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Décisions

Cass. 3e civ., 16 janvier 2008, n° 04-20.218

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Avocats :

Me Blanc, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Peignot et Garreau

Paris, du 16 sept. 2004

16 septembre 2004

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 septembre 2004), que M. et Mme X..., assurés selon police "multirisques" auprès de la société Mutuelle assurances des commerçants et industriels de France (MACIF) ont conclu avec la société Maison familiale constructeur, immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le numéro B 300 938 412, aux droits de laquelle est venue la société MFC gestion nouvelle (MFCG), un contrat de construction de maison individuelle ; que le procès-verbal de réception a été signé le 27 décembre 1989 avec la société Maison familiale ; qu'ayant constaté en 1996 l'apparition de désordres sur leur immeuble, M. et Mme X... ont fait exécuter les travaux préconisés par l'expert de l'assureur "dommages-ouvrage", la société Sprinks ; que de nouveaux désordres étant apparus, ils ont, avec la MACIF, assigné la société MFCG, la société Ager ayant exécuté les travaux de reprise et les assureurs de ces sociétés en réparation de leur préjudice ; que la société MFCG a demandé sa mise hors de cause, faisant valoir que la réception des travaux était intervenue avec une société distincte, la société GMI, ayant pour dénomination commerciale "La Maison familiale, SA", immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le numéro B 350 606 240 et alléguant que la société GMI avait conclu en 1989 avec la société Maison familiale constructeur une convention d'apport soumise au régime des scissions portant sur l'ensemble de la branche d'activité de construction de maisons individuelles ;

Sur la recevabilité du premier moyen du pourvoi principal contestée par la défense :

Attendu que la société Suisse assurance France prétend que le moyen qui critique un motif de l'arrêt, déjà énoncé par les premiers juges et non contesté dans les conclusions devant la cour d'appel, est nouveau ;

Mais attendu que la société MFCG ayant fait valoir, pour la première fois devant la cour d'appel, que la société GMI avait bénéficié d'un apport partiel d'actif placé sous le régime des scissions, opérant de la société apporteuse à la société bénéficiaire une transmission universelle de tous ses droits et obligations pour la branche d'activité faisant l'objet de l'apport, il s'ensuit que le moyen est recevable ;

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis :

Attendu que M. et Mme X... et la MACIF font grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société Ager et son assureur, la société Suisse assurance France, alors que le constructeur chargé de la reprise des désordres d'un ouvrage est, comme le constructeur originaire, responsable de plein droit envers le maître d'ouvrage ou l'acquéreur de l'ouvrage des dommages qui compromettent la solidité de l‘ouvrage ou le rendent impropre à sa destination ; que cette responsabilité ne peut être écartée que par la preuve d'une cause étrangère ; qu'en décidant ainsi qu'il n'était pas démontré que le préjudice subi par les consorts X... n'aurait pas été causé par la société Ager, après avoir constaté que son intervention n'avait pas supprimé les désordres et avoir dit que l'imputabilité des désordres à la société Ager était particulièrement solide, la cour d'appel a violé les articles 1792 et 1151 du code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel a constaté que l'origine des désordres, dus à l'instabilité de l'ouvrage, trouvait sa cause dans une déficience de la conception des fondations, compte tenu de la nature du sol et de l'absence d'études de sol préalables et nécessaires, et que l'intervention de la société Sager, inefficace et non adaptée, n'avait pas supprimé leur cause mais n'avait rien ajouté aux désordres préexistants ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :

Vu les articles L. 236-3, L. 236-14, L. 236-16, L. 236-20 et L. 236-22 du code du commerce ;

Attendu que pour déclarer la société MFCG responsable des désordres subis par l'immeuble de M. et Mme X... et la condamner à leur payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts ainsi qu'à rembourser à l'assureur "dommages-ouvrage" des frais d'investigation, l'arrêt retient que si le procès-verbal de réception a été signé le 27 décembre 1989 avec la société Maison familiale, il ressort des extraits Kbis du registre de commerce et des sociétés délivrés le 27 novembre 2001 que la société dont le nom commercial est La Maison familiale est bien venue aux droits de la société Maison familiale constructeur, 15 rue de Marignan à Paris, inscrite au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro B 300 938 412, qui porte aussi le nom de Marignan immobilier et que l'homonymie invoquée ou l'erreur sur la personne morale mise en cause ne sont aucunement établie ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la société GMI ayant pour nom commercial "la maison familiale" était venue aux droits de la société Maison familiale constructeur et relevé l'existence de l'apport partiel d'actif fait par cette dernière société au bénéfice de la première, sans rechercher si, sauf dérogation expresse prévue par les parties, communauté ou confusion d'intérêts ou fraude, le traité d'apport avait été placé sous le régime des scissions et emportait ainsi transmission universelle, de la société apporteuse à la société bénéficiaire, de tous les droits, biens et obligations dépendant de la branche d'activité faisant l'objet de l'apport, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen du pourvoi principal :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société MFCG, l'arrêt rendu le 16 septembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.