CA Paris, Pôle 4 ch. 2, 16 mars 2016, n° 14/07114
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Allianz I.A.R.D. (SA)
Défendeur :
127 Saint Antoine (SCI), AXA France IARD (SA), 313 Terrasses de L'arche (és qual.), Société D'études et de Gestion Immobilière du Nord Est Segine (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dos Reis
Conseillers :
Mme Royer, Mme Denjoy
Avocats :
Me Dechezlepretre Desrousseaux, Me Holchaker, Me Bezard Falgas, Me Graignic, Me Grappotte-Benetreau, Me Benamour, Me Saucier, Me Claude
L'immeuble appartenant à la SCI 127 Saint Antoine, 127 rue Saint-Antoine à Paris 11ème, a été affecté d'infiltrations ayant pour origine, selon le rapport d'expertise judiciaire de X… du 30 décembre 2008, une descente d'eaux pluviales fuyarde desservant l'immeuble voisin du 129 rue Saint-Antoine à Paris 11ème.
Suivant actes extra-judiciaires du 7 avril 2009 et 30 août 2010, la SCI 127 Saint Antoine a assigné le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine et l'assureur de ce dernier, la société Axa France IARD, à l'effet de les voir condamner solidairement au paiement de la somme de 100.345,42 € TTC en réparation des désordres. Le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine a appelé en garantie’ :
Son assureur, la société Axa France IARD, selon acte extra-judiciaire du 27 juin 2011, suivant nouvel acte extra-judiciaire du 27 juin 2011, son ancien syndic, la société SEGINE, laquelle a appelé en garantie son assureur, la société Allianz IARD, suivant exploit du 5 janvier 2012.
Par jugement du 31 janvier 2014 rectifié le 21 février 2014, le tribunal de grande instance de Paris a’ :
- déclaré le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine responsable des dommages causés à la SCI 127 Saint Antoine et tenu de les réparer,
- condamné in solidum le syndicat du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine et la société Axa France IARD, prise en sa qualité d'assureur dudit syndicat, à payer à la SCI 127 Saint Antoine la somme de 90.464,05 € HT, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant sommation de payer, actualisation sur l'indice BT 01 du coût de la construction, et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- dit que la société Axa France IARD pourrait faire application de la franchise prévue à sa police,
- débouté le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine de son appel en garantie à l'encontre de la société AXA France IARD,
- condamné la société SEGINE et la société Allianz IARD, cette dernière dans les limites de plafond et de franchise de sa police, à garantir le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine de toutes condamnations prononcées contre lui, en ce compris les dépens et l'indemnité accordée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Allianz IARD à garantir la société SEGINE de l'ensemble des condamnations prononcées contre elle, dans les limites de plafond et de franchise de sa police,
- débouté la société Allianz IARD de ses demandes,
- débouté la société Axa France IARD de ses demandes,
- débouté le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine du surplus de ses demandes,
- débouté la société SEGINE de ses demandes,
- condamné in solidum le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine et la société Axa France IARD, son assureur, aux dépens incluant les frais d'expertise judiciaire.
La société Allianz IARD et le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine ont relevé appel de ces jugements par déclarations d'appel séparées des 28 mars 2014 (Allianz) et 8 avril 2014.
La société Allianz IARD par dernières conclusions signifiées le 24 octobre 2014 demande à la Cour de :
A titre principal,
- réformer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société SEGINE et la société Allianz IARD à relever et garantir le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11ème,
- dire que ledit syndicat des copropriétaires n'a subi aucun préjudice résultant d'une faute de la société SEGINE
- dire que la responsabilité de SEGINE et la garantie d'Allianz IARD ne peuvent être engagées
- condamner le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine Paris 75011 et/ou tout succombant à payer à la société Allianz la somme de 6.000 € conformément aux dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens,
Subsidiairement,
- dire que le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11ème ne démontre pas une faute du Cabinet SEGINE en relation directe et certaine avec un quelconque préjudice,
- le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- dire que l'éventuelle faute du cabinet SEGINE n'entraîne aucune perte de chance de voir jouer la garantie de la société AXA FRANCE IARD au profit de la SCI 127 Saint-Antoine victime des désordres et bénéficiaire de l'action directe qui écarte toute prise en charge des dommages par du 129 rue du Faubourg Saint Antoine Paris 75011 dans les limites des garanties souscrites,
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre d'Allianz IARD
- dire que la police souscrite auprès des AGF, à présent dénommées Allianz IARD ne peut s'appliquer que dans la limite de ses plafonds et franchises,
- dire que la société SEGINE ne justifie pas avoir demandé l'accord de son courtier ou de son assureur avant de confier son dossier à son avocat personnel ; rejeter de ce fait la demande de remboursement d'honoraires formulée par SEGINE,
- condamner le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine Paris 75011 et/ou tout succombant à payer à la société Allianz la somme de 6.000 € conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.
Le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11ème, par dernières conclusions signifiées le 1er juillet 2014, prie la Cour de :
Vu les pièces versées aux débats,
Vu les articles 1134, 1147 et 1992 du Code Civil,
Vu l'article 18 de la loi de 1965,
- confirmer le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris le 31 janvier 2014, rectifié le 21 février 2014, en ses condamnations prononcées à l'encontre des sociétés AXA France IARD,
SEGINE et Allianz,
- constater qu'il ne saurait être considéré comme l'unique responsable des dommages survenus,
- ordonner un partage de responsabilité,
- constater l'absence de lien de causalité entre les désordres, objets des factures des sociétés Urbat et Conforama et une quelconque faute de sa part,
- débouter la SCI 127 Saint-Antoine de ses demandes de condamnation au titre des factures URBAT et CONFORAMA,
- compte tenu de la vétusté de l'immeuble voisin à savoir celui 127 Saint Antoine 75011 Paris, appliquer un coefficient de vétusté sur l'ensemble des factures produites ou prononcer un abattement de 50 % sur l'ensemble des factures et devis produits,
- dire que la société AXA FRANCE IARD, es qualité d'assureur de l'immeuble 129 Rue du Faubourg Saint-Antoine 75011 Paris, devra le garantir de toutes condamnations à son encontre,
- débouter la société SEGINE, ancien syndic, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- débouter la société Allianz de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- constater que la société SEGINE, ancien syndic, a commis une faute qui engage sa responsabilité,
- condamner le cabinet SEGINE, ancien syndic, et son assureur, la société Allianz, à lui - payer la somme de 100.345,51 € TTC et à le relever et garantir de toutes condamnations prononcées contre lui en principal, frais et accessoires,
- condamner in solidum le cabinet SEGINE, ancien syndic, et son assureur la société Allianz à lui payer la somme de 7.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamner le cabinet SEGINE, ancien syndic, et son assureur la société Allianz aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise.
La SCI 127 Saint-Antoine par dernières conclusions signifiées le 16 décembre 2014, prie la Cour de :
au visa des articles 815-2, 1382 du code civil, L. 124-3 du code des assurances,
- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum le syndicat des copropriétaires et la société Axa France IARD aux dépens et à lui payer une somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- l'infirmer pour le surplus et condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et Axa France au paiement de la somme de 100.345,51 € TTC assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation en réparation de son préjudice, avec actualisation sur l'indice BT 01 de la construction depuis le 30 décembre 2008 et capitalisation des intérêts,
- condamner in solidum les mêmes au paiement de la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
La société d'Études ET DE GESTION IMMOBILIERE DU NORD EST (SEGINE) par dernières conclusions signifiées le 30 novembre 2015, prie la Cour de :
Vu les articles 1315 et 1382 du Code civil,
Vu le Code des assurances et notamment l'article L124-3,
Vu le contrat d'assurance nº40.419.380,
- La recevoir en son appel incident, et, la disant bien fondée,
A titre principal,
- infirmer le jugement du 31 janvier 2014 en ce qu'il l'a condamnée à garantir le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine de l'intégralité des condamnations mises à sa charge, et, statuant à nouveau, dire que le syndicat des copropriétaires ne justifie d'aucun préjudice résultant d'une faute de sa part,
- dire que sa responsabilité ne peut être engagée,
En conséquence,
- dire que la demande de garantie du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème formulée à son égard est infondée et la mettre hors de cause,
Subsidiairement,
- juger que la SCI 127 SAINT ANTOINE ayant exercé son action directe à l'encontre de la société AXA FRANCE IARD, assureur du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème , cette dernière est dans l'obligation de l'indemniser dans les limites de sa garantie contractuelle,
- infirmer le jugement du 31 janvier 2014 en ce qu'il a jugé que la société SEGINE a commis une faute engageant sa responsabilité à l'égard du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème et en ce qu'il l'a condamnée à garantir ledit syndicat des copropriétaires des condamnations prononcées contre elle,
Et, statuant à nouveau,
- dire qu'elle n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité,
- dire que le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème ne justifie pas d'un préjudice,
En conséquence,
- juger n'y avoir lieu à garantie du syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème par la société SEGINE,
- débouter le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème de ses demandes de condamnation à l'égard de la société SEGINE,
Plus subsidiairement, si par improbable une quelconque responsabilité était retenue à l'égard de la société SEGINE,
- sur le préjudice allégué par le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris (75011), dire que le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris
(75011) ne démontre pas l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice allégués, en conséquence, le débouter de toutes ses demandes,
- à titre infiniment subsidiaire, dire que le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris (75011) ne justifie pas du préjudice dont il réclame la condamnation (100.345,51 € TTC),
- à titre infiniment plus subsidiaire, dire que la part d'indemnisation imputable au syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris (75011) ne pourrait être supérieure à la somme de 8.358,56€ HT et fixer à cette somme la part de préjudice indemnisable,
- dire que la franchise contractuelle du contrat d'assurance souscrit auprès d'AXA France IARD est applicable, de sorte que la franchise devra encore être déduite de la somme de 8.358,56 € HT,
- en conséquence, débouter le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris (75011) de toutes ses demandes,
- sur l'appel en garantie de la société AXA FRANCE IARD à l'égard de la société SEGINE, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé cette demande injustifiée et DEBOUTER la société AXA FRANCE IARD de ses demandes à ce titre,
- en tout état de cause, sur la garantie d'Allianz IARD en cas de condamnation de la société SEGINE, confirmer le jugement du 31 janvier 2014 en ce qu'il a condamné la société Allianz IARD, en sa qualité d'assureur de responsabilité civile professionnelle à garantir la société SEGINE de l'ensemble des condamnations mises à sa charge dans la limite de la franchise contractuelle,
- y ajoutant, constater que la franchise contractuelle applicable est de 300 €,
- sur la prise en charge des frais d'avocat de la société SEGINE par l'assureur Allianz IARD, infirmer le jugement du 31 janvier 2014 en ce qu'il a débouté la société SEGINE de sa demande de condamnation de la société Allianz IARD au paiement de la somme de 9.437,52 € au titre de ses frais d'avocat, et, statuant à nouveau, à titre principal, condamner l'assureur Allianz IARD au paiement de la somme de 9.437,52 € TTC, au titre des honoraires d'avocat exposés par la société SEGINE pour assurer sa défense en première instance, en application du contrat d'assurance'; à titre subsidiaire, condamner l'assureur Allianz IARD, et à défaut le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème au paiement de la somme de 9.437,52 € TTC, au titre des honoraires d'avocat exposés par la société SEGINE pour assurer sa défense en première instance, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
- en tout état de cause, débouter les parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions à l'égard de la société SEGINE,
- condamner la société Allianz IARD, et à défaut le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème au paiement de la somme de 5.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Allianz IARD et à défaut le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à Paris 11 ème aux entiers dépens.
La SA AXA FRANCE IARD par dernières conclusions signifiées le 17 octobre 2014 demande à la Cour de :
Au visa des articles 16 du code de procédure civile, L. 114-1 du code des assurances, 1382 du code civil,
- infirmer le jugement en ce qu'il a dit que le rapport d'expertise de X… lui était opposable et dire que ledit rapport lui est inopposable,
- en conséquence, dire les demandes de condamnation dirigées contre elle par la SCI 127 Saint Antoine irrecevables et les rejeter,
- rejeter plus généralement toute demande de garantie dirigée contre elle,
- subsidiairement, condamner solidairement la société SEGINE et son assureur Allianz IARD à la garantir de toutes condamnations, en principal, frais, intérêts et accessoires,
Très subsidiairement, ramener les demandes formées par la SCI 127 Saint Antoine à de plus justes proportions et dire que sa garantie ne pourrait porter, tout au plus, que sur 50 % des sommes retenues au titre de la réparation des désordres,
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit prescrite l'action en garantie du syndicat des copropriétaires,
- faire application de sa franchise contractuelle,
- condamner solidairement les parties succombant au paiement d'une somme de 4.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause, des procédures, des prétentions, moyens et arguments dont elle est saisie, la Cour fait référence expresse à la décision déférée et aux dernières conclusions d'appel des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 6 janvier 2016.
CECI ETANT EXPOSE, LA COUR
Sur la responsabilité des désordres
Le syndicat des copropriétaires et son assureur font valoir que le mauvais état de l'immeuble de la SCI 127 Saint Antoine est pour partie à l'origine des désordres dont réparation est sollicitée, et ils rappellent que la Préfecture de Police avait, dès le 29 novembre 2004, donné injonction au propriétaire dudit immeuble de remplacer les éléments de structure détériorés en constatant l'instabilité du plancher du 2ème étage, alors qu'aucune trace d'humidité n'était relevée sur ce plancher’ ;
Ces moyens ne font que réitérer sous une forme nouvelle, mais sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs exacts que la Cour adopte sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation'; en effet, les conclusions péremptoires de l'expert X… et des BET Saga et Management avèrent suffisamment que les pénétrations d'eau provenant de la descente EP fuyarde de l'immeuble du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine ont infiltré les fondations et murs de l'immeuble voisin du 127 jusqu'au 2ème étage (constats des 10 mars 2005 et 12 mars 2008) et que les fuites sont à l'origine de la décompression du sol d'assise du bâtiment dont s'agit'; quant aux conséquences desdits désordres, leur ampleur sera examinée ci-après, au chapitre du chiffrage de l'indemnité réparatrice' ;
Le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine n'établit donc pas la concurrence d'autres causes, notamment, le défaut d'entretien de l'immeuble du 127, à l'origine de la survenance des désordres’ ;
Sur le quantum des réparations
La SCI 127 Saint Antoine sollicite une somme de 100.345,51 € correspondant au coût des travaux entrepris pour conforter les structures de l'immeuble, reloger ses locataires mais aussi refaire complètement les locaux atteints par les désordres’ ;
Toutefois, alors que la Préfecture de Police avait enjoint à la SCI 127 Saint Antoine dès le 29 novembre 2004 de remplacer les éléments de structure détériorés de l'immeuble, notamment du fait de l'instabilité du plancher du 2ème étage, que ledit immeuble faisait l'objet d'un programme de rénovation (OHAD) dans le quartier, que ses propriétaires s'étaient néanmoins abstenus de pratiquer les travaux indispensables en dépit des demandes du PACTE de Paris, que l'expert X… relate en son rapport l'état général usé et le manque d'entretien de l'immeuble du 127 de la rue du Faubourg Saint-Antoine, que l'architecte Tissier indique que le bâtiment du 127 était dans un état d'entretien à peu prés nul et que le relogement des habitants du 2ème étage pendant les travaux dans une autre partie du bâtiment a été le prétexte pour la rénovation d'un appartement très vétuste pour un coût de 12.569,42 € , il apparaît que la SCI 127 Saint Antoine a mis à profit les travaux strictement nécessités pour la réfection des désordres liés aux infiltrations pour remettre à neuf des logements vétustes, les équiper et les meubler, alors qu'elle ne justifie pas qu'elle donnait en location des appartements meublés avant le sinistre'; notamment, elle sollicite réparation à hauteur de la somme de 53.000 € HT des frais de réparation des logements du 2ème et 3ème étage de son immeuble alors que la présence d'humidité dans le mur séparatif entre les deux immeubles au niveau du 2ème étage ne justifiait pas la réalisation de travaux d'étaiement, d'ancrage et de reprise de stabilisation de ces appartements, l'expert ne motivant pas son acceptation globale de ces travaux de grande ampleur ni ne les mettant précisément en relation avec les désordres dus à l'humidité'; ainsi, la facture URBAT de 10.050,99 € TTC concerne des prestations de peinture, moquette, plomberie, électricité et chauffage électrique, et les factures de Conforama de 2.332,44 € TTC et de 185,99 € pour des achats d'ameublement et d'électro-ménager ‘n’ont pas de lien de causalité avec les travaux de réfection ; le remplacement, enfin, d'équipements sanitaires ne saurait être en relation avec les désordres imputables aux infiltrations' ;
Vainement la SCI 127 Saint Antoine objecte-t ‘elle qu'elle était dans l'obligation de reloger les locataires du 2ème et du 3ème étage et de leur procurer des meubles pendant les travaux de réfection de leurs logements et que le coût de relogement et ré-ameublement des locataires s'est révélé équivalent à celui de la location d'un autre bien pendant la durée des travaux, alors que cette réfection de logements vétustes et non entretenus était indispensable en tout état de cause, même en l'absence des infiltrations litigieuses'; quant au relogement des locataires du 3ème étage et aux frais de réfection de leur logement, il n'est pas justifié qu'il soit en lien de causalité avec les fuites ayant déstabilisé les fondations du bâtiment et les cloisons des logements des étages inférieurs jusqu'au 2ème étage seulement ;
Au vu de ces éléments, le jugement sera infirmé sur le quantum des réparations qui sera limité à la somme de 70.000 € TTC' pour la stricte réparation des désordres consécutifs aux infiltrations';
S'agissant d'une condamnation indemnitaire, cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement et non de l'assignation comme l'a dit le premier juge dont la décision sera infirmée sur ce point également' ;
Le jugement sera encore infirmé en ce qu'il a ordonné l'actualisation de cette condamnation sur l'indice BT 01 du coût de la construction, alors que, d'une part, elle ne correspond que pour partie à des travaux de bâtiment, que, d'autre part, la date d'exécution des travaux de réfection est antérieure au dépôt du rapport d'expertise déposé le 30 décembre 2008, les factures produites étant datées des mois de février, mars, avril, août 2007' ;
Sur la garantie de la société Axa France IARD
La société Axa France IARD conteste l'opposabilité des opérations du rapport d'expertise dès lors qu'elle n'y a pas participé, le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine s'étant désisté de sa demande d'intervention forcée dirigée contre son assureur dans le cadre de l'instance en référé engagée par les Y… (auteurs de la SCI) par acte extra-judiciaire du 15 décembre 2004' ;
Or, le rapport d'expertise constitue un élément de preuve qui a été régulièrement versé aux débats et qui a ainsi pu être examiné et discuté par la société Axa France IARD, laquelle n'a pas sollicité de contre-expertise, de sorte que ce document, s'il ne lui est pas opposable en tant que rapport d'expertise judiciaire dans la mesure où elle n'a participé aux opérations expertales qu'en sa qualité d'assureur de la SCI 127 Saint Antoine, peut être utilisé par les juridictions pour trancher le litige, dès lors qu'il est corroboré par les rapports des BET versés aux débats' ;
Enfin, la demande du syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine tendant à voir garantir par la société SEGINE et par l'assureur Allianz IARD du montant de la franchise contractuelle restant à sa charge aux termes de la police d'assurances souscrite auprès de la société Axa France IARD sera rejetée alors que la condamnation d'Axa procède de l'action directe introduite par la SCI du 127 et que le tribunal a exactement retenu que cet assureur était en droit d'opposer sa franchise à ladite SCI, de sorte que le montant de celle-ci est bien dû par le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine à la SCI 127 Saint Antoine et qu'il ne peut en demander le remboursement à son assureur qui n'a pas été condamné à le garantir dans le cadre de l'action engagée par la SCI 127 Saint Antoine ';
Au terme de conclusions confuses qui dénotent une méconnaissance du mécanisme de l'obligation in solidum et dérivent d'une confusion entre les garanties dues par la société AXA en sa qualité d'assureur du syndicat des copropriétaires et par la même société en sa qualité d'assureur de la SCI du 127, la société Allianz IARD et la société SEGINE soutiennent que leur garantie ne peut être appelée du fait de l'absence de préjudice subi par le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine, condamné in solidum avec son assureur la société Axa France IARD à réparer les conséquences des désordres' ;
Toutefois, en droit, il y a solidarité ou obligation in solidum de la part des débiteurs, lorsqu'ils sont obligés à une même chose, de manière que chacun puisse être contraint pour la totalité et que le paiement fait par un seul libère les autres envers le créancier'; le codébiteur d'une telle dette, qui l'a payée en entier, peut répéter contre chacun de ses codébiteurs'(contribution à la dette)'la part et portion à leur charge (part virile en l'absence de partage de responsabilité)'; en effet, si, dans le cadre de l'obligation à la dette, le créancier peut s'adresser à l'un quelconque des coobligés, celui qui a acquitté les condamnations peut se retourner, dans le cadre de la contribution à la dette, contre son coobligé pour obtenir le remboursement de la part virile due par celui-ci, de sorte que, même si la société Axa France IARD a payé l'intégralité des condamnations, elle a la faculté, dans le cadre d'une action récursoire, ou encore en sa qualité de subrogée aux droits de la SCI du 127, de demander au syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine le remboursement de sa quote-part virile, puisque le syndicat a été débouté de sa demande de garantie contre son assureur, en raison de la prescription biennale' ;
Il s'ensuit que c'est par de justes motifs que la Cour adopte que le premier juge a relevé que, contrairement à ce que prétendait la société SEGINE et son assureur, la société Allianz IARD, la faute de la société SEGINE avait causé un préjudice au syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine, quoique la société Axa France IARD fût condamnée in solidum avec ledit syndicat, dès lors que cette condamnation laissait à la charge finale de ce dernier une partie des condamnations prononcées' ;
Il sera encore ajouté qu'il est indifférent à la solution du litige que la société Axa France IARD ait ou n'ait pas, exercé à ce jour contre le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine une action récursoire en paiement de la quote-part incombant à ce dernier, puisque l'obligation à garantie de SEGINE et d'Allianz ne pourra être appelée qu'une fois ce remboursement effectué ou appelé’ ;
Sur la faute de la société Axa France IARD
Le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine reproche à la société SEGINE, son ancien syndic, de n'avoir pas interrompu la prescription biennale auprès de son assureur la société Axa France IARD, ce qui le prive de la garantie de cette dernière’ ;
La société SEGINE et la société Allianz IARD dénient cette faute en faisant observer que les infiltrations en provenance de l'immeuble du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine n'ont été mises en évidence que par l'inspection des canalisations par caméra réalisée en mai 2007, laquelle a permis de constater l'état du collecteur et de la descente d'eaux pluviales trouée, de sorte que la prescription biennale n'était pas expirée lorsque le syndicat a délivré une assignation en référé à son assureur, le 11 juillet 2007, le désistement du syndicat ne leur étant pas opposable' ;
Toutefois, ainsi que l'a relevé le premier juge par des motifs exacts que la Cour approuve, la prescription biennale a éteint l'action du syndicat des copropriétaires par la faute de la société SEGINE puisque cette dernière n'a assigné la société Axa France IARD en ordonnance commune que le 11 juillet 2007 alors que les Y…, aux droits desquels se trouve la SCI 127 Saint Antoine, avaient assigné le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine dès le 15 décembre 2004, d'où il suit que le délai biennal de prescription avait commencé à courir à compter de ce recours pour expirer le 15 décembre 2006, même alors que la cause exacte des désordres n'aurait pas été connue avec certitude à cette date' ;
