Cass. 2e civ., 21 mars 2019, n° 17-22.241
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flise
Avocats :
SCP Le Bret-Desaché, SCP Sevaux et Mathonnet
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 31 mai 2017), que par un jugement du 14 février 1996, un tribunal de commerce a ordonné à la SAS Cora (la société Cora) d'avoir à fermer, dans les huit jours de la signification du jugement et sous astreinte d'une certaine somme par jour de retard, certaines entrées qu'elle avait ouvertes au centre commercial de Sainte Marguerite, de telle sorte que la totalité du flux de la clientèle de l'hypermarché et de la cafétéria passe, à l'aller comme au retour, par la nouvelle galerie marchande ; que par acte du 25 septembre 2013, la société Iung, la société Key West, la société Louis Serco et la société Distrifood ont saisi un tribunal de commerce en liquidation de l'astreinte ;
Attendu que les sociétés Key West, Distrifood et Louis Serco font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il les a déclarées irrecevables, par l'effet de la prescription, en l'ensemble de leurs demandes formées contre la société Cora, alors selon le moyen :
1°/ que la demande en liquidation d'une astreinte se prescrit par dix ans à compter de la signification du titre exécutoire qui la prononce ; qu'en ayant jugé qu'à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 (19 juin 2008), la prescription quinquennale de droit commun de l'article 2224 du code civil était applicable, quand seule la nouvelle prescription décennale relative à l'exécution des titres exécutoires l'était, de sorte qu'elle n'aurait été écoulée que le 19 juin 2018, sans que l'addition des deux délais (prescription déjà courue à la date du 19 juin 2008 et nouveau délai décennal) n'épuise l'ancien délai trentenaire, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil par fausse application, ensemble les articles L. 111- 3 et L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
2°/ que la fraude corrompt tout et met obstacle à l'application de la prescription ; qu'en ayant écarté la fraude de la société Cora, au motif que les sociétés appelantes ne démontraient pas que l'ouverture d'une porte supplémentaire dans la galerie avait été précédée ou accompagnée de manoeuvres de la part de l'intimée, quand le dol de la société Cora avait été constaté par un arrêt de cassation du 8 juin 2005, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe selon lequel « fraus omnia corrumpit », ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction alors applicable ;
Mais attendu, d'abord, que l'action en liquidation d'une astreinte n'est pas soumise au délai de prescription prévu à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution applicable à l'exécution des titres exécutoires, mais au délai de prescription des actions personnelles et mobilières prévu à l'article 2224 du code civil ; que c'est par une exacte application de cette règle que la cour d'appel a décidé que l'action des sociétés en liquidation de l'astreinte assortissant l'obligation mise à la charge de la société Cora était soumise à la prescription quinquennale de droit commun ;
Et attendu, ensuite, que sous le couvert du grief non fondé de défaut de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond qui ont écarté la fraude invoquée à l'encontre de la société Cora ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.