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Décisions

Cass. com., 22 octobre 2002, n° 99-13.222

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dumas

Rennes, 1re ch. B, du 14 janv. 1999

14 janvier 1999

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 14 janvier 1999), que par sentence arbitrale du 9 juillet 1991, confirmée par arrêt de la cour d'appel de Bordeaux du 2 juin 1993, la société Castel frères SA (la société Castel) a été condamnée à payer à M. X... la somme de 4 055 000 francs ; que, par ordonnance du 12 octobre 1993, le juge de l'exécution de Bordeaux a autorisé la société Castel à consigner la somme de 4 957 762,36 francs dans l'attente de l'issue du pourvoi introduit contre l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux ; que, par arrêt du 23 mars 1995, la cour d'appel de Rennes, confirmant une décision du juge de l'exécution de Nantes, a ordonné la remise de la somme consignée à la trésorerie principale de Nantes II Crébillon, en exécution d'un avis à tiers détenteur notifié le 2 septembre 1993 ; que, par arrêt du 3 juillet 1996, la Cour de Cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel de Bordeaux et renvoyé la procédure devant la cour d'appel de Toulouse, laquelle par arrêt du 28 avril 1997, a annulé la sentence arbitrale du 9 juillet 1991 et condamné M. X... à payer à la société Castel la somme de 4 281 560 francs ; qu'après mise en demeure du 30 avril 1997, le trésorier principal de Nantes II Crébillon (le trésorier principal) a refusé de procéder au remboursement de la somme qui lui avait été remise ; que, par jugement du 1er décembre 1997, le juge de l'exécution de Nantes a ordonné la restitution par le trésorier principal à la société Castel de la somme de 4 957 762,36 francs ;

Attendu que le trésorier fait grief à la cour d'appel d'avoir confirmé le jugement du 1er décembre 1997, alors, selon le moyen :

1 / qu'il y a compensation lorsque des dettes réciproques certaines, liquides et exigibles s'éteignent jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives, sans qu'il y ait lieu de rechercher si elles présentent un lien de connexité ; qu'en estimant qu'il n'y a pas eu compensation entre la dette de la société Castel frères et la dette de M. X..., tout en constatant cependant que les dettes étaient nées d'un même contrat et que la cour d'appel avait fixé la créance de M. X... sur la société Castel frères à la somme de 7 748 000 francs et la créance de la société Castel frères sur M. X... à la somme de 12 129 560 francs, ce qui caractérisait l'existence d'une compensation entre dettes réciproques, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1289 et suivants du Code civil ;

2 / que la compensation n'a pas lieu au préjudice des droits acquis à un tiers, en sorte que celui qui, étant débiteur, est devenu créancier depuis la saisie-arrêt faite par un tiers entre ses mains, ne peut, au préjudice du saisissant, opposer la compensation ; qu'en estimant que ces dispositions ne pouvaient être invoquées par le trésorier principal de Nantes, alors qu'il est constant qu'au jour de l'avis à tiers détenteur émis par ce dernier, c'est M. X..., débiteur fiscal, qui était créancier de la société Castel frères, tiers saisi, en sorte que la compensation ultérieurement opérée par la cour d'appel entre les créances réciproques de M. X... et la société Castel frères ne pouvait avoir lieu au préjudice du Trésor, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1298 du Code civil ;

3 / qu'en énonçant que le trésorier principal de Nantes ne pouvait se prévaloir de l'antériorité de l'avis à tiers détenteur par rapport à la décision de la cour d'appel, au motif que la société Castel frères avait sollicité une mesure de sursis à l'exécution de l'avis à tiers détenteur jusqu'à ce qu'intervienne une décision définitive dans le litige l'opposant à M. X..., sans constater qu'il avait été fait droit à cette demande de sursis à exécution, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1298 du Code civil, 43 de la loi du 9 juillet 1991 et L. 63 du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que c'est à tort que le trésorier principal de Nantes invoque l'application de l'article 1298 du Code civil, qui concerne le cas de celui qui, de débiteur devient créancier depuis la saisie-arrêt faite par un tiers, la cour d'appel a relevé que la qualité de créancier de la société Castel trouvait son fondement dans le paiement par ses soins des sommes indues à M. X..., dès 1988, soit antérieurement à la délivrance de l'avis à tiers détenteur du 2 septembre 1993 ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu statuer comme elle a fait, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et troisième branches du moyen ;

d'où il suit que le moyen n'est pas fondé en sa deuxième branche et ne peut être accueilli pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.