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Décisions

Cass. 2e civ., 8 décembre 2022, n° 19-20.143

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

M. Cardini

Avocat général :

M. Adida-Canac

Avocats :

SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, SCP Boutet et Hourdeaux

Paris, du 23 mai 2019

23 mai 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 mai 2019) et les productions, le 27 mai 2015, la société civile immobilière Rafy (la SCI) a fait pratiquer, en exécution de l'arrêt d'une cour d'appel, une saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières entre les mains de la société BNP Paribas (la banque) à l'encontre de l'association Église du christianisme céleste paroisse Saint-Esprit (l'association).

2. La banque a déclaré détenir un portefeuille-titres de parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI).

3. Par jugement du 19 février 2016, un juge de l'exécution a débouté l'association de sa contestation de la saisie.

4. Le 17 mars 2016, la SCI a signifié ce jugement à la banque et lui a donné ordre de procéder à la vente forcée des droits d'associé et valeurs mobilières appartenant à l'association et de payer les fonds saisis.

5. La banque a indiqué à l'huissier de justice qu'en raison de leur nature, elle ne pouvait faire procéder à la vente des parts de la SCPI.

6. La SCI a établi un cahier des charges en vue de la vente par adjudication des parts de la SCPI, qu'elle a fait signifier à la banque, laquelle lui a indiqué que, s'agissant de parts de la SCPI, la vente devait être effectuée entre les mains de la société de gestion, la société BNP Reim.

7. Ayant appris, après avoir signifié le cahier des charges à la société BNP Reim, que des parts de la SCPI avaient été vendues, l'huissier de justice n'a pas donné suite à la procédure de vente forcée.

8.La SCI a assigné la banque devant un juge de l'exécution en paiement d'une certaine somme en raison de l'absence de versement du prix de la vente des titres saisis.

Examen du moyen

9. Il est statué sur ce moyen après avis de la chambre commerciale du 30 mars 2022, sollicité en application de l'article 1015-1 du code de procédure civile.

Enoncé du moyen

10. La SCI fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant à voir condamner la banque à lui verser les sommes de 55 060,55 euros en raison de l'absence de versement du prix de la vente des titres saisis avec intérêts au taux légal à compter du 30 novembre 2017 et capitalisation des intérêts et de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, alors :

« 1°/ que si le titulaire de valeurs nominatives a chargé un intermédiaire habilité de gérer son compte, la saisie est opérée auprès de ce dernier ; que l'acte de saisie rend indisponibles les droits pécuniaires du débiteur ; qu'en retenant que la société Bnp Paribas, en sa qualité d'intermédiaire habilité pour l'ensemble des valeurs mobilières inscrites en compte au nom du débiteur auprès duquel a été opérée la saisie n'avait pas l'obligation d'informer la société émettrice des droits d'associés et valeurs mobilières saisis de leur indisponibilité, quand l'intermédiaire habilité est tenu d'informer le mandataire de la société émettrice de la saisie pratiquée et de l'indisponibilité en résultant, la cour d'appel a méconnu les articles R. 232-3 et R. 232-8 du code des procédures civiles d'exécution ;

2°/ que l'acte de saisie rend indisponibles les droits pécuniaires du débiteur ; qu'en retenant qu'il ne peut pas être reproché à la banque le fait que le produit de la vente des droits d'associés et valeurs mobilières saisis n'ait pas été versé au créancier poursuivant, quand le produit de la vente est indisponible entre les mains de l'intermédiaire habilité pour être affecté spécialement au paiement du créancier, la cour d'appel a méconnu l'article R. 232-8 du code des procédures civiles d'exécution. »

Réponse de la Cour

11. S'il résulte des dispositions des articles L. 211-14, L. 211-15, L. 211-17 et R. 211-1 du code monétaire et financier que les titres financiers sont négociables, qu'ils se transmettent par virement de compte à compte, que le transfert de leur propriété résulte de leur inscription au compte-titres de l'acquéreur et qu'ils ne sont matérialisés que par cette inscription, il ressort en revanche de l'article L. 211-14 du code monétaire et financier que les parts de sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) ne sont pas négociables, et de l'article L. 214-93 du même code que le transfert de leur propriété résulte d'une inscription, non au compte-titres de l'acquéreur, mais sur le registre des associés, cette inscription étant réputée constituer l'acte de cession écrit prévu par l'article 1865 du code civil.

12. Il s'en déduit que les parts de la SCPI ne sont pas des valeurs mobilières, de sorte que les dispositions de l'article R. 232-3, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution, qui s'appliquent aux seules valeurs mobilières nominatives, ne leur sont pas applicables.

13. La saisie des parts de la SCPI devant, dès lors, être effectuée, conformément aux dispositions de l'article R. 232-1 du code des procédures civiles d'exécution, entre les mains de la société émettrice de ces parts, la signification de l'acte de saisie à un intermédiaire chargé de gérer un compte-titres dans lequel ces parts ont été inscrites est dépourvue d'effet et ne rend pas indisponibles les droits pécuniaires du débiteur.

14. Aucune obligation légale ou réglementaire n'impose à cet intermédiaire d'aviser la société émettrice de cette saisie ni de représenter les fonds issus d'une vente de ces titres.

15. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a constaté que la saisie portait sur des parts de sociétés civiles de placement immobilier, se trouve légalement justifiée.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.