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Décisions

CA Douai, ch. 2 sect. 1, 16 septembre 2021, n° 19/00866

DOUAI

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

My Matelas (SAS), Dil (SAS)

Défendeur :

Mondial Relay (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Renard

Conseillers :

M. Bedouet, Mme Créon

Avocats :

Me Laurent, Me Renaud, Me Camus Demailly, Me Deschryver, Me Raes

T. com. Lille Métropole, du 23 janv. 201…

23 janvier 2019

Vu le jugement contradictoire du 23 janvier 2019 du tribunal de commerce de Lille Métropole, qui a :

- dit que l'apport d'actif entre les sociétés Dil et My Matelas est inopposable à la Sasu Mondial Relay ;

- dit recevable les demandes formées solidairement par la société Mondial Relay contre les sociétés Dil et My Matelas ;

- condamné solidairement les sociétés Dil et My Matelas à payer à la société Mondial Relay la somme de 70 186,61 euros ;

- dit que cette somme portera intérêts au taux égal au taux d'intérêts appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter de la première mise en demeure, le 7 avril 2017 ;

- prononcé l'anatocisme pour les intérêts dus pour une année entière ;

- condamné solidairement les sociétés Dil et My Matelas à payer à la société Mondial Relay la somme de 560 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement ;

- ordonné à la société Mondial Relay de régler la somme de 6 446,74 euros dans les trente jours après l'encaissement total de ses créances ;

- débouté la société My Matelas de sa demande de délais de paiement ;

- condamné solidairement les sociétés Dil et My Matelas à payer à la société Mondial Relay la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné solidairement les sociétés Dil et My Matelas aux entiers frais et dépens de l'instance, taxés et liquidés à la somme de 106,35 euros en ce qui concerne les frais de greffe ;

- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire du présent jugement ;

- débouté les parties de toutes les autres demandes plus amples ou contraires ;

Vu l'appel interjeté le 11 février 2019 par la Sas Dil et la Sas My Matelas, de cette décision.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 29 juin 2020 par la Sas Dil, la Sas My Matelas, et la Selas Alliance, prise en la personne de maître Véronique Bécheret, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société My Matelas, qui demandent à la cour d'appel de :

- infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille le 23 janvier 2019 sauf en ce qu'il a ordonné à la société Mondial Relay de régler la somme de 6 446,74 euros dans les trente jours après l'encaissement total de ses créances ;

Statuant à nouveau,

- juger que Mondial Relay était irrecevable à agir à l'égard de Dil ;

- juger que l'apport partiel d'actif de Dil à My Matelas était opposable à Mondial Relay;

- juger que les sommes dues par Alliance, prise en la personne de maître Véronique Bécheret, ès qualités de liquidateur judiciaire de My Matelas, à Mondial Relay n'excèdent pas 60 589,40 euros ;

- juger que My Matelas était bien fondée en sa demande de délais de paiement ;

En conséquence, statuant à nouveau,

- échelonner sur une année en douze échéances égales le paiement de la somme de

60 589,40 euros pour My Matelas ;

- prescrire que les sommes correspondantes aux échéances reportées porteront intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure pertinente pour chaque facture ;

- débouter la société Mondial Relay de toutes autres demandes, fins et conclusions ;

En tout état de cause,

- condamner la société Mondial Relay à verser à la société Dil et à la Selas Alliance, prise en la personne de maître Véronique Bécheret, ès qualités de liquidateur judiciaire de My Matelas, la somme de 3000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mondial Relay aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 1er avril 2020 par la société Mondial Relay, qui demande à la cour d'appel de :

A titre principal,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Lille Métropole en ses dispositions sauf en ce qu'il a ordonné à la société Mondial Relay de régler la somme de 6 446,74 euros dans les trente jours après l'encaissement total de ses créances ;

Pour le surplus, statuant à nouveau,

- constater que les sommes dues par la société Dil et My Matelas s'élèvent à la somme totale de 80 817,51 euros ;

- condamner solidairement les sociétés Dil et My Matelas à payer à la société Mondial Relay la somme supplémentaire de 10 630,90 euros TTC, laquelle portera intérêts au taux d'intérêts appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter de la première mise en demeure, le 7 avril 2017, sauf pour la société My Matelas, à remplacer cette condamnation par une admission au passif chirographaire ;

A titre subsidiaire,

- admettre au passif chirographaire de la société My Matelas les sommes suivantes :

- 80 817,51 euros en principal au titre des factures impayées majorée des intérêts de retard selon le taux d'intérêt pratiqué par la BCE à son opération de financement la plus récente majoré de 7 points, à compter de la mise en demeure du 7 avril 2017 ;

- 560 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement en application des dispositions de l'article D441-5 du code de commerce ;

- la capitalisation des intérêts,

En tout état de cause,

- débouter les sociétés Dil et My Matelas de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner les sociétés Dil et My Matelas à payer solidairement à la société Mondial Relay la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers frais et dépens d'appel.

Vu l'ordonnance de clôture du 14 avril 2021,

SUR CE,

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

Il sera simplement rappelé que les sociétés Dil, My Matelas et Matelas Express, qui appartiennent au groupe Dil, sont spécialisées dans la vente de produits de literie par e-commerce.

La société Mondial Relay exerce une activité d'acheminement de colis.

Le 22 janvier 2013, la société Mondial Relay a conclu avec la société Dil, à la tête du groupe Dil, un contrat de prestations de services de livraisons.

Le 7 avril 2017, la société Mondial Relay a mis en demeure la société Dil de régler la somme de 103 571,51 euros au titre de retards de paiement.

Divers échanges visant à résoudre des différends commerciaux les opposant ont amené la société Mondial Relay à proposer de reconduire, pour l'année 2016, une remise de fin d'année accordée à la société Dil à hauteur de 6 446,74 euros, et à faire un geste commercial à hauteur de 15 000 euros, moyennant le règlement de l'ensemble des impayés sur 4 mois.

L'échéancier n'a pas été respecté, et le dirigeant du groupe Dil, M. X invoquant un problème de fabrication de leurs matelas, et a proposé sous le timbre de la société Dil un nouvel échéancier prévoyant un règlement de la dette en cinq échéances à compter du 27 décembre 2017, qui a été rejeté par la société Mondial Relay.

Entre temps, le 17 octobre 2017, la société Dil a opéré par traité d'apport partiel d'actif à la société My matelas, sa filiale, le transfert de son activité de commerce électronique de produits liés à la literie.

Le 28 décembre 2017, la société Mondial Relay a assigné la société Dil devant le tribunal de commerce de Lille Métropole puis, le 28 février 2018, les sociétés Matelas Express et My Matelas en paiement de l'encours restant dû.

C'est dans ce contexte qu'est intervenue la décision dont appel.

Par jugement du 5 septembre 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert à l'encontre de la société My Matelas une procédure de liquidation judiciaire, et a désigné la Selas Alliance pris en la personne de maître Véronique Becheret, en qualité de liquidateur judiciaire.

Par ordonnance du 14 novembre 2019, le conseiller de la mise en état a prononcé l'interruption de l'instance pour permettre la mise en cause du liquidateur et la production de la déclaration de créance de la société mondial Relay à la procédure collective.

Pour conclure à l'infirmation du jugement, la société Dil, la société My Matelas et la Selas Alliance font valoir en premier lieu que la société Mondial Relay est irrecevable à agir pour défaut d'intérêt à l'encontre de la société Dil, en raison de l'apport partiel d'actif de la société Dil à la société My Matelas, rétroactif au 1er janvier 2017 de sorte que les opérations postérieures à l'inventaire établi au 31 décembre 2016 sont réputées avoir été faites pour le compte de My Matelas ; sur le fond, elles font valoir que l'ensemble du passif et de l'actif rattaché à la branche d'activité apportée a été transmis universellement et de plein droit par la société apporteuse à la société bénéficiaire, que la société Mondial Relay n'a pas formé opposition à l'apport partiel d'actif devant le tribunal de commerce dans les 30 jours de la publication du projet d'apport d'actif au BODACC, sans obligation particulière autre d'information, et que dès lors l'opération d'apport partiel d'actif lui est opposable, que la société My Matelas est devenue débitrice des sommes restant dues à Mondial Relay au titre du contrat ; elles opposent que les conditions de l'action paulienne évoquées par la société Mondial Relay ne sont pas réunies, Mondial Relay n'apportant aucune preuve d'une quelconque intention de la société Dil d'échapper aux obligations contractées à son égard, ni de l'existence de manoeuvres particulières, qu'elle n'est qu'un créancier chirographaire, disposant du droit de gage général ; en outre, la preuve de l'insolvabilité de la société Dil n'a pas été rapportée ; elles font valoir que la solidarité prononcée par le tribunal est sans fondement, car les sociétés Dil et My Matelas constituent des entités distinctes, sans confusion entre elles ni apparence de solidarité ; elles soutiennent que le tribunal a retenu un montant de créance erroné, que le montant de la dette de la société My Matelas est de 60 589,40 euros et non pas de 70 186,61 euros ; elles sollicitent des délais de paiement, en raison de leur bonne foi et de difficultés rencontrées qui relevaient de la force majeure.

La société Mondial Relay oppose que le traité d'apport partiel d'actif lui est inopposable en raison d'éléments manquants qui ne lui permettent pas de connaître exactement l'étendue des dettes qui sont transmises à la société bénéficiaire ; elle considère que cette inopposabilité résulte également de l'existence d'une fraude paulienne, dont les conditions légales sont réunies, la société Dil ayant, selon elle, entendu se débarrasser d'une branche d'activité déficitaire et de continuer à faire des profits, s'appauvrissant en fraude des droits du créancier, en outre, elle n'a pas été informée de ce traité ; elle oppose également que si en effet elle n'a signé de contrat cadre qu'avec la Sas Dil, la confusion existant entre les différentes sociétés du groupe Dil, menées par M X, conduisent à considérer que ce contrat profite également à la société My Matelas, qu'en outre la Sas Dil s'est immixée dans la gestion des affaires de la société My Matelas, ce qui justifie que les deux sociétés soient condamnés solidairement au paiement des dettes dues à la société Mondial Relay ; elle soutient que le total des impayés s'élève à la somme de 80 817,51 euros TTC, et sa créance doit donc être admise au passif de la liquidation judiciaire de la société My Matelas ; elle s'oppose à tous délais de paiement, les difficultés financières alléguées n'étant pas justifiées:

Sur l'opposabilité à la société Mondial Relay de l'apport partiel d'actif de la société Dil à la société My Matelas

L'article L236-22 du code de commerce, alinéa 1er, dispose que la société qui apporte une partie de son actif à une autre société et la société qui bénéficie de cet apport peuvent décider d'un commun accord de soumettre l'opération aux dispositions des articles

L. 236-16 à L. 236-21, qui régissent les scissions de sociétés.

Aux termes de l'article L236-20 du code de commerce, 'Les sociétés bénéficiaires des apports résultant de la scission sont débitrices solidaires des obligataires et des créanciers non obligataires de la société scindée, au lieu et place de celle-ci sans que cette substitution emporte novation à leur égard.'

L'article L236-21 dispose que : ' Par dérogation aux dispositions de l'article L. 236-20, il peut être stipulé que les sociétés bénéficiaires de la scission ne seront tenues que de la partie du passif de la société scindée mise à la charge respective et sans solidarité entre elles.

En ce cas, les créanciers non obligataires des sociétés participantes peuvent former opposition à la scission dans les conditions et sous les effets prévus aux alinéas deuxième et suivants de l'article L. 236-14".

En l'espèce, il est versé aux débats un traité d'apport partiel d'actif du17 octobre 2017 prévoyant que la société Dil s'oblige à apporter à la société My Matelas qui l'accepte, les biens relatifs à sa branche d'activité autonome et complète (par rapport à sa détention de participation) à charge de reprendre les passifs y afférent, précision étant faite à la ligne suivante que l'activité précitée est entendue comme le e-commerce.

Les parties ont convenu que toutes les opérations actives et passives effectuées par la société Dil depuis le 1er janvier 2017 jusqu'au jour de la réalisation définitive de l'opération d'apport partiel d'actif seront réputées être faites pour le compte de la société My Matelas ; elles ont également convenu expressément de soumettre l'apport partiel d'actifs au régime des scissions, en particuliers aux dispositions des articles L236-16 à L.236-21 du code de commerce.

A l'article 5 de l'accord ' charges et conditions de l'apport', il était précisé que 'd'une manière générale, la société My Matelas sera subrogée purement et simplement dans tous les droits, actions, obligations et engagements divers de la société Dil, sans solidarité'.

Lorsque l'apport partiel d'actif est ainsi soumis au régime des scissions, il est admis, en ce qui concerne la branche d'activité faisant l'objet de l'apport, qu'il y a transmission universelle du patrimoine à la société bénéficiaire, qui se substitue à la société apporteuse dans tous ses droits, biens et obligations.

Il est également admis que la société apporteuse reste solidairement obligée avec la société bénéficiaire au paiement des dettes transmises à cette dernière, sauf dérogation conventionnelle telle que prévue à l'article L. 236-21 du code de commerce.

Il résulte de ces dispositions législatives et des éléments de l'espèce que le traité d'apport partiel d'actif sus visé, qui portait clairement sur l'ensemble des éléments d'actif et de passif de la branche e-commerce de la société Dil, de laquelle relevaient les créances de la société Mondial Relay, a opéré une transmission universelle du patrimoine de la société apporteuse à la société bénéficiaire, que la règle permettant de tenir malgré cette transmission les sociétés comme coobligées solidaires des créanciers a été écartée conventionnellement, qu'il est pas contesté que la société Mondial Relay n'a pas formé opposition à l'opération d'apport, dans les conditions et sous les effets prévus aux alinéas deuxième et suivants de l'article L. 236-14, qui prévoient que : 'Les créanciers non obligataires des sociétés participant à l'opération de fusion et dont la créance est antérieure à la publicité donnée au projet de fusion peuvent former opposition à celui-ci dans le délai fixé par décret en Conseil d'Etat. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne, soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties si la société absorbante en offre et si elles sont jugées suffisantes.

A défaut de remboursement des créances ou de constitution des garanties ordonnées, la fusion est inopposable à ce créancier.

L'opposition formée par un créancier n'a pas pour effet d'interdire la poursuite des opérations de fusion

Les dispositions du présent article ne mettent pas obstacle à l'application des conventions autorisant le créancier à exiger le remboursement immédiat de sa créance en cas de fusion de la société débitrice avec une autre société'.

Aucune autre disposition n'imposait à la société Dil, au motif de relations commerciales difficiles, d’informer particulièrement la société Mondial Relay du projet d'acte d'apport partiel de ses actifs à la société My Matelas, alors même qu'il n'existait entre eux aucun lien d'instance.

La société My Matelas s'est donc substituée à la société Dil dans ses relations avec la société Mondial Relay du fait de la transmission universelle résultant de l'acte d'apport d'actif et les dispositions de l'acte s'opposent à voir retenir une solidarité entre les sociétés apporteuse et bénéficiaire.

En outre, la société Mondial Relai ne verse pas aux débats de pièces justifiant d'échanges entre les parties postérieurement au 13 octobre 2017, la confusion alléguée par elle entre les sociétés Dil et My Matelas n'étant pas démontrée.

La société Mondial Relay invoque le bénéfice de l'action paulienne pour que l'apport des actifs de la société Dil à la société My Matelas lui soit déclaré inopposable.

L'article 1341-2 du code civil dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce dispose que 'Le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude'.

Il est admis que l'action paulienne peut s'appliquer à un traité d'apport partiel d'actif lorsque celui-ci a pour effet de faire échapper un bien aux poursuites du créancier le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler et en tous cas plus difficiles à appréhender.

Cependant, en l'espèce, la transmission universelle de patrimoine de la branche e-commerce de la société Dil à la société My matelas a institué cette dernière débitrice de la créance de la société Mondial Relay en lieu et place de la société Dil, supportant sur ses propres actifs la garantie constituée du droit de gage général des créanciers.

Les actifs apportés par la société Dil à la société My Matelas, d'une valeur totale de 2153791,79 euros, comportaient notamment un poste 'autres immobilisations corporelles' valorisé à la somme de 212 419,01 euros et des stocks valorisés à la somme de 487 379 euros, soit un total de biens corporels de 699 798, 01 euros qui permettait à la société Mondial Relay l'exercice sur les biens de la société My Matelas de son droit de gage général dans des conditions normales de saisie des biens physiques meubles et immeubles.

L'acte d'apport partiel faisait ressortir un actif net apporté de 239 552 euros, de sorte qu'il ne peut être soutenu que la transmission universelle du patrimoine s'est faite avec un passif trop important compromettant les chances de paiement des créances par la société bénéficiaire ou rendant plus difficile le recouvrement des créances.

Le 28 février 2018, à la date de son assignation par la société Mondial Relay, la société My Matelas n'avait pas encore fait l'objet d'une procédure collective.

Le droit de gage général des créanciers de celle-ci n'apparaissait pas au 17 octobre 2017 anormalement compromis du fait de l'apport partiel des actifs opéré par la société Dil.

La société Mondial Relay, qui revendique une créance de 80 817,51 euros, a vu les perspectives de recouvrement de sa créance compromises non pas du fait des conditions de l'apport partiel du 17 octobre 2017, qui lui permettait d'exercer de façon normale son droit le gage général sur le patrimoine de son obligée la société My Matelas, mais du fait du jugement ouvrant à l'encontre de celle-ci une procédure de liquidation judiciaire, postérieurement à son assignation.

Il ne résulte donc pas de l'acte d'apport partiel du 17 octobre 2017 lui-même une atteinte frauduleuse aux droits de la société Mondial Relay susceptible de le faire déclarer inopposable à celle-ci.

L'apport partiel d'actif concernant la branche e-commerce par la société DIL à sa filiale My Matelas est en conséquence opposable à la société My matelas qui, n'ayant plus de créance à l'encontre de la société apporteuse, n'a pas d'intérêt à agir contre elle et doit être déclarée irrecevable en sa demande de condamnation solidaire à son endroit.

Le jugement du 23 janvier 2019 du tribunal de commerce de Lille Métropole sera infirmé de ce chef.

Sur le quantum de la créance

Il est justifié des liens contractuels entre les parties par production aux débats du contrat de prestations de service du 22 janvier 2013 régularisé entre la société Mondial Relay et la société Dil SAS, et portant sur l'acheminement des colis de celle-ci.

La société Mondial Relay a procédé le 2 mars 2020 à la déclaration auprès du liquidateur judiciaire de sa créance en reprenant notamment à titre de principal les éléments suivants :

- 70 186,61 euros au titre des factures non payées par la société My Matelas, majorés des intérêts au taux d'intérêts appliqué par la BCE à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage à compter de la première mise en demeure, le 7 avril 2017,

- 10 630,90 euros portant intérêts dans les mêmes conditions.

Il ressort des pièces versées aux débats par les sociétés Dil et My Matelas que le compte fournisseur

Mondial Relay de la société Sas My Matelas présentait au 30 avril 2018 un solde créditeur de 83 589,40 euros.

Les appelantes soutiennent dans leurs dernières conclusions n'être redevables que de la somme de 60 589,40 euros mais ne justifient pas de paiements postérieurs au 30 avril 2018, et allèguent devoir bénéficier d'un avoir de 6 446,74 euros au titre de la remise de fin d'année pour l'année 2016, ainsi que de remises au titre des 'non qualités' pour la somme de 10 630,90 euros ; il ressort cependant d'un échange de courriels des 21 et 26 juin 2017 entre les parties que la société Mondial Relay avait proposé d'établir à la société Dil un avoir de 6 446,74 euros au titre de la remise de fin d'année pour l'année 2016 et de la faire bénéficier d'un geste commercial de 15 000 euros, sous condition de règlement global des factures non honorées avant la fin du mois de juin 2017 ; la condition de règlement des factures impayées n'ayant pas été respectée, cette proposition est caduque et ne peut être retenue dans le décompte entre les parties.

En conséquence, en absence de justificatif de règlements postérieurs au mois d'avril 2018, la créance de la société Mondial Relay doit être fixée au passif de la société My Matelas pour la somme totale de 80 817, 51 euros, majorée des intérêts de retard selon le taux d'intérêt pratiqué par la BCE à son opération de financement la plus récente majoré de 7 points, à compter de la mise en demeure du 7 avril 2017, auxquels il sera fait application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

Le recouvrement de la créance devant intervenir dans le cadre de la procédure collective, il n'y a pas lieu au paiement de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement prévu par l'article D441-5 du code de commerce, la demande sera rejetée sur ce point.

Sur la demande de délais de paiement de la société My Matelas

La procédure de liquidation judiciaire ne permet pas le règlement de la dette dans le cadre d'un échéancier de paiement, la demande de la société My Matelas sera rejetée.

Sur les indemnités de procédure et les dépens

Le sens du présent arrêt commande de condamner sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la société My Matelas à payer à la société Mondial Relay une indemnité procédurale de 3 000 euros, le surplus des demandes formées de ce chef étant rejeté.

Les dépens seront employés en frais de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Lille Métropole le 23 janvier 2019 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Déclare le traité d'apport partiel du 17 octobre 2017 entre les sociétés Dil et My Matelas opposable à la société Mondial Relay ;

Déclare la société Mondial Relay irrecevable en sa demande de paiement à l'encontre de la société Dil pour défaut d'intérêt à agir ;

Fixe au passif de la société My Matelas la créance de la société Mondial Relay pour la somme de 80 817, 51 euros, majorée des intérêts de retard selon le taux d'intérêt pratiqué par la BCE à son opération de financement la plus récente majoré de 7 points, à compter de la mise en demeure du 7 avril 2017, auxquels il sera fait application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;

Déboute la société Mondial Relay et la société My Matelas de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile la société My Matelas à payer à la société Mondial Relay une indemnité procédurale de 3 000 euros ;

Les entiers dépens seront employés en frais de procédure collective.