Cass. soc., 13 mars 2019, n° 17-28.017
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Farthouat-Danon
Avocats :
SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 236-3, L. 236-20 et L. 236-22 du code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que sauf dérogation expresse prévue par les parties dans le traité d'apport, l'apport partiel d'actif emporte lorsqu'il est placé sous le régime des scissions, transmission universelle de la société apporteuse à la société bénéficiaire de tous les biens, droits et obligations dépendant de la branche d'activité qui fait l'objet de l'apport ;
Attendu, selon l' arrêt attaqué, que W... J... a travaillé sur le site du Pont d'Arcole à Beauvais, exploité successivement par les sociétés Lokheed DB devenue Bendix puis les sociétés AlliedSignal systèmes de freinage (ASSF) et AlliedSignal Europe services techniques (ASEST), filiales françaises du groupe AlliedSignal ; que postérieurement à la rupture du contrat de travail, aux termes d'un traité d'apport ("Asset Purchase Agreement") du 29 février 1996 à effet du 1er avril 1996, régi par les lois de l'Etat de New-York, la société AlliedSignal Inc a cédé à la société M... V... GmbH son activité exercée aux Etats-Unis et dans d'autres pays ; qu'en application de ce traité, deux traités d'apport ont été conclus à Paris le 27 juin 1996 aux termes desquels les sociétés ASSF et ASEST ont apporté à la société Q... Systèmes de freinage devenue M... V... France (ci-après M... V...) la branche activité freinage du groupe AlliedSignal en France exploitée sur le site en cause, à compter du 1er avril 1996, l'apport partiel d'actif étant placé sous le régime des scissions ; que cet établissement a été inscrit par arrêté ministériel du 3 juillet 2000, modifié par arrêté du 12 octobre 2009, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période de 1966 à 1985 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de la société M... V... à lui payer des dommages-intérêts en réparation de son préjudice d'anxiété ;
Attendu que pour déclarer cette demande irrecevable et mettre la société M... V... hors de cause, l'arrêt retient que, sur l'application du principe de la transmission universelle, l'économie de l'article L. 236-3 du code de commerce et l'interprétation jurisprudentielle qui en a été faite ont manifestement pour objectif de ménager les droits et intérêts des salariés en cas de disparition de la société cédante en évitant de les priver de tout recours, qu'en l'espèce, la société apporteuse n'a pas disparu puisqu'elle existe, sans que cela soit contesté, sous la dénomination Honeywell systèmes de freinage, et que la possibilité offerte au salarié d'un recours auprès de cette dernière fait en conséquence échec à l'application du principe de la transmission universelle ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants, sans qu'il résulte de ses constatations que l'obligation était étrangère à la branche d'activité apportée ou expressément exclue par le traité d'apport, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation de l'arrêt du 6 décembre 2016, entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt rectificatif du 10 octobre 2017 qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Constate l'annulation de l'arrêt rendu le 10 octobre 2017 par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.