Livv
Décisions

Cass. soc., 26 juin 2008, n° 07-41.294

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bailly

Avocats :

Me Rouvière, SCP Gatineau, SCP Piwnica et Molinié

Lyon, du 18 déc. 2006

18 décembre 2006

Attendu, selon les arrêts attaqués (Lyon, 18 décembre 2006) que le 22 novembre 2001, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société Aérolyon, filiale du groupe Nouvelles Frontières ; que le 23 avril 2002, le tribunal de commerce a arrêté un plan de cession, au profit de la société Aéroplus, qui, après une modification décidée le 4 juin suivant par le tribunal de commerce, a repris un appareil donné en location à la société Aérolyon par la société Nouvelles Frontières ; que les contrats de travail du personnel de la société cédante ont été poursuivis par la société Altitude plus, qui s'est substituée à la société Aéroplus ; que n'ayant pas été en mesure d'exercer son activité de transport aérien, la société Altitude plus a été placée en redressement judiciaire, le 13 août 2002, puis en liquidation judiciaire, le 26 décembre 2002 ; que le 10 janvier 2003, le liquidateur judiciaire a licencié pour motif économique tout le personnel de la société Altitude plus ; que des salariés licenciés ont alors saisi la juridiction prud'homale pour être reconnus créanciers d'indemnités, en soutenant que la société Nouvelles Frontières et sa filiale, la société Corsair, avaient la qualité de co-employeurs, que leurs contrats de travail auraient dû se poursuivre avec la société Corsair et que les licenciements étaient nuls et dépourvus de cause réelle et sérieuse ;

Sur le premier moyen, commun aux pourvois :

Attendu que les salariés font grief aux arrêts d'avoir retenu que les sociétés Nouvelles Frontières ou Corsair n'avaient pas la qualité de co-employeurs et de les avoir déboutés des demandes dirigées contre elles, alors, selon le moyen :

1°/ que l'absence de lien de subordination direct entre les salariés de la société Aérolyon et la société Nouvelles Frontières (ou Corsair) n'était pas de nature à exclure la qualité de co-employeur de cette dernière ; qu'en effet, il appartenait à la cour d'appel qui ne nie pas l'interdépendance étroite des sociétés, de rechercher, à travers le faisceau de présomptions invoqué, s'il n'existait pas une communauté et une confusion voulues d'intérêts, d'activité et de direction susceptible de conférer à la société Nouvelles Frontières (ou Corsair) la qualité d'employeur ; qu'ainsi les arrêts manquent de base légale au regard des articles L. 121-1 et L. 122-12 du code du travail ;

2°/ qu'en toute hypothèse, la cour d'appel ne pouvait débouter les salariés de leurs demandes à l'encontre des sociétés Nouvelles Frontières et Corsair sans rechercher si, comme les intéressés le faisaient valoir à titre subsidiaire, ces sociétés n'avaient pas respecté leur engagement unilatéral de leur accorder une priorité d'embauche, ce qui justifiait la demande de dommages-intérêts présentée par chacun des salariés ; qu'ainsi l'arrêt méconnaît les termes du litige et viole l'article 4 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, que si la cour d'appel a relevé qu'il existait entre la société Aérolyon et le groupe Nouvelles Frontières une communauté d'intérêts économiques et une interdépendance des organes de direction, elle a également constaté, effectuant la recherche prétendument omise, que la société Aérolyon disposait d'une clientèle propre et d'une autonomie de gestion à l'égard de son personnel et de l'organisation de ses vols et que ses salariés n'étaient pas soumis dans leur activité à la direction et au contrôle du groupe Nouvelles Frontières ; qu'elle a pu en déduire qu'il n'existait pas, entre ces sociétés, de confusion d'intérêts, d'activités et de direction ;

Attendu, ensuite, qu'il ne résulte pas des arrêts que la cour d'appel se soit prononcée sur les demandes indemnitaires présentées par les salariés au titre de la violation d'un engagement de priorité d'embauche pris par la société Corsair ; que cette omission de statuer peut être réparée selon la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile ;

D'où il suit que le moyen, non fondé en sa première branche et irrecevable en sa seconde branche, ne peut être accueilli ;

Sur le second moyen commun aux pourvois :

Attendu que les salariés font encore grief aux arrêts d'avoir jugé que leurs contrats de travail n'avaient pas été transférés à la société Corsair, en rejetant les demandes dirigées à ce titre contre cette société, alors, selon le moyen, que la cour d'appel ne pouvait considérer qu'il n'y avait pas eu de transfert d'une unité économique de la société Aérolyon au profit de la société Corsair, en se bornant à limiter son appréciation aux seuls éléments composant le fonds de commerce de la société défaillante, sans prendre en compte les éléments d'exploitation non compris dans ce fonds de commerce, notamment des éléments d'exploitation mis à la disposition des exploitants successifs ; qu'ainsi, les arrêts manquent de base légale au regard des dispositions de l'article L. 122-12, alinéa 2, du code du travail ;

Mais attendu que la seule poursuite de la même activité par une autre entreprise ne suffit pas caractériser le transfert d'une entité économique autonome ; qu'ayant constaté que la société Corsair s'était bornée à assurer, avec ses propres autorisations, ses appareils et son personnel, une partie des vols auparavant exploités par la société Aérolyon, sans reprendre les moyens que cette dernière mettait en oeuvre, la cour d'appel a pu en déduire qu'il n'y avait pas eu de transfert d'une entité économique ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.