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Décisions

Cass. soc., 23 mars 2022, n° 20-21.518

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cathala

Rapporteur :

Mme Marguerite

Avocat général :

Mme Grivel

Avocats :

SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Lévis

Paris, du 10 sept. 2020

10 septembre 2020

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 septembre 2020), Mme [I] a été engagée, à compter du 2 mai 2001, par la société BNP Paribas Lease Group, en qualité de juriste fiscaliste. Par accord entre la salariée, la société BNP Paribas Lease Group et la société BNP Paribas, le contrat de travail a été transféré à cette dernière à compter du 1er avril 2009.

2. La salariée a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir son positionnement à un autre niveau de la grille indiciaire, un rappel de salaire, des dommages-intérêts pour discrimination en raison de ses maternités, de son sexe et de son engagement syndical et pour harcèlement discriminatoire.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses troisième, cinquième et sixième branches, le deuxième moyen, pris en ses deuxième à douzième branches, et le troisième moyen du pourvoi principal, pris en ses deuxième à sixième branches, et le moyen du pourvoi incident, ci-après annexés

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches

Enoncé du moyen

4. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes concernant la période antérieure au 1er avril 2009, alors :

« 1°/ que, lorsque, dans le cadre d'une mobilité professionnelle organisée au sein d'un groupe, le contrat de travail d'un salarié est transféré d'une filiale vers une autre filiale du groupe avec poursuite de ce contrat selon les mêmes conditions, le nouvel employeur reste tenu des obligations à la charge du précédent employeur ; qu'en affirmant que la salariée n'était pas fondée à se prévaloir des manquements commis par la société BNP Paribas Lease Group après avoir pourtant constaté que le 13 mars 2009, la salariée avait été avertie par son employeur, la Société BNP Paribas Lease Group, que dans le cadre de la mobilité intra-groupe, son contrat de travail serait transféré à la société BNP Paribas et que par courrier en date du 24 mars 2009 signé par la société BNP Paribas Lease Group et la société BNP Paribas, il avait été indiqué à la salariée, que son contrat de travail était transféré au sein de la société BNP Paribas pour occuper un poste de juriste comme précédemment, avec reprise d'ancienneté, de sa classification et sa rémunération, de ses droits acquis au titre des congés payés et du DIF, ainsi qu'une absence de liquidation de ses droits acquis antérieurement, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que, constitue une application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, l'opération par laquelle, au sein d'un même groupe, et dans le cadre d'une mobilité encouragée et facilitée pour répondre aux besoins du groupe, une filiale transfère le contrat de travail d'un de ses salariés au sein de la société mère en application d'une convention prévoyant la poursuite du contrat de travail dans des conditions similaires, avec reprise d'ancienneté et des droits acquis chez le précédent employeur ; qu'en l'espèce, pour dire que les manquements de la société BNP Paribas Lease Group ne pouvaient engager la société BNP Paribas, la cour d'appel a relevé que les parties n'avaient pas prévu une application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-2 du code du travail qui mettent à la charge du nouvel employeur les obligations de l'employeur antérieur ; qu'en se déterminant ainsi, après avoir pourtant constaté que le 13 mars 2009, la salariée avait été avertie par son employeur, la société Paribas Lease Group, que dans le cadre de la mobilité intra-groupe, son contrat de travail serait transféré à la société BNP Paribas et que par courrier en date du 24 mars 2009, signé par la société Paribas Lease Group, la société BNP Paribas et la salariée, il avait été indiqué à celle-ci que son contrat de travail était transféré au sein de la société BNP Paribas pour occuper un poste de juriste comme précédemment, avec reprise d'ancienneté, de sa classification et sa rémunération, ainsi qu'une absence de liquidation de ses droits acquis antérieurement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1224-1 du code du travail, ensemble l'article 1103 du code civil.

