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Décisions

Cass. com., 13 juin 1995, n° 94-21.003

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Canivet

Avocat général :

Mme Piniot

Avocats :

SCP Tiffreau et Thouin-Palat, SCP Nicolay et de Lanouvelle, SCP Célice et Blancpain

T. com. Nanterre, 1re ch., du 13 sept. 1…

13 septembre 1994

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué, que, réunis en assemblée, les porteurs d'obligations remboursables en actions (ORA) émises par la société Métrologie international, ont approuvé les mesures proposées par la société émettrice dans le cadre d'un plan de restructuration financière et consistant à modifier la date d'échéances de ces titres et leur parité de remboursement ; que l'Association de défense des porteurs desdites ORA (l'association) et M. Y... ont assigné la société émettrice ainsi que MM. X... et François, en qualité de représentants de la masse des porteurs d'ORA, en annulation des délibérations de cette assemblée ;

Sur les moyens uniques des pourvois incidents, rédigés en termes identiques :

Attendu que l'association et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir dit que les porteurs d'ORA de la société Métrologie international peuvent être regroupés en une masse, alors, selon le pourvoi, que le législateur a expressément distingué en les traitant dans des sections différentes les obligations pures et simples et les ORA ; que ces dernières, temporairement obligations, sont, dès leur émission, des actions en puissance et deviennent définitivement et nécessairement des actions en acte à leur échéance ; que ces valeurs mobilières ont donc les caractéristiques majeures des actions dès leur émission et ne sont pas soumises au régime des obligations ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 293 de la loi du 24 juillet 1966 par fausse application ;

Mais attendu qu'outre les dispositions particulières des articles 339-1 et suivants de la loi du 24 juillet 1966 par application desquelles elles sont créées, les ORA sont, avant leur remboursement, soumises aux dispositions des articles 284 et suivants de ladite loi ; que la cour d'appel a donc jugé à bon droit que les porteurs d'ORA jouissent des droits liés à la propriété d'obligations et notamment celui d'être groupés de plein droit dans une masse ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique du pourvoi n° 94-21.003, pris en sa première branche :

Attendu que les représentants de la masse des porteurs d'ORA Métrologie international émises au mois de mars 1989 font grief à l'arrêt d'avoir dit que les sociétés Avenir participation, Paribas électronique développement, Générale commerciale et financière & associés, ne pouvaient participer au vote sur les résolutions soumises à l'assemblée générale des titulaires d'ORA qui s'est tenue le 18 juillet 1994 et annulé cette assemblée générale par application des dispositions de l'article 308, alinéa 4, de la loi du 18 juillet 1994, alors, selon le pourvoi, que les représentants de la masse des porteurs d'ORA, dûment autorisés par l'assemblée générale, ont seuls qualité pour engager, au nom de ceux-ci, toutes actions ayant pour objet la défense des intérêts communs des obligataires ; qu'en omettant de déclarer d'office irrecevable une action engagée par des porteurs d'obligations remboursables en actions et tendant à l'annulation d'une assemblée générale d'obligataires qui aurait été tenue en violation des articles 308, alinéa 4, et 317 de la loi du 24 juillet 1966, la cour d'appel a violé l'article 301 de ladite loi ;

Mais attendu que les dispositions de la l'article 301 de la loi du 24 juillet 1966 n'interdisent pas aux obligataires d'agir individuellement en annulation des délibérations de leurs assemblées ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi n° 94-21.003, pris en sa deuxième branche, et sur le moyen unique du pourvoi n° 94-21.436, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles 5 et 308, alinéa 4, de la loi du 24 juillet 1966 ;

Attendu que l'interdiction faite à une société qui détient au moins 10 % du capital de la société débitrice de voter à l'assemblée des obligataires ne peut résulter que de sa participation directe dans le capital de cette société ;

Attendu que pour annuler les délibérations de l'assemblée des obligataires de la société Métrologie international, l'arrêt retient que " la Compagnie financière Paribas, qui est le banquier de la société, émettrice, détient directement 11,37 % du capital de celle-ci qu'elle contrôle à hauteur de 21,6 % à travers les sociétés Avenir participation, Paribas électronique développement et Générale commerciale et financière & associés " qui ont pris part au vote et " qu'elle contrôle 100 % des deux premières dont les dirigeants sont ses salariés et 31,5 % de la dernière " ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que les sociétés Avenir participation, Paribas électronique développement, Générale commerciale et financière & associés étaient des personnes juridiquement distinctes et qu'aucune d'elles ne détenait directement au moins 10 % du capital de la société Métrologie international, la cour d'appel a violé les dispositions des textes susvisés ;

Et sur le moyen unique du pourvoi n° 94-21.003, pris en sa troisième branche, et sur les première, deuxième et troisième branches du moyen unique du pourvoi n° 94-21.436 :

Vu les articles 5 et 308, alinéa 4, de la loi du 24 juillet 1966 ;

Attendu que pour annuler les délibérations de l'assemblée des obligataires de la société Métrologie international, l'arrêt retient que les sociétés Avenir participation, Paribas électronique développement et Générale commerciale et financière & associés, filiales à 100 % de la Compagnie financière de Paribas, ayant toutes trois leur siège social ..., détiennent respectivement 8 000, 9 290 et 90 625 ORA émises par la société Métrologie international, soit 22,36 % de l'émission, qu'ainsi, au travers du vote exprimé par un mandataire unique de ces trois sociétés, par ailleurs salarié du groupe Paribas, ce sont bien les intérêts du groupe et la volonté de l'actionnaire principal de la société Métrologie international qui ont prévalu à l'assemblée générale des porteurs d'ORA émises par cette société, qu'il existe une absence évidente d'indépendance " des organes de la filiale " à l'égard de la " société mère " ;

Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que la Compagnie financière Paribas avait imposé aux sociétés Avenir participation, Paribas électronique développement, Générale commerciale et financière & associés des décisions contraires à leur intérêt social, en particulier, portant une atteinte illégitime à leurs droits d'obligataires de la société Métrologie international, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois n°s 94-21.003 et 94-21.436 :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 novembre 1994, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris.