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Décisions

Cass. soc., 16 mars 2010, n° 08-43.838

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Avocats :

SCP Boulloche, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Nancy, du 16 mai 2008

16 mai 2008

Sur le moyen unique :

Vu l'article L. 1221-1 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. X..., Y..., Z... et A... ont été salariés de la société BTT placée en redressement judiciaire le 10 juin 1994 et qui a fait l'objet d'un plan de redressement par cession présenté par M. Alain B..., homologué par jugement du Tribunal de commerce d'Epinal du 30 novembre 1994, au profit d'une société à créer devenue la société BTT-GAT ; que le 14 décembre 1994, un protocole d'accord a été signé entre le gérant de la société BTT-GAT et les délégués syndicaux concernant la suppression de la prime d'intéressement de 6 % dont bénéficiaient les salariés par usage ; que la société BTT-GAT a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Epinal du 21 octobre 2003 ; que les salariés ont été licenciés pour motif économique par le liquidateur par lettre du 3 novembre 2003 ; qu'estimant que leur véritable employeur était M. Alain B..., en qualité de co-employeur et de gérant de fait, et lui reprochant la suppression unilatérale de la prime d'intéressement de 6 % ainsi que de n'avoir effectué aucune recherche de reclassement préalable à leur licenciement au sein du Groupe Alain B..., les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes aux fins de rappel de prime d'intéressement et de dommages et intérêts pour non-respect par l'employeur de son obligation de reclassement ;

Attendu que pour dire que les demandeurs, anciens salariés de la société BTT, reprise par M. Alain B... et son groupe dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de cette société devenue BTT-GAT, puis licenciés pour motif économique à la suite de la liquidation judiciaire de cette dernière société, étaient irrecevables à agir à l'encontre de M. Alain B... et du Groupe Alain B... qui n'avaient pas, à leur égard, la qualité d'employeur, la cour d'appel a retenu que " les salariés ne peuvent en effet juridiquement invoquer la qualité de co-employeur de M. Alain B..., personne physique, avec la société BTT-GAT, personne morale, dont la création a été une condition nécessaire posée par le tribunal de commerce dans son jugement du 30 novembre 1994 à la reprise de l'ancienne société BTT, et que " le fait que M. Alain B... se soit comporté en gérant de fait, ce qu'ont justement admis les premiers juges, ne peut avoir pour effet un transfert des contrats de travail des salariés, les conséquences juridiques attachées à la gérance de fait étant strictement limitées sur le plan légal à la saisine du tribunal de commerce, soit d'une action en responsabilité pour comblement de l'insuffisance d'actifs, soit en l'état des textes lors de la liquidation judiciaire de la société BTT-GAT, d'une action en faillite personnelle intentée contre M. Alain B... " ;

Mais attendu que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ;

Qu'en se déterminant comme elle l'a fait par des motifs inopérants, alors que les conditions mises à la cession dans le jugement arrêtant le plan n'avaient pas pour effet de priver les salariés de la possibilité de prouver que M. B... s'était, abstraction faite de sa qualité de gérant de fait de la société BTT-GAT, comporté personnellement à leur égard en co-employeur, et qu'il lui appartenait de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'il en allait bien ainsi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mai 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Nancy ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims.