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Décisions

CA Nîmes, 2e ch. A, 17 novembre 2022, n° 21/01622

NÎMES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Le Sanglier (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dampfhoffer

Conseillers :

Mme Mallet, Mme Huet

Avocats :

Me Monroux, Me Pomies Richaud, Me Vajou, Me Jourdan

TJ Carpentras, du 12 janv. 2021, n° 19/0…

12 janvier 2021

EXPOSE DU LITIGE

M. [X] [E] expose qu'il a prêté, le 30 septembre 2013, par le biais d'un chèque bancaire, la somme de 30 000 euros à la SNC [B] et Cie, devenue la SNC Le Sanglier, alors constituée par Mme [G] [I] divorcée [S] et M. [D] [B], celui-ci ayant dans ce cadre signé une reconnaissance de dette en sa qualité de gérant de la SNC [B] et Cie.

Par un jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 13 novembre 2013, la SNC [B] et Cie a été mise en redressement judiciaire.

Le 13 janvier 2014, selon acte authentique électronique, Mme [C] [A] a fait un apport à la société [B] et Cie et a été agréée comme nouvelle associée.

Par suite de cette augmentation de capital, par jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 12 novembre 2014, un plan de continuation a été arrêté au profit de la SNC [B] et Cie.

Par acte authentique du 25 novembre 2015, M. [D] [B] et Mme [I]-[S] ont procédé à la vente des parts qu'ils détenaient dans le capital social de la SNC [B] et Cie à M. [R] [N].

M. [D] [B] et Mme [I]-[S] sont ainsi remplacés par M. [R] [N], gérant de la société SNC [B] et Cie et par Mme [C] [A].

Faisant valoir que toute démarche amiable est demeurée vaine pour obtenir le remboursement de la somme prêtée, M. [E] a, par acte d'huissier du 6 septembre 2018, saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Carpentras, lequel a, par ordonnance du 10 octobre 2018, au visa de l'article 809, alinéa 2 du code de procédure civile, dit n'y avoir lieu à référé et rejeté ses demandes aux motifs notamment qu'il ne justifiait pas avoir déclaré sa créance au passif de la SNC [B] et Cie, que la mise en cause personnelle des associés de la SNC [B] et Cie justifiait un débat sur le fond et ne pouvait prospérer devant la juridiction des référés dans la mesure où la reconnaissance de dette avait été souscrite au nom de la société, et qu'il existait une difficulté sérieuse sur la validité de la créance revendiquée.

M. [X] [E] a, par acte délivré le 2 mai 2019, fait assigner, devant le tribunal judiciaire de Carpentras, la SNC [B] et Cie, devenue la SNC Le Sanglier ainsi que Mme [G] [I]-[S] et M. [D] [B] afin d'obtenir la condamnation conjointe et solidaire de la SNC [B] et Cie devenue SNC Le Sanglier, prise en la personne de son représentant légal en exercice, M. [R] [N] en sa qualité de gérant, et de Mme [C] [A] en sa qualité d'associée, M. [D] [B] et Mme [G] [I]-[S] au paiement sous astreinte de la somme de 30 000 euros au titre du remboursement du prêt, assortie des intérêts légaux, la somme de 10 000 euros en réparation de ses préjudices, et la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par jugement réputé contradictoire du 12 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Carpentras a statué comme suit :

- condamne solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 30.000 euros,

- condamne solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] aux dépens,

- condamne solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejette les autres demandes.

Par déclaration du 23 avril 2021, M. [B] et Mme [I] divorcée [S] ont relevé appel de ce jugement.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 16 août 2022, auxquelles il est expressément référé, M. [D] [B] et Mme [G] [I] divorcée [S] demandent à la cour de :

A titre principal :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Carpentras le 12/01/2021,

Vu l'article 2224 du code civil,

Vu l'article 122 code de procédure civile,

Vu l'article 803 alinéa 1 du code de procédure civile,

- révoquer l'ordonnance prévoyant la clôture de l'instruction au 25 mai 2022 pour cause grave,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel relevé à l'encontre du jugement précité,

- prononcer la prescription de l'action de M. [E] [X],

- infirmer totalement le jugement du 12/01/2021 précité,

- débouter M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier de toutes leurs fins, dires et conclusions présentées à l'encontre de M. [B] [D] et de Mme [I] [G] divorcée [S],

