CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 18 mars 2004, n° 2003/02369
VERSAILLES
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
Walter Thompson (SA), Concept Consulting Group (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Laporte
Conseillers :
M. Fédou, M. Coupin
Avoués :
SCP Gas, Me Binoche
Avocat :
Me Libert
FAITS ET PROCEDURE :
La Société AEB MULTIMEDIA (ci-après "AEB") a été constituée par Madame Annie X... et Monsieur Bernard Y... le 21 mars 1997 sous la forme d'une société à responsabilité limitée; en mars 1998, la Société CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) a acquis une participation dans la Société AEB à concurrence de 34 % du capital social, Madame X... et Monsieur Y... continuant de détenir les 66 % restant. Au cours du dernier semestre 2000, des négociations sont intervenues entre la Société CCG et le Groupe J. WALTER THOMPSON (JWT), afin qu'il soit procédé à l'achat, via la Société LOUISE HOLDING, de l'ensemble des titres composant le capital de la Société CCG ;
L’acquisition de la Société CCG a été formalisée par la signature en date du 1er mars 2001 d'un contrat de cession d'actions entre les associés de cette société et la Société LOUISE HOLDING. Parallèlement, des négociations se sont déroulées entre les représentants de THOMPSON CORP., organisme chargé au sein du Groupe J. WALTER THOMPSON de l'activité commerciale et des relations avec la clientèle, et Madame Annie X..., en vue d'aboutir à une intégration de la Société AEB à la Société CCG. Le projet envisagé entre la Société CCG et Madame X... devait porter, non seulement sur l'acquisition des titres détenus par cette dernière, mais également sur la conclusion d'un contrat de travail, préalablement à l'absorption de la Société AEB par la Société CCG. Les négociations, plusieurs fois suspendues, ont été reprises une nouvelle fois au mois de février 2002 ; au mois de juillet 2002, la Société CCG et les membres de THOMPSON CORP. ont fait savoir à Madame X... qu'ils n'entendaient pas procéder aux opérations envisagées.
C'est dans ces circonstances que, par acte du 20 septembre 2002, Madame Annie X... a assigné les Sociétés CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) et J.WALTER THOMPSON, aux fins de constatation du caractère parfait de l'accord portant sur la cession de parts sociales, et de condamnation au paiement de la somme de 237.000 euros à titre de dommages-intérêts. Aux termes de ses écritures déposées le 21 janvier 2003, Madame X... a, à titre subsidiaire, sollicité la condamnation des défenderesses au paiement de la somme de 237.000 euros, à titre de dommages-intérêts, pour rupture subite et abusive des pourparlers de rachat des parts sociales.
Par jugement du 18 février 2003, le Tribunal de Commerce de NANTERRE a:
- débouté la Société J. WALTER THOMPSON de sa demande de mise hors de cause;
- dit qu'aucun accord parfait n'est intervenu, portant sur une cession de parts sociales entre Madame X... et la Société CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) ;
- débouté Madame X... de sa demande tendant à dire que les Sociétés CCG et JWT ont rompu de manière abusive les pourparlers ;
- condamné solidairement la Société J. WALTER THOMPSON et la Société CONCEPT CONSULTING GROUP à payer à Madame X... la somme de 17.000 euros à titre de dommages-intérêts ;
- débouté les parties de leurs autres et plus amples demandes ; - dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
- condamné Madame Annie X... aux entiers dépens.
Les Sociétés J. WALTER THOMPSON (JWT) et CONCEPT CONSULTING GROUP SAS (CCG) ont interjeté appel de cette décision. Elles font valoir que c'est à tort que la Société JWT a été attraite dans la cause, alors qu'elle n'est intervenue que ponctuellement au cours des négociations afin d'assister la Société CCG. Elles soutiennent que, loin de mettre en évidence un quelconque accord global intervenu entre la Société CCG et Madame X..., la chronologie de leurs pourparlers précontractuels atteste au contraire de l'échec de la conclusion entre elles de toute convention de cession ou de contrat de travail. Elles relèvent que, tant que la radiation de la Société AEB était susceptible d'être prononcée, l'acquisition des titres de cette société ne pouvait être sérieusement envisagée.
