Livv
Décisions

Cass. 2e civ., 14 janvier 2021, n° 18-23.238

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

Mme Dumas

Avocat général :

M. Aparisi

Avocats :

Me Balat, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Grenoble, du 26 juin 2018

26 juin 2018


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 26 juin 2018), par jugement d'un tribunal correctionnel du 26 mai 2011, M. N... a été déclaré coupable des faits de violence à l'encontre de Mme B....

2. Par jugement du 21 mars 2012, un tribunal de commerce a ouvert, à l'encontre de M. N..., une procédure de redressement judiciaire, puis par jugement du 21 novembre 2012, adopté un plan de redressement.

3. Par jugement du 2 octobre 2014, un tribunal de grande instance a déclaré M. N... responsable des conséquences dommageables de l'infraction et fixé la créance de Mme B... à certaines sommes.

4. Le 9 novembre 2016, la commission d'indemnisation des victimes d'infraction a alloué à Mme B... la somme de 34 705 euros à titre de dommages-intérêts, décision signifiée à M. N... le 31 mars 2017. Le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le FGTI) s'est acquitté de cette somme.

5. Les 5 avril et 20 juin 2017, le FGTI a fait procéder à deux saisies-attributions sur le compte de M. N..., que ce dernier a contestées devant un juge de l'exécution qui, par jugement du 23 novembre 2017, a dit que l'action en contestation de la seconde saisie était irrecevable et débouté M. N... de sa demande de mainlevée de la première.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

6. M. N... fait grief à l'arrêt de rejeter les moyens tirés de l'inopposabilité à son encontre de la créance de la victime et de débouter celui-ci de sa demande de mainlevée de la saisie-attribution du 20 juin 2017 pratiquée auprès de la société Homeserve alors « que le subrogé n'a pas plus de droits que son subrogeant au lieu et place duquel il agit ; qu'en affirmant que le Fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'autres infractions, en sa qualité de subrogé dans les droits de Mme B... en application des dispositions de l'article 706-11 du code de procédure pénale, était en droit d'obtenir à l'encontre de M. N... le remboursement des sommes qu'il avait versées à Mme B..., cependant que cette dernière n'a jamais eu de créance à l'encontre de M. N... dans la mesure où le jugement du 2 octobre 2014, qui sert de fondement à la saisie-attribution du 20 juin 2017, ne prononce aucune condamnation à l'encontre de M. N..., en redressement judiciaire à cette date, et que Mme B... n'a déclaré aucune créance indemnitaire au passif de cette procédure collective, de sorte que le Fonds ne pouvait se trouver subrogé dans des droits en réalité inexistants du subrogeant, la cour d'appel méconnu le principe susvisé et a violé l'article 1249 ancien du code civil, devenu l'article 1346 du même code, ensemble l'article 706-11 du code de procédure pénale. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 111-2 et L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution et 706-11 du code de procédure pénale :

7. La décision rendue par une juridiction, qui se borne à constater une créance et à en fixer le montant dans le cadre d'une procédure collective, ne constitue pas un titre exécutoire et ne peut, dès lors, servir de fondement à une mesure d'exécution forcée, et le fonds de garantie des victimes d'actes de terrorisme et d'infraction, subrogé dans les droits de la victime, ne peut se prévaloir que du titre exécutoire de condamnation de l'auteur de l'infraction au bénéfice de la victime des faits.

8. Pour rejeter la contestation de la saisie-attribution formée par M. N..., l'arrêt retient que le texte même de l'article 706-11 précité indique bien que le FGTI est en droit d'obtenir auprès de la personne déclarée responsable du dommage le remboursement des indemnisations versées à la victime, que M. N... a bénéficié d'un plan de continuation adopté le 21 novembre 2012, soit antérieurement à la décision fixant le montant précis de l'indemnisation, que l'adoption du plan a mis fin à la période d'observation et a remis le débiteur en capacité de gérer son entreprise sous réserve des mesures imposées par ce plan, que dès lors, les créances nées après l'adoption du plan relèvent du droit commun et doivent être payées à l'échéance.

9. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait par ailleurs que le jugement du 2 octobre 2014 avait seulement fixé les créances d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.