CA Aix-en-Provence, 8e ch. A, 25 novembre 2010, n° 09/12494
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Entreprise Palka (SARL), Bâtiment et Travaux Publics (Sté)
Défendeur :
Le Crédit Lyonnais (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Schmitt
Conseillers :
Mme Elleouet - Giudicelli, Mme Verdeaux
Avoués :
SCP de Saint Ferreol-Touboul, Me Leca, SCP Latil - Penarroya-Latil - Alligier, SCP Primout-Faivre
Avocats :
Me Hawadier, Me Bac
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par jugement en date du 22 octobre 2010, le Tribunal de commerce de DRAGUIGNAN a ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la S.A.R.L. ENTREPRISE PALKA et désigné Me LECA en qualité de liquidateur judiciaire.
La S.A. BNP PARIBAS IMMOBILIER a déclaré une créance de 30 604,99 euros.
La débitrice s'est opposée à l'admission de la créance au motif que certaines des situations de travaux qui lui étaient dues étaient impayées.
Par ordonnance du 24 juin 2009, portant le numéro 2009 001754, le juge commissaire a fait droit à la demande en indiquant que la compensation entre les créances connexes de la BNP PARIBAS IMMOBILIER et de la S.A.R.L. ENTREPRISE PALKA était de droit et faisait ressortir une créance de la BNP PARIBAS IMMOBILIER à hauteur de 30 604,99 euros.
La S.A.R.L. ENTREPRISE PALKA et Me LECA a régulièrement relevé appel de cette décision.
Dans des conclusions du 10 octobre 2010, ils soutiennent que la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER, filiale de la BNP PARIBAS IMMOBILIER, est redevable à la société PALKA au titre de travaux effectués par cette dernière de deux factures d'un montant total de 167 333 euros et ne peut donc se voir reconnaître une créance de 30 604,49 euros après compensation de la somme due à ce titre avec des sommes réclamées pour des inexécutions ou des malfaçons et ce sur la base de la production d'un constat d'huissier, qui ne reprend que les dires du maître de l'ouvrage, et de devis non contradictoires, que le juge commissaire n'était pas compétent pour ordonner une compensation et que de toute façon cette compensation n'était pas justifiée puisque si les factures de la société PALKA n'ont jamais été contestées, la somme réclamée par la BNP PARIBAS IMMOBILIER n'a pas un caractère certain, liquide et exigible qui permettait cette compensation.
Ils concluent à la réformation de l'ordonnance, au rejet de la créance produite ou tout au moins au sursis à statuer jusqu'à ce que la juridiction compétente ait fixé la créance de la BNP PARIBAS IMMOBILIER et à la condamnation de la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER à leur payer 3000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le 22 avril 2010, M. Joseph PALKA est intervenu volontairement à la procédure, en sa qualité de caution de la garantie donnée par la S.A. LCL CRÉDIT LYONNAIS à la société PALKA en substitution de la retenue de garantie due par cette dernière au titre des travaux effectués.
Il conclut que la déclaration de créance n'était pas recevable puisque la BNP PARIBAS IMMOBILIER, qui est un tiers par rapport à la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER, n'avait pas mandat pour déclarer la créance et qu'aucun pouvoir n'était joint à la déclaration.
A titre subsidiaire, il expose que le juge commissaire n'était pas compétent pour fixer la créance de la déclarante et demande à la Cour de réformer l'ordonnance et de surseoir à statuer jusqu'à qu'une décision du juge du fond intervienne pour fixer la créance de la déclarante.
A titre infiniment subsidiaire, il conclut au rejet de la créance en l'état des sommes dues par la déclarante à la société.
Il sollicite enfin 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 17 mai 2010, la S.A. LCL CRÉDIT LYONNAIS est intervenue aux débats en qualité de subrogée dans les droits de la S.N.C. LES ALLÉES DE SAINT LÉGER et, par des conclusions du 8 octobre 2010, elle s'en est rapportée à justice sur l'appel et les demandes de la S.A.R.L. ENTREPRISE PALKA et de Me LECA.
La BNP PARIBAS IMMOBILIER a constitué avouer mais n'a pas conclu et c'est la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER qui a fait déposer des conclusions le 5 octobre 2010.
