CA Aix-en-Provence, ch. 3-1, 24 novembre 2022, n° 19/10051
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Venus & Apollon (SAS), De Bois Herbaut (SELARL)
Défendeur :
Dépil Tech (SAS), BG & Associes (SELARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Calloch
Conseillers :
Mme Berquet, Mme Combrie
Avocats :
Me Sider, Me Bellet, Me Perrier, Me Herbaut , Me Magnan, Me Didon
FAITS ET PROCÉDURE
Suivant acte en date du 10 novembre 2014, madame [V] a signé avec la société DEPIL TECH un contrat de franchise afin de pouvoir exploiter un centre de dépilation à la lumière pulsée et de photo-rajeunissement dans la ville de [Localité 9]. Madame [V] a versé une somme de 26 400 € au titre du droit d'entrée.
Le 10 janvier 2016, un avenant a été signé pour permettre à madame [V] d'implanter son centre non dans la ville de [Localité 9], mais dans la ville de [Localité 8]. Le centre a été exploité à partir d'octobre 2016, la société VENUS ET APOLLON se substituant à madame [V].
Par lettre recommandée datée du 25 février 2017, la société VENUS ET APOLLON par l'intermédiaire de sa gérante, madame [V], a notifié à la société DEPILTECH sa volonté de résilier le contrat et a demandé le remboursement de la somme de 26 400 €, outre divers frais par elle engagée. Elle a ensuite cessé l'exploitation du centre, la fermeture du fonds de commerce étant constatée par procès-verbal d'huissier le 4 avril 2017.
Par acte en date du 22 juin 2017, la société DEPIL TECH a fait assigner la société VENUS ET APOLLON et madame [V] devant le tribunal de commerce de NICE afin de faire juger abusive la résiliation du contrat et obtenir leur condamnation en paiement de la somme de 80 500 € au titre de dommages-intérêts et des redevances impayées, outre 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Suivant jugement du tribunal de commerce de NICE en date du 24 mai 2018, la société DEPIL TECH a été placée sous sauvegarde. Le plan de sauvegarde a été adopté par jugement en date du 27 décembre 2019, lequel a désigné la SELARL BG ET ASSOCIES en qualité de commissaire à l'exécution au plan. La société VENUS et APOLLON a en conséquence attrait à la cause la SELARL BG ET ASSOCIES par acte en date du 27 juillet 2018.
La société VENUS ET APOLLON a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de NANTERRE du 8 août 2018, la SELARL DE BOIS HERBAUT étant nommée en qualité de liquidateur. La société DEPIL TECH a déclaré sa créance et a appelé à la cause la SELARL DE BOIS HERBAUT.
Suivant jugement en date du 23 mai 2019, le tribunal de commerce de Nice a jugé la résiliation abusive et fautive et a fixé au passif de la société VENUS ET APOLLON les sommes de 15 000 € au titre des échéances non payées, jusqu'à échéance du contrat, 625 € au titre d'une échéance jusqu'à restitution du matériel, 5 098 € 40 au titre de factures impayées et 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, et a condamné solidairement madame [V] au paiement de ces sommes. Prononcé la nullité du contrat pour dol et a fixé à son passif au bénéfice de madame [V] la somme de 26 400 € en remboursement du droit d'entrée, outre 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT ont interjeté appel de la décision par déclaration enregistrée au greffe le 21 juin 2019.
Par ordonnance en date du 3 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de l'instruction et a renvoyé l'examen de l'affaire à l'audience du 10 octobre 2022.
Madame [V] et la SELARL DE BOIS-HERBAUT, par conclusions déposées par voie électronique le 29 septembre 2022, rappellent les conditions de conclusion du contrat et contestent certaines allégations factuelles de la partie adverse. Elles demandent le remboursement du droit d'entrée de 26 400 €, cette somme étant indue en l'absence de contrepartie apportée par le cocontractant.