- condamner solidairement M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile au profit de M. [B] [D] et de Mme [I] [G] divorcée [S],

- condamner solidairement M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier au paiement des dépens de première instance et d'appel,

A titre subsidiaire :

Vu le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Carpentras le 12/01/2021,

Vu l'article 1858 du code civil,

Vu les articles L 221-1, L 622-26, L 622-28, L 626-11, L 631-14 et L 631-20 du code de commerce,

Vu l'article 803 alinéa 1 du code de procédure civile,

- révoquer l'ordonnance prévoyant la clôture de l'instruction au 25 mai 2022 pour cause grave,

- déclarer recevable et bien fondé l'appel relevé à l'encontre du jugement précité,

- déclarer infondée l'action de M. [E] [X],

- infirmer totalement le jugement précité,

- débouter M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier de toutes ses fins, dires et conclusions présentées à l'encontre de M. [B] [D] et de Mme [I] [G] divorcée [S],

- condamner solidairement M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile au profit de M. [B] [D] et de Mme [I] [G] divorcée [S],

- condamner solidairement M. [E] [X] et la SNC Le Sanglier et au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel.

Les appelants font valoir :

- que la seconde attestation de Mme [T] datée du 10 août 2022 qu'ils communiquent constitue une cause grave justifiant la révocation de l'ordonnance de clôture du 25 mai 2022,

- que la reconnaissance de dette du 30 septembre 2013 est une dette de la SNC [B] et Cie, M. [B] ayant contracté en qualité de gérant de ladite société, et la dette figurant dans le Grand Livre Journal de la SNC [B] et Cie,

- que M. [E], au moment de la remise de la somme de 30 000 euros, connaissait parfaitement la situation économique difficile de la SNC [B] et Cie, comme en attestent des témoins,

- que le point de départ de l'action en remboursement de la somme de 30 000 euros à leur encontre n'est pas la date de la cession du fonds de commerce Bar Tabac Le Sanglier, mais la date de la signature de la reconnaissance de dette et de la remise simultanée de la somme de 30 000 euros le 30 septembre 2013,

- que l'action en référé du 6 septembre 2018 de M. [E] à leur encontre n'a pu interrompre la prescription en ce que l'ordonnance du 10 octobre 2018 a rejeté la demande de celui-ci,

- que l'action au fond engagée par M. [E] en date du 2 mai 2019 est prescrite en application de l'article 2224 du code civil et qu'il en est de même si la dette n'est pas une dette de la SNC [B] et Cie mais une dette de M. [B] et de Mme [I],

- à titre subsidiaire, qu'ils peuvent se prévaloir du principe de l'inopposabilité au débiteur des créances non déclarées dès lors qu'ils ne sont pas des coobligés mais des débiteurs subsidiaires, M. [E], n'ayant pas déclaré sa créance, alors qu'il connaissait les difficultés économiques de la SNC [B] et Cie,

- que M. [E] ne justifiant pas de vaine poursuite à l'encontre de la SNC [B] et Cie, il ne peut leur demander la condamnation au paiement de la somme de 30000 euros au titre du prêt consenti,

- que les préjudices moraux et financiers invoqués par M. [E] ne sont pas liés à leur attitude mais soit à l'imprudence de celui-ci, soit à d'autres causes.

Dans ses dernières conclusions formant appel incident remises et notifiées le 17 mai 2022, auxquelles il est expressément référé, M. [X] [E] demande à la cour de :

Vu les pièces communiquées sous bordereau annexé aux présentes,

Statuant sur l'appel formé par Mme [G] [I] et M. [D] [B], à l'encontre du jugement prononcé le 12 janvier 2021,

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

* condamné solidairement et conjointement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 30 000 euros,

* condamné solidairement et conjointement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] aux dépens,

* condamné solidairement et conjointement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* rejeté les autres demandes de M. [E] à l'égard de la SNC Le Sanglier.

