Cass. crim., 14 décembre 2011, n° 11-82.854
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louvel
Rapporteur :
Mme Labrousse
Attendu que, pour écarter l'argumentation de la partie civile prise du fractionnement illicite des marchés entre les différents établissements locaux de formation dépendant du centre national de la fonction publique territoriale, l'arrêt énonce que chaque établissement local, étant spécialisé dans la formation de publics différents, a des besoins spécifiques qui doivent être évalués au niveau local et non national ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il se déduit que les marchés passés par chacun des établissements locaux constituaient des opérations de service distinctes au sens de l'article 27 du code des marchés publics alors applicable, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1er du code des marchés publics et 432-14 du code pénal ;
Attendu que le moyen, qui se borne à reprendre l'argumentation que, par une motivation exempte d'insuffisance comme de contradiction, la chambre de l'instruction a écarté à bon droit, ne saurait être accueilli ;
Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 432-14 du code pénal ;
Vu ledit article, ensemble l'article 121-3, alinéa 1, du même code ;
Attendu que l'élément intentionnel du délit de favoritisme est caractérisé par l'accomplissement, en connaissance de cause, d'un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 8 octobre 2003, l'école nationale d'application des cadres territoriaux de Nancy a lancé une procédure d'appel d'offres pour le recrutement de formateurs professionnels devant assurer des modules d'enseignement pour des cadres de la fonction publique territoriale ; que le règlement de la consultation prévoyait cinq critères de sélection classés selon leur ordre d'importance ; qu'aucune des offres déposées par le groupement X...-Y... n'a été retenue ; que, par jugement en date du 23 mai 2006, le tribunal administratif de Nancy a annulé l'attribution de ces marchés au motif que lors de l'examen des offres des différents candidats, la commission locale n'avait pas procédé à un classement de ces derniers en fonction des critères précités mais s'était fondée sur la seule qualité de la réponse pédagogique et le prix des interventions, sans expliciter les éléments pris en compte pour apprécier le premier critère ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à poursuivre quiconque du chef de favoritisme, l'arrêt, après avoir relevé que l'élément matériel du délit de favoritisme était caractérisé, énonce que le délit prévu à l'article 432-14 du code pénal suppose que soit établi un élément intentionnel, qui se définit comme l'intention de nuire ; que les juges ajoutent que si des maladresses et des dysfonctionnements se sont produits au regard des critères de choix, il ne résulte d'aucun élément de l'information que les membres de la commission aient été animés d'une telle intention de nuire au groupement X...-Y... et qu'ils aient de manière délibérée et frauduleuse évincé ce dernier pour privilégier un autre candidat ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe susénoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, en date du 27 janvier 2011, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Metz, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.