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Décisions

Cass. crim., 3 juin 2004, n° 03-80.593

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pibouleau

Rapporteur :

Mme De la Lance

Avocat général :

M. Mouton

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP Laugier et Caston

Aix-en-Provence, du 19 déc. 2002

19 décembre 2002

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 7, 8, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de prescription de l'action publique soulevée in limine litis par Alain X... ;

"aux motifs qu'il ressort des pièces du dossier que deux soit-transmis adressés, le premier, en date du 25 avril 2001, par le procureur de la République de Nice au procureur général de la Cour, le second, en date du 2 mai 2001, par le procureur général au procureur de la République de Grasse, sont venus interrompre le délai de prescription dont la date limite était le 29 mai 2001 ;

"alors, d'une part, qu'en se bornant à affirmer que deux soit-transmis adressés, le premier, le 25 avril 2001, par le procureur de la République de Nice au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence et, le second, le 2 mai 2001, par le procureur général au procureur de la République de Grasse, seraient venus interrompre le délai de prescription, sans constater que ces actes auraient constitué des actes d'instruction ou de poursuite au sens de l'article 7 du Code de procédure pénale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que seuls les actes qui ont pour objet de constater les infractions, d'en découvrir ou d'en convaincre les auteurs, constituent des actes d'instruction ou de poursuite susceptibles d'interrompre la prescription ; que cette qualification ne peut être reconnue à l'acte par lequel, le 25 avril 2001, le procureur de la République de Nice informe le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, postérieurement au jugement du tribunal correctionnel de Grasse, de ce que ,"Port Vauban c'est à Antibes" et, par suite, de ce que le tribunal correctionnel de Grasse était bien territorialement compétent pour connaître des faits reprochés au prévenu ; que la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, enfin, qu'en l'état des carences imputables à l'huissier et des erreurs commises par le service public de la justice, la qualification d'acte d'instruction ou de poursuite susceptible d'interrompre la prescription ne peut être reconnue au soit-transmis du 2 mai 2001 ; qu'en effet, il ressort des pièces du dossier que le prévenu réside de manière habituelle avenue de la Libération, Port Vauban, à Antibes, adresse à laquelle lui a d'ailleurs été adressée, le 23 octobre 1996, sa citation à comparaître devant le tribunal correctionnel de Grasse ; qu'à la suite d'une erreur de plume, le tribunal a, dans son jugement frappé d'appel, domicilié le prévenu avenue de la Libération à Port Vauban (et non plus à Antibes), de sorte que, se présentant à cette adresse inexistante, l'huissier, missionné aux fins de citer Alain X... devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, a constaté, le 21 mars 2001, que ce dernier était actuellement sans domicile connu ; que, le 2 mai 2001, le procureur général a sollicité du procureur de la République de Grasse que des recherches soient effectuées conformément à l'article 560 du Code de procédure pénale aux fins de découvrir l'adresse du prévenu, recherches qui ont finalement abouti à la constatation que ce dernier résidait toujours à l'adresse déclarée à Antibes ; que la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Alain X..., ayant relevé appel du jugement du 29 mai 1998 rendu par le tribunal correctionnel de Grasse le condamnant des chefs d'escroquerie et abus de biens sociaux, a invoqué l'exception de prescription de l'action publique, plus de trois ans s'étant écoulés entre le jugement précité et sa citation devant la cour d'appel ;

Attendu que, pour écarter cette exception, les juges du second degré retiennent que le délai de prescription a été interrompu par deux soit-transmis adressés, le premier, du 25 avril 2001, par le procureur de la République de Nice au procureur général de la cour d'appel, le second, du 2 mai 2001, par le procureur général au procureur de la République de Grasse ;

Attendu qu'en cet état, et dès lors que les instructions données par le procureur général au procureur de la République à l'effet de procéder à des recherches en vue de découvrir l'adresse du prévenu, en application de l'article 560 du Code de procédure pénale, constituent un acte de poursuite interruptif de prescription au sens des articles 7 et 8 dudit Code, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles des articles 6.1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 8, 171 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité de l'ensemble des actes de poursuite ;

"aux motifs, adoptés, des premiers juges que, à supposer que le délai raisonnable, prescrit par la Convention européenne des droits de l'homme, pour juger l'affaire n'ait pas été respecté, la durée excessive d'une procédure pénale n'entraîne pas la nullité mais permet seulement à celui qui en aurait souffert de saisir éventuellement la juridiction nationale compétente d'une demande de réparation ou, s'il y a lieu, de saisir la Commission européenne des droits de l'homme .

"alors qu'aux termes de l'article 171 du Code de procédure pénale, il y a nullité lorsqu'il a été porté atteinte aux intérêts de la partie concernée par la méconnaissance d'une formalité substantielle prévue non seulement par une disposition du Code de procédure pénale, c'est-à-dire par une disposition du droit interne, mais également par "toute autre disposition de procédure pénale", qui peut être une disposition internationale ; qu'il s'ensuit que la méconnaissance, préjudiciable aux intérêts du prévenu, du droit au procès équitable dans un délai raisonnable consacré par l'article 6.1 de la Convention européenne, doit entraîner la nullité des poursuites ; qu'en estimant le contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Attendu que, pour écarter l'exception de nullité fondée sur le défaut de respect du délai raisonnable, les juges du second degré prononcent par les motifs adoptés repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;

Qu'ainsi, le moyen ne peut être admis ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 ancien, 111-4, 121-3, 313-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain X... coupable d'escroquerie, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs que les premiers juges, pour déclarer Alain X... coupable d'escroquerie ont notamment relevé que celui-ci avait déclaré qu'il avait "pris la tête de la société Marina Limited en apportant tout simplement le million prêté par Mme Y... (à la société), comme s'il avait été versé sur (mon) propre compte, en communauté d'intérêt avec (moi) ; ayant pris le pouvoir de cette première société, il (m'a) donc été facile, par le biais d'une augmentation de capital au profit de la concession Othello, de devenir propriétaire de 98 % des parts et donc du seul patrimoine de la société, à savoir les murs de l'Hôtel Bellevue ; évidemment, (je) n'avais pas dit à Mme Y... que (mon) but était de (me) servir de son argent pour prendre le contrôle de la société" ; qu'ils ont également relevé que le prévenu avait rédigé et signé sur papier à en-tête de la société Othello une cession de créance d'un montant d'un million de francs qu'il détenait soit-disant sur Fred Z... qui a affirmé qu'il n'en était rien, ce qui n'est pas sérieusement contesté par le prévenu, de sorte qu'il sera maintenu dans les liens de la prévention par confirmation de la décision attaquée dont la Cour adopte expressément les motifs, en ce compris la relaxe du chef des délits de faux documents et usage dès lors que les documents argués de faux visés à la prévention, et leur usage par le prévenu, participent des manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie déjà retenu à son encontre ;

"alors, en premier lieu, que de simples allégations mensongères, mêmes produites par écrit, ne sauraient, en l'absence de toute autre circonstance, constituer les manoeuvres frauduleuses visées aux articles 405 ancien et 313-1 du Code pénal ; qu'en se bornant à énoncer que la fabrication et la production d'un document mentionnant une fausse créance et une fausse adresse seraient constitutifs d'une telle manoeuvre, sans établir qu'un fait extérieur, une mise en scène ou l'intervention d'un tiers auprès de la victime aurait donné force et crédit aux allégations mensongères du prévenu, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'infraction reprochée en son élément matériel ;

"alors, en deuxième lieu, que l'escroquerie n'est constituée qu'autant que les manoeuvres frauduleuses ont été déterminantes de la remise ; que, comme le faisait valoir le prévenu dans ses écritures demeurées sans réponse, une cession de créance ne crée de droits qu'au profit du cessionnaire de cette créance et à l'égard du seul cédant, à l'exclusion du débiteur cédé et des tiers ; que la cession de créance constitutive du faux matériel ne créant ainsi de droits au profit de la société Othello, cessionnaire, qu'à l'égard d'Alain X..., cédant, à l'exclusion du débiteur cédé et de Mme Y..., tiers au contrat, l'indication sur le document litigieux d'une adresse erronée et d'une créance inexistante n'a pu exercer aucune influence directe et immédiate sur la remise au prévenu, lors de l'augmentation de capital de la société MLIL, de 495 000 actions ;

qu'en entrant néanmoins en voie de condamnation, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, en troisième lieu, qu'il s'évince des conclusions d'appel du prévenu et des pièces produites par lui que l'augmentation de capital de la société MLIL, réalisée sans contribution financière de la société Othello, et rendue indispensable tant par la situation financière préoccupante de l'entreprise que par la volonté de Mme Y... de se préserver des éventuels recours contentieux envisagés par M. Z..., a été débattue et décidée d'un commun accord par la victime, ses conseils juridiques, et Alain X..., mandataire ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des écritures dont elle était régulièrement saisie, et dont il ressortait que, les modalités de l'augmentation de capital de la société MLIL ayant été avalisées par les principaux intéressés, au nombre desquels la victime, l'indication sur le document litigieux d'une adresse erronée et d'une créance inexistante n'avait exercé aucune influence directe et immédiate sur la remise au prévenu, lors de cette opération, de 495 000 actions, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, en quatrième lieu, qu'en l'absence de tout préjudice, l'un des éléments du délit d'escroquerie fait défaut ; que, selon les articles 405 ancien et 313-1 du Code pénal, les moyens frauduleux doivent avoir pour objet notamment de déterminer la victime à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque ;

qu'en énonçant que le prévenu se serait fait remettre sans droit, à la faveur de la fabrication et de la production de la cession de créance constitutive du faux matériel, 495 000 actions de la société MLIL, ce dont il résulte que la victime, au sens des articles précités, ne pouvait être que ladite société, et non l'une de ses actionnaires, Mme Y..., et que, à défaut pour la victime d'avoir subi un préjudice, l'escroquerie reprochée au prévenu ne pouvait être constituée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, en cinquième lieu, que, s'étant bornée à citer une déclaration du prévenu, faite sans l'assistance de son conseil, la cour d'appel aurait dû rechercher, comme elle y était invitée, si Alain X... avait eu conscience de tromper sciemment et de mauvaise foi la victime ; qu'en s'en abstenant, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des textes susvisés" ;

Sur le moyen additionnel de cassation, pris de la violation des articles 405 ancien, 313-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain X... coupable d'escroquerie, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs que les premiers juges, pour déclarer Alain X... coupable d'escroquerie ont notamment relevé que celui-ci avait déclaré qu'il avait "pris la tête de la société Marina Limited en apportant tout simplement le million prêté par Mme Y... (à la société) comme s'il avait été versé sur (mon) propre compte, en communauté d'intérêt avec (moi) ; ayant pris le pouvoir de cette première société, il (m'a) donc été facile, par le biais d'une augmentation de capital au profit de la concession Othello, de devenir propriétaire de 98 % des parts et donc du seul patrimoine de la société, à savoir les murs de l'Hôtel Bellevue ; évidemment, (je) n'avais pas dit à Mme Y... que (mon) but était de (me) servir de son argent pour prendre le contrôle de la société" ; qu'ils ont également relevé que le prévenu avait rédigé et signé sur papier à en-tête de la société Othello une cession de créance d'un montant d'un million de francs qu'il détenait soit-disant sur Fred Z... qui a affirmé qu'il n'en était rien, ce qui n'est pas sérieusement contesté par le prévenu, de sorte qu'il sera maintenu dans les liens de la prévention par confirmation de la décision attaquée dont la Cour adopte expressément les motifs, en ce compris la relaxe du chef des délits de faux documents et usage dès lors que les documents argués de faux visés à la prévention, et leur usage par le prévenu, participent des manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie déjà retenu à son encontre ;

"alors que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, énoncer dans ses motifs que le délit d'escroquerie poursuivi aurait été commis au préjudice de Mme Y..., et confirmer le dispositif du jugement ayant déclaré le prévenu coupable d'escroquerie commis à l'encontre de la société Marina Leisure Industries Limited" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être admis ;

Mais sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 425, 437 de la loi du 24 juillet 1966, L. 241-3, L. 242-6 du Code de commerce, 111-3, 111-4, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain X... coupable d'abus de biens sociaux, en répression, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant cinq ans, et a prononcé sur les réparations civiles ;

"aux motifs que les premiers juges ont justement relevé que le prévenu, administrateur de la société Marina Leisure Industries Limited à Jersey, et gérant de fait de la SARL Marina Leisure à Antibes, avait réglé le cautionnement d'un montant de 2 millions de francs mis à sa charge par le magistrat instructeur en partie avec les fonds de ces sociétés, soit 700 000 francs tirés sur les comptes de Marina Leisure Industries Limited à Jersey, et 500 000 francs tirés sur les comptes de la SARL Marina Leisure ;

qu'ils ont , en outre, relevé que le prévenu avait occupé sans droit ni titre un appartement à Antibes dont les loyers avaient été réglés par le débit du compte courant de la SARL Marina Leisure Industries Limited à Jersey ; que c'est à partir du compte bancaire en France et de son compte courant d'associé dans la SARL Marina Leisure, domiciliée à Antibes, que sont intervenus les abus de biens sociaux perpétrés par Alain X..., qui a reconnu avoir dirigé l'hôtel "pour suppléer aux carences de Mme Y..." ;

"alors, en premier lieu, que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, énoncer dans ses motifs que le délit d'abus de biens sociaux poursuivi aurait été commis au préjudice de la SARL Marina Leisure, et confirmer le dispositif du jugement ayant déclaré le prévenu coupable d'abus de biens sociaux exclusivement au détriment de la société Marina Leisure Industries Limited ;

"alors, en deuxième lieu, que le délit d'abus de biens sociaux ne peut être retenu que contre un dirigeant exerçant ses fonctions dans le cadre d'une société réglementée par le Code de commerce français ; qu'en se bornant à énoncer que l'un des éléments constitutifs du délit d'abus de biens sociaux poursuivi aurait été commis sur le territoire français, justifiant ainsi l'application au cas d'espèce de la loi nationale, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la forme juridique de la Marina Leisure Industries Limited, non prévue par le Code de commerce français, ne s'opposait pas à ce que le prévenu ait à répondre de l'usage fait par lui des biens sociaux de cette société sur le fondement des articles L. 241-3 et L. 242-6 du Code de commerce (anciens articles 425 et 437 de la loi du 24 juillet 1966), la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, en troisième lieu, qu'il n'y a abus de bien social que lorsque le dirigeant social a fait dans un intérêt personnel, ou de mauvaise foi, un usage des fonds sociaux contraire à l'intérêt social ; qu'en faisant grief au prévenu d'avoir fait régler par la société MLIL la somme requise par le juge d'instruction au titre du cautionnement imposé par le contrôle judiciaire, cependant qu'il ressort de ses écritures et des pièces versées au débat que, sur la somme de 1 040 000 francs prélevée sur la société MLIL, un million était destiné à garantir les sommes dues par cette société à la victime, ce dont il résulte que les dépenses litigieuses n'étaient pas contraires à l'intérêt social de la société, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ;

Vu l'article 593 du Code de procédure pénale, ensemble les articles L. 241-3 et L. 242-6 du Code de commerce ;

Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;

Attendu que, pour déclarer Alain X... coupable d'abus de biens sociaux, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, énonce que celui-ci, administrateur de la SARL Marina Leisure Industries Limited (MLIL), propriétaire de l'hôtel Bellevue à Antibes, ayant son siège social à Jersey, et gérant de fait de la SARL Marina Leisure, gérante de l'hôtel et située à Antibes, a réglé le cautionnement mis à sa charge par le magistrat instructeur en partie avec les fonds de la société MLIL et a occupé un appartement à Antibes dont les loyers ont été également réglés par débit du compte courant de cette société, que les faits reprochés ont été commis par le prévenu à partir des comptes bancaires en France, que la loi pénale française s'applique aux délits commis en France et que les articles 425 et 437 de la loi du 24 juillet 1966, devenus les articles L. 241-3 et L. 242-6 du Code de commerce, sont des dispositions pénales qui doivent s'appliquer quelle que soit la nationalité de la société victime des agissements du prévenu ;

Mais attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, alors que l'incrimination d'abus de biens sociaux ne peut être étendue à des sociétés que la loi n'a pas prévues, telle une société de droit étranger, et pour lesquelles seule la qualification d'abus de confiance est susceptible d'être retenue, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés,

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 19 décembre 2002, mais en ses seules dispositions ayant condamné Alain X... du chef d'abus de biens sociaux, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du Code de procédure pénale.