Et statuant à nouveau :

Au principal :

- condamner conjointement et solidairement, la SNC [B] et Cie devenue SNC Le Sanglier prise en la personne de son représentant légal en exercice, M. [N] [R] en sa qualité de gérant, et Mme [C] [A] en sa qualité d'associée à payer à M. [E] [X] :

' la somme de 30 000 euros au titre de remboursement du prêt, assortie des intérêts légaux, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

' la somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudices moraux et financiers,

' la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- débouter Mme [G] [I] et M. [D] [B], la SNC Le Sanglier de toutes leurs demandes, fins et prétentions les plus amples ou contraires, et de tout appel incident.

Subsidiairement :

Si la cour ne retenait pas la responsabilité de la SNC Le Sanglier, alors il convient de :

- condamner conjointement et solidairement M. [B] [D] et Mme [G] [I] / [S], pris en leur personne respective, à payer à M. [E] [X] :

' la somme de 30 000 euros au titre de remboursement du prêt, assortie des intérêts légaux, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

' la somme de 10 000 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudices moraux et financiers,

' la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- assortir lesdites condamnations d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir,

- débouter Mme [G] [I] et M. [D] [B], la SNC Le Sanglier de toutes leurs demandes, fins et prétendions les plus amples ou contraires,

- condamner solidairement et conjointement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

- condamner conjointement et solidairement M. [B] [D] et Mme [G] [I] / [S], aux entiers dépens de l'instance, frais de signification et d'exécution.

M. [E] fait valoir :

- que la reconnaissance de dette stipule que la SNC [B] et Cie a bien reçu par l'intermédiaire de son gérant la somme de 30 000 euros, de sorte que cette somme n'a pu être versée que sur le compte de la SNC, et que la responsabilité de celle-ci ne peut être écartée,

- que M. [B] et Mme [I] [S], ayant cédé la totalité de leur part, ont vendu le fonds de commerce « Bar Tabac Le Sanglier », et qu'en conséquence, le remboursement du prêt aurait dû être effectué,

- que l'obligation à la dette à laquelle le nouvel associé est tenu s'étend à toutes les dettes contractées par la société, qu'elles soient nées antérieurement ou postérieurement à son arrivée,

- que la SNC [B] et Cie ayant été cédée à la SNC Le Sanglier, cette dernière doit être condamnée à lui rembourser la somme de 30000 euros au titre du remboursement du prêt dès lors qu'il est très peu probable que les consorts [N]/[A] n'aient pas été au courant dudit prêt, le repreneur devant étudier les différentes comptabilités antérieures à la cession des parts avant de reprendre un fonds de commerce,

- que M. [B], ne l'ayant pas informé de la mise en redressement judiciaire de la SNC, ne lui a pas permis de déclarer sa créance, de sorte qu'après l'avoir vainement mis en demeure de rembourser le prêt, il engage sa responsabilité à son égard,

- que la SNC [B] et Cie ne respectant pas ses obligations au titre du remboursement du prêt et ayant un comportement constitutif d'une résistance abusive, il a subi un préjudice financier consistant en une perte de revenus dès lors qu'il a dû effectuer un prêt personnel de 7000 euros, ainsi qu'un préjudice moral ayant dû suivre des entretiens psychologiques.

En réplique aux conclusions adverses, il soutient :

- sur la prescription de l'action, que selon la volonté des parties, le remboursement de la dette intervient à la vente du commerce, soit le 3 décembre 2015 au moment où est intervenu un changement de dirigeant, mais qu'il n'a pas connu ce changement de dirigeant et l'épuration des dettes, et que quand bien même cette date serait retenue, il a interrompu le délai de prescription par la saisine du juge des référés du tribunal de Carpentras le 6 septembre 2018, même si le juge s'est déclaré incompétent au profit du juge du fond,

- sur le défaut de déclaration de créance, qu'il est inexpérimenté en matière de procédures collectives, qu'il appartenait à la SNC [B] et Cie de déclarer la créance et que le gérant M. [B] étant au courant de la dette, la SNC [B] et Cie ne peut invoquer l'inopposabilité de la déclaration de créance,

- sur le défaut de vaine poursuite, qu'il a sollicité M. [B], à plusieurs reprises, qu'il a envoyé des courriers recommandés tant au mandataire qu'aux associés et que l'assignation en référé ou au fond équivaut à une mise en demeure,

- sur les préjudices financiers et moraux, qu'il ne peut lui être reproché d'avoir été imprudent alors qu'il s'agirait plutôt d'une escroquerie de la part de M. [B], que s'il n'avait pas prêté cette somme à la SNC [B] et Cie, il n'aurait pas eu besoin d'emprunter, qu'il perçoit une pension de retraite à hauteur de 1600 euros, avec auparavant des revenus modestes, et qu'il a dû avoir un suivi psychologique,

- que les consorts [B] reconnaissent l'existence d'une dette de la SNC [B] et Cie et que celle-ci figure dans le Grand Livre Journal de la SNC [B] et Cie,

- que l'attestation de Mme [T] doit être rejetée en ce qu'elle est ambiguë,

- que la reconnaissance de dette indiquant que M. [B] agit en qualité de gérant de la personne morale ne peut être qu'une dette sociale, et peu importe qu'aucune assemblée générale de la SNC n'ait précédé la reconnaissance de dette,

- que la cession des parts sociales équivaut à la vente du fonds de commerce, que la somme de 30 000 euros a été enregistrée dans la comptabilité de la SNC, de sorte qu'elle était au courant de cette créance et qu'elle ne l'a pas déclarée.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 25 mai 2022, auxquelles il est expressément référé, la SNC Le Sanglier demande à la cour de :

Vu les articles L. 210-1 et L. 721-3 du code de commerce,

Vu l'article L. 622-24 du code de commerce,

Vu l'article L. 622-26 alinéa 2 du code de commerce,

Vu l'article L. 221-1 du code de commerce,

Vu les pièces annexées,

- confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Carpentras du 12 janvier 2021 en toutes ses dispositions,

- débouter M. [E] de sa demande de condamnation à l'encontre de la SNC Le Sanglier, mais également à l'encontre de M. [N] et de Mme [A],

- condamner solidairement M. [B] et Mme [I] [S] au paiement de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement M. [B] et Mme [I] [S] aux entiers dépens.

La SNC Le Sanglier fait valoir :

- que la somme versée par M. [E] a été prêtée à M. [B] à titre personnel et que la créance de M. [E] ne peut être reconnue comme une dette sociale dès lors qu'il n'est pas rapporté la preuve que M. [B] et Mme [I] ont donné leur autorisation lors d'une assemblée générale de la SNC Le Sanglier,

- que M. [E] n'a jamais déclaré sa créance au passif de la société dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement conformément à l'article L. 622-24 du code de commerce, de sorte que la créance est forclose,

- que M. [B] et Mme [I] [S] ayant dissimulé cette dette, ils se sont rendus coupables de dol,

- qu'aucune condamnation ne pourra être prononcée à l'encontre de M. [N] et de Mme [A] dès lors qu'ils n'ont pas été mis en cause,

- que l'événement déterminant le remboursement, à savoir la cession de fonds de commerce, ne s'étant pas réalisé, la demande de remboursement des sommes dues par la SNC Le Sanglier doit être rejetée.

Il est fait renvoi aux écritures des parties pour plus ample exposé des éléments de la cause, des prétentions et moyens des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction de la procédure est intervenue le 25 mai 2022.

L'affaire a été retenue à l'audience en date du 12 septembre et mise en délibéré au 17 novembre 2022.

MOTIVATION

Sur la demande de révocation de la clôture :

M. [B] et Mme [S] sollicitent la révocation de l'ordonnance de clôture. Ils affirment avoir pris connaissance de l'attestation de Mme [T] que le 10 août 2022 et souhaitent voir révoquer l'ordonnance de clôture afin de pouvoir verser aux débats cette attestation.

Les autres parties ne se sont pas opposées à la révocation de l'ordonnance de clôture.

En vertu de l'article 803 alinéa 1 du code de procédure civile, il y a lieu de révoquer l'ordonnance de clôture.

Sur la prescription soulevée :

La SNC Le Sanglier soutient en appel au visa de l'article 2224 du code civil, que l'action se prescrit par 5 ans, et qu'ainsi l'action de M. [E] serait prescrite, le point de départ de celle-ci étant au jour du prêt et non au jour de la vente des parts sociales.

Réponse de la cour :

La reconnaissance de dette précise que le remboursement de la somme de 30 000 euros sera exigible à la vente du commerce. Il ressort ainsi de la volonté des parties que la vente du fonds de commerce est l'événement emportant l'exigibilité du remboursement du prêt.

C'est donc à compter de la vente des parts sociales que débute la prescription et non à la date de l'établissement de la reconnaissance de dette.

La vente des parts sociales du fonds de commerce ayant eu lieu le 25 novembre 2015 et l'assignation au fond ayant été intentée le 2 mai 2019, M. [E] n'était pas prescrit en son action.

Sur la nature de la créance :

La SCI Le Sanglier prétend que M. [B] ne s'est pas engagé en qualité de gérant de la SNC [B] et Cie, mais à titre personnel.

Réponse de la cour :

La reconnaissance de dette est ainsi libellée :

« Je soussigné [B] [D], gérant de la SNC [B] et CIE avoir reçu de Monsieur [E] [X], la somme de trente mille euros (30 000 euros) par chèque bancaire du Crédit Mutuel n° 588 1026, daté au 30 septembre 2013.

Cette somme sera rendue à Monsieur [E] [X] à la vente du commerce Bar Tabac Le Sanglier avec les intérêts calculés au jour du remboursement.

Fait pour valoir ce que de droit. '. » .

M. [E] [X] verse aux débats un relevé bancaire qui démontre que ledit chèque a été encaissé le 30 septembre 2013. Le chèque bancaire d'un montant de 30 000 euros portant le numéro 5881026 était libellé à l'ordre de la SNC [B] et CIE. La dette figure dans le Grand Livre Journal de la SNC [B] ET CIE au titre de l'exercice du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 page 28 du livre.

M. [B] a signé cette reconnaissance de dette en sa qualité de gérant de la SNC.

Cette reconnaissance de dette doit s'analyser comme un acte souscrit au nom de la « SNC [B] et Cie » par son gérant, donc dans le cadre de l'activité commerciale de la SNC [B] et Cie. De par la signature du gérant de la SNC, la reconnaissance de dette devient une dette sociale. Peu importe, qu'aucune assemblée générale de la SNC n'ait acté cette reconnaissance de dette.

La juridiction de premier degré a, à bon droit, considéré qu'il s'agissait d'une dette de la société et non d'une dette personnelle de M. [B].

Sur le défaut de vaine poursuite :

M. [B] et Mme [I] soulèvent l'absence de vaines poursuites. Ils considèrent que M. [E] ne justifie pas de vaine poursuite, au sens des articles L 221-1 du code de commerce et 1858 du code civil, à l'encontre de la SNC [B] ET Cie, préalable indispensable à la poursuite des associés tenus au passif social.

Réponse de la cour :

Selon l'article L. 221-1 du code de commerce, les associés en nom collectif ont tous la qualité de commerçant et répondent indéfiniment et solidairement des dettes sociales. Les créanciers de la société ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé, qu'après avoir vainement mis en demeure la société par acte extrajudiciaire.

En l'espèce, M. [E] a envoyé de multiples courriers adressés tant au mandataire qu'aux associés, leur faisant sommation de restituer la somme de 30 000 euros entre 2017 et 2018. Il a par ailleurs, assigné en référé provision le 06 septembre 2018, les mêmes parties.

Le moyen tiré de l'absence de vaines poursuites est donc inopérant.

Sur le défaut de déclaration de créance de M. [E] dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire et l'inopposabilité de la créance à la SNC Le Sanglier

La SNC Le Sanglier argue d'un défaut de déclaration de créance de M. [E] pour affirmer que la créance lui est inopposable et demande ainsi confirmation de la décision de première instance.

Réponse de la cour :

Il est constant que la procédure de redressement judiciaire de la société SNC [B] ET Cie, devenue la SNC Le Sanglier, a été ouverte par le tribunal de commerce d'Avignon le 13 novembre 2013, et que M. [E], n'a jamais déclaré sa créance au passif de la société dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement conformément à l'article L. 622-24 du code de commerce.

M. [E] aurait, comme l'a suggéré le premier juge, donc également pu introduire une action en relevé de forclusion, conformément aux dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce devant le Juge-Commissaire puisqu'il prétendait, au terme de ses conclusions de première instance, que M. [B] avait volontairement dissimulé sa créance.

Sa créance est donc forclose à défaut d'avoir sollicité le relevé de forclusion.

