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Décisions

Cass. 3e civ., 10 mars 1999, n° 97-14.531

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

M. Bourrelly

Avocat général :

M. Baechlin

Avocats :

SCP Pascal Tiffreau, Me Cossa

Colmar, 3e ch. civ., sect. B, du 6 mars …

6 mars 1997

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 6 mars 1997), statuant en référé, que l'immeuble qu'ils donnaient à bail à M. X... menaçant de s'effondrer et faisant l'objet, pour ce motif, d'un arrêté de péril, Mme Z... et MM. Z... et Y... (consorts A...), en reprochant au preneur un manque d'entretien du bien loué, l'ont assigné devant le juge des référés en paiement d'une provision sur le coût des travaux de réfection ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande, alors, selon le moyen, "1 ) que la juridiction des référés ne peut accorder au demandeur une provision que dans le cas où l'obligation du défendeur n'est pas sérieusement contestable ; que, par ailleurs, sont à la charge exclusive du bailleur, sauf clause contraire expresse, les travaux de sécurité imposés par l'autorité administrative pour prévenir le risque d'effondrement d'un immeuble, a fortiori lorsque ce risque a donné lieu à un arrêté de péril ; qu'en l'espèce, était donc sérieusement contestable l'obligation du preneur à bail commercial de payer au bailleur une provision sur le coût de réfection de l'immeuble, motif pris d'une clause du contrat mettant à sa charge l'obligation d'entretenir la toiture, dès lors qu'il résultait des propres constatations de la juridiction des référés que "le maire de la commune a pris un arrêté de péril, interdisant toute activité dans ce bâtiment qui menaçait à tout moment de s'effondrer" ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ; 2 ) qu'au surplus, était sérieusement contestable l'obligation du preneur à bail commercial de payer au bailleur une provision sur le coût de réfection de l'immeuble, dès lors que la juridiction des référés n'a alloué la provision qu'après avoir , en méconnaissance de sa compétence, visé une clause contractuelle relative à la "toiture" et sujette à interprétation quant à la charge de la réfection de la "charpente" et de la "couverture", statué sur la cause du désordre au regard des rapports d'expertise judiciaire et sujets à interprétation et "déclaré" le preneur "seul responsable de ce sinistre", avant d'écarter puis de retenir en se contredisant "la vétusté générale de l'immeuble", quant au surplus le juge du fond était saisi ; que dès lors, en allouant une provision, la cour d'appel a violé l'article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ; 3 ) que la juridiction des référés de première instance avait relevé qu'il résultait des rapports d'expertise judiciaire que "la vétusté du bâtiment et de la couverture ont entraîné au fil des ans la chute de tuiles et de bardeaux et la déformation progressive de la charpente, le processus de dégradation ayant été amorcé avant que M. X... (le preneur) ne prenne les lieux en location", de sorte que "si, en cours de bail, M. X... avait voulu éviter toute entrée d'eau, il aurait dû faire refaire la totalité de la couverture" (soit) "une (...) opération de réhabilitation (n'entrant) pas dans l'obligation d'entretien du preneur, mais (incombant) au bailleur" ; que, dans ses conclusions d'appel, le preneur avait également soutenu ce qui précède, en reprochant toutefois au premier juge d'avoir omis de "constater que les demandes des consorts Z... et Y... se heurtent à des contestations sérieuses au fond" ;

qu'en omettant de s'en expliquer, au regard de l'existence d'une contestation sérieuse sur l'obligation du preneur, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 809, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile" ;

Mais attendu, d'une part, que, M. X... n'ayant soutenu en cause d'appel ni que l'arrêté de péril rendait contestable son obligation d'entretenir la toiture, ni que pour l'application de la clause du bail relative à cette obligation, une distinction était à faire entre la charpente et la couverture, le moyen est de ce chef nouveau, mélangé de fait et de droit, et partant, irrecevable ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant constaté qu'il ressortait des rapports d'expertise judiciaire qu'à cause du pourrissement d'un entrait de ferme un mur extérieur présentant un faux-aplomb risquait de s'effondrer et de provoquer l'effondrement de la charpente, que le pourrissement et la rupture à cet endroit étaient dus à des infiltrations d'eau qui avaient eu lieu pendant plusieurs années à travers la toiture par des trous situés juste au-dessus, que les autres bois de charpente étaient bien conservés en dépit de la vétusté des tuiles, et déduit de ses constatations que des réparations entreprises à temps sur la couverture ou la charpente auraient permis d'éviter le sinistre ayant entraîné l'arrêté de péril, la cour d'appel, qui a pu relever que M. X..., tenu d'entretenir l'immeuble, avait manqué à cette obligation et devait verser aux consorts A... une provision dont, sans se contredire, elle a fixé le montant en tenant compte de la vétusté de celui-ci, a, sans trancher de contestation sérieuse, légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.