Elles soulèvent la nullité du contrat de franchise en raison de l'absence de description fiable du marché telles qu'imposée par l'article R. 330-1 4° du code de commerce et en invoquant un dol imputable à DEPIL TECH du fait de manœuvres destinées à tromper sur la rentabilité et les perspectives du projet. Elles invoquent la responsabilité du franchiseur en invoquant notamment le nombre important de liquidations judiciaires de centres ouverts sous l'enseigne DEPIL TECH et les erreurs ou mensonges entachant les mentions du document information précontractuel fourni, notamment que le chiffre d’affaires moyen réalisé par les centres. Elles soulèvent en outre la nullité du contrat du fait de l'illécéité de l'objet du contrat lui-même à la date de signature du contrat et invoquent à nouveau sur ce point une manœuvre dolosive imputable à la société DEPIL TECH. Elles affirment notamment que la technique de la dépilation par lumière pulsée ne peut être considérée comme licite et que nombreux centres DEPIL TECH ont fait l'objet de condamnations pénales, notamment en raison de brûlures résultant de la technique proposée, pour coups et blessures involontaires ou exercice illégal de la médecine.
Madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT demandent à la cour de condamner la société DEPIL TECH des préjudices résultant de l'annulation du contrat, préjudice estimé à la somme de 152 272 € pour la société VENUS ET APOLLON et 136 393 € 16 pour madame.
Elles font observer enfin que le franchiseur n'a nullement rempli son obligation d'assistance, ce qui rendrait non fondées ses demandes au titre de la résiliation du contrat, et qu'il n'existe aucune clause de solidarité passive au contrat permettant de prononcer une condamnation personnelle à l'encontre de madame [V].
Au terme de leurs conclusions, madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT demandent à la cour de :
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- Jugé que la résiliation anticipée du contrat de franchise du fait de la SAS Vénus & Apollon est abusive et fautive,
- Débouté la SAS Vénus & Apollon de l'ensemble de ses demandes,
- Jugé en conséquence que la SAS Vénus & Apollon devait indemniser les conséquences préjudiciables de cette résiliation subies par Dépil'Tech,
- Fixé au passif de la SAS Vénus & Apollon la somme de 625 € H.T. x 24 soit 15.000 € H.T., au bénéfice de la SAS Depil Tech au titre de dommages et intérêts pour redevances non perçues suite au blocage de différents sites non exploités, ou non exploités jusqu'à échéance du contrat, suite à une rupture de contrat unilatérale de Madame [D] [V],
- Condamné solidairement Madame [D] [V] à payer cette somme de 625 € H.T. x 24, soit 15.000 € HT,
- Fixé au passif de la SAS Venus & Apollon la somme de 625 € H.T. au bénéfice de la SAS Depil'Tech au titre des redevances restant dues, de la dernière redevance facturée jusqu'à la date de restitution de la machine à lumière pulsée soit le 3 janvier 2018,
- Condamné solidairement Madame [D] [V] à payer cette somme de 625 € H.T,
- Fixé au passif de la SAS Venus & Apollon la somme de 5.098,40 € TTC au titre des six factures impayées,
- Condamné solidairement Madame [D] [V] à payer cette somme de 5.098,40 € TTC,
- Débouté la SAS Venus & Apollon et Madame [D] [V] de l'ensemble de leurs demandes reconventionnelles,
Et, statuant à nouveau :
Juger que le droit d'entrée pour l'institut de [Localité 8] n'a reçu aucune contrepartie, d'une part, et qu'il a été requis et payé avant la signature du contrat de franchise, d'autre part.
Juger que le contrat de franchise est nul pour objet et cause illicite.
Juger que le contrat de franchise est nul en raison des manœuvres dolosives dont la société Depil Tech s'est rendue coupable tant au sujet de la rentabilité du concept que de son illicéité, et qui ont vicié le consentement de Madame [V] et de la société Vénus & Apollon.
Juger que les chiffres prévisionnels transmis par Dépil'Tech sont à l'origine d'une erreur sur la rentabilité de l'activité entreprise commise par Madame [V] et la société Vénus & Apollon, erreur sur la substance qui emporte la nullité du contrat de franchise.
En conséquence :
- Prononcer la nullité du contrat de franchise ;
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 26.400 € TTC en remboursement du droit d'entrée pour l'institut de [Localité 8],
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 79.064 € HT au titre des travaux d'aménagement du local et du matériel,
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 3.808 € TTC au titre des redevances et des opérations publicitaires engagées,
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 6.500 € TTC au titre des coffrets payés,
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 16.500 € HT au titre du droit au bail,
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de la société Vénus & Apollon à hauteur de la somme de 20.000 € à titre de dommages et intérêts correspondant à la perte de chance de faire une meilleure utilisation de ses fonds,
Soit au total la somme de 152.272 €, avec intérêt de droit à compter du 10 novembre 2014, date de signature du contrat de franchise.
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de Madame [V] à hauteur de la somme de 136.393,16 € à titre de dommages et intérêts correspondant au remboursement de son compte courant d'associé qu'elle n'aurait pas investi si elle n'avait été trompée par la société DEPIL TECH, où subsidiairement à hauteur de la chance perdue de ne pas avoir englouti cette somme en pure perte, soit la somme de 109.114,52 €,
- Débouter la société Dépil Tech de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions, en ce compris de son appel incident.
- Déclarer subsidiairement irrecevables les demandes de condamnation solidaire formées par la société Dépil'Tech à l'encontre de Madame [V] personnellement, comme étant mal dirigées.
- Fixer au passif de la société Dépil Tech la créance de Madame [V] à hauteur de la somme de 12.000 € au titre des frais irrépétibles.
- Condamner la société Dépil Tech aux entiers dépens.
Par conclusions déposées par voie électronique le 30 septembre 2022, la société DEPIL TECH, la société civile professionnelle [B] [K] en qualité de mandataire judiciaire et la SELARL BG ET ASSOCIES concluent à la confirmation de la décision ayant consacré le caractère fautif de la résiliation. Elles soutiennent que cette résiliation intervenue quatre mois après l'ouverture du centre n'était motivée soit par l'impossibilité de développer l'activité, soit par le souci de profiter des apports du franchiseur. Elles concluent à l'infirmation en ce qui concerne le montant des dommages-intérêts à allouer en réparation, le tribunal ayant commis une erreur sur la date à laquelle le contrat devait prendre fin, soit le 10 novembre 2021 et non le 3 janvier 2018 comme retenu par le tribunal de commerce. Elles concluent à la confirmation de la décision ayant débouté les appelantes de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles, faisant valoir notamment que les délais de réflexion ont été respectés entre la signature du DIP et celle du contrat et excipant de son assistance fournie lors de l'installation du centre. Sur la nullité du contrat alléguée, elles soutiennent que l'activité d'épilation à la lumière pulsée par personnes n'ayant pas la qualité de médecin est parfaitement licite et ils se réfèrent pour cela à un arrêt en date du 8 novembre 2019 du Conseil d'Etat, à la jurisprudence de la présente cour et à deux arrêts qualifiés d'arrêts de principe de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation en date du 19 mai 2021. Elles affirment que madame [V] a été parfaitement informée du débat juridique existant au moment de la conclusion du contrat sur la licéité de l'activité par le document d'information précontractuelle (DIP) et sur l'application de la jurisprudence aux contrats en cours, elles se réfèrent à la motivation adoptée sur ce point par la Cour de cassation. Selon elles, le cocontractant aurait été parfaitement informé de la rentabilité de l'entreprise et des conditions de son exploitation dans le DIP, la moyenne chiffrée fournie étant exacte et madame [V] ne pouvant invoquer un manque de rentabilité en ayant exploité le centre sur une période réduite de quatre mois. Sur l'absence de production d'un état local du marché, elles font observer que l'article R. 330-1, 4° du code de commerce ne prescrit pas la production de ce document à peine de nullité et que leur intention de tromper n'est nullement démontrée. Plus subsidiairement, dans l'hypothèse d'une annulation du contrat, elles contestent la réalité et le quantum des préjudices invoqués. Elles concluent en conséquence à la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne le terme du contrat et en conséquence le montant des dommages-intérêts qui devraient être fixés à la somme de 80 500 € TTC. Elles demandent à la cour de fixer à la somme de 8 000 € le montant de l'indemnité leur revenant en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la validité du contrat de franchise
Madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT invoquent l'illécéité de l'objet de la cause des contrats de franchise en excipant des dispositions de l'article 5 2° de l'arrêté du 6 janvier 1962 et de différentes décisions judiciaires pour affirmer que la technique de l'épilation par lumière pulsée doit être considérée comme un acte médical ; force est de constater que par arrêt en date du 8 novembre 2019, le Conseil d'Etat a annulé la décision du ministre des solidarités et de la santé refusant d'abroger les dispositions de l'article 5 2° de l'arrête du 6 janvier 1962, se référant pour cela à la liberté d'établissement et à la libre prestation de services garantis par le droit de l'Union Européenne ; au vu de cette décision, et en l'absence de tout texte réglementaire régissant actuellement la matière, il convient de constater que l'activité d'épilation par lumière pulsée ne peut être en l'état considérée comme illicite ; ce caractère licite de l'activité existait au moment de la conclusion du contrat, et ce quand bien même des décisions judiciaires du juge du fond ont par la suite un moment contesté ce point ; la jurisprudence contradictoire constatée concernant la licéité de l'activité proposée par le franchiseur à des personnelles non titulaires d'un doctorat de médecine a été unifiée par la première chambre civile de Cour de cassation dans un arrêt du 19 mai 2021 versé aux débats ; cet arrêt indique expressément que la pratique par un professionnel non médecin d'épilation à la lumière pulsée n'est plus illicite et que, si elle peut être soumise à des restrictions pour des motifs d'intérêt général, elle ne justifie pas l'annulation des contrats que ce professionnel a pu conclure aux seuls motifs qu'ils concernent une telle pratique ; il ajoute que cette évolution de jurisprudence s'applique immédiatement aux contrats en cours, en l'absence de droit acquis à une jurisprudence figée et de privation d'un droit d'accès au juge ; il découle de cette dernière précision que le caractère licite du contrat doit être apprécié au moment de la signature du contrat, mais au vu des principes dégagés au jour où statue la juridiction, et ce que ce soit pour les contrats en cours d'exécution, ou pour ceux résiliés par l'une ou l'autre des parties ; il y a lieu en conséquence de rejeter le moyen tiré du caractère illicite de l'objet du contrat de franchise.
Les documents d'Informations Précontractuelles versés aux débats indiquent de manière claire les aléas juridiques liés à la pratique de l'épilation par lumière pulsée, et leur analyse selon laquelle cette pratique doit être considérée comme licite même sans recours à un docteur en médecine ; ces documents ne peuvent être qualifiés de trompeurs au vu des éléments rappelés au paragraphe précédent ; madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT ne peuvent en conséquence soutenir avoir été induites en erreur sur la licéité de l'activité, observation étant faite que les documents pré-contractuels n'éludaient pas l'incertitude juridique régnant alors sur la question.
Ce même Document d'Information Précontractuelle doit, en application de l'article L. 330-3 du Code de commerce, fournir au franchisé des informations sincères qui lui permette de s'engager en connaissance de cause ; outre les informations listées à l'article R. 330-1 du même code, il doit en conséquence fournir des éléments fiables et vérifiés concernant le marché local ainsi que des éléments comptables relatifs aux résultats concernant l'ensemble du réseau et aux investissements prévisibles à la charge du franchisé ; en l'espèce, le document remis à madame [V] comporte en ses pages 21 et 25 les comptes annuels 2011 et 2012 du centre de [Localité 7] ; il comporte la liste des centres DEPIL TECH sur le territoire national, permettant ainsi au franchisé de prendre toute information concernant la rentabilité des établissements ayant une activité similaire ; aucun élément versé aux débats ne permet d'affirmer le caractère erroné, voir mensonger de ces données chiffrées ; la société DEPIL TECH produit une attestation de son expert-comptable faisant état d'un chiffre d'affaire moyen mensuel d'un centre DEPIL TECH pour l'exercice 2014-2015 de 25 000 €, soit la moyenne annuelle indiquée en page 9 du DIP pour l'ensemble des centres, soit 300 000 € ; aucun élément ne permet de mettre en cause la régularité formelle de ce document signé par un expert-comptable ni même sa sincérité, l'attestant ne pouvant ignorer en sa qualité de professionnel du chiffre et du droit engager sa responsabilité en cas d'allégation mensongère ; s'il est avéré que comme le soutiennent les intimées certains franchisés ont connu des moyennes bien inférieures et que certains ont même été placés en redressement judiciaire, ces événements ne permettent pas d'affirmer que les chiffres moyens avancés par la société DEPIL TECH dans son document d'information et les bilans concernant une ville similaire à [Localité 9], en l'espèce [Localité 7], sont erronés et encore moins mensongers ; il apparaît ainsi que si le bilan prévisionnel présenté en page 9 du Document d'Information Précontractuelle apparaît optimiste, il ne peut être considéré comme mensonger, ni comme fondé sur des centres sans rapport aucun avec le centre proposé à madame [V] ; il sera observé en outre que sont versés aux débats de très nombreux échanges de courriels entre madame [V] et la société DEPIL TECH établissant que la franchisée a modifié le lieu géographique envisagé dans le contrat, soit [Localité 9], puis a demandé des renseignements sur le chiffre d'affaire et la rentabilité de différents centre DEPIL TECH avant de choisir de s'implanter à [Localité 8] ; ainsi non seulement madame [V] ne prouve pas que les informations données relatives à la rentabilité d'un centre situé à [Localité 9] étaient mensongers ou erronés, mais encore elle doit être considérée comme ayant été en mesure de prendre toutes les informations utiles avant de finalement choisir le lieu implantation du centre exploité grâce au contrat de franchise.
Il convient en conséquence de débouter madame [V] et la SELARL DE BOIS HERBAUT de leur demande en annulation du contrat de franchise et en paiement de dommages-intérêts liés aux conséquences de l'annulation sollicitée.
Sur la restitution du droit d'entrée et de maîtrise d'œuvre.
La société DEPIL TECH a perçu la somme totale de 26 400 € au titre de droit d'entrée et de maîtrise d'œuvre ; cette somme lui restera acquise en application de la clause VX stipulée au contrat dès lors que le contrat est jugé régulier.
Sur l'indemnité au titre de rupture abusive du contrat.
La résiliation du contrat a été notifiée par madame [V] ès qualité suivant courrier daté du 25 février 2017 invoquant quatre griefs, à savoir le caractère illégal de l'objet du contrat, l'absence de rentabilité du concept, le refus d'autoriser l'adjonction d'une nouvelle activité dans le centre et l'absence totale d'assistance, notamment la "coupure du web".
Ainsi qu'il a été rappelé plus haut, l'illégalité de l'objet du contrat ne peut être retenue ; aucun élément ne permet d'affirmer que le concept même développé par la société DEPIL TECH n'est pas rentable, observation faite que cette dernière verse aux débats des documents mettant en évidence la création de nouveaux centres, et ce malgré sa mise en redressement judiciaire ; en application de l'article VI du contrat, le franchiseur avait la possibilité d'interdire au franchisé d'exercer des activités complémentaires susceptibles de "détroneré"(sic) son activité principale, et donc le refus d'adjonction d'une nouvelle activité ne peut être jugée en soi comme abusif.
Il résulte des très nombreux échanges de courriels versés aux débats que la société DEPIL TECH a fourni une assistance dans la recherche de locaux, puis dans l'aménagement ce ceux-ci ou la présentation des dossiers de financement avant l'ouverture du centre de [Localité 8] ; aucune stipulation contractuelle n'imposait à cette société de fournir à la société DEPIL TECH un site web permettant le prospect, et au demeurant aucune pièce n'est fournie permettant de constater qu'elle aurait unilatéralement supprimer cette prestation.
Il apparaît en conséquence que les griefs invoqués par madame [V] dans son courrier de résiliation ne sont pas fondés, et que la résiliation intervenue après la signature de l'avenant du 10 janvier 2016 et le début de l'exploitation du centre en octobre 2016 est fautive.
La société DEPIL TECH reconnaît elle-même dans ses écritures que la société VENUS ET APOLLON s'est substituée à madame [V] en qualité de franchisée suite à l'avenant signé le 10 janvier 2016 (pièce DEPIL TECH 3) modifiant le lieu d'exploitation du centre ; elle a au demeurant adressé ses factures concernant notamment les redevances à la société VENUS ET APOLLON ; il convient d'en déduire que la société VENUS ET APOLLON est la seule contractante de la société DEPIL TECH et que c'est cette personne morale qui, par l'intermédiaire de sa gérante madame [V], est à l'origine de la résiliation fautive du contrat de franchise.
Le contrat de franchise originale daté du 10 novembre 2014 prévoit en son article 1.5 que si le franchisé exerce en société, la personne physique responsable de l'exploitation doit « se porter caution à l'égard du franchiseur de l'ensemble des obligations de la société » ; cependant, en l'espèce, la société DEPIL TECH ne fournit aucun acte de caution ou tout acte par lequel madame [V] se serait portée caution ou garante de la société VENUS ET APOLLON ; la caution ne pouvant être tacite, c'est à bon droit que madame [V] soutient ne pas devoir être tenue de l'indemnité due par la société VENUS ET APOLLON au titre de la résiliation fautive du contrat de franchise ; la décision de première instance sera sur ce point infirmée.
La société VENUS ET APOLLON ne conteste pas avoir conservé la cabine à lumière pulsée jusqu'au 3 janvier 2018 ; du fait de cette conservation du matériel indispensable à l'activité d'un centre, la société DEPIL TECH a perdu la possibilité jusqu'à cette date de fournir celui-ci à un autre franchisé ; c'est dès lors à bon droit que les premiers juges ont estimé le préjudice subi au montant des redevances qu'aurait dû verser la société VENUS ET APOLLON jusqu'au mois de janvier 2018 ; au-delà, la société DEPIL TECH n'a fourni aucune assistance, et ne peut invoquer de préjudice complémentaire ; la décision ayant fixé son préjudice à la somme de 15 000 € HT sera confirmée.
Le dispositif fixant au passif de la société VENUS ET APOLLON le paiement d'une somme de 625 € de la dernière redevance facturée à la date de restitution de la machine ne fait que reprendre la condamnation de cette même société VENUS ET APOLLON au paiement de la somme de 15 000 € et cette condamnation sera en conséquence infirmée.
De même, il convient de confirmer la décision ayant fixé au passif de la société VENUS ET APOLLON le montant des factures impayées avant résiliation, soit la somme de 5 098 € 40 ; en l'absence d'engagement de cautionnement, la décision ayant condamnée madame [V] sera en revanche infirmée.
Sur les demandes accessoires,
Les circonstances de l'espèce imposent en équité de ne pas faire application en cause d'appel de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société VENUS ET APOLLON, partie succombante.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
- CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de NICE en date du 23 mai 2019 en ce qu'il a fixé la créance de la société DEPIL TECH au passif de la société VENUS ET APOLLON les sommes de 15 000 € HT, 5 098 € 40 et 8 000 € et a débouté madame [V] et la société VENUS ET APOLLON de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles,
- INFIRME la décision pour le surplus.
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
- DÉBOUTE la société DEPIL TECH, la société civile professionnelle [B] [K] et la SELARL BG & ASSOCIES de leurs demandes en paiement dirigées contre madame [V].
Ajoutant à la décision déférée,
- DÉBOUTE la société DEPIL TECH, la société civile professionnelle [B] [K] et la SELARL BG & ASSOCIES ainsi que la société VENUS ET APOLLON et madame [V] de l'intégralité de leurs demandes.
- DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- MET l'intégralité des dépens à la charge de la société VENUS ET APOLLON.