dès lors que le marché n'était soumis à aucune formalité particulière, Elisabeth Y...avait pu légitimement considérer que l'offre de cette société était économiquement la plus avantageuse, étant la moins disante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3) alors qu'en tout état de cause en l'espèce la cour d'appel a retenu que le délit de favoritisme résultait du fait d'avoir attribué le marché pour faire plaisir à un ami politique et a déduit la complicité de Christian Z...du fait pour ce dernier d'avoir demandé à Daniel A...de baisser le prix de sa seconde offre faite à la ville de Saint-Brieuc ; qu'à défaut d'avoir constaté que, contrairement aux conclusions des prévenus, l'adjointe au maire connaissait les conditions dans lesquelles le prix proposé par A.C.C avait été modifié, et donc qu'elle avait en connaissance de cause utilisé cette aide, la cour d'appel n'a pu caractériser la complicité par aide et assistance ;
" 4) alors qu'en outre le complice doit participer à la réalisation de l'infraction principale ; que l'article 432-14 réprime le fait pour un acheteur public de fausser la libre concurrence et n'incrimine pas le fait pour toute autre personne de fausser la concurrence ; que le seul fait pour le Christian Z...d'avoir obtenu des informations sur les prix du marché ne pouvait suffire à caractériser sa participation à la réalisation du délit, ce dernier n'étant pas tenu par l'obligation d'assurer la libre concurrence et la cour d'appel n'ayant pas constaté que l'adjointe au maire savait que les prix proposés avaient été modifiés sur la base d'indiscrétions involontaires du responsable des contrats d'assurance de la mairie ;
" 5) alors qu'en outre, pour retenir le recel, les juges doivent constater la connaissance de l'origine délictuelle ou criminelle de la chose recelée ; que la cour d'appel qui a jugé que le favoritisme résultait du fait d'avoir attribué le marché à la société A.C.C. pour faire plaisir à un ami politique n'a cependant nullement constaté que Daniel A...avait eu connaissance des conditions dans lesquelles le marché avait été passé et partant, faute d'avoir relevé sa connaissance du favoritisme, n'a pu caractérisé le recel ;
" 6) alors qu'au demeurant, selon l'article 321-1 du code pénal, le recel résulte d'actes postérieurs à la commission de l'infraction dont provient la chose recelée ; que, par conséquent, la complicité de recel suppose également un acte postérieur à l'infraction dont provient la chose prétendument recelée ; qu'en déclarant Christian Z...complice de recel de favoritisme, pour avoir indiqué à quel prix le directeur de la société devait proposer une seconde offre, la cour d'appel qui a, ce faisant, relevé un acte antérieur à la commission de l'infraction principale, n'a pu mettre en évidence une complicité de recel ;
" 7) alors qu'enfin, en retenant que Christian Z...était complice de recel dès lors qu'il avait indiqué à Daniel A..., dirigeant de la société candidate à l'attribution du marché public, qu'il fallait qu'il modifie le prix qu'il proposait pour sa prestation, la cour d'appel n'a caractérisé qu'un acte tendant à l'obtention d'un marché public, mais pas un acte tendant à permettre la détention, la dissimulation ou la transmission d'une chose provenant d'une infraction, en connaissance de cause, dès lors que le favoritisme ne résultait pas de ce fait " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'en prévision du renouvellement de ses contrats d'assurance la commune de Saint-Brieuc a lancé un appel d'offres pour choisir un prestataire de service chargé d'effectuer un audit des besoins, élaborer un cahier des charges, consulter les sociétés d'assurances intéressées et évaluer leurs propositions ;
qu'une convention a été signée entre la ville, représentée par Elisabeth X..., maire-adjoint, et la société A.C. consultants sud ouest, dont le gérant est Daniel A..., portant sur un coût total de 5 850 euros ; qu'une enquête ordonnée à la suite des protestations d'un candidat évincé a révélé que le cabinet A.C. consultants sud-ouest, qui avait initialement transmis une offre à 9 000 euros, avait ensuite revu celle-ci à la baisse lors d'une seconde consultation, et présenté l'offre moins disante à 5 850 euros qui avait été retenue ;
qu'il est apparu que Christian Z..., exerçant la profession de consultant en assurances et, par ailleurs, président de la communauté d'agglomération de Saint-Brieuc, qui avait créé, en 1998, la société A.C. consultants sud-ouest et avait ensuite contribué à la création d'A.C. consultants sud-ouest, avait informé Daniel A..., gérant de cette dernière société, de ce que la première offre présentée ne se situait pas dans le prix du marché et lui avait répercuté une fourchette de prix qu'il avait obtenue lors d'un entretien téléphonique avec un fonctionnaire chargé de ce dossier à la mairie de Saint-Brieuc ;
que l'enquête a également révélé que, bien que mise en garde par le directeur général adjoint des services et le directeur des affaires juridiques de la ville de Saint-Brieuc sur la manoeuvre suspecte de la société A.C. consultants sud-ouest et sur le risque de choisir celle-ci compte tenu des fonctions électives exercées par Christian Z..., Elisabeth X...avait décidé de passer outre ces avis ;
Attendu que, pour déclarer cette dernière coupable d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics, Christian Z...coupable de complicité et complicité de recel et Daniel A...coupable de recel, l'arrêt infirmatif attaqué énonce que les dispositions figurant à l'article 1er I du code des marchés publics, alors applicables, qui édictent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, concernent tous les marchés publics sans opérer de distinction entre ceux qui, compte tenu de leur montant, sont passés sans formalités préalables et ceux qui sont soumis à un tel formalisme ;
que les juges ajoutent qu'Elisabeth X...a reconnu avoir pris sa décision d'attribuer le marché à la société A.C. consultants sud-ouest non pas en fonction de critères objectifs de choix découlant des propositions faites par les candidats mais pour " faire plaisir " à un tiers avec lequel elle entretenait des relations d'amitié et qu'en procédant ainsi, elle a porté atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats et procuré un avantage injustifié à la société A.C. consultants sud-ouest ; que, par ailleurs, les juges retiennent que Christian Z..., en obtenant des services municipaux les prix des premières offres et en indiquant à Daniel A...le montant auquel il devait fixer le prix de son offre lors de la seconde consultation, a facilité, par aide et assistance, la préparation et la commission des délits de favoritisme et de recel ;
qu'enfin, ils relèvent que Daniel A..., qui a suivi lors de sa seconde offre, les indications qui lui avaient été données, ne pouvait ignorer que l'opération était destinée à fausser, au profit de sa société, la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans ce marché public et qu'il s'est ainsi rendu coupable de recel ; Attendu qu'en cet état, et dès lors que la méconnaissance de l'article 1er du code des marchés publics, dans sa rédaction issue du décret du 7 mars 2001, qui s'appliquait à tous les marchés publics, quel que soit leur montant, entre dans les prévisions de l'article 432-14 du code pénal, la cour d'appel, qui a caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.