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Décisions

Cass. crim., 1 décembre 2010, n° 10-80.771

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

Mme Labrousse

Avocat :

SCP Thouin-Palat et Boucard

Nancy, du 10 déc. 2009

10 décembre 2009

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de faux et usage de faux du fait de la délivrance de l'attestation du 25 mai 2003 ;

" aux motifs que l'entreprise Dubois matériaux, fournisseur de matériaux de M. Y... ayant exigé de celui-ci, avant toute livraison, un document officiel de la mairie d'Amneville, attestant que la SARL Espaces et habitats était bien titulaire d'un marché public pour la construction d'un galion espagnol, M. X... lui a remis une attestation datée du 30 juin 2003, signée de sa main, certifiant qu'un marché public de travaux d'un montant de 250 000 euros était attribué à la SARL Espaces et habitats représentée par M. Y... pour la réalisation d'un galion espagnol ; que M. Y... a remis ce document à son fournisseur ; que M. X... ne pouvait qu'être conscient de l'altération de la vérité contenue dans cette attestation, tenant au fait qu'à sa date, le 30 juin 2003, il n'existait encore aucun marché public de travaux conclu entre la mairie d'Amneville et la SARL Espaces et habitats ; que le conseil municipal de la commune d'Amneville, dans sa délibération du 27 mai 2003, avait donné seulement son accord de principe pour la réalisation d'un bateau qui serait implanté au lac d'Amneville, et la commune n'a été régulièrement et irrévocablement engagée que par le contrat signé le 8 janvier 2004 et notifié à son titulaire le 16 février 2004 ; que l'acte était de nature à cause un préjudice à la commune d'Amneville dans la mesure où l'entreprise Dubois matériaux aurait pu la mettre en cause si le marché n'avait pas été accepté ultérieurement par la commune d'Amneville ; qu'il est constant qu'en remettant cette attestation à M. Y..., M. X... connaissait l'emploi qui en serait fait ; que les délits de faux et d'usage de faux reprochés à M. X... du fait de la délivrance de cette attestation sont par conséquent constitués tant en leur élément matériel que moral ;

1°) " alors que constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité ; qu'au cas d'espèce, M. X..., maire de la commune d'Amneville, a établi, le 30 juin 2003, une attestation indiquant qu'un marché de travaux d'un montant de 250 000 euros était attribué par la commune à la société Espaces et habitats et précisant que " l'élaboration administrative dûdit marché était en cours'" ; qu'il résultait nécessairement de ces termes que le marché n'avait pas, à la date de délivrance de l'attestation, été conclu, mais que son attribution était seulement acquise dans son principe ; que de fait, au 30 juin 2003, le conseil municipal, après avoir examiné le projet présenté par la société Espaces et habitats, avait donné " son accord de principe pour la réalisation d'un bateau qui sera implanté au lac d'Amneville ", chargeant le maire " d'entreprendre toutes les démarches administratives relatives à la passation des marchés " ; que la cour a elle-même relevé que le marché pouvait être attribué à la société Espaces et habitats sans mise en concurrence préalable ; qu'il en résultait qu'au 30 juin 2003, le principe de l'attribution du marché à la société Espaces et habitats pouvait être considéré comme acquis, seule sa formalisation administrative demeurant à effectuer ; qu'en affirmant que l'attestation délivrée par M. X..., qui se bornait à faire état de cette situation, constituait un faux, la cour d'appel a violé l'article 441-1 du code pénal ;

2°) " alors que le délit de faux n'est constitué que si le document litigieux est de nature à causer un préjudice ; qu'au cas d'espèce, la délivrance par le maire de la commune d'Amneville d'une attestation certifiant qu'un marché était attribué à la société Espaces et habitats ne pouvait ouvrir, au profit des fournisseurs de cette société, aucun droit à l'encontre de la commune, laquelle demeurait tiers aux relations contractuelles entre la société Espaces et habitats et ses fournisseurs ; qu'en affirmant que l'attestation litigieuse était " de nature à causer un préjudice à la commune d'Amneville dans la mesure où l'entreprise Dubois matériaux (fournisseur de la société Espaces et Habitats) aurait pu la mettre en cause si le marché n'avait pas été accepté ultérieurement ", la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

3°) alors que le délit d'usage de faux suppose l'utilisation d'une pièce que l'on sait fausse ; qu'au cas d'espèce, la seule rédaction d'une attestation, fût-elle inexacte, ne suffisait pas à caractériser le délit d'usage de faux " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X..., maire de la commune d'Amneville, à la demande de la société Espaces et habitats, attributaire d'un marché public, sans mise en concurrence, signé le 8 janvier 2004 et notifié le 16 février 2004, a établi et remis à cette société, dont le principal fournisseur exigeait des garanties de paiement, une attestation, datée du 30 juin 2003, dans laquelle il certifiait " qu'un marché de travaux est attribué à ladite société... son élaboration administrative est en cours " ;

Attendu que, pour le déclarer coupable des chefs de faux et usage, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors qu'est constitutif d'un usage de faux le fait de remettre le document contrefait à un tiers en vue du résultat final qu'il était destiné à produire, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui, en ses deux premières branches tend à remettre en cause l'appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause par les parties, ne peut être admis ;

Et attendu que est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.