Enfin, contrairement à ce que soutiennent la société SEGINE et la société Allianz IARD, la faute de SEGINE n'est pas à l'origine d'une perte de chance pour le syndicat des copropriétaires d'être garanti par AXA, mais bien d'une privation de garantie qui justifie que ledit syndicat soit garanti de l'intégralité des condamnations à sa charge par l'auteur de cette faute et son propre assureur' ;
Sur la garantie de la société Allianz IARD vis-à-vis de la société SEGINE
La société Allianz IARD conteste devoir garantir les sociétés SEGINE et Allianz IARD, estimant que le sinistre, matérialisé par la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale soulevée par la société Axa France IARD devant le juge des référés, s'est produit avant l'entrée en vigueur de sa police au 1er janvier 2009 et qu'il n'a pas été porté à sa connaissance par la société SEGINE avant la prise d'effet de sa police (1er janvier 2009) en violation de l'article 5 de son contrat prévoyant que le sinistre consiste en une réclamation, c'est-à-dire « 'toute mise en cause écrite ou amiable ou judiciaire de la responsabilité de l'assurée adressée par un tiers' »' ;
Le tribunal a justement répondu sur ce point qu'aucune réclamation n'avait été adressée à la société SEGINE avant la prise d'effet de la garantie de la société Allianz IARD, qui devait donc garantir son assurée des conséquences de la responsabilité civile encourue' ;
Il n'y a pas lieu de donner acte à la société Allianz IARD de ses limites de garantie alors que le jugement ne l'a condamnée que dans les limites de sa police, d'où il suit que son appel sur ce point est sans objet' ;
Sur la demande de la société SEGINE relative à la prise en charge des honoraires de son avocat formée par la société Allianz IARD
Excipant d'une lettre de son courtier Gras Savoye du 4 janvier 2012 lui indiquant qu'il lui « 'appartient de saisir un avocat personnel' », la société SEGINE réclame à son assureur, la société Allianz IARD, le remboursement des honoraires d'avocat qu'elle a réglés à hauteur de la somme de 9.437,52 € TTC pour assurer sa représentation à l'instance' ;
Cependant, ainsi que l'a retenu le tribunal, alors que l'article 22-2-3 des conditions générales de la police de la société Allianz IARD prévoit que « l'assuré ne doit pas prendre l'initiative de confier son dossier à un avocat sans avoir obtenu l'accord préalable de Gras Savoye ou de l'assureur' », les termes ambigus et neutres de la lettre du courtier Gras Savoye n'expriment aucun accord pour que SEGINE désigne un conseil personnel dans le cadre d'une direction du procès par l'assureur, étant observé que jusqu'à ce jour, la société Allianz a constamment dénié sa garantie à la société SEGINE';
Sur la demande de garantie de la société Axa France IARD
La société Axa France IARD sollicite la garantie de la société SEGINE et de son assureur la société Allianz IARD sans motiver ni expliciter cette demande' ;
Or, dès lors qu'il n'existe aucune lien de causalité entre la faute retenue à l'encontre de la société SEGINE, laquelle a pour seule conséquence de priver le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine de la garantie de son assureur Axa, et l'obligation à paiement mise à la charge de l'assureur Axa France IARD du fait des désordres subis par la SCI 127 Saint Antoine, cette demande ne peut qu'être rejetée, comme l'a relevé le premier juge, étant rappelé que la société Axa France IARD n'est attraite en la cause qu'en sa qualité d'assureur de responsabilité civile du syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine et non en sa qualité d'assureur dommages de la SCI 127 Saint Antoine';
Les conditions d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas réunies au cas d'espèce ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement, sauf sur le quantum de l'indemnité accordée à la SCI 127 Saint Antoine, le point de départ des intérêts au taux légal, et l'actualisation de la somme allouée sur l'indice BT 01 du coût de la construction,
Statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires du 129 rue du Faubourg Saint-Antoine et la société Axa France IARD, prise en sa qualité d'assureur dudit syndicat, à payer à la SCI 127 Saint Antoine la somme de 70.000 € TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Confirme le jugement pour le surplus,
Rejette toute autre demande,
Dit que chacune des parties conservera à sa charge les dépens qu'elle a exposés en appel.