Elles précisent qu'en refusant les termes du contrat de travail soumis à sa signature, alors que ce contrat constituait l'une des conditions des accords négociés par elle avec la Société CCG, la partie adverse a fait obstacle à la parfaite conclusion du contrat de cession envisagé.
Elles objectent qu'aucun accord n'était définitivement intervenu entre les parties sur le prix de la cession, dès lors que la valorisation des titres de la Société AEB restait sujette à analyse et impliquait un nouvel examen de la situation financière de cette société.
Elles en déduisent que, faute d'établir que les parties se seraient accordées sur une chose et sur un prix, Madame X... n'est pas fondée à solliciter l'exécution d'un prétendu contrat intervenu entre elle et les Sociétés CCG et JWT.
Elles allèguent que les pourparlers ont toujours été conduits de manière loyale entre les différentes parties, et que leur interruption pendant plusieurs mois a fait suite à la découverte du risque de radiation de la Société AEB et au refus de Madame X... en janvier 2002 de signer le projet de contrat de travail qui lui était proposé.
Elles soulignent que la rupture en juin 2002 de négociations qui n'étaient pas sur le point d'aboutir n'avait nullement pour effet de mettre un terme aux relations d'affaires entre d'une part la Société AEB, d'autre part la Société CCG et le Groupe JWT.
Elles contestent que cette rupture ait revêtu un caractère abusif, alors qu'elle était justifiée par les résultats de l'analyse économique et financière de la Société AEB MULTIMEDIA, à laquelle le candidat à l'acquisition devait préalablement se livrer.
Elles observent que les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conséquences de leurs constatations en prononçant à leur encontre une condamnation à des dommages-intérêts, bien qu'ils n'aient relevé aucune faute susceptible de leur être imputée.
Elles ajoutent que la demande de dommages-intérêts présentée par Madame X... ne saurait prospérer, dès lors que cette dernière ne peut à bon droit réclamer la réparation des conséquences dommageables d'une prétendue désorganisation qu'elle a elle-même occasionnée, et qui n'a pu concerner que la Société AEB.
Aussi, tout en concluant à la confirmation de la décision entreprise en ce qu'elle a dit qu'aucune accord parfait n'est intervenu entre les parties et que les pourparlers entre ces dernières n'ont pas été rompus de manière brutale, les Sociétés CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) et J. WALTER THOMPSON (JWT) demandent à la Cour de l'infirmer pour le surplus, de mettre hors de cause la Société JWT, et de débouter Madame Annie X... de l'ensemble de ses prétentions indemnitaires.
Elles réclament en outre pour chacune les sommes de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Egalement appelante de cette décision, Madame Annie X... expose qu'elle avait un intérêt né et actuel à attraire dans la présente instance la Société J. WALTER THOMPSON, dont les représentants et conseils sont directement intervenus dans la processus de rachat des parts.
A titre principal, elle fait valoir que les Sociétés J. WALTER THOMPSON et CCG ont engagé leur responsabilité contractuelle pour inexécution partielle de leur engagement de rachat.
Elle indique avoir été destinataire d'une offre ferme de rachat, comportant une condition unique : le rachat de 66 % des parts sociales pour un montant de 800.000 F (121.959,21 ) payable sur trois ans (afin d'aménager une garantie de passif), son contrat de travail devant se poursuivre aux mêmes conditions d'activité et de rémunération par application de l'article L. 122-12 du Code du travail.
Elle expose que cette offre de contracter a été suivie d'une acceptation des deux associés personnes physiques de la Société AEB, intervenue oralement au début de l'année 2000, et officialisée par le document écrit tenu lors de la réunion du 26 juin 2001, ainsi que par un courrier du Conseil des Sociétés JWT et CCG en date du 08 août 2001.
Elle se prévaut de l'exécution partielle de l'accord par ces dernières, sur les plans tant commerciaux que juridique, compte tenu de la place qui lui a été faite dans leur organisation interne et dans leurs relations avec les professionnels de la communication, et en raison des initiatives entreprises en vue de parvenir ultérieurement à une "dissolution-confusion" de la Société AEB par la Société CCG.
Elle en déduit qu'elle était fondée à mettre les Sociétés JWT et CCG en demeure de finaliser leurs engagements en exécutant leur obligation de payer le prix de la cession, conformément à leurs promesses encore réitérées les 26 février, 24 avril et 10 juin 2002.
A titre subsidiaire, elle s'estime en droit de demander, sur le fondement délictuel, l'indemnisation des dommages subis par suite d'une rupture des pourparlers, intervenue subitement, sans motif et sans justification.
A cet égard, elle stigmatise l'attitude fautive des Sociétés JWT et CONCEPT, lesquelles ont multiplié les tergiversations pour retarder la finalisation de l'opération, et ont ultérieurement invoqué le caractère non viable de l'opération de rachat d'un point de vue économique, sans autre forme de preuve.
Elle soutient qu'en poursuivant des contacts sur une longue période, ce qui a eu pour effet de la maintenir dans l'illusion d'un rachat destinée à tromper sa confiance sans autre explication, les Sociétés J. WALTER THOMPSON et CONCEPT ont commis des fautes dont elles doivent répondre des conséquences dommageables.
Elle relève qu'à son préjudice en relation avec les négociations de rachat, se sont ajoutés le trouble causé à son image commerciale et professionnelle, et la désorganisation consécutive aux agissements fautifs des parties adverses postérieurement à l'introduction de la présente procédure, lesquels ont interféré sur l'activité de la Société AEB en même temps qu'ils ont affecté directement la personne de sa gérante.
Par voie de conséquence, Madame Annie X... demande à la Cour de la déclarer recevable et bien fondée en son action, d'infirmer le jugement entrepris, de constater le caractère parfait de l'accord portant sur une cession de parts sociales entraînant le contrôle, et, à défaut, de constater la rupture subite et abusive des pourparlers de rachat de ces parts.
Elle sollicite également la condamnation de la Société CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG), solidairement avec la Société J. WALTER THOMPSON pour le cas où cette dernière serait jugée co-engagée, à achever l'exécution des termes de son/leur accord, et à lui régler le prix des parts sociales acquises de la Société AEB.
Subsidiairement, elle conclut à la condamnation solidaire de ces sociétés à réparer les conséquences dommageables de la rupture subite et abusive des pourparlers de rachat des parts sociales, et à lui verser la somme de 237.000 euros, à titre de dommages-intérêts, en indemnisation des préjudices commerciaux, financiers et moraux occasionnés, et celle de 45.000 euros, du chef des préjudices résultant de l'attitude déloyale des parties adverses.
Elle réclame en outre leur condamnation solidaire au paiement de 13.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 04 décembre 2003.
MOTIFS DE LA DECISION :
SUR LA RECEVABILITE DE L'ACTION A L'ENCONTRE DE LA SOCIETE J. WALTER THOMPSON :
Considérant qu'au soutien de sa demande de mise hors de cause, la Société J. WALTER THOMPSON fait valoir que Madame X... est sans droit à revendiquer à son encontre l'exécution d'un contrat de cession de titres qui n'a à aucun moment été envisagé entre elle-même et cette société ;
Mais considérant qu'il convient de rappeler que Madame X... présente à titre subsidiaire une demande de dommages-intérêts pour rupture subite et abusive des pourparlers ; Considérant qu'il résulte suffisamment des documents produits aux débats que la Société JWT a pris une part active aux négociations qui se sont poursuivies entre la Société CCG, faisant partie du même groupe, et Madame X..., et auxquelles il a été définitivement mis un terme au mois de juillet 2002 ;
Considérant qu'au demeurant, l'implication de cette société dans l'élaboration des accords alors en discussion se trouve corroborée par les obligations de confidentialité et de non-concurrence auxquelles la cédante devait s'engager envers le Groupe JWT aux termes du projet d'acte de cession d'actions établi le 08 août 2001 ;
Considérant que Madame X... avait donc un intérêt à agir à l'encontre de la Société JWT, à l'effet de faire juger que celle-ci doit répondre, sur le fondement délictuel, solidairement avec la Société CCG, des conséquences dommageables de la rupture prétendument abusive des pourparlers ;
Considérant que le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a déclaré recevable l'action de la Société X... en tant qu'elle est dirigée contre la Société JWT.
SUR L'EXISTENCE ALLEGUEE D'UN ACCORD PARFAIT SUR LA CESSION DES ACTIONS :
Considérant qu'une convention n'est formée entre les parties qu'à la condition que soit constatée l'existence d'un accord parfait des volontés sur l'ensemble des éléments déterminants de cette convention ;
Considérant qu'en l'occurrence, il doit être observé que les contrats de cession de titres et de contrat de travail ont été établis pour la première fois au mois d'août 2001 sous la forme de projets, lesquels étaient destinés à être amendés en fonction de l'état d'avancement des pourparlers alors en cours entre les parties ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du projet de cession des titres, il est prévu que l'acquéreur (CCG) achètera et le vendeur (Madame X...) cédera, la pleine propriété des actions détenues par cette dernière dans le capital de la Société AEB, "sous réserve de la réalisation des opérations visées à l'article 4 ci-dessous" ;
Considérant qu'il est précisé à l'article 4 qu'à la date de réalisation de la cession, le vendeur devra remettra à l'acquéreur un certain nombre de documents, parmi lesquels figure le contrat de travail du vendeur, dûment signé ;
Considérant qu'il s'ensuit que les contrats de travail et de cession des titres étaient dépendants l'un de l'autre, l'absence de signature du premier faisant obstacle à la conclusion de la seconde ;
Or considérant qu'il est acquis aux débats qu'un désaccord est survenu entre les parties au début de l'année 2002 sur les termes du contrat de travail proposé par la Société CCG, Madame X... ayant estimé que le projet soumis à sa signature faisait obstacle à l'application de l'article L 122-12 du Code de travail garantissant au salarié le transfert automatique de son contrat de travail aux conditions antérieures en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur ;
Considérant qu'à cet égard, il importe peu qu'à partir de l'année 2001, Madame X... ait été présentée par les Sociétés du Groupe JWT, tant à usage interne que dans les rapports avec les tiers, comme "dirigeant de CONCEPT" ou comme "directrice du pôle Multimédia" de la Société CCG, dans la mesure où il apparaît qu'à cette époque, les parties étaient loin d'avoir finalisé leurs accords, ainsi que le met en évidence leur différend survenu ultérieurement sur le montant de la rémunération devant être attribuée à l'intéressée ;
Considérant que, dès lors, sans même qu'il y ait lieu de rechercher si Madame X... était ou non fondée à invoquer la non-conformité de ce projet de contrat aux dispositions d'ordre public susvisées du code du travail, il suffit de constater que, lorsqu'il a été mis fin aux pourparlers entre les parties, aucun accord dûment établi n'était intervenu entre elles sur l'ensemble des éléments de leurs négociations ;
Considérant que la même observation doit être faite en ce qui concerne la détermination du prix, lequel, fixé à la somme de 800.000 F (121.951,21 euros) aux termes du projet d'acte de cession établi le 08 août 2001, était susceptible d'être revalorisé en fonction des résultats de la nouvelle analyse de la situation financière de la Société AEB décidée en avril 2002 à l'initiative des Sociétés CCG et JWT ;
Considérant qu'il s'ensuit qu'en l'absence de preuve d'une rencontre des volontés des parties à la date de la rupture des pourparlers, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande tendant à voir condamner les Sociétés CCG et JWT à exécuter les termes de leur prétendu accord et à lui régler le prix des actions cédées.
SUR L'EXISTENCE ALLEGUEE D'UNE RUPTURE ABUSIVE DES POURPARLERS :
Considérant que, si chaque partie à la négociation peut y mettre fin tant que le contrat n'est pas définitivement formé par l'acceptation pure et simple d'une offre, l'auteur de la rupture engage sa responsabilité délictuelle lorsque son initiative est intervenue brutalement alors même que les pourparlers se trouvaient à un stade avancé ;
Considérant qu'en l'occurrence, sans avoir, à l'époque de la rupture, explicitement motivé les raisons les ayant décidées à ne pas poursuivre les négociations, les Sociétés CCG et JWT font valoir dans le cadre de leurs écritures judiciaires que c'est la constatation de la médiocrité des résultats atteints par la Société AEB qui les a conduits à renoncer à donner suite aux conventions envisagées avec Madame X... ;
Considérant qu'elles précisent que la rupture des pourparlers, loin d'être abusive, ressort de l'analyse économique et financière de la Société AEB MULTIMEDIA, à laquelle devait se livrer l'acquéreur avant de procéder au rachat des titres de Madame X... ; Mais considérant qu'il s'infère des documents produits aux débats qu'au moins à partir de la réunion qui s'est tenue fin juin 2001 en présence des parties, Madame X... a constamment fait part de son acceptation de céder les 66 % du capital restant de la Société AEB au prix de 800.000 F (121.951,21 euros) ;
Considérant qu'il doit être observé que les bases de cet accord, reprises dans le projet d'acte de cession établi le 08 août 2001 par les Sociétés du Groupe JWT, n'ont pas été remises en question par ces dernières lors des discussions qui se sont succédé au cours des mois suivants ;
Considérant qu'il convient également de relever que, dans la perspective de cette cession et de la future absorption de la Société AEB par la Société CCG, Madame X... a, à la demande des Sociétés JTW et CCG, convoqué deux assemblées générales de la Société AEB afin qu'il soit procédé à une augmentation de son capital et à sa transformation en société par actions simplifiées ;
Considérant que, s'il est vrai qu'un désaccord ayant opposé les parties sur le montant de la rémunération due à Madame X... a entraîné à partir de janvier 2002 une nouvelle suspension des pourparlers, il est toutefois constant que ce différend n'a pas sérieusement altéré le processus de cession en cours, puisque, par courrier du 26 février 2002, la Société CCG invitait son Conseil à : reprendre la poursuite de ce dossier...", "les accords avec Annie X... pour la finalisation de l'opération AEB MULTIMEDIA étant désormais finalisés" ;
Considérant qu'il apparaît en outre que, le 24 avril 2002, le Conseil de la Société CCG a établi un : "calendrier des opérations relatives à la cession d'actions d'AEB Multimédia SAS à Concept Consulting Group SAS, et à la dissolution-confusion d'AEB Multimédia", et que, le 12 juin 2002, une nouvelle réunion a été organisée entre les divers protagonistes dans la perspective d'une prochaine finalisation de l'opération de cession sur les mêmes bases que celles négociées antérieurement ;
Considérant que c'est donc de manière inattendue que les Sociétés du Groupe JTW ont pris l'initiative en juillet 2002 de mettre fin aux pourparlers, sansalors s'expliquer sur les raisons de leur décision, qu'elles ont dans le cadre de la présente instance tenté de justifier en alléguant la précarité de la situation financière de la Société AEB que les documents comptables versés aux débats ne viennent toutefois nullement corroborer; Considérant qu'il s'ensuit qu'en rompant brutalement et sans motif légitime les négociations conduites depuis plus d'une année avec Madame X..., et parvenues désormais à un stade très avancé, les Sociétés CONCEPT CONSULTING GROUP et J. WALTER THOMPSON, qui ont agi conjointement, ont manqué à leur obligation de loyauté dans les relations commerciales avec leur partenaire, qu'elles ont maintenue de manière fautive dans l'illusion d'un très prochain dénouement de l'opération de cession de ses actions, alors pourtant qu'elle avait satisfait à l'essentiel de leurs exigences;
Considérant que, par voie de conséquence, il convient, en infirmant le jugement déféré, de dire que ces sociétés doivent être tenues d'indemniser sur le fondement délictuel le préjudice subi par Madame X... du chef de rupture abusive des pourparlers.
