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Décisions

Cass. crim., 5 décembre 2018, n° 17-87.488

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Soulard

Avocats :

SCP Foussard et Froger, SCP Spinosi et Sureau

Bordeaux, du 8 nov. 2017

8 novembre 2017

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1741 du code général des impôts, 111-3 et 111-4 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la cour d'appel a déclaré M. X... et Mme Y..., coupables de fraude fiscale ;

"aux motifs que sur la culpabilité, si le jugement évoque en ses motifs que les faits peuvent s'analyser comme une erreur, que les prévenus ont pu n'employer aucune manoeuvre frauduleuse destinée à dissimuler leurs revenus, et que la situation ne constituerait pas une fraude fiscale aggravée, pour autant le tribunal retient justement en son dispositif la culpabilité et la condamnation des prévenus, au visa des textes de la prévention ; que les prévenus ne peuvent soutenir utilement que les faits ne constituent que de simples retards et erreurs, de la part du comptable, la procédure établissant suffisamment que leurs agissements étaient volontaires et frauduleux ; qu'en effet, l'impôt sur le revenu est un impôt personnel au titulaire fiscal, que le comptable des activités professionnelles des sociétés qu'il possède dirige ou dans lesquelles il travaille n'a pas pour vocation de calculer déclarer et payer, alors de plus que ce comptable ne possède pas toutes les données individuelles afin d'y procéder, et alors que la personne physique est nécessairement le destinataire des documents de déclaration et d'avis d'imposition, et le titulaire des moyens de paiement personnels, mais aussi l'unique déclarant ; alors que, aucun élément de la procédure n'établit l'existence d'un mandat général ou spécial antérieur, ou limité à la période de prévention, donné par les consorts X... à M. Gabriel B... concernant leur impôt sur le revenu, son calcul sa déclaration son paiement ; alors en revanche que la mission ultérieure donnée à un expert comptable a fait l'objet d'une lettre de mission précise dont concernant les déclarations fiscales personnelles des consorts X... ; que non seulement M. B... n'a jamais été déclaré à l'administration fiscale comme agissant au nom et pour le compte des consorts X..., mais en plus les déclarations de revenus des prévenus n'ont pas été signées par le comptable M. B..., et ne mentionnent pas de mandat en sa faveur, tandis que les documents déposés par les consorts X... devant la cour concernent la fiscalité des sociétés, et non celle des personnes physiques, et même, ne sont pas tous sous la signature de M. B... ; alors que les consorts X..., propriétaires associés dirigeants et salariés effectifs de la société familiale, entité prospère d'un ensemble de sociétés familiales prospères, les époux X... possédant 75 % des parts, M. David X... 25 %, et M. Bernard X... décédé étant le dirigeant, avaient à ces titres un pouvoir une connaissance et un intérêt particuliers certains dans l'activité de la société, qui leur imposaient de mettre en place les garanties préalables notamment comptables nécessaires au respect de l'ensemble de la loi, qui plus est puisqu'ils soulignent leur incompétence en matière comptable et fiscale ; que la décision de versement de dividendes a été prise par les consorts X... dans le cadre d'assemblées générales de la société, les dividendes ont été versés sur leurs comptes courants, puis leurs comptes bancaires personnels ; qu'ils étaient les seuls décideurs et bénéficiaires de la répartition de bénéfices, ce qui constituait une décision totalement majeure dans la vie de la société notamment en 2010 pour la 1re fois, comme pour leurs revenus durant trois années consécutives, ces dividendes réalisant la majeure partie de leurs revenus : époux X..., 2010 et 2011, 270 000 euros en 2010 sur un revenu imposable de 704 484 euros, et 540 000 euros en 2011 sur un revenu imposable de 870 729 euros, 2012, de 525 788 euros sur un revenu imposable de 933 788 euros, M. David X..., 2010 et 2011, 90 000 euros en 2010 sur un revenu imposable de 327 645 euros, et 180 000 euros en 2011 sur un revenu imposable de 469 777 euros, 2012, de 373 979 euros pour un revenu imposable de 509 379 euros ; et alors que l'activité des sociétés X... prenait un importance économique majeure, les prévenus ont été à l'origine du choix du comptable M. B... et de son nouveau statut au sein de la société X... Y... B..., dont le siège était situé dans la société X..., et dont M. B... était associé minoritaire, travaillant exclusivement pour les sociétés X... ; mais que, les prévenus n'établissent pas l'exercice de leur direction et de leur contrôle qui aurait été non respectés par ce comptable subordonné en faits et au regard de son activité professionnelle exclusive en faveur des activités des sociétés des consorts X... ; de plus, alors que les versements de dividendes n'ont pas été déclarés par la société, ce qui interdisait à l'administration fiscale de déduire leur bénéfice par les porteurs de parts, les consorts X... ne font pas valoir que toutes les déclarations fiscales, ou autres déclarations administratives, ou travaux comptables, de la période de prévention, faisaient l'objet de la même absence de déclaration ou de traitement, les documents déposés établissant le contraire ; de plus, M. David X... majorait à tort son quotient familial d'1/2 part, concernant 2 enfants mineurs ; qu'enfin, les consorts X... n'ont pas averti l'administration fiscale, ni demandé une régularisation ni déposé une déclaration rectificative, à la suite de leur découverte invoquée durant l'été 2012 et confirmée durant l'été 2013 de l'insuffisance de leurs déclarations fiscales antérieures ; que par ailleurs, les déclarations 2012 n'a pas été déposées dans le délai initial, et pas plus dans le délai de régularisation, en raison de l'absence de signature des déclarations, alors qu'aucun élément n'établit l'incitation ou l'accord écrit ou verbal de l'administration fiscale implicite ou explicite à un dépôt tardif afin d'obtenir la signature, et donc un accord de l'autorité légitime susceptible de valoir prorogation de délai ; et ce, alors que les prévenus se prévalent par ailleurs de l'absence de leur signature des déclarations antérieures afin de se dégager de leurs responsabilités ; que ces éléments établissent la gravité des faits justifiant l'application des dispositions de l'article 1741 du code général des impôts, au regard tant du montant des sommes fraudées pendant trois ans consécutifs dont par rapport aux revenus des prévenus, que de la nature des agissements des prévenus en fonction de leur implication effective dans leur société familiale dont ils étaient seuls porteurs de parts, de l'absence concordante de déclaration fiscale des dividendes par la société, de l'absence de garanties suffisantes particulières prises en matière de déclarations fiscales, en l'absence de mandat particulier donné au comptable en ce qui concerne leurs déclarations fiscales personnelles ; que le comportement fiscal des prévenus ainsi apprécié n'est pas sans lien avec l'existence de leur casier judiciaire antérieur, mais aussi de redressements fiscaux intervenus en 2006 à l'encontre des époux X... à titre professionnel et personnel » ;

"1°) alors qu'il résulte de la décision 2016-545 QPC du 24 juin 2016 que seuls les cas les plus graves de dissimulation frauduleuse des sommes soumises à l'impôt caractérise le délit de fraude fiscale, cette gravité, qui peut résulter du montant des droits fraudés, de la nature des agissements ou de leurs circonstances, supposant des manoeuvres frauduleuses diverses ou un état de récidive légale ; qu'en déclarant les prévenus coupables de fraude fiscale sans caractériser aucune manoeuvre frauduleuse destinée à dissimuler leurs revenus, la cour d'appel, qui n'a relevé aucune circonstance établissant la gravité requise pour établir l'infraction poursuivie, a privé sa décision de base légale ;

"2°) alors que, la gravité exigée pour caractériser la fraude fiscale exclut nécessairement les seules déclarations tardives du champ d'application du texte pénal ; qu'en déclarant les prévenus coupables de fraude fiscale pour avoir déclaré tardivement, hors du délai initial et du délai de régularisation, les déclarations 2012, circonstances n'établissant pas la gravité requise pour caractériser la fraude fiscale, la cour d'appel n'a de plus fort pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;

"3°) alors que, la cour d'appel ne pouvait se borner à relever que l'impôt sur le revenu est un impôt personnel que le comptable des activités professionnelles, au bénéfice duquel aucun mandat n'a été produit à cette fin, n'a pas vocation à déclarer, sans répondre au moyen péremptoire de défense qui rappelait les nombreux témoignages et le jugement du tribunal administratif du 6 avril 2017 dont il résulte que la gestion de la totalité des obligations fiscales des prévenus incombait à M. B..., comptable des sociétés, qui effectuait les déclarations de revenus des consorts X... et procédait au paiement de l'impôt, circonstances exclusives de toute intention délibérée de l'éluder" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. David X... et Mme C... Y..., ont été poursuivis des chefs de fraude fiscale pour déclarations minorées des revenus des années 2010 et 2011 et pour non déclaration des revenus de l'année 2012 dans les délais prescrits, que le tribunal correctionnel a condamné le premier à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et 50 000 euros d'amende, la seconde à trois mois d'emprisonnement et 50 000 euros d'amende et a reçu l'administration fiscale en sa constitution de partie civile, que les prévenus, le ministère public et la partie civile ont interjeté appel ;

Attendu que, pour confirmer le jugement sur la culpabilité des prévenus, l'arrêt relève que les dissimulations sur les revenus provenant de dividendes de la société familiale s'élèvent pour Mme Y... à 270 000 euros pour l'année 2010 et à 540 000 euros pour 2011 et pour M. X... à 90 000 euros pour 2010 et à 180 000 euros pour 2011 et retient que la décision de non déclaration de ces dividendes a été concertée, que M. X... a, en outre, majoré à tort son quotient familial d'une demi part et que ses parents M. X... et Mme Y... avaient fait l'objet de redressements fiscaux en 2006 tant à titre professionnel que personnel ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui établissent l'élément intentionnel apprécié souverainement par les juges du fond, et dès lors qu'il n'est pas allégué l'exercice de poursuites fiscales pour les mêmes faits de dissimulation ni d'une décision définitive de décharge rendue par le juge administratif ou civil relative au même impôt ; la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître la réserve d'interprétation invoquée ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.