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Décisions

Cass. crim., 24 octobre 2012, n° 11-87.781

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

Mme Moreau

Avocat :

SCP Waquet, Farge et Hazan

Pau, du 11 oct. 2011

11 octobre 2011

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jean-Michel X..., partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAU, en date du 11 octobre 2011, qui, dans l'information suivie sur sa plainte, contre MM. Joseph X... et Jean-Pierre X... des chefs d'abus de biens sociaux, recel et organisation frauduleuse d'insolvabilité, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 du code de commerce, 176 et suivants, 184 et 591 à 593 du code de procédure pénale, défauts de motifs; manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Bayonne, s'agissant des délits d'abus de biens sociaux et de recel d'abus de biens sociaux ;

"aux motifs que l'enquête effectuée par le SRPJ de Bayonne a démontré qu'à l'occasion d'échanges entre associés lors d'une assemblée générale relative à l'augmentation du poste comptable des salaires et charges sociales, M. X... avait été informé par son frère Joseph du développement des affaires sociales ayant nécessité le recours à l'intérim pour des chantiers ponctuels, le recrutement d'un permanent et la rémunération du gérant, qu'ainsi dès l'assemblée générale du 26 juin 2002 ayant approuvé les comptes de l'année 2001, M. X... était informé de l'existence de la rémunération du gérant ; que l'enquête de police a également démontré que les rémunérations de MM. Joseph et Jean-Pierre X... correspondaient à un travail effectif dans la société, et qu'elles se situaient à un niveau raisonnable, Jean-Pierre ayant été embauché à la suite de contrats successifs d'intérim d'une part et Joseph n'ayant perçu aucune rémunération les deux premières années de sa gérance, vivant sur ses économies pour ne pas pénaliser les résultats de la société ; que, enfin, l'enquête a démontré que finalement la SARL SLM était restée «in bonis» ; que par conséquent il est difficile de soutenir que l'octroi d'une rémunération raisonnable au gérant et à un associé salarié de la SARL SLM, ayant tous deux la majorité au sein de celle-ci, rémunération ayant pour contrepartie une réelle activité professionnelle et n'ayant pas compromis les résultats économiques de ladite SARL, serait constitutif d'un abus de biens sociaux ;

"alors que l'abus de biens sociaux est caractérisé dès lors que le gérant dispose du bien social en violation des droits et obligations qui lui sont conférés ; qu'en décidant que n'était pas abusif le fait pour un gérant de s'octroyer et d'octroyer à l'un des associés une rémunération sans y avoir été autorisé, comme il le devait, par l'assemblée générale de la société, au motif inopérant tiré du caractère a posteriori « raisonnable » des sommes versées, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-7 du code pénal, 176 et suivants, 184 et 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Bayonne, s'agissant du délit d'organisation de frauduleuse d'insolvabilité ;

"aux motifs que la partie civile fait grief à son frère Joseph d'avoir organisé volontairement l'insolvabilité de la SARL SLM en donnant le fonds de commerce de cette société en location-gérance à la société SEE SLM qu'il avait créée à dessein, et ce moyennant une redevance annuelle dérisoire de 5 400 euros ; qu'il convient de préciser, avant tous autres développements au fond, qu'en réalité la situation financière de la SARL SLM était loin d'être catastrophique et que si la société avait enregistré lors de la clôture des comptes au 31 août 2004 une importante régression de son chiffre d'affaires, son bénéfice s'élevait encore à 483 211 euros, que la société avait pu absorber en le régularisant le paiement des astreintes mises à sa charge par la partie civile dans le cadre d'une procédure civile, que la reconstitution des capitaux propres de la société lui avait permis d'honorer ses dettes et que la société, comme l'a confirmé l'enquête du SRPJ de Bayonne, ne présentait pas le bilan d'une société insolvable ; que son actif disponible était suffisant à couvrir le passif exigible ; que cette simple constatation établit l'inexistence même de l'infraction reprochée par la partie civile à son frère, en raison de l'absence d'un de ses éléments constitutifs fondamentaux ; que, de plus, l'enquête a révélé que si l'objectif de la mise en location-gérance du fonds de commerce de la société SLM était effectivement d'échapper aux diverses actions nocives de M. X..., il n'en demeure pas moins que ce montage juridique a, seul, permis la sauvegarde du potentiel économique de cette société et le maintien du savoir-faire familial dans son domaine d'activité ; que, enfin, la partie civile ne saurait se prévaloir des actions judiciaires civiles qu'elle a menées à l'encontre de la société SLM pour se plaindre du montant d'astreintes qu'elle a obtenues et dont le montant aurait pu entraîner d'importantes pertes d'actifs pour la SARL SLM si cette situation n'avait pas été régularisée par MM. Joseph et Jean-Pierre X... ;

"alors qu'il existe des charges suffisantes à l'encontre d'un mis en examen d'avoir organisé frauduleusement son insolvabilité lorsqu'il apparaît qu'il s'est employé par un acte juridique fictif présentant une contrepartie dérisoire à réduire l'actif saisissable de sa société, peu important qu'il y soit ou non parvenu ; qu'en l'espèce, en avril et novembre 2003, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte de la société SLM aux sommes de 110 000 euros et de 430 000 euros et ce n'est que le 17 janvier 2005 que la cour d'appel de Pau a ramené le montant de ces astreintes à la somme globale de 30 000 euros ; qu'entre-temps, la chambre de l'instruction a constaté que la société SLM avait cédé fictivement, le 19 février 2004, la totalité de son fonds de commerce à une société créée pour les besoins de la cause par M. X... et gérée par M. X... ; que peu importe le jugement de valeur totalement inopérant porté par la chambre de l'instruction sur les démarches judiciaires entreprises par M. X... et le préjudice réel occasionné, dès lors qu'elle constatait que cette opération juridique fictive avait pour but clair et avoué «d'échapper aux diverses actions» de M. X..., et que les mis en examen pouvaient légitimement craindre à cette époque la confirmation par la cour d'appel des jugements rendus par le juge de l'exécution, la chambre de l'instruction ne pouvait ignorer les charges suffisantes qui s'en évinçaient sans violer les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre MM. Joseph et Jean-Pierre X... d'avoir commis les délits reprochés, ni toute autre infraction ;

Que, dès lors, les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.