Cass. com., 16 décembre 2008, n° 07-18.513
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bouzidi et Bouhanna
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Aix-en-Provence, 16 mai 2007), que M. X..., dirigeant de la société Institut Villa (la société), mise en redressement judiciaire le 10 janvier 2001 puis en liquidation judiciaire le 1er octobre 2001, M. Y... étant désigné liquidateur, a été condamné au paiement de l'insuffisance d'actif en application de l'article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et qu'une mesure d'interdiction de gérer a été prononcée à son égard en application des articles L. 625-5, 5°, L. 625-4 et L. 624-5, 4°, du même code ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir statué ainsi, alors, selon le moyen :
1°/ que tant M. X... que M. Y... affirmaient que le premier avait perçu une rémunération annuelle de 319 470 francs ; qu'en retenant dès lors, pour caractériser l'intérêt personnel qu'aurait eu M. X... à poursuivre l'exploitation déficitaire de la société, que ce dernier aurait reçu, à titre de rémunération pour l'année 2000, une somme de 319 470 euros, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que M. X... soulignait, dans ses conclusions, qu'après avoir augmenté, en 1998, le capital de la société de 150 000 francs et avoir, au cours de cette même année, apporté à cette entreprise une somme de 2 000 000 francs en compte courant, il avait procédé en 2000 à une nouvelle augmentation de capital de la société à hauteur de 167 336 francs ; qu'en affirmant que M. X... avait poursuivi, à compter de l'année 1999, une activité déficitaire dans un intérêt personnel, sans répondre à ce moyen qui faisait apparaître que le dirigeant avait investi des sommes importantes lors de la poursuite de l'activité, s'exposant ainsi à les perdre, ce qui excluait ou limitait considérablement l'intérêt personnel dans lequel il avait pu agir, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que ne commet pas de faute de gestion, le dirigeant qui poursuit une activité déficitaire dès lors qu'il adopte les mesures susceptibles de remédier à cette situation et est fondé à croire qu'existent de sérieuses perspectives de redressement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que les difficultés financières rencontrées par la société provenaient d'événements précis et passagers liés à la destruction du village d'exposition dans lequel était située sa villa d'exposition et à la perte de sa garantie de livraison ; que la cour d'appel a encore relevé que le dirigeant de cette société, M. X..., s'était employé à résoudre les difficultés auxquelles la société se trouvait confrontée à raison de faits extérieurs ; que l'arrêt précise enfin que cette société avait fait l'objet d'une période d'observation, décidée à la suite de la déclaration de cessation des paiements, pendant plus de huit mois ; qu'en imputant néanmoins à faute à M. X... qui avait personnellement investi des sommes importantes pour sauvegarder son entreprise, d'avoir poursuivi l'activité déficitaire de la société sans rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si le gérant n'était pas fondé à croire qu'existaient des perspectives de redressement dès lors que les efforts qu'il avait déployés avaient permis d'obtenir une nouvelle garantie et de maintenir sa villa d'exposition dans un site rétabli, désormais commercialement attractif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 624-3 du code de commerce ;
4°/ que M. X... faisait valoir, en s'appuyant sur le bilan arrêté au 30 juin 2000, produit aux débats et visé dans ses conclusions, que le premier semestre de cette année laissait apparaître un bénéfice de 39 938 francs ; qu'en reprochant à M. X... d'avoir poursuivi une activité déficitaire en l'état de la baisse très importante de chiffre d'affaires enregistrée en 1999 , sans répondre à ce moyen qui faisait apparaître qu'à la fin du premier semestre 2000 des perspectives de bénéfice s'offraient à la société, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que la condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif en application de l'article L. 624-3 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises n'étant pas subordonnée à la démonstration de la poursuite par le dirigeant de la satisfaction d'un intérêt personnel, les deux premières branches du moyen sont inopérantes à critiquer la condamnation de M. X... sur ce fondement ;
Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel, après avoir relevé qu'au cours de l'année 2000, M. X... avait continué à être rémunéré pour ses fonctions de gérant, ce qui n'était pas contesté, et que son fils également associé avait perçu une somme de 87 811 francs, a pu en déduire que c'était dans un intérêt personnel que M. X... avait poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a répondu en les écartant aux conclusions prétendument délaissées, a légalement justifié sa décision de prononcer à l'égard de M. X... une interdiction de gérer ;
Attendu, en dernier lieu, qu'ayant relevé, par motifs adoptés, que dès 1998 la société avait clôturé ses exercices par des déficits, et par motifs propres, que le chiffre d'affaires avait connu une baisse très importante en 1999 et que tout redressement s'était avéré impossible au cours de l'année 2000 compte tenu de la rupture d'activité intervenue au cours du mois de juillet 2000 consécutive à la dénonciation de la garantie de livraison et de l'état de cessation des paiements réalisé dès septembre 2000, la cour d'appel a procédé à la recherche mentionnée à la troisième branche et légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.