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Décisions

CA Bordeaux, 2e ch. civ., 19 novembre 2008, n° 08/04200

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Reynal Jean (SNC)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bougon

Conseillers :

M. Legras, Mme Larsabal

Avoués :

SCP Fournier, SCP Casteja-Clermontel & Jaubert

Avocats :

Me Blatt, Me Caporale, Me Gentilucci

TGI Bordeaux, du 24 juill. 2007, n° 06/9…

24 juillet 2007

Par acte authentique du 26 février 1963 madame COURREGE, aux droits de laquelle se trouve Robert DARLON, a donné à bail commercial à Jacques DOUAT, aux droits duquel se trouve la SNC REYNAL JEAN, pour une durée de trois à douze ans divers locaux sis [...]. Ce bail, successivement renouvelé à trois reprises, est venu à expiration le 30 septembre 2002 et s'est depuis poursuivi par tacite reconduction.

Par acte d'huissier du 28 novembre 2002 Jean Patrick REYNAL signifiait à Robert DARLON une demande de renouvellement de bail aux mêmes clauses et conditions à compter du 1er octobre 2002 en application des dispositions des articles L 145-9 et L 145-10 du code de commerce. Par acte du 13 janvier 2006Robert DARLON faisait signifier à la SNC REYNAL JEAN un congé avec offre de renouvellement du bail à compter du 15 juillet 2006 moyennant un loyer annuel porté à 22.240€ HT et hors charges correspondant à la valeur locative. Par un acte en réponse du 31 janvier 2006 la SNC REYNAL JEAN déclarait à Robert DARLON que le congé signifié le 13 janvier 2006 se trouvait privé d'objet du fait de l'absence de réponse dans le délai de trois mois à sa demande de renouvellement du bail et que ce renouvellement était intervenu.

Le 19 juin 2006 Robert DARLON notifiait son mémoire préalable à la saisine du juge des loyers commerciaux pour la fixation du prix du bail renouvelé, la SNC REYNAL JEAN répondant en contestant la compétence de ce juge pour trancher la difficulté.

Par acte du 1er septembre 2006Robert DARLON faisait assigner la SNC REYNAL JEAN prise en la personne de son gérant Jean Patrick REYNAL devant le tribunal de grande instance de BORDEAUX aux fins de les voir déboutés de leurs prétentions, de voir constater l'irrecevabilité à agir de Jean Patrick REYNAL, de dire que la demande de renouvellement de bail notifiée le 28 novembre 2002 n'a pas mis fin au bail en cours et de fixer le montant du loyer à la somme annuelle de 22.240€ HT et hors charges, y compris à titre provisionnel au cas où une mesure d'instruction serait ordonnée, outre les intérêts et leur capitalisation. La SNC REYNAL JEAN et Jean Patrick REYNAL concluaient au débouté et au sursis à statuer sur les demandes tendant à la fixation du loyer du bail renouvelé.

Par jugement contradictoire du 24 juillet 2007 le tribunal a :

- débouté Robert DARLON de sa demande en contestation des effets de la demande de renouvellement de bail notifiée par acte du 28 novembre 2002 ;

- constaté l'incompétence du tribunal de grande instance en matière de fixation du prix du bail commercial renouvelé et invité le demandeur à se pourvoir devant le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué aux loyers commerciaux

- débouté la SNC REYNAL JEAN de sa demande en dommages-intérêts ;

- condamné Robert DARLON à payer à la SNC REYNAL JEAN une indemnité de 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Robert DARLON a interjeté appel le 30 août 2007 de ce jugement dont il a conclu le 11 septembre 2007 à la réformation intégrale en reprenant l'intégralité de ses demandes de première instance et demandant la condamnation de l'intimée à lui payer 3.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La SNC REYNAL JEAN, intimée et appelante incidente, a conclu le 1er février 2008 à la confirmation du jugement sauf à condamner l'appelant à lui payer 3.500€ de dommages-intérêts pour procédure abusive et à dire n'y avoir à statuer sur les demandes complémentaires de l'appelant tendant à la fixation du loyer renouvelé. Elle demande d'autre part 3.500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS ET DECISION

Attendu qu'il est constant que la demande de renouvellement de bail du 28 novembre 2002 a été signifiée à la requête de Jean Patrick REYNAL alors que la SNC REYNAL JEAN est à la fois la locataire et la propriétaire du fonds de commerce exploité dans les lieux loués, d'où l'appelant entend en voir déduire le défaut de qualité pour agir de Jean Patrick REYNAL qui n'indique même pas dans l'acte agir en qualité de gérant de la SNC, et par suite voir déclarer cet acte nul et n'ayant pu comporter aucun effet ;

Attendu cependant qu'en sa qualité de gérant et seul associé de la SNC REYNAL JEANJean Patrick REYNAL avait le pouvoir de représenter sa société et le défaut de qualité qui aurait pu constituer une irrégularité de fond au sens de l'article 117 du code de procédure civile ne peut lui être opposé ;

Attendu d'autre part que s'il s'agit d'un vice de forme affectant l'acte il convient que la partie qui l'invoque justifie de l'existence d'un grief en application de la règle de l'article 114 alinéa 2 du code de procédure civile, or il doit être observé que Robert DARLON, qui avait admis que dans l'acte de renouvellement de bail du 30 septembre 1993 Jean (Patrick) REYNAL apparaisse comme représentant de la SNC REYNAL-LUBEIGT et qui adressait son courrier du 28 septembre 1999 demandant la révision du loyer annuel à Jean REYNAL, pharmacien, n'a pas pu être trompé sur l'identité du bénéficiaire du bail pas plus que sur l'objet de la demande ;

Attendu que la demande de renouvellement de bail du 28 novembre 2002 ayant normalement produit ses effets a, à défaut de réponse du bailleur dans le délai de trois mois prévus par l'article L 145-10 alinéa 3 du code de commerce, entraîné le renouvellement du bail à compter du 1er octobre 2002 ;

Attendu qu'il n'y avait par suite pas lieu en juillet 2006 à renouvellement du bail et à congé avec offre de renouvellement ;

Attendu par ailleurs qu'il a été justement retenu par le premier juge que la question de la demande de fixation du prix du bail renouvelé relevait de la compétence du président du tribunal de grande instance ou du juge des loyers commerciaux et, s'il est stipulé à l'article R 145-23 du Code de commerce que le tribunal de grande instance saisi d'une autre contestation relative à un bail commercial peut accessoirement se prononcer sur les demandes en fixation du prix du bail renouvelé il n'apparaît pas opportun de priver du bénéfice du double degré de juridiction la partie qui le revendique ;

Attendu qu'à l'appui de sa demande en dommages-intérêts l'intimée ne justifie pas plus qu'en première instance d'un préjudice particulier résultant d'une faute qui n'a pu consister pour le bailleur à tenter de faire valoir ses droits ;

Attendu en conséquence que le jugement sera confirmé ;

Qu’il soit fait droit à hauteur de 2.000€ à la demande d'indemnité complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile de l'intimée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,

- CONFIRME le jugement,

- DEBOUTE Robert DARLON de toutes ses demandes et la SNC REYNAL JEAN de sa demande en dommages-intérêts,

- CONDAMNE Robert DARLON à payer et porter à la SNC REYNAL JEAN la somme de 2.000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- CONDAMNE le même aux dépens d'appel dont distraction au profit de la SCP d'avoués CASTEJA-CLERMONTEL et JAUBERT.