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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 3, 13 janvier 2010, n° 08/16386

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

M. Delestre (és qual.)

Défendeur :

Hôtel De Moscou (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gaboriau

Conseillers :

Mme Imbaud-Content, Mme Porcher

Avoués :

SCP Hardouin, SCP Fisselier - Chiloux - Boulay

Avocats :

Me Le Bris, Me Lagrange, Me Riglet

TGI Paris, du 3 juill. 2008, n° 07/04340

3 juillet 2008

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement en date du 3 juillet 2008, rendu par le tribunal de grande instance de Paris qui a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, statué en ces termes :

Dit qu'à défaut de stipulation contractuelle, Monsieur Jean-Pierre DELESTRE ne peut contraindre la S.A. Société HOTEL DE MOSCOU à payer un loyer majoré de la T.V.A.

Dit que les causes du commandement de payer délivrer le 20 juillet 2006 au visa de la clause résolutoire ne sont dues,

Dit que ce commandement est nul et de nul effet,

Condamne Monsieur Jean-Pierre DELESTRE à payer à la S.A. Société HÔTEL DE MOSCOU la somme de 11 851,11 Euros avec intérêts de droit à hauteur de la somme de 7.957,94 Euros à compter du 17 mars 2007 et pour le surplus à compter du prononcé du présent jugement,

Dit que la C.R.L. ne constitue pas une charge récupérable,

Dit que la S.A. Société HÔTEL DE MOSCOU fondée à demander la restitution des sommes versées à ce titre dans les limites de la prescription quinquennale,

Déboute la S.A. Société HÔTEL DE MOSCOU de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

Déboute Monsieur Jean-Pierre DELESTRE de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamne Monsieur Jean-Pierre DELESTRE à payer à la S.A. Société HÔTEL DE MOSCOU la somme de 4.500 Euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamne Monsieur Jean-Pierre DELESTRE aux entiers dépens.

' Vu l'appel relevé par Monsieur Jean-Pierre DELESTRE à l'encontre de ce jugement,

' Vu les dernières conclusions :

' ' de l'appelant, déposées au greffe de la Cour, le 29 mai 2009 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au terme desquelles Monsieur Jean-Pierre DELESTRE poursuivant la réformation de la décision entreprise prie la cour de :

Débouter la Société HOTEL DE MOSCOU de toutes ses demandes fins et conclusions,

Dire que Monsieur Jean-Pierre DELESTRE est fondé à réclamer à la Société HOTEL DE MOSCOU la TVA sur les loyers,

Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour confirmerait le jugement en ce qu'il a ordonné la restitution des sommes versées au titre de la CRL, dire que cette restitution ne pourra avoir lieu que dans les limites de la prescription quinquennale,

Sollicitant, en outre, l'allocation d'une somme de 4500€ en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

' ' de l'intimée, déposées au greffe de la Cour, le 17 juin 2009 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, au terme desquelles la Société HOTEL DE MOSCOU, concluant, au visa des articles 1134 et 2277 du Code civil, au rejet de toutes les prétentions adverses, poursuit la confirmation de la décision entreprise en formant, toutefois, appel incident.

Elle prie, ainsi, la Cour de :

Dire que la restitution des sommes versées au titre de la CRL n'est pas limitée à la prescription quinquennale,

Condamner Monsieur Jean-Pierre DELESTRE à payer à la Société HOTEL DE MOSCOU une somme de 20 000€ à titre de dommages et intérêts,

Sollicitant, en outre, l'allocation d'une somme de 7500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Discussion

Sur l'assujettissement à la TVA

Il sera en liminaire rappelé que conformément à l'article 260 du Code général des impôts, les personnes qui donnent à bail des locaux pour les besoins de l'activité du preneur peuvent, sur leur demande, acquitter la taxe sur la valeur ajoutée.

Ce n'est pas le droit d'option au plan fiscal du bailleur qui est en cause devant la cour, juridiction judiciaire, mais la question de savoir si, le bailleur ayant unilatéralement décidé cette option il peut en réclamer la récupération sur le preneur même si celui-ci n'y consent pas.

Le bail commercial, en date du 2 juillet 1997 (en renouvellement, à compter du 1er juillet 1994, d'un bail du 4 septembre 1985), faisant état d'une destination de Hôtel meublé loueur en garni, et dans lequel il n'est aucunement fait allusion à l'assujettissement du loyer à la TVA, stipule (6°/) que le preneur s'engage à acquitter 'les impôts et contributions de toute nature assis ou asseoir sur l'immeuble loué, y compris l'impôt foncier, les charges de ville et de police, le balayage, les charges d'égout, d'ordures ménagères et aussi tous autres impôts qui pourraient être créés en remplacement ou en compensation de ceux existant à ce jour'.

À cette époque, il est incontestable que le bailleur, payant la contribution sur les revenus locatifs, n'avait pas opté pour l'application de la TVA. Le bail n'a pas fait mention, par ailleurs, du fait que le bailleur se réservait la faculté d'opter pour ce régime en cours de bail.

Il ne saurait être valablement soutenu que la TVA, impôt qui existait lors de la signature de la convention et pour laquelle le bailleur aurait pu, d’ores et déjà, opter, a été créé en remplacement ou en compensation de ceux -les impôts- existant' au jour de la signature du bail.

Monsieur Jean-Pierre DELESTRE ne pouvant justifier d'une stipulation contractuelle prévoyant l'assujettissement des loyers à la TVA ne peut, comme l'a valablement décidé le premier juge, imposer au preneur de payer un loyer majoré de la TVA.

En ce qui concerne les conséquences de cette appréciation, Monsieur Jean-Pierre DELESTRE ne demande pas, à titre subsidiaire, la réformation du jugement entrepris d'autres chefs.

La décision entreprise sera donc, en ce qui concerne la TVA, totalement confirmée.

Sur le remboursement de la CRL

La contribution sur les revenus locatifs, imposition liée à la perception de revenus, ne peut être considérée comme assis sur l'immeuble loué au même titre que l'impôt foncier. Dès lors le premier juge a valablement considéré que la récupération sur le preneur n'était pas fondée. Tout paiement indu doit être répété en application de l'article 1376 du code civil, le seul fait que la Société HOTEL DE MOSCOU ait réglé cette somme ne prouvant pas son acquiescement au principe d'une telle récupération dont il n'est pas soutenu qu'elle serait due sur un autre fondement que le contrat, fondement erroné comme il vient d'être démontré.

Depuis la loi du 18 janvier 2005, la répétition des charges se prescrit par 5 ans. Ce nouveau délai court à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi sans que la durée totale puisse excéder la durée antérieurement appliquée savoir 30 ans.

La Société HOTEL DE MOSCOU produit un décompte faisant état d'un premier indu en date de 1992 savoir sur le fondement du bail antérieur à celui versé aux débats. La Société HOTEL DE MOSCOU a la charge de la preuve des sommes dont elle réclame le paiement et la cour ne peut se prononcer sur le caractère indu d'un paiement qu'au vu du contrat déterminant les obligations respectives des parties. La cour connaît celles-ci uniquement à compter du 1er juillet 1994, le bail antérieur n'étant pas produit aux débats.

Dès lors ce sont seulement les sommes réglées à compter de cette date qui peuvent donner lieu à répétition étant souligné que l'assignation étant en date du 17 mars 2007, la prescription n'était pas acquise selon l'application des principes qui viennent d'être énoncés.

La décision entreprise sera réformée en ce qu'il convient de donner une telle interprétation de la nouvelle prescription quinquennale et de fixer ainsi les limites de la répétition de l'indu.

Sur la demande dommages et intérêts

S'il est établi que Monsieur Jean-Pierre DELESTRE a demandé des sommes à tort à la Société HOTEL DE MOSCOU et a, de façon infondée, mis en oeuvre la clause résolutoire, l'intention de nuire de sa part n'est pas, pour autant, caractérisée. La décision entreprise sera également confirmée de ce chef.

Sur les autres demandes

Monsieur Jean-Pierre DELESTRE qui succombe en ses prétentions sera condamné aux entiers dépens de l'appel.

La nécessité d'apaiser les relations entre les parties commande de ne pas allouer de somme à la Société HOTEL DE MOSCOU devant la cour, en application de l'article 700 du Code de procédure civile. Celle accordée en première instance sera, par ailleurs confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en dernier ressort :

I. Confirme la décision entreprise sauf en ce qui concerne le chef lié à l'application de la prescription quinquennale et l'étendue de la répétition de la CRL,

II. Réformant la décision entreprise de ces chefs et statuant à nouveau,

' dit que délai de prescription quinquennale prévu par la loi du 18 janvier 2005 court à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi sans que la durée totale puisse excéder la durée antérieurement appliquée, savoir 30 ans,

' dit que la Société HOTEL DE MOSCOU est fondée à obtenir la restitution des sommes versées au titre de la CRL à compter du 1er juillet 1994,

III. Dit n'y avoir lieu à allocation, en cause d'appel, d'une somme en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

IV. Condamne Monsieur Jean-Pierre DELESTRE aux dépens d'appel et autorise sur sa demande, la SCP. FISSELIER-CHILOUX-BOULAY à recouvrer directement contre Monsieur Jean-Pierre DELESTRE ceux des dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.