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Décisions

Cass. crim., 18 décembre 2019, n° 19-81.724

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soulard

Rapporteur :

Mme Planchon

Avocat général :

M. Petitprez

Avocats :

SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Piwnica et Molinié

Nîmes, du 17 janv. 2019

17 janvier 2019


1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

"Les dispositions de l'article 432-14 du code pénal, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, en ce qu'elles laissent partiellement au pouvoir réglementaire la faculté de déterminer les éléments constitutifs du délit de favoritisme et en ce qu'elles permettent que le délit soit caractérisé même en l'absence de manquement à une règle particulière, méconnaissent-elles les articles 4, 5, 6, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 34 et 37 de la Constitution relatifs au principe de légalité des délits et des peines et l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et de prévisibilité de la loi ?"

2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux.

5. En effet, l'article 432-14 du code pénal en vigueur à la date des faits reprochés à M. Y... définit le délit de favoritisme comme le fait, pour l'une des personnes visées par ce texte, de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public.

6. Il résulte de cette définition que l'élément matériel de cette infraction est constitué par un acte consistant à octroyer un avantage injustifié, contraire, notamment, aux dispositions contenues dans le code des marchés publics lesquelles, aux termes de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ne mettent en cause ni les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales, ni aucun autre principe ou règle que la Constitution place dans le domaine de la loi, et sont de nature réglementaire (Décision n° 64-29 L. du 12 mai 1964 ; Décision n° 2003-195 L. du 22 mai 2003).

7. Il résulte également de cette définition, et conformément à une jurisprudence constante de la Cour de cassation (Crim., 28 janvier 2004, n° de pourvoi 02-86.597, Bull. crim. 2004 n°23), que toute réforme des dispositions régissant les marchés publics est sans incidence sur la définition même du délit de favoritisme, l'article 432-14 du code pénal, support légal de l'incrimination, n'étant pas modifié.

8. Par ailleurs, le législateur a limité les règles dont la violation est susceptible d'être à l'origine du délit de favoritisme à celles qui ont pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public, parmi lesquelles figure l'article 1er du code des marchés publics en vigueur à la date des faits reprochés au demandeur, qui énonçait que l'ensemble des marchés prévus par ce code étaient soumis à ces principes.

9. En conséquence, le législateur ayant défini lui-même les caractéristiques essentielles du comportement fautif de nature à engager la responsabilité pénale, et la modification des dispositions réglementaires n'étant pas de nature à influer sur la définition du délit de favoritisme, lesdites dispositions étant, à l'époque des faits, contenues dans le code des marchés publics, l'article 432-14 du code pénal ne porte pas atteinte aux principes de légalité et des peines et de prévisibilité de la loi.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.