C'est à juste titre, que le tribunal judiciaire de Carpentras a relevé que c'était vainement que M. [E] faisait valoir son inexpérience des procédures collectives.

Les créances non déclarées régulièrement dans les délais de l'article L. 622-26 alinéa 2 du code de commerce sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus.

C'est pertinemment que la SNC Le Sanglier argue que l'article L. 622-26 du code de commerce est parfaitement applicable en cas d'adoption d'un plan de redressement et que la Cour de cassation reconnaît bien l'application des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce en cas de redressement judiciaire mais précise également que le créancier ne recouvre son droit de poursuite à l'encontre du débiteur qu'en cas de résolution du plan de redressement.

En l'espèce, il n'y a pas eu de résolution du plan puisque la SNC Le Sanglier a apuré l'intégralité du passif déclaré et mené à terme ses engagements. En effet, par jugement du 12 novembre 2014, le tribunal de commerce d'Avignon a arrêté un plan de redressement. Par jugement du 4 janvier 2017, le tribunal de commerce d'Avignon a autorisé l'apurement par anticipation du passif de la société. Par jugement du 10 mai 2017, le tribunal de commerce d'Avignon a constaté l'apurement du passif de la société SNC [B] ET Cie, devenue SNC Le Sanglier.

Le plan de redressement a donc parfaitement été respecté et le passif a été apuré avant la date de fin du plan sur autorisation du tribunal, il y a donc bien lieu de faire application des dispositions de l'article L. 622-26 du code de commerce.

Les demandes formulées à l'encontre de la société SNC Le Sanglier lui sont inopposables.

C'est donc à juste titre que le tribunal judiciaire de Carpentras a jugé que la créance litigieuse ne pouvait pas être opposée à la SNC [B] ET Cie, devenue SNC Le Sanglier.

Sur la demande de remboursement formulée à l'encontre des anciens associés de la SNC M. [B] et Mme [I] divorcée [S]:

M. [E] considère qu'en matière de société en nom collectif, l'associé qui se retire est tenu du passif contracté antérieurement à son départ et qu'il peut solliciter le remboursement de la somme de 30 000 euros à M. [B] et Mme [I].

Réponse de la cour :

En vertu de l'article L 221-1 du code de commerce, les associés d'une société en nom collectif, ont tous la qualité de commerçant et répondent indéfiniment et solidairement de dettes sociales.

Cependant, lorsqu’une société fait l'objet d'une procédure de sauvegarde ou de redressement judiciaire, les associés (personnes physiques ou morales), peuvent se prévaloir du plan de sauvegarde ou du plan de redressement ; en effet les dispositions des articles L 626-11 et L 631-20 du code de commerce interdisant aux coobligés de se prévaloir de ces plans ne sont pas applicables aux associés car ce sont des débiteurs subsidiaires à l'égard des créanciers et non des coobligés.

Il est constant que si la société respecte les dispositions d'apurement du passif, prévues par le plan, les créanciers sociaux ne peuvent poursuivre les associés en paiement des dettes sociales.

L'inopposabilité ne peut bénéficier aux coobligés mais profite aux débiteurs subsidiaires que sont les associés en nom collectif.

En conséquence, il y a lieu d'infirmer la décision de première instance en ce qu'elle a décidé que l'inopposabilité ne pouvait bénéficier aux deux associés.

Les associés étant des débiteurs subsidiaires et non des coobligés, M. [E] ne pouvait les poursuivre en l'état de la procédure.

En conséquence, sur les autres demandes au titre du préjudice financier, moral, il y a lieu de confirmer la décision du premier juge qui a rejeté ces demandes.

Sur les frais annexes :

Vu les articles 696 et suivants du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR :

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort,

Prononce la révocation de l'ordonnance de clôture au jour des débats,

- Confirme le jugement en ce qu'il a :

- rejeté les autres demandes.

- Infirme le jugement en en ce qu'il a :

- condamné solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 30.000 euros,

- condamné solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] aux dépens,

- condamné solidairement Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B] à payer à M. [X] [E] la somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ces chefs :

- Déboute M. [X] [E] de sa demande en paiement contre Mme [G] [I] [S] et M. [D] [B]

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

Condamne M. [X] [E] aux dépens de première instance,

Y ajoutant,

- Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en appel,

- Condamne M. [X] [E] aux dépens d'appel.