Elle soutient qu'elle avait confié à l'entreprise PALKA le gros oeuvre d'un immeuble à DRAGUIGNAN, mais que l'entreprise a, du fait de la liquidation judiciaire, abandonné le chantier, que deux constats d'huissier ont donc été établis, l'un à la requête de Me LECA et l'autre à la sienne, et que c'est au vu de ces constats qu'elle a établi un décompte général définitif qui a donné lieu à la déclaration de créance en cause,
Que si l'ordonnance désigne la BNP PARIBAS IMMOBILIER comme créancier déclarant, c'est par le fait d'une erreur matérielle que le juge commissaire n'a pas voulu rectifier, que depuis cette ordonnance, la société LCL CREDIT LYONNAIS lui a versé la somme de 30 604,99 euros mais s'est réservé par un courrier du 25 août 2010, la possibilité, en cas de rejet de la créance de lui demander le remboursement de cette somme qu'elle a donc intérêt à poursuivre la confirmation de l'ordonnance déférée et l'admission au passif de la créance de la LCL CREDIT LYONNAIS,
Que si c'est la BNP PARIBAS IMMOBILIER RÉSIDENTIEL PROMOTION MÉDITERRANÉE qui a effectivement procédé à la déclaration de créance, le 15 décembre 2008, elle l'a fait en qualité de gérante de la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER, que donc cette déclaration est recevable,
Que le décompte général définitif de travaux qu'elle a établi, sur la base de deux constats d'huissier tient compte des travaux effectivement réalisés par la société PALKA et de la compensation automatique et de plein droit des créances réciproques des parties,
Que dans la mesure où la Cour dispose de tous les éléments lui permettant d'apprécier le sérieux du décompte proposé, le renvoi devant une autre juridiction ne se justifie pas,
Qu’il se justifie d'autant moins que les appelants n'indiquent pas quelle serait la juridiction compétente,
Que dès lors l'ordonnance devra être confirmée, sauf à préciser qu'elle est titulaire de la créance inscrite, mais qu'en l'état du paiement effectué, la société LCL CREDIT LYONNAIS est subrogée dans ses droits.
Elle demande aussi la condamnation in solidum de Me LECA, ès qualités, et de M. PALKA à lui verser 4000 euros chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 octobre 2010.
MOTIFS DE L'ARRÊT :
SUR LA RECEVABILITÉ DE LA DÉCLARATION DE CRÉANCE :
Attendu que si le cocontractant de l'entreprise PALKA pour le marché de travaux objet du litige est la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LEGER, il est démontré par les pièces produites au débat que la SA. BNP PARIBAS IMMOBILIER est bien le gérant de cette société et avait donc qualité pour déclarer la créance, sans qu'il soit nécessaire pour elle d'avoir pouvoir à cette fin, que l'erreur sur le nom de la personne morale déclarante qui affecte cette déclaration n'est qu'un vice de forme qui a été réparé dès la déclaration puisqu'il était indiqué que le dossier concerné était celui de la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LEGER et n'a pas porté préjudice au débiteur, que donc la déclaration de créance est recevable ;
SUR L'ADMISSION DE LA CRÉANCE :
Attendu que contrairement à ce que soutient la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LEGER aucun texte n'oblige la partie qui soutient que la décision à prendre excède la compétence du juge-commissaire à indiquer quelle juridiction de fond est compétente ;
Attendu que, quelles que soient les conditions dans lesquelles il a été établi et même si un des deux constats d'huissier sur lequel il s'appuie a été réalisé contradictoirement, le décompte général définitif, invoqué par le maître d'ouvrage, n'est pas un document ayant valeur contractuelle, que le juge commissaire ne pouvait donc le retenir comme un élément lui permettant de fixer de la créance de la S.N.C. LES ALLEES SAINT LEGER au passif de la société PALKA, qu'il convient dès lors de réformer l'ordonnance, de dire que le juge commissaire était incompétent pour fixer la créance et de renvoyer les parties, en application de l'article R 624-5 du Code de commerce à saisir la juridiction compétente pour connaître du litige et ce dans le mois de la notification qui sera faite par le greffe de la Cour de la présente à la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LÉGER, à la S.A. LCL CREDIT LYONNAIS, à la S.A.R.L. ENTREPRISE PALKA et à Me LECA ès qualités de liquidateur de cette société ;
Attendu que l'équité ne justifie pas en la cause l'application de l'article 700 du Code de procédure civile et que la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LEGER qui succombe dans sa demande doit être condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
REFORME l'ordonnance déférée,
DIT que la déclaration de créance faite par la S.A. BNP PARIBAS IMMOBILIER en qualité de gérant de la S.N.C. LES ALLÉES SAINT LEGER est recevable, mais que le juge-commissaire était incompétent pour statuer,
RAPPELLE qu'en application de l'article R 624-5 du Code de commerce, les parties devront saisir la juridiction compétente pour trancher le litige qui les oppose dans le mois de la notification de la présente décision qui leur sera faite par le greffe de la Cour,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE la S.N.C. LES ALLEES SAINT LEGER aux dépens et autorise les S.C.P. DE SAINT-FERREOL TOUBOUL, LATIL PENARROYA-LATIL ALLIGIER et PRIMOUT FAIVRE, titulaires d'offices d'avoués à procéder à leur recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.