SUR L'INDEMNISATION DU PREJUDICE :
Considérant que le comportement fautif des Sociétés CCG et J. WALTER THOMPSON a mis Madame X... dans l'obligation d'engager un certain nombre de frais financiers, lesquels ont été engagés en pure perte par suite de la rupture brutale des négociations ;
Considérant que le préjudice subi par Madame X... a été aggravé par le fait que, dès l'année 2001, elle était présentée dans la presse destinée aux professionnels de la communication comme un dirigeant du Groupe J. WALTER THOMPSON, ce qui, en pratique, compte tenu de la perspective future d'une absorption de la Société AEB par la Société CCG, lui interdisait de traiter avec un tiers pour la cession de ses actions;
Considérant qu'à la perte de la chance de parvenir à la conclusion d'un accord définitif s'est ajouté le trouble commercial qui lui a été causé dans l'exercice de ses activités de gérante de la Société AEB, et qui s'est notamment traduit par la difficulté pour elle, durant la longue phase des négociations, de promouvoir les investissements nécessaires au développement de cette société ;
Considérant que ces divers éléments justifient l'allocation en faveur de Madame X... d'une indemnité évaluée toutes causes confondues à la somme de 100.000 euros, destinée à réparer le préjudice qui a directement résulté pour elle de la rupture abusive des pourparlers;
Considérant que, par ailleurs, Madame X... sollicite la réparation du dommage qu'elle indique avoir subi durant la période ayant suivi cette rupture fautive, tout particulièrement en raison de l'obligation dans laquelle elle s'est trouvée de libérer dans les meilleurs délais les locaux dans lesquels la Société AEB poursuivait ses activités;
Considérant que, toutefois, il apparaît que la Société AEB est seule concernée par la perte de chiffre d'affaires constatée au 31 décembre 2002, ainsi que par ses difficultés d'hébergement à partir de la fin 2002, sans que la preuve soit rapportée que les agissements reprochés aux Sociétés CCG et JWT aient eu des répercussions personnellement préjudiciables à Madame X... ;
Considérant qu'il y a donc lieu de débouter cette dernière de sa demande en paiement d'une indemnité complémentaire de 45.000 euros du chef des déloyautés perpétrées depuis l'introduction de la présente action en justice.
SUR LES DEMANDES COMPLEMENTAIRES ET ANNEXES :
Considérant que l'équité commande d'allouer à Madame Annie X... une indemnité globale de 5.000 euros, sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, en remboursement des frais non compris dans les dépens exposés par elle tant en première instance qu'en cause d'appel ;
Considérant que les Sociétés CCG et JWT, dont les prétentions sont pour l'essentiel écartées, ne peuvent qu'être déboutées de leurs demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive et d'indemnité de procédure ; Considérant qu'il convient d'infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a mis les dépens de première instance à la charge de Madame X..., et de condamner solidairement les Sociétés CCG et JWT aux dépens de première instance et d'appel.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
DECLARE recevable l'appel interjeté par les Sociétés J. WALTER THOMPSON et CONCEPT CONSULTING GROUP, le dit mal fondé ;
DECLARE recevable l'appel interjeté par Madame Annie X..., le dit partiellement fondé ;
CONFIRME le jugement déféré, mais seulement en ce qu'il a débouté la Société J. WALTER THOMPSON de sa demande de mise hors de cause, et en ce qu'il a ditnt fondé ;
CONFIRME le jugement déféré, mais seulement en ce qu'il a débouté la Société J. WALTER THOMPSON de sa demande de mise hors de cause, et en ce qu'il a dit qu'aucun accord parfait n'est intervenu sur la cession des actions de Madame X... à la Société CCG;
L'INFIRME en ses autres dispositions, et statuant à nouveau :
CONDAMNE solidairement les Sociétés J. WALTER THOMPSON (JWT) et CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) à payer à Madame Annie X... la somme de 100.000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive des pourparlers;
CONDAMNE solidairement les Sociétés J. WALTER THOMPSON (JWT) et CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) à payer à Madame Annie X... la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;
DEBOUTE les Sociétés J. WALTER THOMPSON (JWT) et CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) de leurs demandes de dommages-intérêts et d'indemnité de procédure ;
CONDAMNE solidairement les Sociétés J. WALTER THOMPSON (JWT) et CONCEPT CONSULTING GROUP (CCG) aux dépens de première instance et d'appel, et AUTORISE Maître BINOCHE, Avoué, à recouvrer directement la part le concernant, conformément à ce qui est prescrit par l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.