4°/ qu'en retenant, pour dire que la salariée n'était pas fondée à se prévaloir des manquements commis avant le 1er avril 2009, que celle-ci avait accepté le transfert de son contrat de travail, que les parties n'avaient pas mentionné une reprise par la société BNP Paribas de l'ensemble des obligations mises à la charge du précédent employeur et n'avaient pas fait mention d'une application volontaire de l'article L. 1224-2 du code du travail, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants, a violé les articles L. 1224-1 et L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

5. La convention par laquelle un salarié quitte le poste qu'il occupait dans une entreprise pour entrer au service d'une autre entreprise appartenant au même groupe, organisant ainsi la poursuite du contrat de travail, hors application de l'article L. 1224-1 du code du travail, n'emporte pas la transmission au nouvel employeur de l'ensemble des obligations qui incombaient à l'ancien employeur, sauf stipulations expresses en ce sens.

6. La cour d'appel a constaté que la convention tripartie conclue entre la salariée et les deux employeurs successifs, qui avait pour objet la poursuite du contrat de travail au sein d'une autre société du groupe, avec maintien de l'ancienneté, de la même qualification et du même salaire, des droits acquis auprès du précédent employeur au titre des congés payés et du DIF, n'avait pas prévu une application volontaire des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, permettant de mettre à la charge du nouvel employeur l'ensemble des obligations de l'ancien employeur à la date de la modification de la situation juridique, ni ne mentionnait une reprise par le nouvel employeur de l'ensemble des obligations qui pesaient sur le précédent employeur au 1er avril 2009.

7. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, que la salariée n'était pas recevable à former à l'encontre du nouvel employeur des demandes fondées sur des manquements imputables au premier employeur.

8. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le troisième moyen, pris en sa première branche, réunis

Enoncé du moyen

9. Par le deuxième moyen, la salariée fait grief à l'arrêt de dire qu'elle avait seulement fait l'objet d'une discrimination dans la fixation de sa part variable de 2012 à 2014 en lien avec ses activités syndicales et de condamner l'employeur à lui verser la seule somme de 6 600 euros à titre de rappel de rémunération variable au titre de ces années, outre 4 000 euros en réparation de son préjudice moral, alors « que la cassation à intervenir du chef du premier moyen emportera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a dit que la salariée avait seulement fait l'objet d'une discrimination dans la fixation de sa part variable de 2012 à 2014 en lien avec ses activités syndicales et en ce qu'il a condamné la Société BNP Paribas à lui verser la seule somme de 6 600 euros à titre de rappel de rémunération variable au titre de ces années, outre 4 000 euros en réparation de son préjudice moral. »

10. Par le troisième moyen, la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé qu'elle avait été victime d'un harcèlement discriminatoire, en conséquence, de la débouter de ses demandes tendant à ce que soit ordonné son repositionnement au niveau J à compter du 1er janvier 2013 et au niveau K à compter du 1er janvier 2018, que sa rémunération fixe annuelle brute soit fixée à compter du 1er janvier 2018 à hauteur de 88 493,68 euros, subsidiairement, à hauteur de 72 429,12 euros, que son employeur soit condamné au rappel de salaires correspondants et de la débouter de ses demandes tendant à ce que l'avertissement en date du 30 janvier 2015 soit annulé et que l'employeur soit condamné à lui verser une certaine somme au titre du préjudice économique, la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice résultant du harcèlement discriminatoire et subsidiairement, la même somme sur le fondement de l'article L. 4121-1 du code du travail, outre la somme de 10 000 euros au titre des dommages-intérêts en raison de la violation des accords collectifs, alors « que la cassation à intervenir du chef du premier moyen emportera, par voie de conséquence, la censure de l'arrêt en ce qu'il a débouté la salariée de ses demandes au titre du harcèlement discriminatoire. »

Réponse de la Cour

11. Le rejet du premier moyen rend sans portée la première branche du deuxième moyen et la première branche du troisième moyen, qui invoquent une cassation par voie de conséquence.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois.