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Décisions

Cass. com., 30 mars 2022, n° 19-20.624

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mollard

Rapporteur :

Mme Fevre

Avocats :

SAS Buk Lament-Robillot, SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Versailles, du 12 mars 2019

12 mars 2019

Déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 3 novembre 2016, examiné d'office

Vu l'article 978 du code de procédure civile :

1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application du texte susvisé.

2. Il résulte de ce texte qu'à peine de déchéance, le demandeur en cassation doit, au plus tard dans le délai de quatre mois à compter du pourvoi, remettre au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée.

3. Le mémoire en demande de la société [K] ne contenant aucun moyen de droit contre l'arrêt du 3 novembre 2016, il y a lieu de constater la déchéance de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cette décision.

Faits et procédure

4. Selon les arrêts attaqués (Versailles, 3 novembre 2016 et 12 mars 2019) et les productions, le 3 décembre 2007, la société [K], ayant une activité de culture de tomates sous serre, a conclu un contrat de crédit-bail avec la société Unifergie – Union pour le financement des économies d'énergie (la société Unifergie) afin de financer l'acquisition d'une chaudière et son installation.

5. Le 19 mars 2008, la société [K] a commandé à la société Reka France (la société Reka) une chaudière de marque Reka. Celle-ci a été installée et mise en service en novembre 2008 et la société Unifergie a payé à la société Reka 80 % du prix.

6. Se plaignant de dysfonctionnements rendant la chaudière impropre à son usage, la société [K] a refusé de la réceptionner et s'est opposée au paiement du solde du prix au vendeur par le crédit-bailleur.

7. La société Reka a assigné en paiement les sociétés Unifergie et [K]. Un jugement avant-dire droit a ordonné une expertise de la chaudière.

8. Se prévalant des conclusions de l'expert judiciaire, la société [K] a demandé, reconventionnellement, au vendeur l'indemnisation des préjudices subis du fait du fonctionnement défectueux de la chaudière et sa mise en conformité, ainsi que le rejet des demandes du crédit-bailleur formées contre elle, en l'absence de réception de l'ouvrage.

9. La société Reka ayant été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 7 janvier 2016 qui a désigné la Selarl Mars, prise en la personne de M. [T], en qualité de liquidateur, la société Unifergie a assigné cette dernière en intervention forcée.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La société [K] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'homologation des rapports d'expertise et de condamner, en conséquence, la société Unifergie à payer à la Selarl Mars, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Reka, la somme de 128 894,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 avril 2009, de confirmer le jugement en ce qu'il avait prononcé au 21 août 2009 la réception judiciaire de la chaudière, de condamner la société [K] à payer à la société Unifergie la somme de 774 410,69 euros outre les loyers à venir, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt et capitalisation des intérêts, de rejeter le surplus des demandes de la société [K] à l'égard de la Selarl Mars, ès qualités et de condamner la société [K] à payer à la société Unifergie la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour refuser d'homologuer le rapport d'expertise du 11 mai 2012 et juger qu'elle ne tiendrait compte que des extraits de ce rapport cités par le jugement et les conclusions des parties et non contestés, la cour a relevé qu'elle n'en avait pas été rendue destinataire, malgré ses demandes au tribunal et à l'avocat de la Selarl Mars, lequel avait visé ce rapport dans son bordereau de communication de pièces ; qu'en statuant ainsi sans inviter toutes les parties, et en particulier la société [K], à s'expliquer sur l'absence au dossier du rapport dont cette société demandait l'homologation, croyant légitimement qu'il avait été produit par la Selarl Mars, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :

11. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

12. Pour rejeter la demande d'homologation du rapport d'expertise, condamner le crédit-bailleur à payer le solde du prix au vendeur, prononcer la réception judiciaire de la chaudière au 21 août 2009, condamner le crédit-preneur à payer les loyers échus et à venir à la société Unifergie et rejeter en partie les demandes d'indemnisation de la société [K] contre la société Reka, l'arrêt relève que, malgré ses demandes adressées au tribunal de commerce ayant rendu le jugement entrepris et à l'avocat de la Selarl Mars, ès qualités, dont le bordereau de communication de pièces annexé à ses conclusions d'appel visait le rapport d'expertise, la cour d'appel n'a pas été rendue destinataire de ce document et qu'elle statuera en tenant compte des extraits non contestés cités dans le jugement et les écritures des parties.

13. En statuant ainsi, sans inviter toutes les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier du rapport d'expertise, dont elle avait constaté qu'il figurait au bordereau de communication de pièces annexé aux conclusions d'appel de la société Reka, représentée par la Selarl Mars, ès qualités, et dont la communication n'avait pas été contestée par la société [K], qui s'en prévalait au soutien de ses prétentions, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CONSTATE la déchéance du pourvoi en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2016 ;

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable l'appel formé par la société Unifergie, l'arrêt rendu le 12 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris.