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Décisions

CA Colmar, 1re ch. civ., 25 mars 2003, n° B20030046

COLMAR

Arrêt

CA Colmar n° B20030046

24 mars 2003

FAITS ET PROCEDURE

La société STIEBEL ELTRON Gmbh, spécialisée dans la fabrication de radiateurs électriques à accumulation, a embauché le 10 octobre 1982 Monsieur Henri B en qualité de directeur technico-commercial attaché au développement de sa succursale de METZ.

Le contrat de travail renfermait une clause selon laquelle les inventions réalisées par Monsieur Henri B dans le cadre de son activité devenaient la propriété de la société.

Ce contrat a pris fin le 30 avril 1994.

Une demande de brevet français n° 94.02569 et une demande de brevet européen n°95.440 008.1 ont été respectivement déposées les 2 mars 1994 et 27 février 1995 par Mademoiselle Sandra B, fille de Monsieur Henri B, et par Madame Nadine C, relatives à une régulation pour chauffage électrique à accumulation.

Estimant que cette invention était leur propriété conjointe, la société STIEBEL ELTRON et une société SEREB (Société d'Etudes et de Réalisations Electriques Blésoises) ont fait assigner en juin 1998 Monsieur Henri B, " Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C en revendication de ces brevets sur le fondement de l'article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle.

Par acte déposé le 26 janvier 1999, la société SEREB s'est désistée de son action et Monsieur Claude H (anciennement Directeur de cette société) est intervenu volontairement dans la procédure aux côtés de la société STIEBEL ELTRON. Ensemble, ils ont demandé au tribunal de :

-dire que Monsieur Henri B a utilisé comme prête-noms Mademoiselle Sandra B et Madame C, leur faisant déposer la demande de brevet français n°94.02569, pour chercher à obtenir protection d'une invention soustraite à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur H ;

En conséquence,

-par application de l'article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, dire que le brevet n°94.02569 est la copropriété à parts égales de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur H ;

-par voie de conséquence, dire que le brevet européen n°95.440 008.1 et les autres brevets étrangers correspondant au brevet français n° 94.02569 sont la copropriété à parts égales de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur H ;

-dire que mention de la présente décision sera faite au Registre National des Brevets tenu par l'INPI ;

-faire injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame C, in solidum, sous astreinte de 1000 francs par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, de faire toutes démarches pour la régularisation du transfert de propriété auprès de l'INPI et de tous offices étrangers concernés, et à remettre à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur H tous documents relatifs au brevet français et aux brevets étrangers correspondants ;

-faire injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame C de remettre à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur H tous contrats de cession ou de licence affectant les brevets en cause et ce sous peine d'astreinte ;

-faire injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame C de résilier tous contrats de cession ou de licence affectant les brevets en cause et d'en justifier à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur H, et ce sous peine d'astreinte ;

-faire défense à Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame C, directement ou indirectement, de fabriquer, faire fabriquer, offrir à la vente et ou vendre des systèmes de régulation conformes aux brevets français n° 94.02569 et européen n° 95.440 008.1 sous peine d'astreinte ;

-condamner Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame C in solidum à verser à chaque demandeur une indemnité provisionnelle de 400.000 francs à valoir sur leur préjudice ;

-avant-dire-droit sur ce préjudice, nommer tel expert qu'il plaira au tribunal avec mission de rechercher tous renseignements et d'entendre tous sachants, à 1 ' effet de rechercher et d'apprécier tous les éléments du préjudice subi par la société SIEBEL ELTRON et par Monsieur H, par suite du dépôt illégitime des brevets susvisés et de l'exploitation indirecte qui a pu en être faite par Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame C.

La société STIEBEL ELTRON et Monsieur H ont conclu au rejet des prétentions adverses, ont réclamé le paiement solidaire d'une somme de 100.000 francs pour chacun d'eux en raison du caractère manifestement abusif de la procédure, la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix des concluants et aux frais des demandeurs, enfin le paiement solidaire d'une somme de 20.000 francs pour chacun au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Par un jugement du 23 octobre 2001, la juridiction saisie :

-a donné acte à la société SEREB de son désistement d'appel et à Monsieur H de son intervention volontaire dans la procédure ;

-a constaté l'ouverture de l'enveloppe SOLEAU à l'audience en présence de l'avocat de la partie défenderesse ;

-a dit que Monsieur Henri B a utilisé comme prête-noms Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C en leur faisant déposer la demande de brevet français n° 94.02569 suivie du brevet européen n° 95.440 008.1 en vue d'obtenir protection d'une invention soustraite à la société STEBBEL ELTRON et à Monsieur Claude H ;

En conséquence,

Vu l'article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle,

-dit et juge que le brevet n° 94.02569 déposé le 2 mars 1994 et le brevet n° 95.440 008.1 déposé le 27 février 1994 et tous autres brevets étrangers correspondant au brevet français n°94.02569 sont la copropriété à parts égales de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur Claude H ;

-a dit que mention du présent jugement sera faite au Registre National des Brevets tenu par l'INPI ;

-a fait injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame Nadine C d'effectuer toute démarche pour la régularisation du transfert de propriété auprès de! TNPI et de tous offices étrangers concernés et à remettre à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H tous documents relatifs au brevet français et au brevet étranger correspondant, et ce sous astreinte de 1000 francs par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la signification du jugement ;

-a fait injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame Nadine C de remettre à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H tous contrats de cession ou de licence affectant les brevets en cause, et ce sous astreinte de 1000 francs par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification du jugement ;

-a fait injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame Nadine C de résilier tous contrats de cession ou de licence affectant les brevets en cause et d'en justifier à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H, sous astreinte de 1000 francs par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du jugement ;

-a fait défense à Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, directement ou indirectement, de fabriquer, faire fabriquer, offrir à la vente et/ou vendre des systèmes de régulation conformes aux brevets susvisés, sous astreinte de 10.000 francs pour chaque infraction constatée après un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement ;

-a condamné in solidum Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C à verser à la société STIEBEL ELTRON la somme de 400.000 francs en réparation de son préjudice et à. Monsieur Claude H la somme de 300.000 francs en réparation de son préjudice ;

-a débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-a condamné in soIidum Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C aux dépens, ainsi qu'au versement à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H de la somme de 25.000 francs pour chacun au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

Pour statuer ainsi, les premiers juges ont relevé :

-qu'il est acquis que Mademoiselle Sandra B, la propre fille de Monsieur Henri B, et Madame Nadine C ont déposé le 2 mars 1994 auprès de l'INPI un brevet relatif à un système de régulation pour chauffage électrique à accumulation dont la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H revendiquent la propriété du fait que cette invention procéderait des études menées en commun par Monsieur Henri B, Monsieur Claude H et les collaborateurs de la société STIEBEL ELTRON, ce que les défendeurs contestent en affirmant qu'il s'agit d'un procédé nouveau développé par les deux déposantes ;

qu'un second brevet européen a été déposé le 27 février 1995 par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C en complément du brevet français et relatif au procédé de régulation de la charge d'au moins un dispositif de chauffage électrique à accumulation et dispositif pour la mise en oeuvre de ce procédé ;

-qu'il convient d'examiner le contenu des documents, schémas et études élaborés au sein de la société STIEBEL ELTRON et de procéder à une comparaison avec les brevets déposés pour déterminer s'il y a eu détournement d'invention ;

-qu'il ne peut être contesté, à l'examen des courriers et télécopies produits au dossier, que la société STIEBEL ELTRON a engagé en 1992 une recherche à laquelle a participé Monsieur Henri B sur la mise au point de radiateurs électriques à accumulation avec thermostats d'ambiance, régulation électronique et restitution d'énergie, ainsi que cela résulte des pièces 5 à 8, en vue d'obtenir une meilleure charge de l'appareil ;

-qu'il est notamment produit un échange de courrier STTEBEL du l4 janvier 1992 accompagné d'un croquis détaillé prévoyant une charge de l'appareil en heures creuses avec relance de jour sur la base de trois interrupteurs dont l'interrupteur K2 relatif à la chaleur restante, l'interrupteur Th réglable de 17 à 21 degrés (soit entre 19 + ou -2°), et l'interrupteur A1 commandé par la température ambiante ;

-que le compte rendu de réunion du 20 septembre 1992, à laquelle participait Monsieur Henri B, relate le projet d'installation d'un thermostat d'ambiance bi ou tri-polaire ;

-qu'à ces pièces s'ajoute le contenu de l'enveloppe SOLEAU déposé par Monsieur Claude HE Y le 11 janvier 1991 et transmis à Monsieur Henri B par courrier du 14 mars 1993 ;

-que ce procédé vise le système de régulation de charge d'appareils de chauffage électrique en apportant une information nouvelle à l'appareil pour se recharger aux heures creuses sur la base de la comparaison entre la charge restante et la quantité de chaleur emmagasinée sur les 24 dernières heures ;

-que cette référence au jour précédent constitue "un indice nouveau et fiable, permettant d'éviter le recours à une sonde extérieure moins économique ;

-que dans son courrier d'accompagnement du 14 mars 1993, Monsieur Claude H propose à Monsieur Henri B de le revoir afin de constituer un dossier pour le dépôt d'un brevet en commun, ce qui atteste d'études avancées en vue de breveter l'invention ; qu'aucune réponse à ce projet n'est produite au dossier ;

-que si les défendeurs affirment que de tels documents, schémas et courriers ne constituent que des pièces inexploitables et qu'en tout état de cause elles différent de l'invention déposée, il convient de relever que la description de la technique connue à ce jour telle que relatée dans la présentation du brevet litigieux procède du même raisonnement que celui contenu dans l'enveloppe SOLEAU, à savoir régulation de charges calculées en fonction de la température ambiante, extérieure, et de la chaleur résiduelles dans l'appareil, tous critères exposés dans l'enveloppe SOLEAU ;

-que la revendication n°1 du brevet propose un procédé de régulation affiné par la référence aux consommations du cycle précédent de 24 heures, complété par la consigne de température ambiante du thermostat de charge réglée à 19° ajustable, -et la consigne affichée au thermostat d'ambiance du local ;

-que le brevet introduit la notion nouvelle de comparaison du cycle précédent de 24 heures

Le tribunal en a déduit :

-qu'il s'avère ainsi que le brevet déposé constitue une contraction de l'ensemble des études menées par la société STÏEBEL ELTRON et du contenu de l'enveloppe SOLEAU, en développant à l'évidence sur le plan technique ces projets afin d'aboutir à un système de fonctionnement efficace ;

-que le brevet consiste à optimiser la charge de l'appareil et à se référer au jour précédent (procédé H) pour obtenir un meilleur confort tout en assurant une charge continue de l'appareil pour pallier le changement de température, en la limitant cependant au strict nécessaire d'un point de vue économique sur la base de deux thermostats de température donnée et de température ambiante du local ( études S) ;

-qu'en conséquence, les brevets sont le résultat des études menées auparavant sous l'égide de Monsieur Henri B au sein de la société STIEBEL ELTRON, avec la collaboration même épisodique de Monsieur Claude H.

Les premiers juges ont encore retenu ;

qu'il est troublant que' les brevets aient pu être déposés par Mademoiselle Sandra B, la propre fille de Monsieur Henri B, âgée de 19 ans à l'époque et qui, si brillante fut-elle, suivait un cursus généraliste sans pouvoir disposer ni justifier des connaissances spécifiques attachées à la technicité du procédé breveté ;

-que Madame Nadine C, architecte de son état, ne peut davantage justifier d'une expérience dans le domaine très spécialisé de la thermique et du génie électrique qu'un architecte généraliste de la construction ne peut appréhender, sauf à être passionné en la matière, ce qui n'est pas démontré ;

-qu'il est à cet égard frappant de constater que les défenderesses n'ont produit aucun travail, schémas, plans, croquis, planches, études préliminaires, courriers, justifiant de leurs recherches communes et approfondies, en vue de la mise au point d'un brevet d'une telle spécificité ;

-qu'il en résulte à l'évidence que c'est Monsieur Henri B qui, disposant de toutes les informations et connaissances suffisantes en raison de son métier, son expérience et ses études au sein de la société STIEBEL ELTRON, est à l'origine de la concrétisation du brevet dont il a développé la mise au point technique à l'époque même où il était encore employé chez S, la date du dépôt du brevet français étant antérieure à son départ de l'entreprise ;

-que Monsieur Henri B avait tout intérêt à déposer et exploiter un brevet de cette nature, ce que confirme la création de sa propre entreprise THERMOSPHERE en 1996 au nom de sa fille et de son fils, âgé à l'époque de 16 ans, ce qui ne fait que conforter le caractère clandestin des activités exercées par Monsieur Henri B.

Le tribunal en a conclu qu'il convenait d'accueillir la demande en revendication formée par la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H sur le fondement de l'article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, suivant lequel si un titre de propriété industrielle a été demandé soit pour une invention soustraite à l'inventeur ou à ses ayants -cause, soit en violation d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne lésée peut revendiquer la propriété de la demande ou du titre délivré.

Selon une déclaration enregistrée au greffe le 28 décembre 2001, Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C ont régulièrement interjeté appel de ce jugement.

En cours d'instance, la société THERMOSPHERE est intervenue volontairement dans la procédure.

Par leurs dernières conclusions déposées le 10 janvier 2003, Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont demandé à la Cour de ;

Avant-dire-droit :

Commettre, après consultation de l'un des organismes désignés par arrêté du 10 juin 1965, comme il est dit à l'article R.615-5 du Code de la Propriété Intellectuelle, un expert aux fins de déterminer à l'aide des Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont fait valoir ;

-que ce sont les propres investigations de Mademoiselle Sandra B, étudiante animée d'un esprit scientifique brillant, qui lui ont permis, avec l'aide de Madame Nadine C, architecte, d'appréhender les problèmes de régulation thermique et de développer le nouveau concept de régulation pour système de chauffage électrique à accumulation ; que son parcours professionnel vient corroborer en tant que de besoin son goût et ses aptitudes évidentes pour les sciences expérimentales ;

-que contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges, c'est l'inexpérience de Mademoiselle Sandra B qui lui a permis de se détacher de la voie empruntée par de nombreux spécialistes d'alors, pour finalement innover à partir de l'expression d'une idée simple, soit le fait d'assurer une régulation thermique d'un chauffage par accumulation :

* en réalisant une pré-charge qui démarre dès le début des heures creuses, laquelle est une fraction des consommations de la veille,

* en associant la pré-charge à une charge définie par une consigne de température ambiante fixe, sans prise en compte de la température extérieure, ce point étant fondamental puisque la société STIEBEL ELTRON est demeurée pendant des années après le départ de Monsieur Henri B attachée à des systèmes de régulation avec sonde extérieure, c'est-à-dire avec prise en compte de la température extérieure ;

-que cette idée est nouvelle et originale ; qu'en tout état de cause, la partie adverse ne prouve pas l'avoir jamais eue, ni l'avoir formalisée ;

-que la contribution de Madame Nadine C est notamment matérialisée par la prise en compte de certains aspects spécifiques liés aux immeubles collectifs ; que son mari, cadre à l'Electricité de STRASBOURG, a indiqué dans une attestation quelle a été sa contribution ;

-que ce n'est qu'une fois le brevet déposé que Monsieur Henri B est intervenu par l'effet d'un mandat confié par les déposantes pour assurer son exploitation ;

-que désireuse d'étendre la protection du brevet français à d'autres pays et ce avant l'expiration du délai de priorité unioniste d'une année, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C ont déposé le 2 mars 1995 une demande de brevet européen, mais cette fois par l'intermédiaire d'un mandataire professionnel ;

-que ce brevet introduit une modification d'importance, en ce sens qu'il comprend une innovation supplémentaire, objet de la revendication n°3 (les revendications 5 et 6 dépendant de la revendication n°3) ; qu'ainsi, le brevet de 1995, bien que fondé sur le brevet de 1994, n'en est pas la reproduction identique ; qu'il ajoute, en sa revendication n°3, un paramètre en plus pour le réglage, soit la masse calorifique globale du local ;

-que ce sont en fait les constatations de Monsieur Henri B qui conduisirent à la modification de la rédaction du brevet européen ; que cet apport, réalisé plus de 8 mois après la fin de l'activité de Monsieur Henri B chez STEEBEL est sans aucune rapport avec les techniques et les moyens spécifiques de l'entreprise qui commercialisait un régulateur sous licence avec sonde extérieure ;

-que c'est également sur la base de cet élément nouveau que Monsieur Henri B a développé un concept nouveau qu'il a dénommé THERMOSPHERE, dénomination qui a fait l'objet d'un dépôt de marque et qui constitue aussi la dénomination d'une société commerciale d'exploitation de ce concept, dont il assuré l'essentiel du développement, documents fournis par les parties et des explications qu'il aura recueillies, après les avoir entendues :

-si Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C avaient la capacité de réaliser l'invention objet du brevet de 1994,

-si les documents et notes versés aux débats par la société STIEBEL ELTRON ainsi que l'enveloppe SQLEAU produite par Monsieur Claude H, constituent une invention qui leur serait le cas échéant commune et non comprise dans l'état antérieur de la technique, notamment au regard des antériorités constituées par les brevets EDF et DANFOSS ;

-dire si l'invention ou le procédé dont pourrait se prévaloir la société STIEBEL ELTRON ou Monsieur Claude H définit le procédé de régulation objet et/ou du brevet de 1995 : dans l'affirmative, caractériser en quoi l'invention STIEEBEL/H concerne tout ou partie des revendications des brevets de 1994 et 1995,

-dire si le brevet de 1995 constitue une invention de perfectionnement au regard de l'invention revendiquée dans le brevet de 1994 et, dans l'affirmative, la caractériser ;

-dire que l'expert pourra se voir adjoindre la présence d'un ingénieur électro-thermicien ayant une formation en électricité lui permettant d'interpréter des schémas électriques ;

En tout état de cause,

-déclarer Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B recevables et bien fondés en leur appel ;

-réformer intégralement le jugement entrepris et dire n'y avoir lieu à condamnation des appelants ni à restitution des brevets de 1994 et 1995 ;

Sur appel incident,

-condamner in solidum les intimés à payer à Monsieur Henri B et à Mademoiselle Sandra B la somme de 50.000 Euros pour chacun à titre de dommages-intérêts ;

-ordonner en cas de débouté des intimés, le droit pour chacune des parties de faire publier la décision à intervenir dans 5 journaux ou périodiques de leur choix, aux frais des intimés qui devront les supporter solidairement, sans que le coût de chaque insertion soit inférieur à 4574 Euros HT ;

-condamner in solidum les intimés aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 20.000 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Subsidiairement, en cas de succès de l'action en revendication entreprise,

-dire et juger que l'attribution du brevet européen n'inclut pas les revendications 3, 5 et 6 dudit brevet ;

-dire et juger que par application de l'article L.611 -7 du Code de la Propriété Intellectuelle, le brevet français n° 94.02569 et le brevet européen n° 95.440 008.1 sont au moins pour partie constitués d'inventions hors mission attribuables à la société STIEBEL ELTRON, de sorte que Monsieur Henri B sera en droit d ' en réclamer un juste prix, lequel ne saurait être inférieur au montant des dommages-intérêts attribués à la société STIEBEL ELTRON.

Au soutien de leur appel, expliquant d'abord la genèse des brevets, lequel a été entravé par l'assignation adverse.

S'expliquant davantage au fond, Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont fiait valoir :

-que la demande d'expertise, bien que rejetée par le conseiller delà mise en état, est maintenue ; qu'en effet, la question relative au caractère brevetable des "travaux" de S/H est primordiale, dans la mesure où le principe même de l'action en revendication est d'offrir aux prétendues victimes la possibilité de récupérer leur invention ayant fatl'objet d'un brevet ; que si leurs "projets" ne sont ni des inventions au sens des inventions brevetables, ni nouvelles ou mêmes dépourvues d'activité inventive, elles font partie du domaine de l'état de la technique et ne sont donc pas protégeables

-qu'en tout état de cause, il sera démontré que Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C sont bien les véritables auteurs de l'invention objet du brevet français de 1994 et du brevet européen de 1995 ;

-que subsidiairement, il sera fait la démonstration qu'aucune preuve tangible n'a été apportée par les demandeurs de ce que l'invention, objet des brevets revendiqués, d'une part soit la leur et d'autre part qu'elle leur a été soustraite par Monsieur Henri B, sous couvert de sa fille et de Madame Nadine C.

Relativement à l'absence de caractère frauduleux du dépôt. Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont indiqué :

-que l'analyse des premiers juges sur le caractère frauduleux du dépôt des brevets est lacunaire et entachée d'une évidente suspicion à l'égard des appelants ;

-qu'en effet, le tribunal a raisonné par de simples présomptions qui ne sont étayées par aucun élément objectif et probant, alors que la bonne foi est due au titre ;

-que s'il est vraisemblable que les déposants puissent être les inventeurs, il appartient à la partie adverse, à l'aide de preuves incontestables et non à l'aide de simples accusations ou présomptions, de prouver le contraire, ce qu'elle est incapable de faire ;

-que Monsieur Henri B aurait été d'une maladresse extraordinaire pour utiliser le nom de sa fille pour un dépôt frauduleux, et ce alors que son contrat de travail chez S. expirait quelques jours plus tard ;

-que la demande de brevet a bien été déposée le 2 mars 1994 par Mademoiselle Sandra B et non par Monsieur Henri B ;

-que la partie adverse n'établit pas que Monsieur Henri B se serait emparé de documents, alors par ailleurs que, si une équipe de recherche ou d'études "franco-allemande" il devait y avoir, comme le soutiennent les intimés, cette équipe devait nécessairement disposer des doubles ;

-que l'accusation adverse selon laquelle Monsieur Henri B aurait caché l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H, communiquée par un courrier du 4 mars 1993, est démentie par l'annexe 30 des intimés qui prouve que ledit courrier était bien resté entre les mains de la société STIEBEL ELTRON ;

-que Monsieur Claude H a écrit le 1er juillet 1994 à Monsieur Henri B, en sa qualité de gestionnaire du brevet français, pour lui adresser un projet de contrat sur en-tête SEREB, qui n'a finalement pas abouti, par lequel Monsieur Henri B confierait es qualités la réalisation du ou des prototypes d'un système de régulation pour accumulateurs électriques ; qu'ainsi, non seulement Monsieur Claude H et/ou la SEREB avaient été informés par Monsieur Henri B de l'existence du brevet, dont il n'a nullement caché l'existence, mais en outre ils reconnaissent ne pas être les auteurs des points innovants et ne pas avoir connu renseignement du brevet ;

-que Monsieur Claude H ne peut dès lors poursuivre une action en revendication sur une partie de l'invention, soit le concept exprimé dans son enveloppe SOLEAU, alors que le projet de convention SEREB/H prouve qu'il ne connaissait pas auparavant le brevet et donc son enseignement ;

-qu'il ne prouve pas que la signature au bas de document ne serait pas la sienne ;

-que les intimés soutenant que c'est la contraction des études S/H qui caractériseraient l'invention, si Monsieur Claude H ne peut plus décemment revendiquer sa part d'invention, il en résulte qu'il n'existe plus de combinaison susceptible d'être revendiquée ;

-que la sincérité de Monsieur Henri B ressort du fait que celui-ci a écrit à son ancien employeur le 30 mai 1994 pour lui indiquer qu'il était entrain de créer une société d'exploitation d'un concept pour l'amélioration du chauffage électrique, mettant en oeuvre des radiateurs à accumulation, tout en lui proposant un droit d'exploitation préférentiel ; que le concept était en fait le procédé objet du brevet déposé par sa fille et Madame Nadine C ; qu'il montrait ainsi qu'il n'avait rien à cacher à la société STIEBEL ELTRON et ne cherchait aucunement à nuire à ses intérêts ;

-que la société STIEBEL ELTRON a attendu le mois de juin 1998 pour assigner les concluants ;

-qu'il est feux de prétendre que Monsieur Claude H se trouvait en relation avec Monsieur Henri B au cours de la période 1991/92 ;

-qu'il est également faux de prétendre qu'il existait une équipe de recherches M/B chez S à la même époque, et que Monsieur Henri B était personnellement à l'origine de l'étude S telle que matérialisée par les pièces versées aux débats ; qu'en fait d'études, il s'agissait uniquement de transposer, comme demandé par les clients français de S, la technologie des brevets EBF aux schémas techniques de base des accumulateurs S ; qu'ainsi, seules des annotations et des corrections manuscrites ont été faites sur ces schémas existants, à titre de brouillon, envoyés en Allemagne pour retranscription et/ou adaptation ; que Monsieur Henri B, de par ses fonctions, se devait de répercuter en Allemagne la demande de ses clients français ; qu'il n'a donc pas participé à une équipe de recherche pour inventer un nouveau régulateur thermique ;

-que Monsieur Henri B a uniquement participé à la demande faite par les clients de STIEBEL France d'adapter les régulateurs avec sonde extérieure pour y incorporer le dispositif EDF tombé dans le domaine public ;

-que la succursale française de la société STIEBEL ELTRON n'avait pas de service spécifique pour le développement de produits nouveaux et Monsieur Henri B n'a jamais fait partie du moindre service de recherche au sein de S ;

-que Mademoiselle Sandra B produit des relevés de température prouvant qu'elle a entrepris une étude sérieuse et détaillée afin d'étayer sa réflexion de base et notamment le principe de la prise en compte d'une fraction de l'énergie consommée la veille pour définir une pré-charge en heures creuses ;

-que S avait tout intérêt à tenter de bloquer la commercialisation du concept THERMOSPHERE qu'elle n'arrivait pas égaler, en invoquant un prétendu dépôt de brevet frauduleux exercé à son détriment et à celui de Monsieur Claude H ;

-que L'expertise sollicitée démontrera en tant que de besoins que les documents versés aux débats tant par la société STIEBEL ELTRON que par Monsieur Claude H ne définissent pas le procédé des brevets de 1994 et de 1995 ;

-que la disposition contractuelle, selon laquelle il était fait obligation à Monsieur Henri B de transmettre la propriété de toute invention à son employeur, est contraire aux règles d'ordre public de l'article L.611-7 du Code de la Propriété Intellectuelle., définissant le régime des inventions de salariés ; qu'en l'absence de mission inventive attribuée au salarié, l'invention est réputée appartenir au salarié, sauf dans 1 ' hypothèse où elle pourrait être attribuée à l'employeur, moyennant toutefois l'attribution d'un juste prix ; que le tribunal a par méconnaissance des dispositions sus-visées, renversé la présomption légale en faveur du salarié en la faisant bénéficier à son employeur ;

-qu'en tout état de cause, si la Cour devait confirmer l'attribution de tout ou partie de l'invention objet du brevet de 1994 et/ou de tout ou partie de celle objet du brevet de 1995, en ce qu'elle était le fait de Monsieur Henri B et non des déposants, elle devra faire application de l'article L.611-7 &2 et n'en faire attribution à l'employeur que dans les limites qu'elle définira et moyennant l'attribution d'un juste prix.

En ce qui concerne le défaut d'identité entre les inventions en cause, les appelants ont fait valoir :

-que la simple juxtaposition de moyens connus est exclue du champ de la brevetabilité, seule la combinaison nouvelle de moyens connus pouvant l'être ; que les intimés ne contestent pas le caractère non brevetable de leurs "moyens" et ne soutiennent pas davantage que, combinés entre eux, ils constitueraient une combinaison nouvelle de moyens connus, qui seule serait brevetable ;

-qu'ils ne peuvent donc raisonnablement revendiquer quelque chose qu'ils n'avaient pas, ni même une combinaison qu'ils n'avaient jamais réalisée ou qu'ils n'étaient pas sur le point de réaliser au moment des dépôts de brevet ;

-qu'ils soutiennent simplement que le principe de leurs moyens se retrouverait dans les brevets discutés, ce qui est au demeurant contesté, et que dès lors ils auraient droit à l'invention et aux brevets qui en découlent ;

-que subsidiairement, les intimés ne démontrent pas en quoi les documents qu'ils produisent caractériseraient une combinaison brevetable ;

-que les premiers juges n'ont pas caractérisé en quoi les moyens techniques exposés dans l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H ou encore dans les prétendus travaux de S sont contenus dans la totalité des revendications des deux brevets litigieux ;

-que le tribunal a raisonné de façon très globale et s'est contenté de retenir, sans expertise préalable, que le type de régulation thermique décrit dans l'enveloppe SQLEAU de Monsieur Claude H était le même que celui décrit dans la revendication n°l du brevet de 1994 et qu'en conséquence il constituait une contraction de l'ensemble des études menées par S et du contenu de l'enveloppe SOLEAU, sans caractériser :

* en quoi toutes les revendications des brevets de 1994 et de 1995, notamment explicitées par leurs descriptions, étaient-elles aussi l'expression d'une contraction des études menées par S et Monsieur Claude H ; que le recours à la description permet d'établir et de mettre en évidence la différence entre les procédés ;

* en quoi il devait en être de même pour le brevet de 1995, ce brevet devant d'analyser en un titre de propriété industrielle distinct, alors que ledit brevet renfermait un certain nombre de revendications complémentaires qui constituaient une amélioration apportée à l'invention objet du brevet de 1994 ;

-qu'une invention de perfectionnement, bien que dans la dépendance du brevet principal, reste distincte et protégeable en soi ;

-que le brevet de 1994, qui est le seul sur lequel le tribunal s'est véritablement penché, recourt à un procédé distinct de l'invention revendiquée par S et H, en ce que les moyens employés sont différents.

Analysant précisément les différences dans les moyens techniques revendiqués, Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont exposé :

1 - sur l'existence d'un thermostat bi ou tripolaire du procédé H/S,

-que ce moyen a été interprété à tort par le tribunal comme étant un moyen de Monsieur Claude H ;

-qu'en effet, il n'apparaît pas dans l'enveloppe SOLEAU,

-que le thermostat bi ou tripolaire auquel fait allusion le tribunal n'est en fait évoqué que dans les schémas et la note de S ; que ce moyen était parfaitement connu à l'époque, dès lors qu'il était défini dans les brevets EDF n° 7420633 et 74.20634 de juin 1974 (l'intégration de ces thermostats avait été demandée par les clients français de S) ;

-que dans le brevet de 1994., il est recouru à un moyen technique différent, constitué de deux thermostats distincts, soit un -thermostat de charge et un thermostat d'ambiance, associés à un compteur de temps et d'énergie, pour définir une pré-charge en fonction d'une fraction de l'énergie consommée la veille ;

2 - sur le moyen relatif à la prise en charge d'un cycle de la veille,

-que le moyen décrit dans l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H consiste à exposer de façon très générale un procédé de régulation fonctionnant sur le principe d'une comparaison de certains événements qui se sont produits au cours d'un cycle de 24 heures, d'y associer un calcul dit "simple", quoique non caractérisé, pour définir le temps de charge à prendre en compte pour le cycle suivant ;

-que l'idée de se référer à un cycle de consommation précédent de 24 heures, reprise entre autres 'choses dans le brevet de 1994, était parfaitement connue (brevet DANFOSS) ;

-que le moyen décrit dans le brevet de 1994 et de 1995 consiste à prendre notamment en compte une fraction prédéterminée de la consommation de la veille (70%) que l'on complète en fonction du niveau des température obtenues, par l'utilisation d'un deuxième thermostat d'ambiance qui coupera la charge lorsque la température souhaitée sera obtenue ;

-qu'il existe en conséquence une différence de taille : l'invention B définit une pré-charge indépendamment des conditions de charge de la veille, alors que le principe revendiqué par Monsieur Claude H définit cette pré-charge en tenant compte exclusivement de la quantité d'énergie emmagasinée la veille ;

-qu'enfin, Monsieur Claude H parle de définir un nouveau temps de charge en heures creuses, alors que les brevets s'attachent, entre autres, à définir la pré-charge en heures creuses ;

3 - sur la prise en compte de la charge en heures pleines,

-que ni l'enveloppe SOLEAU ni les documents de S ne s'attachent à la définir, et encore moins de la façon dont le font les brevets de 1994 (revendication 1 § 2) et de 1995 (revendication 4) ;

4 - sur la prise en compte de l'inertie thermique du bâtiment,

-que cet élément est exprimé dans les revendications 3, 5 et 6 du brevet de 1995 ;

-qu'aucun des documents adverses ne prouve que ce phénomène a été abordé ;

-que les intimés soutiennent à tort qu'un simple thermostat d'ambiance suffirait à le prendre en considération ;

5 - sur la présence d'un thermostat d'ambiance,

-que l'enveloppe SOLEAU ne fait pas appel à un thermostat d'ambiance, comme c'est le cas pour les brevets disputés.

Insistant encore sur le défaut de pertinence des pièces adverses, Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B ont précisé :

-qu'aucune de ces" pièces ne témoigne d'une véritable activité de recherche ou de projet innovateur allant dans le sens de l'invention brevetée en 1994 et améliorée en 1995 ;

-qu'aucun schéma, hormis l'annexe 6, n'est un original ;

-qu'elles ne retracent que certaines discussions et réflexions dont l'objet était tout autre, soit d'intégrer le dispositif de régulation compris dans les brevets EDF (qui étaient en fin de validité) aux schémas techniques des accumulateurs S, à la demande expresse de ses propres clients, projet au demeurant non suivi d'effet ;

-que ces schémas électriques figurant en annexes 8 et 9 furent réalisés sur la base du schéma classique des accumulateurs de S afin d'y ajouter le principe des brevets EDF avec thermostat bi ou tripolaires ; qu'au demeurant, une interprétation rigoureuse de ces schémas nécessiteraient le recours à un spécialiste ;

-que l'on ne voit pas en quoi la pièce n°8 révélerait le procédé du brevet de 1994 ;

-que la pièce n°9 n'est pas davantage exploitable ; qu'il s'agit de simples brouillons., ultérieurement mis au propre par Monsieur M (annexe n°5), puis comportant quelques corrections de Monsieur Henri B (annexe 6) ;

-que la pièce n°7 ne saurait caractériser l'existence d'une équipe de recherche à laquelle Monsieur Henri B aurait participé ;

-qu'en tout état de cause, les documents produits par S comprennent des incohérences, sont incomplets et enfin énoncent des principes connus.

Les appelants ont enfin fait valoir :

-que la société STIEBEL ELTRON ne cherchait pas à. définir un procédé de régulation thermique en fonction d'une pré-charge correspondant à une fraction d'énergie consommée pendant le cycle précédent de 24 heures, sans recours à une sonde extérieure, et n'a cherché qu'à transposer dans ses schémas classiques le dispositif breveté par EDF (entre-temps tombé dans le domaine public), en y ajoutant un dispositif klixon K2 d'interruption thermique ayant l'effet rigoureusement contraire à celui recherché, soit de limiter la consommation en heures creuses du système de chauffage par accumulation ;

-que les schémas annexés aux pièces 5 et 6, qui sont des tentatives de mise au propre des schémas des annexes S et 9, ne forment au mieux qu'un projet d'implantation dans les schémas classiques S de l'enseignement du brevet EDF ;

-que la société STIEBEL ELTRON énonce que son procédé serait également caractérisé par l'existence d'une condition B, soit le fait de relancer la charge pendant les heures à plein tarif, lorsque la température ambiante est inférieure aunecertaine valeur et en fonction de la progression de la température ambiante ; qu'elle n'indique cependant pas les moyens qui lui permettraient d'atteindre ce résultat ; que par contre, le brevet de 1994 comprend des indications précises à cet égard ;

-qu'ainsi, sur les 4 conditions énoncées par la société STIEBEL ELTRON pour caractériser le fonctionnement de son système de régulation,

* la condition Al n'est pas remplie par l'implantation du klixon K2 et ne révèle pas davantage un objectif de régulation thermique, mais au contraire démontre la totale ignorance de S du problème de la pré-charge ;

* les conditions A2 et A3 sont tout simplement reprises dans le brevet EDF 1974 ;

* la condition B n'est pas reprise dans les schémas S ;

-que les documents adverses énoncent des principes connus ; que les attestations produites par les appelants (annexes 57 à 58 ter), émanant de distributeurs fiançais de la société STIEBEL ELTRON, font ressortir que ceux-ci avaient demandé d'intégrer dans l'accumulateur S le procédé de régulation communément appelé à 3 contacts (thgmostat tripolaire) mis au point par EDF ;

-que les brouillons de schémas (pièces adverses 5 à 9) furent envoyés suite à cette demande au service marketing de la maison mère ; qu'ils comportent simplement des relais inverseurs indispensables pour mettre en oeuvre le procédé EDF dans les accumulateurs de S ELTRON ; qu'en effet, la charge des accumulateurs S est réalisée lorsque le signal de commande est absent, alors que dans le schéma EDF la charge est réalisée lorsque ce signal est présent ; que la fonction de l'interrupteur du thermostat est donc inversée ;

-que le paragraphe Ib de la pièce adverse n°7 le définit également clairement, puisqu'il est dit que la commande de la charge par l'intermédiaire du thermostat d'ambiance est nécessaire, un thermostat à 2 ou 3 voies (bi ou tri-polaire) étant à l'oeuvre pour cette fonction ; que la revendication 1 du brevet EDF n° 74.20663 de 1974 est identique à la définition du paragraphe 1b précité ;

-que l'enveloppe SOLEAU énonce un principe déjà connu et repris en 1975 dans le brevet allemand DANFOSS n° 2539065 (annexe 74) puis repris dans son brevet français n° 2323 284 du 1er septembre 1976 (annexe 75) ; qu'en effet, le procédé sommairement décrit dans l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H définit la charge en fonction de l'énergie emmagasinée la veille (elle compare la charge restante par rapport au jour précédent à la même heure, : avec la quantité d'énergie emmagasinée pendant les dernières 24 heures et après "un calcul simple" définit le nouveau temps de charge) ; que le procédé DANFOSS définissait déjà un procédé qui détermine l'énergie emmagasinée pendant le cycle de 24 heures précédent, pour définir la charge du cycle en cours ;

-que ce qui rend les brevets de 1994 et de 1995 différents de l'idée de Monsieur Claude H et des antériorités précitées (DANFOSS, EDF), c'est qu'ils définissent une pré-charge par rapport à une fraction fixe de la consommation d'énergie de la veille (70%) et non une charge après comparaison entre la charge restante et l'énergie emmagasinée la veille (enveloppe SOLEAU) ou consommée la veille (brevets DANFOSS) ;

-que la différence principale entre les procédés ressort d'autre part du fait que les brevets DANFOSS corrigent la charge définie en fonction de l'énergie consommée la veille par la valeur de la consigne de température ambiante affichée au thermostat par l'occupant ou par la température extérieure ; que cette correction par l'un ou l'autre de ces paramètres n'est pas réalisée par le procédé des brevets de 1994 et de 1995, qui maintiennent la pré- charge à sa valeur pré-définie, laquelle est une fraction de l'énergie absorbée ;

-que les brevets de 1994 et de 1995 introduisent en outre par la pré -charge l'effet de l'inertie du bâtiment en régime variable, qui ne peut pas être définie par les besoins en chaleur de la veille ou la consigne du thermostat d'ambiance réglée par l'occupant ; que cette approche nouvelle est absente de tous les procédés des brevets antérieurs ;

-qu'en conséquence, contrairement à ce que soutiennent les intimés, dès lors que les documents versés au débats ne font qu'énoncer des principes connus et donc compris dans l'état de la technique, ils ne peuvent prétendre qu'ils seraient les véritables auteurs d'une invention qui a été brevetée et qui leur aurait été détournée ; qu'une invention n'est brevetable que si elle est nouvelle, recèle une activité inventive et se trouve susceptible d'application industrielle ;

-qu'en occurrence, les intimés n'ont rien inventé, puisqu'ils ne font qu'énoncer des principes connus ;

-que les premiers juges n'ont pas motivé les montants mis en compte à titre de dommages-intérêts.

La société THERMOSPHERE, intervenante volontaire, est venue appuyer dans les mêmes conclusions l'argumentation développée par les consorts B.

Par ses dernières conclusions déposées le 6 janvier 2003, Madame Nadine C a demandé à la Cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :

-débouter la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H de toutes leurs prétentions ;

-dire et juger que les affirmations formulées par les intimés dans le cadre de la procédure de première instance à l'égard de Madame Nadine C et le caractère manifestement abusif de cette procédure ont causé à celle-ci un préjudice qui ne saurait être évalué à moins de 15.245 Euros ;

-condamner solidairement la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H à la réparation de ces préjudices ;

-ordonner la publication du jugement à intervenir dans 5 journaux ou revues au choix de Madame Nadine C et aux frais des intimés, sans que le coût de chaque insertion ne soit inférieur à 4575 Euros ;

-condamner solidairement les intimés à payer à Madame Nadine C une somme de 4000 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux dépens.

Développant de façon générale la même argumentation que Monsieur Henri B et Mademoiselle Sandra B, Madame Nadine C a notamment fait valoir ;

-que Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C sont incontestablement les inventeurs des brevets qu'elles ont déposés en 1994 et 1995 ; que rien en tous cas ne permet de prétendre qu'elles ne pouvaient pas concevoir une tel dispositif ;

-que si la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H étaient effectivement les inventeurs du système breveté, ils n'auraient pas manqué d'en revendiquer la paternité aussitôt après avoir en avoir eu connaissance ;

-que pour dénier la qualité d'inventeurs à Mademoiselle Sandra B et à Madame Nadine C, le tribunal s'est contenté, adoptant en cela l'argumentation développée par les demandeurs, de relever le jeune âge de Mademoiselle Sandra B et l'absence d'expérience de Madame Nadine C dans le domaine très spécialisé de la thermique et du génie électrique ;

-que foi est cependant due aux titres, de sorte que le demandeur d'un brevet d'invention est présumé en être le légitime titulaire et que c'est à celui qui agit en revendication de démontrer que tel n'est pas le cas ;

-que les allégations de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur Claude H selon lesquelles Monsieur Henri B aurait utilisé des prête-noms pour le dépôt d'une invention, dont il serait en réalité l'auteur, ne sont absolument pas prouvées et vont à l'encontre des faits ;

-que Mademoiselle Sandra B OUR et Madame Nadine C ont rédigé seules le brevet français de base, qui comporte d'ailleurs "quelques imperfections dans la rédaction ; qu'elles ont ultérieurement fait appel à Monsieur Henri B pour la rédaction formelle du texte du brevet européen qui apparaît techniquement plus structuré ;

-que Monsieur Henri B a également été mandaté par elles pour procéder aux formalités administratives des dépôts ; que c'est donc bien lui qui a signé certaines pièces et il n'a pas à s'en cacher ;

-que conscients de la difficulté qu'il y avait pour remettre sérieusement en cause la qualité d'inventeur de Mademoiselle Sandra BOUR et de Madame Nadine C, la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H ont alors imaginé de soutenir que l'invention, objet des brevets revendiqués, leur avait en réalité été soustraite frauduleusement par Monsieur Henri B, ancien directeur technico-commercial de la succursale française de la société STIEBEL ELTRON ;

-que pour accueilljr une action en revendication sur le fondement de l'article L. 611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, il est nécessaire pour le demandeur d'apporter la preuve de ce qu'il est en réalité l'inventeur de l'objet du brevet ;

-que la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H sont défaillants dans l'administration de la preuve qui leur incombe ;

-que si les pièces communiquées par eux ne démontrent pas qu'ils sont à l'origine du système breveté par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, en revanche celles-ci ont versé aux débats des pièces qui démontrent qu'à l'époque du dépôt de leur brevet la société STIEBEL ELTRON développait et commercialisait des systèmes de régulation sans relation avec celui faisant l'objet de l'invention ;

-qu'il apparaît au contraire que la société STIEBEL ELTRON de croyait pas à la possibilité de supprimer la sonde extérieure pour obtenir de meilleurs résultats ;

-qu'elle ne peut sérieusement prétendre qu'elle effectuait en 1992 des recherches sur le procédé inventif litigieux, alors que des documents commerciaux des années 1997 et 1998 font état de systèmes de régulation totalement opposés à celui du brevet, et dont la société STIEBEL ELTRON indique elle-même qu'elle travaille à leur amélioration et à leur développement ;

-que si elles avaient été réelles, les recherches de cette société n'auraient pas manqué d'aboutir bien avant l'année 1997 ;

-que les pièces versées aux débats par la société STIEBEL ELTRON révèlent donc que l'invention, objet des brevets revendiqués, n'était pas connue et n'était pas non plus en gestation chez elle, les quelques idées exprimées dans les documents produits en annexes n'allant pas dans le sens de renseignement des brevets ;

-que Madame Nadine C est bien fondée à solliciter la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de la procédure abusive intentée à son encontre ;

-qu'elle a été injustement suspectée de n'être, aux côtés de Mademoiselle Sandra BOUR, qu'un prête-nom et a été contrainte de justifier de sa qualité d'inventeur que rien pourtant ne permettait la mise en cause.

Par leurs dernières conclusions déposées le 30 décembre 2002, la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H ont demandé à la Cour de débouter Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C de leurs prétentions et, confirmant le jugement entrepris sauf à augmenter les dommages-intérêts provisionnels, de :

-dire que le désistement de la société SEREB est régulier ;

-dire que l'intervention volontaire de Monsieur Claude H pour reprise en son nom et pour son compte des demandes formées par SEREB est régulière ;

-dire que Monsieur Henri B a utilisé comme prête-noms Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, leur faisant déposer la demande de brevet français n° 94.02569, pour chercher à obtenir protection d'une invention soustraite à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H ;

En conséquence,

-par application de l'article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, dire que le brevet n° 94.02569 est la copropriété à parts égales de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur Claude H ;

-par voie de conséquence, dire que le brevet européen n° 95.440 008.1 et les autres brevets étrangers correspondant au brevet français n°94.02569sont la copropriété à parts égales de la société STIEBEL ELTRON et de Monsieur H ;

-dire que mention de la présente décision sera faite au Registre National des Brevets tenu par l'INPI ;

-faire injonction à Mademoiselle Sandra B et à Madame C, in solidum, sous astreinte de 300 Euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la signification de la décision à intervenir, de faire toutes démarches pour la régularisation du transfert de propriété auprès de l'INPI et de tous offices étrangers concernés, et à remettre à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur H tous documents relatifs au brevet français 94.02569 et aux brevets étrangers correspondants ;

-faire défense à Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, directement ou indirectement, de fabriquer, faire fabriquer, offrir à la vente et/ou vendre des systèmes de régulation conformes aux brevets français n° 94.02569 et européen n° 95.440 008.1 sous astreinte de 3000 Euros pour chaque infraction constatée après un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir ;

Y ajoutant,

-condamner Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C in solidum à verser à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H une indemnité provisionnelle d'un montant global de 450.000 Euros à valoir sur leur préjudice ;

-avant-dire-droit sur ce préjudice, nommer tel expert qu'il plaira à la Cour avec mission de rechercher tous renseignements et d'entendre tous sachants, à l'effet de rechercher et d'apprécier tous les éléments du préjudice subi par la société STIEBEL ELTRON et par Monsieur H, par suite du dépôt illégitime des brevets susvisés et de l'exploitation indirecte qui a pu en être faite par Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame C ;

-condamner Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C in solidum à payer à chacun des intimés la somme de 15.000 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau. Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H ont fait observer en réplique :

-qu'au cours des années 1991/92, Monsieur Henri B, avec plusieurs autres salariés de la société STIEBEL ELTRON basés en Allemagne ou à Metz, a travaillé sur un projet de radiateur électrique à accumulation avec régulation de charge et de restitution intégrée ;

-qu'en parallèle, la succursale française de S ELTRON, dirigée par Monsieur Henri B, avait entamé courant 1990 des relations avec la société SEREB qui fabrique des systèmes de régulation électronique ;

-que la SEREB était alors dirigée par Monsieur Claude H qui, de son côté, avait réfléchi à un nouveau principe de fonctionnement d'un système de régulation par compensation de charge, qu'il a décrit dans une enveloppe SOLEAU déposée le 22 juillet 1991 : ce principe repose sur la comparaison de la charge restante à une certaine heure, choisie parmi les périodes à tarif réduit, à celle existant le jour précédent à la même heure, ainsi qu'à la quantité d'énergie emmagasinée pendant les dernières 24 heures ;

-que Monsieur Claude H, es qualité de dirigeant de SEREB, et Monsieur Henri B, es qualité de directeur de la succursale française STIEBEL ELTRON, étaient en relation pendant cette époque 1991-1993 ; qu'ils s'étaient échangés les résultats de leurs travaux respectifs, à tel point qu'en mars 1993, SEREB, sous la signature de Monsieur Claude H, communiquait à S ELTRON en la personne de Monsieur Henri B, copie de l'enveloppe SOLEAU et demandait à Monsieur Henri B de "lui faire parvenir les schémas de principe de vos plans actuels, ainsi que les plans mécaniques pour permettre l'implantation afin de constituer un dossier pour le dépôt d'un brevet en commun" ;

-que Monsieur Henri B a caché à ses supérieurs hiérarchiques l'existence de l'enveloppe SOLEAU et de la lettre du 4 mars 1993, la société STIEBEL ELTRON n'en ayant eu connaissance que début 1997 ;

-qu'en effet, la société STIEBEL ELTRON, qui a pris connaissance de la demande de brevet par Mademoiselle Sandra B qu'après sa publication fin 1995, a trouvé curieux qu'un brevet appartenant à son domaine de régulation des radiateurs électriques à accumulation de charge ait pu être pris par la fille de son ancien salarié, a fait des recherches et a été conduite à discuter avec Monsieur Claude H ; que c 'est ainsi qu'en mars 1997 elle a appris l'existence de la lettre envoyée le 4 mars 1993 par SEREB à STEEBEL ELTRON à l'attention de Monsieur Henri B avec en annexe l'enveloppe SOLEAU ;

-qu'il est ainsi apparu à la société STIEBEL ELTRON et à Monsieur Claude H que le procédé de régulation revendiqué dans le brevet français reprenait :

+ d'une part le principe de régulation de la charge pendant les périodes à tarif réduit et celui de la relance de charge pendant les périodes à tarif plein dans les conditions des études S ELTRON de 1991-1992,

+ d'autre part le principe développé par Monsieur Claude H consistant à remplacer la condition de maintien de la charge à tarif réduit lié à la consommation d'énergie durant de telles périodes par la comparaison à la consommation d'énergie pendant la précédente période de 24 heures ;

-que l'invention était en germe en 1993, invention réalisée en fait par deux co-inventeurs, S ELTRON d'une part, Monsieur Claude H d'autre part ;

-que pour ce qui la concerne, la société STIEBEL ELTRON a estimé que sa part d'invention lui appartenait comme ayant été réalisée par ses salariés, parmi lesquels Monsieur Henri B ;

-que Monsieur Claude H et S ELTRON ont donc saisi le Tribunal de Grande Instance de STRASBOURG pour voir dire que l'invention couverte par le brevet français était leur invention commune, qu'elle leur avait été soustraite par Monsieur Henri B, lequel avait utilisé comme prête-noms pour apparaître comme déposants officiels de ce brevet, sa fille Mademoiselle Sandra B, et Madame Nadine C.

Les intimés ont ensuite fait valoir qu'il appartient à la Cour, à la suite du tribunal, de comparer dans un premier temps l'invention du brevet avec le résultat combiné des travaux de S ELTRON et de Monsieur Claude H pour déterminer s'il y a identité d'invention, et ensuite seulement de se prononcer sur la question de savoir s'il est vraisemblable que l'invention couverte par le brevet français a été réalisée par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, hors l'intervention de Monsieur Henri B, ou comme le soutiennent S ELTRON et Monsieur Claude H, si Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C n'ont été que les prête-noms utilisés par Monsieur Henri B pour la soustraction de l'invention.

Sur la comparaison des inventions, les intimés ont indiqué :

-que l'étude effectuée par Messieurs B et M de la société STIEBEL ELTRON reposait sur les principes suivants :

* la charge durant les périodes à tarif réduit est maintenue jusqu'à réalisation des conditions suivantes : la consommation d'énergie durant les périodes à tarif réduit doit assurer une charge comprise entre 20 et 40% de la charge nominale ; la température ambiante doit avoir atteint la consigne d'un thermostat intégré (réglable de 17 à 21°) ; la température doit avoir atteint la consigne d'un thermostat d'ambiance (il découle notamment des pièces 5, 8 et 9 que Messieurs B et M avaient prévu un thermostat de charge intégré, réglable uniquement par l'installateur, sur une plage allant de 17 à 21° ; qu'il découle également des mêmes pièces que S prévoyait aussi un thermostat d'ambiance du local, noté TA) ;

* la relance de la charge durant les heures à plein tarif est réalisée lorsque la température ambiante est inférieure pour un certain écart à la valeur de consigne réglée sur le thermostat d'ambiance ; le niveau de charge du radiateur est alors régulé par ce dernier pour que la puissance calorifique restituée couvre en permanence juste les stricts besoins de chauffage ;

-qu'à cette même époque, le 22 juillet 1991, Monsieur Claude H a déposé une enveloppe SOLEAU, exposant un nouveau principe de fonctionnement d'un système de régulation par compensation de charge auquel il avait pensé ; qu'il en a fait parvenir une copie à Monsieur Henri B par lettre du 4 mars 1993 ; qu'il s'agissait d'un "procédé qui diffère des autres par le fait qu'il compare, à l'apparition de l'information heure creuse, la charge restante par rapport au jour précédent à la même heure, ainsi que la quantité d'énergie emmagasinée dans les dernières 24 heures" et prévoyant que" après un calcul simple, le système connaît le nouveau temps de charge organisé autour d'un micro contrôleur..." ;

-qu'il en résulte qu'en juillet 1991, Monsieur Claude H avait pensé à un procédé de régulation selon lequel on charge les radiateurs en période réduite en tenant compte de l'énergie consommée pendant le cycle de 24 heures ; qu'il s'agit du principe même exposé dans ta revendication 1 du brevet français ;

-qu'il est incompréhensible que les appelants font aujourd'hui valoir que la véritable innovation relèverait en fait du brevet européen qui apporterait des perfectionnements, alors que l'inertie thermique du local et des murs, évoquée dans ledit brevet constitue un paramètre que tout le monde connaît, mais qui n'est pas directement mesurable, si ce n'est à travers le système classique du thermostat d'ambiance ;

-qu'il est encore moins compréhensible que Monsieur Henri B, qui serait à l'origine de cette prétendue innovation, ne soit pas nommé comme inventeur dans le brevet européen ;

-que les schémas et notes réalisés par Monsieur Henri B et Monsieur M en 19$2 portent sur le fonctionnement d'un système de régulation pour chauffage électrique à accumulation dans les conditions suivantes :

* on maintient la charge durant les périodes à tarif réduit jusqu'à obtention de 3 conditions liées à la consommation d'énergie pendant les périodes à tarif réduit (condition Al), à la consigne de température ambiante d'un thermostat intégré (condition A2) et aime valeur de consigne du thermostat d'ambiance que doit atteindre la température ambiante (condition A3) ;

* on relance la charge pendant les heures à plein tarif lorsque la température ambiante est inférieure à une certaine valeur et en fonction de la progression de la température ambiante (condition B) ;

-qu'il résulte des pièces communiquées, en particulier la pièce 5, que l'étude S de 1992 prévoyait de réaliser ces fonctions de la manière suivante :

* la condition Al est réalisée par le coupe-circuit thermique ou klixon K2 qui permet d'assurer, pendant les périodes à tarif réduit dites "heures creuses" une charge comprise entre 20 et 40% de la charge nominale ;

* la condition A2 est réalisée par le thermostat intégré Th, réglable de 17 à 21°C par l'installateur ;

* la condition A3 est réalisée par le thermostat d'ambiance TA qui définit la température désirée, dite "température de consigne" ;

* la condition B est inhérente à toute "relance de jour", selon laquelle on chauffe électriquement au prix fort juste ce qu'il faut pour atteindre sensiblement la température de consigne ;

-que par rapport à cela, l'invention revendiquée dans le brevet français ne fait que remplacer la condition Al de l'étude S par celle de l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H ;

-qu'ainsi, mises à part quelques différences dans les modes de réalisation, la revendication 1 du brevet reprend :

-le principe de la régulation de la charge pendant les périodes à tarif réduit et celui de la relance de la charge pendant les périodes à plein tarif dans les conditions des études S ELTRON,

* dans lequel la condition de maintien de la charge à tarif réduit liée à la consommation d'énergie durant de telles périodes, a simplement été remplacée par la comparaison à la consommation d'énergie pendant la précédente période de 24 heures ;

-qu'il s'agit précisément du principe développé par Monsieur Claude H ;

-que la revendication n° 1 du brevet européen n'ajoute rien au brevet français ;

-qu'en ce qui concerne les revendications n° 3, 5 et 6, sous couvert d'un soi-disant paramètre nouveau lié à l'inertie thermique, elles n'ajoutent rien à l'appareil, le système d'ambiance suffisant à estimer l'inertie thermique ;

-que le processus d'invention était donc bien en cours chez S ELTRON quand Monsieur Henri B a quitté cette société, ce qui lui a permis de l'achever et de déposer d'abord le brevet français alors qu'il était encore salarié chez S, et sous des prête-noms.

Répondant encore aux moyens adverses, les intimés ont exposé :

-que le fait que la société STIEBEL ELTRON n ' ait pas pu retrouver d'autres traces écrites de ses travaux s'explique par le fait que Monsieur Henri B, lors de son départ de la société, d'une part a pris la précaution d'emporter un grand nombre de documents, d'autre part a soigneusement caché à son employeur les discussions qu'il avait pu avoir avec Monsieur Claude H concernant le principe de l'enveloppe SOLEAU ;

-que la question de savoir si les documents produits et l'enveloppe SOLEAU énonceraient des principes connus est hors débats ; qu'il ne s'agit pas ici de juger de la brevetabilité de l'invention tirée des travaux de Monsieur Claude H et de S ELTRON de 1991-92 ; qu'il s'agit uniquement de comparer le résultat de ces travaux aux brevets litigieux ;

-que si la Cour juge, comme l'a fait le tribunal, que l'invention du brevet BOUR- CLAUDE se retrouve dans les travaux réalisés par Monsieur Claude H -STIEBEL ELTRON en 1991-92, il devrait être jugé dans un sens favorable à la revendication de propriété ;

-que si au contraire la Cour devait juger que ces travaux ne comprennent pas tous les éléments de l'invention du brevet BOUR-CLAUDE, il conviendrait alors de débouter Monsieur Claude H et la société STIEBEL ELTRON de leur action en revendication ;

-que contrairement à ce que soutiennent les appelants, il est possible de procéder à une contraction du principe de l'enveloppe SOLEAU et des résultats des études S ELTRON ;

-que Monsieur Claude H n'a pas souvenir de la pièce adverse qui fait état d'un projet d'accord de coopération, qui aurait été adressé par la SEREB à Monsieur Henri B par un fax du 7 juillet 1994, pièce qui ne porte pas sa signature ; qu'en tout état de cause, ce projet de coopération n'ayant pas abouti, Monsieur Henri B n'a pas communiqué à Monsieur Claude H et/ou à la SEREB le texte du brevet n° 94.02569 dont il est fait état dans ce document ;

-qu'au contraire, il est établi à travers ce document que Monsieur Henri B, après avoir quitté son employeur et s'être approprié le contenu de l'enveloppe SOLEAU de Monsieur Claude H parla demande de brevet n° 94.02569S a voulu reprendre avec SEREB et Monsieur Claude H le travail qu'il aurait dû faire chez S, dont il avait caché les éléments et qu'il a continué à cacher puisqu'aucune communication n'a été faite à Monsieur Claude H.

Enfin, sur les circonstances du dépôt du brevet français, les intimés ont fait observer :

-que Monsieur Henri B était encore salarié de la société STIEBEL ELTRON le 2 mars 1994, date de dépôt du brevet, que son contrat de travail prévoyait que toutes les inventions qu'il viendrait faire dans le cadre de son activité seraient la propriété de la société STÏEBEL ELTRON ; qu'il ne pouvait se permettre d'apparaître comme déposant du brevet ;

-qu'il connaissait la teneur du brevet dans son intégralité, puisqu'il a signé le formulaire de la requête de dépôt auprès de l'INPI ; qu'il est intervenu tant pour le suivi de la procédure de délivrance du brevet français que pour l'extension de ce brevet à l'étranger par le biais du dépôt du brevet européen ;

-que les affirmations adverses relatives aux compétences dont disposaient Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C pour déposer le brevet ne sont pas crédibles ;

-que le seul document prouvant les prétendues recherches de Mademoiselle Sandra B est une note de 1998 dont les annexes ne sont pas d'époque et qui sont en outre incomplètes ;

-que tout montre que Monsieur Henri B est seul à l'origine des faits de la cause.

DECISION

Vu le dossier de la procédure, les pièces régulièrement versées aux débats et les conclusions écrites auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des moyens des parties ;

Attendu qu'il est constant :

-que Monsieur Henri B a été embauché en 1982 par la société STIEBELE LTRON Gmbh, société allemande spécialisée dans la fabrication de radiateurs électriques à accumulation avec régulateur, pour assurer les fonctions de "directeur technico- commercial " de la succursale française de METZ ; qu'en cette qualité, étant le seul directeur en fonction, il se trouvait en rapport étroit avec la société mère allemande ;

-que son contrat de travail renfermait une clause selon laquelle les inventions réalisées par lui dans le cadre de son activité devenaient la propriété de la société ;

-que les relations de travail ont pris fin le 30 avril 1994, à l'issue d'une période de préavis dont il a été dispensé, pour des motifs sans lien avec la présente affaire ;

-qu'entre-temps, le 2 mars 1994, Mademoiselle Sandra B, fille de Monsieur Henri B, alors en classe préparatoire Mathématiques Supérieures au Lycée KLEBER de STRASBOURG, et Madame Nadine C, architecte, ont déposé auprès de l'INPI un brevet n° 94.02569 relatif à un système de régulation pour chauffage électrique à accumulation ;

-que le 27 février 1995 : un brevet européen n° 95.440 008.1 a été déposé par les mêmes personnes, en complément du brevet français, relatif au procédé de régulation de la charge d'au moins un dispositif de chauffage électrique à accumulation et dispositif pour la mise en oeuvre de ce procédé ;

Attendu que la société STDEBEL ELTRON et Monsieur Claude HE Y revendiquent la copropriété de ces brevets sur le fondement de 1 ' article L.611-8 du Code de la Propriété Intellectuelle, au motif que l'invention procéderait des études menées en commun par Monsieur Henri B et ses collaborateurs au sein de la société STIEBEL ELTRON d'une part, et par Monsieur Claude H, directeur de la société SEREB d'autre part ; qu'ils estiment que l'invention ne constituent que la "contraction " des études menées conjointement par ces derniers ; qu'ils soutiennent que cette invention leur a été soustraite par Monsieur Henri B, lequel a utilisé sa fille, Mademoiselle Sandra B, et Madame Nadine C comme prête-noms pour apparaître comme déposants officiels du brevet ;

Attendu qu'il est précisé que les demandeurs et intimés exercent leur action sur l'ensemble des revendications faisant l'objet des deux brevets litigieux ;

Attendu qu'aux termes de l'article L.611 -8 du Code de la Propriété Intellectuelle, si un titre de propriété industrielle a été demandé, soit pour une invention soustraite à l'inventeur ou à ses ayants cause, soit en violation études effectuées conjointement et exercent en conséquence l'action sur l'ensemble des revendications figurant dans les brevets, chaque demandeur considérant avoir des droits sur l'ensemble de l'invention ;

Attendu que pour cela, ils font valoir que Monsieur Claude H, en sa qualité de dirigeant de la SEREB, et Monsieur Henri B, en sa qualité de directeur de la succursale française STIEBEL ELTRON, étaient en relation pendant la période 1991 à 1993, qu'ils se sont échangés les résultats de leurs travaux respectifs et que les brevets déposés reprennent purement et simplement l'invention qui est la leur ;

Attendu cependant que les intimés, qui ont la charge de la preuve, n'établissent par aucune pièce qu'il y a eu des études communes entré eux ;

Attendu que la seule pièce établissant leur rapprochement est le courrier du 4 mars 1993, par lequel Monsieur Claude HE Y a fait parvenir à la société STIEBEL ELTRON à METZ, "à l'attention de Monsieur B, " une copie de l'enveloppe SOLEAU déposée à l'INPI en 1991 ; que ce courrier est libellé en ces termes :

"Pour faire suite à notre réunion du salon DOMOTECHNICA Je vous prie de trouver ci- joint la copie de l'enveloppe SOLEAU déposé à l'INPI en 1991.

Depuis, j'ai bien entendu évolué sur ce produit et, de façon à connaître la tendance et à pouvoir synchroniser le système en cas de coupure de courant, les 5 jours précédents sont mémorisés.

Déplus, il est tout fait possible défaire une comparaison avec une sonde extérieure, ce qui permettrait d'affiner la charge.

J'ai aussi réfléchi à votre système évolutif et, de façon à aller un peu plus loin dans la pré- étude, il faudrait que vous nous fassiez parvenir les schémas de principe de vos plans actuels ainsi que les plans mécanique pour permettre l'implantation.

Dans l'attente de ces derniers, et surtout de vous revoir afin de constituer un dossier pour le dépôt d'un brevet en commun ;

Attendu qu'il ressort des termes de ce courrier que, relativement aux points évoqués, les contacts entre Monsieur Claude H et Monsieur Henri B s'étaient récemment noués à l'occasion d'un salon et que, voulant aller "une peu plus loin dans la pré-étude", ce qui dénotait une approche encore sommaire et imprécise des problèmes, Monsieur Claude H souhaitait obtenir la communication par Monsieur Henri B de ses schémas de principe et plans mécaniques ;

Attendu qu'il n'est ni démontré ni même allégué par Monsieur Claude H qu'il avait obtenu la communication de ces pièces, de sorte que sa propre réflexion n'a pu évoluer.

Attendu au surplus que l'analyse que faisait Monsieur Claude H du nouveau concept de régulation envisagé, qui prévoyait encore l'éventuel recours à un thermostat extérieur, était éloignée de l'un des éléments essentiels du brevet B/C qui repose justement sur la suppression de toute sonde extérieure ; d'une obligation légale ou conventionnelle, la personne lésée peut revendiquer la propriété de la demande ou du titre délivré ;

Attendu que le tribunal a accueilli la demande sur la base de ce texte, sans faire la distinction entre les deux cas d'ouverture ;

Attendu que, devant la Cour, les demandeurs et intimés se situent exclusivement dans le cadre de la soustraction de l'invention ;

Attendu qu'il sera d'ailleurs observé que ni Mademoiselle Sandra B, ni Madame Nadine C n'était tenue par des obligations contractuelles ; que de son côté. Monsieur Henri B n'est pas celui qui a demandé délivrance du titre de propriété industrielle, de sorte que l'action en revendication ne pourrait pas prospérer au regard du second cas d'ouverture prévu par le texte ;

Attendu que Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, qui ont déposé les brevets, bénéficient du droit du premier déposant, de sorte que la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H ne peuvent agir en revendication en prétendant simplement être les premiers inventeurs ;

Attendu ainsi que, pour établir qu'il y a eu soustraction d'une invention, il faut que les demandeurs parviennent à démontrer à la fois qu'ils détenaient conjointement une invention qui renfermait déjà les éléments techniques ayant ultérieurement permis le dépôt du brevet par un tiers, et que cette invention leur a été soustraite par des procédés déloyaux ;

Attendu que l'action doit être déclarée non fondée si une seule de ces conditions n'est pas remplie ;

Attendu que les intimés ont d'ailleurs eux-mêmes admis dans leurs conclusions écrites que s'il était établi que les travaux S/H ne comprennent pas tous les éléments de l'invention du brevet B/C, la logique voudrait qu'ils soient déboutés -de leur action en revendication ;

I - SUR LA DETENTION CONJOINTE PAR S/H D'UNE INVENTION COMPRENANT TOUS LES ELEMENTS DE L'INVENTION AYANT FAIT L'OBJET DU BREVET B/C :

Attendu que la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H soutiennent que des études communes avaient été menées conjointement ayant permis d'acquérir l'ensemble des éléments techniques ultérieurement retrouvés dans les brevets déposés par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C ;

1 - sur l'existence d'études communes S/H :

Attendu que tant la société STIEBEL ELTRON que Monsieur Claude H estiment que l'invention déposée par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C constituent une "contraction" des

Attendu dans ces conditions que, était-il envisagé dans te même courrier "le dépôt d'un brevet en commun", les termes de la lettre du 4 mars 1993 n'établissent pas l'existence d'études suffisamment avancées et tendant aux mêmes fins, et ce contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges ;

Attendu que, dans la mesure où Monsieur Claude H s'est contenté de délivrer à la société STIEBEL ELTRON une copie de l'enveloppe SOLEAU, laquelle, selon ses propres déclarations, ne serait afférente qu'à l'un des moyens techniques dont la combinaison constituerait l'invention, sur action en revendication de la totalité des brevets ne saurait prospérer ;

Attendu que, de son côté, la société STIEBEL ELTRON s'est effectivement trouvée en possession de l'enveloppe SOLEAU ; que pour aboutir dans son action, elle doit cependant encore démontrer en quoi les revendications des deux brevets sont la reprise et la combinaison des moyens techniques exposés dans l'enveloppe SOLEAU et dans les travaux de l'équipe S ;

2 - sur l'identité entre les inventions :

Attendu qu'il convient de rechercher non si la société STIEBEL ELTRON détenait une invention susceptible d'être brevetée, mais uniquement de savoir si elle détenait une invention renfermant les éléments qui ont ultérieurement fait l'essence des brevets déposés ; qu'il en résulte que toute l'argumentation des appelants relative à la brevetabilité de l'invention se trouve hors débats, ainsi que le conseiller de la mise en état l'a exactement relevé dans son ordonnance rejetant la demande d'expertise ; qu'il est notamment indifférent de savoir si la technique maîtrisée par la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H présentait un caractère nouveau par rapport à l'état de la technique, et en particulier si certains éléments se retrouvaient dans des brevets antérieurs (DANFOSS) ou tombés dans le domaine public ("24 heures brevet EDF") ;

Attendu que selon la revendication n°1 du brevet de 1994, qui repose sur une description complète, l'invention B/C est relative à un procédé de régulation de la charge des radiateurs électriques à accumulation, caractérisé par le fait que : ;

-la charge des radiateurs d'un local est pilotée durant les périodes à tarif réduit par les consommations du cycle précédent de 24 heures, la consigne de température ambiante du thermostat de charge et la consigne affichée au thermostat d'ambiance de ce local ;

-la relance éventuelle de la charge ou d'un chauffage direct complémentaire durant les périodes à plein tarif est pilotée par la vitesse des ventilateurs de déstockage, la valeur de la progression de la température ambiante durant le cycle de mesure et le niveau de charge des radiateurs ;

Attendu que la revendication n°2 dépend de la revendication n°1 ; que celle-ci se trouvent complétées par plusieurs dispositifs pour la mise en oeuvre du procédé, ainsi que par des planches explicatives et des schémas électriques ;

Attendu qu'il est constant que le brevet européen reprend, sous une formulation plus complète, la revendication sus-visée du brevet français, en ses revendications 1 et 2 ; qu'il est notamment mentionné, dans la première revendication, que l'invention est relative à un procédé de régulation de la charge d'au moins un dispositif de chauffage électrique à accumulation, tel qu'un radiateur électrique à accumulation, caractérisé en ce qu'il consiste essentiellement, pour un local à : chauffer donné, à piloter la charge ou l'opération de chargement du ou des dispositifs électriques à accumulation au cours des périodes à tarif réduit du réseau de distribution électrique d'un cycle de durée déterminée fixe, en fonction des consommations d'énergie dudit ou desdits dispositifs durant un cycle précédent identique et en fonction de la valeur de la température de consigne mesurant la température ambiante et agissant sur la charge ou sur l'opération de chargement du ou des dispositifs de chauffage électrique à accumulation, ladite charge étant coupée lorsque les consommations électriques du cycle en cours ont atteint une fraction pré-réglée des consommations d'énergie totales du cycle précédent et lorsque la température ambiante a atteint la température de consigne du thermostat précité ;

Attendu que la revendication n° 2 du brevet européen vise le procédé selon la revendication n° 1, caractérisé en ce qu'il consiste, lorsque la température ambiante est supérieure à la température de consigne du thermostat agissant sur la charge et inférieure à la température de consigne d'un deuxième thermostat régulant la température ambiante, à réaliser la charge jusqu'à atteinte d'un seuil de température ambiante pré-fixe sur la bande proportionnelle de ce deuxième thermostat d'ambiance, notamment du type électronique, à action proportionnelle sur la vitesse des ventilateurs de déstockage du ou des dispositifs de chauffage électriques à accumulation, dans l'intervalle défini par ladite bande proportionnelle ;

Attendu que la revendication n6 3 vise un procédé selon l'une quelconques des revendications 1 et 2, caractérisé en ce qu'il consiste, lorsque la température ambiante est supérieure aux températures de consigne de charge et de consigne de température ambiante, à réaliser, en période à tarif réduit, la charge aussi longtemps que ladite température ambiante est inférieure à celle obtenue par la masse calorifique globale du local ;

Attendu que ces trois premières revendications essentielles sont suivies de 15 autres revendications qui viennent les compléter (la revendication n° 3 étant notamment complétée par les revendications 5 et 6), ainsi que par des schémas et figures ;

Attendu que les deux brevets font état de revendications précises et font référence à des dispositifs détaillés de mise en oeuvre des procédés ;

Attendu que de leur côté, pour établir qu'ils détenaient l'essence de l'invention, les intimés ont fait valoir :

-d'une part que le principe exposé dans la revendication n°1 du brevet français B/C n'est que la reprise du procédé développé par Monsieur Claude H dans l'enveloppe SOLEAU, qui reposait sur le principe selon lequel on charge l'installation de chauffage d'un local à une période choisie, et notamment à tarif réduit, en fonction de la quantité d'énergie emmagasinée pendant la précédente période de 24 heures ;

-d'autre part que les schémas et notes réalisés par Messieurs B et M en 1992 portaient sur le fonctionnement d'un système de régulation pour chauffage électrique à accumulation dans les conditions suivantes :

-on maintient la charge durant les périodes à tarif réduit jusqu'à obtention de 3 conditions liées à la consommation d'énergie pendant les périodes à tarif réduit (condition Al), à la consigne de température ambiante d'un thermostat intégré (condition A2) et à une valeur de consigne du thermostat d'ambiance que doit atteindre la température ambiante (condition A3) ;

-on relance la charge pendant les heures à plein tarif lorsque la température ambiante est inférieure à une certaine valeur et en fonction de la progression de la température ambiante (condition B) ;

Attendu que, se référant aux pièces versées par eux aux débats, en particulier la pièce 5, les intimés ont fait valoir que l'étude S de 1992 prévoyait de réaliser ces fonctions de la manière suivante :

-la condition Al est réalisée par le coupe-circuit thermique ou klixon K2 qui permet d'assurer, pendant les périodes à tarif réduit dites "heures creuses" une charge comprise entre 20 et 40% de la charge nominale ;

-la condition A2 est réalisée par le thermostat intégré Th, réglable de 17 à 21°C par l'installateur ;

-la condition A3 est réalisée par le thermostat d'ambiance TA qui définit la température désirée, dite "température de consigne" ;

-la condition B est inhérente à toute "relance de jour", selon laquelle on chauffe électriquement au prix fort, juste ce qu'il faut pour atteindre sensiblement ta température de consigne ;

Attendu que les intimés ont en déduit que, mises à part quelques différences dans les modes de réalisation, la revendication 1 du brevet reprend :

-le principe de la régulation de la charge pendant les périodes à tarif réduit et celui de la relance de la charge pendant les périodes à plein tarif dans les conditions des études S ELTRON,

-dans lequel la condition de maintien de la charge à tarif réduit liée à la consommation d'énergie durant de telles périodes, a simplement été remplacée par la comparaison à la consommation d'énergie pendant la précédente période de 24 heures ;

Attendu cependant que, à l'appui de leur argumentation, les demandeurs et intimés se contentent de produire un certain nombre de documents qu'il convient d'analyser successivement ;

Pièce n°5 : télécopie du 14 janvier 1992, émanant de Monsieur M de S ELTRON/METZ et adressée à Monsieur W (de la société mère en Allemagne), concernant un "radiateur à accumulation type ETS avec thermostat d'ambiance et régulateur de charge intégrés", comportant quelques lignes sur les possibilités d'utilisation et accompagnée surtout d'un '"schéma de principe pour l'exécution citée en référence " avec une légende ;

Attendu que si cette pièce vient établir qu'une réflexion était en cours au sein de S, à laquelle participait l'équipe de METZ à la tête de laquelle se trouvait Monsieur Henri B, ainsi que des salariés de la société mère allemande, prenant en considération certains éléments techniques développés dans les brevets sus-décrits, notamment en ce qui concerne la présence d'un thermostat d'ambiance et un régulateur de charge intégrés, cette note apparaît toutefois succincte et ne permet pas de savoir si la finalité de la réflexion recouvrait exactement l'objet des brevets ;

Attendu que les appelants font d'ailleurs observer gué rien dans cette note, ni sur le schéma qui l'accompagne, n'indique comment sont pilotées la charge et la décharge en fonction du temps, des besoins de l'utilisateur, de la température extérieure ou de la température ambiante ;

Attendu que, d'une manière générale, les (appelante apportent des éléments de réponse par voie d'affirmations, sans aucune élément probant ne vienne corroborer leur argumentation ;

Attendu en tout état de cause que la Cour ne dispose pas de renseignements techniques certains permettant de retenir que le schéma électrique annexé à la télécopie (pièce n°5) renfermait déjà l'essence des procédés revendiqués ultérieurement par les consorts B/C ;

-Pièce n° 6 : "Information du 13/07/1992 de Monsieur V à Monsieur B" relatif à une "discussion sur régulation le 10/09/1992"

Attendu qu'il s'agit là d'un document émanant d'un salarié du Groupe STIEBEL, interrogeant notamment Monsieur B sur la connaissance qu'il aurait de systèmes similaires, lequel lui a donné un certain nombre de réponses sur le même document ;

Attendu cependant que ce document ne permet pas de relier les points évoqués aux revendications des brevets ;

Attendu que les termes de cet échange de notes démontrent plutôt que de nombreuses interrogations subsistaient au sein de S relativement à la réflexion menée ;

-Pièce n° 7 : Compte rendu de la. réunion du 29/09/92 au sein de S, réunissant Monsieur Henri B de la succursale de METZ et 4 autres salariés de la maison mère allemande, dont Monsieur W et Monsieur V ;

Attendu qu'il est notamment mentionné dans ce compte-rendu qu'afin de pouvoir commercialiser en France les nouveaux radiateurs ETS, les exigences suivantes doivent être remplies :

"Nouveaux ETS

-une régulation de la charge via le circuit de puissance doit être possible,

-la charge par l'intermédiaire du thermostat d'ambiance est nécessaire ; un thermostat bi ou tri polaire est à utiliser pour cette fonction (une proposition a été faite au service GEP- R),

-une coupure omnipolaire est nécessaire " ;

Attendu que Monsieur Henri B n'a pas cessé d'affirmer qu'il avait uniquement participé à des réunions ayant pour but de donner satisfaction à des clients de STIEBEL France aux fins d'adaptation des régulateurs avec sonde extérieure, pour y incorporer le dispositif EDF tombé dans le domaine public ; que cela rentrait dans ses attributions, sachant qu'il n'avait pas de mission inventive proprement dite au sein de la société ;

Attendu que, là encore, s'il est établi que plusieurs personnes provenant tant de la maison mère allemande que de la succursale de Metz menaient une réflexion sur un nouveau concept de radiateurs ETS, les termes du compte-rendu de la réunion du 29 septembre 1992 font plutôt ressortir que cette réflexion n'était pas encore achevée et ne permettent en tous cas pas d'affirmer que les éléments discutés se superposaient avec les revendications des brevets ultérieurement déposés ;

-Pièces 8 et 9 : brouillons de schémas, comportant des ratures et des rectifications

Attendu qu'il semblerait qu'il s'agisse là des schémas qui i pré et repris dans le plan objet de l'annexe n° 5 ;

Attendu cependant que, comme cela a déjà été dit plus haut, il est impossible de dire, au vu de ces documents succincts et non explicites, restés au stade de brouillons, s'ils recouvrent les éléments essentiels des revendications des brevets de 1994 et de 1995 ;

Attendu de même que les appelants, qui bénéficient de la bonne foi due au titre, font valoir que, des 4 conditions énoncées par la société STIEBEL ELTRON pour caractériser le fonctionnement de son système de régulation (Al, A2, A3 et B),

-la condition Al n'est pas remplie par l'implantation du klixon K2 et ne révèle pas davantage un objectif de régulation thermique, mais au contraire démontre la totale ignorance de S du problème de la pré-charge ;

-les conditions A2 et A3 sont tout simplement reprises dans le brevet EDF 1974 ;

-la condition B n'est pas reprise dans les schémas S ;

Attendu que les intimés, qui ont la charge de la preuve, n! établissent pas la fausseté des contestations techniques adverses, du moins en ce qui concerne les conditions Al et B (il importe en effet peu que les conditions A2 et A3 aient été puisées dans un brevet tombé dans le domaine public, puisque c'est la combinaison de moyens techniques qui constitue en l'occurrence l'invention) ;

Attendu qu'ils ne prouvent pas davantage que l'introduction d'un paramètre de réglage nouveau dans le brevet européen, soit la notion d'inertie thermique et de masse calorifique globale du local (revendications 3, 5 et 6 du brevet de 1995), n'ajouterait rien au procédé initial ;

Attendu enfin que les appelants ont fait ressortir une différence essentielle relativement à l'enveloppe SOLEAU, en relevant :

-que le système décrit dans cette ^enveloppe consisterait dans le chargement du radiateur en fonction de l'énergie consommée la veille en tenant compte de l'énergie résiduelle ;

-que le "calcul simple" évoqué dans l'enveloppe consisterait donc à remplacer l'énergie consommée la veille en tenant compte de la différence des énergies résiduelles au démarrage le jour J par rapport au démarrage le jour J-1 ;

qu'il s'agit en conséquence d'une charge tenant, compte exclusivement de l'énergie dépensée le jour précédent ;

-que par contre, dans l'invention de Mademoiselle Sandra B et de Madame Nadine C, la charge du radiateur après une pré-charge de base minimum est faite en fonction de la température qui règne effectivement dans le local au moment de la charge et en fonction de la variation de cette température à ce moment sous l'effet de la charge, c'est-à-dire indépendamment des conditions de charge de la veille ;

Attendu que la lecture des brevets ( Brevet 1994 page 7 revendication 1 § 35 et description page 2 § 25 -Brevet 1995 colonne 8 revendication 1 et description colonne 5 § 15) fait effectivement apparaître que la notion de pré-charge minimum en heures creuses constitue un élément technique propre, que les intimés ne prétendent pas avoir développée dans leurs études ;

Attendu ainsi que cette notion de fraction fixe des consommations de la veille (70%) constitue en soi un élément d'importance des brevets B/C qui exclut que l'on puisse retenir une identité entre les inventions, étant rappelé que les intimés avaient eux-mêmes admis dans leurs écrits que s'il était établi que les travaux S/H" ne comprennent pas tous les éléments de l'invention du brevet B/C, la logique voudrait qu'ils soient déboutés de leur action en revendication ;

Attendu en tout état de cause que les demandeurs à l'action en revendication n'ont jamais réclamé l'instauration d'une expertise technique pour savoir précisément si les éléments dont ils se prévalent se recoupent avec ceux ayant ultérieurement donné lieu au dépôt des brevets ; que la Cour, qui n'a pas à pallier la carence des demandeurs dans l'administration de la preuve, ne saurait ordonner une expertise technique qui n'a pas été sollicitée par la partie qui avait seule intérêt à la voir instaurer ;

Attendu dans ces conditions que les premiers juges ne pouvaient retenir que le brevet déposé constituait une contraction de l'ensemble des études menées par la société STIEBEL ELTRON et du contenu de l'enveloppe SOLEAU ;

Attendu que, la preuve de l'identité entre les éléments essentiels de l'invention dont se prévalent conjointement la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H d'une part, et les revendications des brevets déposés par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C d'autre part, n'étant pas rapportée, la Cour ne peut qu'infirmer le jugement entrepris et débouter les demandeurs ;

II - SUR LA SOUSTRACTION PAR DES PROCEDES DELOYAUX

Attendu qu'à titre superfétatoire, il apparaît que l'infirmation du jugement entrepris s'avère également nécessaire en raison de l'absence de preuve suffisante de l'existence de procédés déloyaux au préjudice de Monsieur Claude H d'une part et au préjudice de la société STTEBEL ELTRON d'autre part ;

1 - au préjudice de Monsieur Claude H ;

Attendu qu'il sera préalablement observé que, même si la substitution de Monsieur Claude H aux lieu et place de la société SEREB, demanderesse initiale aux côtés de la société STIEBEL ELTRON (réalisée procéduralement à travers un désistement en première instance de la société SEREB suivi d'une intervention volontaire de Monsieur Claude H) n'est pas remise en cause, un tel retrait suivi d'une reprise des prétentions par une autre partie apparaît curieux pour une partie qui se prétend victime de procédés déloyaux ;

Attendu au fond qu'il appartient à Monsieur Claude H de prouver qu'il a été victime de procédés déloyaux ;

Attendu que, selon les demandeurs et intimés, la contribution de Monsieur Claude H à l'invention serait constituée par l'apport de la technique exposée dans l'enveloppe SOLEAU, déposée par lui le 22 juillet 1991 à l'INPI sous le n° 40.817 ;

Attendu cependant qu'il est constant que Monsieur Claude H a spontanément adressé la copie de l'enveloppe SOLEAU à la société STIEBEL ELTRON à METZ ("à l'attention de Monsieur B") par un courrier du 4 mars 1993 rédigé en ces termes :

"Pour faire suite à notre réunion du salon DOMOTECHNICA, je vous prie de trouver ci- joint la copie de l'enveloppe SOLEAU déposé à l'INPI en 1991.

...j'ai aussi réfléchi à votre système évolutif et, de façon à aller un peu plus loin dans la pré-étude, il faudrait que vous nous fassiez parvenir les schémas de principe de vos plans actuels ainsi que les plans mécanique pour permettre l'implantation.

Dans l'attente de ces derniers, et surtout de vous revoir afin de constituer un dossier pour le dépôt d'un brevet en commun " ;

Attendu que Monsieur Claude H ne démontre ni même ne soutient qu'il aultérieurement cherché à reprendre contact avec Monsieur Henri B pour connaître la suite susceptible d'être donnée à ses propositions ;

Attendu enfin qu'il ressort des pièces versées aux débats que par un courrier du 1er juillet 1994, soit peu de temps après le départ de Monsieur Henri B de chez S ELTRON, Monsieur Claude H a écrit à Monsieur B en sa qualité de gestionnaire du brevet 94.02569 pour lui adresser un projet de contrat sur en-tête SEREB (qui n'a finalement pas abouti), par lequel Monsieur B lui aurait confié es qualités la réalisation du ou des prototypes d'un système de régulation pour accumulateurs électriques ;

Attendu que Monsieur Claude H, gêné par les termes de ce fax du 7 juillet 1994, ne saurait sérieusement soutenir qu'il ne se souvient plus de ce document qui ne porte pas sa signature, mais dont il tente néanmoins d'atténuer la portée ;

Attendu en effet que, même si la non réalisation de ce projet de collaboration a empêché Monsieur Claude H de connaître exactement le contenu du brevet qui n'avait pas encore été publié, il n'en demeure pas moins que celui-ci n'a pas tenté de reprendre la discussion avec Monsieur Henri B, laquelle en était restée au stade de la communication de l'enveloppe SOLEAU, et n'a pas manifesté la moindre interrogation vis-à-vis de Monsieur Henri B, gestionnaire d'un nouveau brevet ;

Attendu dans ces conditions que l'intimé ne saurai sérieusement se plaindre d'avoir été victime de procédés déloyaux ;

Attendu que cette constatation suffit également, en soi, pour débouter Monsieur Claude H de son action en revendication ;

2 - au préjudice de la société STIEBEL ELTRON :

Attendu que l'ensemble des éléments retenus par les premiers juges pour retenir la soustraction d'invention ne constituent que des présomptions qui, en dépit de l'interrogation qu'ils suscitent, ne suffisent pas à caractériser l'usage de procédés déloyaux par Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C pour soustraire l'invention prétendue (situation personnelle des déposants, absence de justification de recherches communes, fait que Mademoiselle Sandra B était la fille de Monsieur Henri B, création par Monsieur Henri B de la société THERMOSPHERE en 1996 au nom de sa fille et de son fils, âgé de 16 ans...) ;

Attendu en effet qu'il appartient à la société STIEBEL ELTRON d'apporter des éléments de preuve positifs de la soustraction dont elle se plaint ;

Attendu qu'à ce titre, la société appelante relève d'abord que le formulaire de la requête de dépôt relatif au brevet français porterait la signature de Monsieur Henri B lui-même, alors que ce dernier se trouvait encore à son service ;

Attendu cependant que, la signature figurant sur ce formulaire ne serait-elle pas exactement la même que celle figurant sur des documents ultérieurs attribués à Mademoiselle Sandra B, il n'est aucunement établi que c'est Monsieur Henri B qui aurait signé ce document aux lieu et place de sa fille ;

Attendu ensuite que la société STIEBEL ELTRON invoque le détournement de documents dont elle aurait été victime de la part de Monsieur Henri B, lorsque celui-ci a quitté la société début 1994, et notamment l'appropriation par lui de l'enveloppe SOLEAU reçue de Monsieur Claude H ; qu'elle soutient ainsi n'avoir pris connaissance de l'existence de cette enveloppe qu'en mars 1997 lorsque, après avoir discuté avec Monsieur Claude H, elle a su que ce dernier avait adressé à Monsieur Henri B une lettre du 4 mars 1993 renfermant en annexe l'enveloppe SOLEAU ;

Attendu cependant que l'es intimés produisent aux débats une télécopie du 27 mars 1997 (annexe 30) émanant de Monsieur M de la société STIEBEL ELTRON, libellée en ces termes :

"Faisant suite à notre --entretien téléphonique de CE jour, nous vous transmettons ci-joint copie du courrier des Ets SEREB relatif à l'enveloppe SOLEA U, transmise à Monsieur B -STIEBEL ELTRON" ;

Attendu qu'il ressort des termes de ce document que la société STIEBEL ELTRON avait conservé la lettre de Monsieur Claude H du 4 mars 1993, par laquelle celui-ci faisait parvenir à la société STIEBEL ELTRON à METZ ("à l'attention de Monsieur B") une copie de l'enveloppe SOLEAU ;

Attendu au surplus que cette télécopie émane de Monsieur M, salarié de la société mère ayant participé à la réflexion au sein du groupe sur un nouveau type de radiateurs à accumulation, aux côtés de Monsieur Henri BOUR, ce qui démontre bien que les autres participants disposaient des éléments de réflexion communs et des pièces traduisant l'existence d'une étude en cours ; que cela a d'ailleurs permis aux intimés de produire aux débats les brouillons et schémas sus-analyses ;

Attendu en tout état de cause que la preuve d'une soustraction de documents par Monsieur Henri B n'est pas caractérisée ;

Attendu au surplus qu'il ressort d'un courrier du 30 mai 1994 que Monsieur Henri B a proposé dès cette date à la société STIEBEL ELTRON, soit quelques semaines à peine après l'avoir quittée, une participation au développement d'une société qui aurait pour objet la mise en oeuvre d'un nouveau concept de radiateurs à accumulation, plus particulièrement destiné à l'équipement de chauffage électrique en immeuble collectif ; que Monsieur Henri B ajoutait : "je suis au service de votre spécialiste pour lui donner toutes informations utiles sur son fonctionnement et sa mise en oeuvre",

Attendu que les termes ce courrier, qui n'a pas reçu de suites, établissent plutôt la bonne foi de Monsieur Henri B qui n'avait rien à cacher à son ancien employeur après l'avoir quitté ;

Attendu en définitive que, la soustraction d'invention n'étant pas davantage établie, il convient d'infirmer le jugement entrepris et de débouter la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H de toutes leurs prétentions ;

III - SUR LES AUTRES DEMANDES FORMEES PAR LES APPELANTS

Attendu que le caractère manifestement abusif de la procédure, qui d'abord donné lieu à un jugement donnant satisfaction aux demandeurs, 'est pas caractérisé ; qu'il convient de débouter Monsieur Henri B, mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C de leur réclamation à ce titre ;

Attendu de même que la publication de l'arrêt ne paraît pas nécessaire, étant constant que les brevets n'ont pas encore été exploités et que les consorts B ont indiqué que le préjudice de la société HERMOSPHERE fera l'objet d'une procédure distincte ;

Attendu enfin qu'il serait inéquitable de laisser aux appelants la harge de leurs frais relevant de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à hauteur de la somme de 4000 Euros pour chacun eux ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Reçoit l'appel, régulier en la forme ;

Au fond :

Infirmant le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Déboute la société STIEBEL TRON et Monsieur Claude H toutes leurs prétentions ;

Déboute Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et madame Nadine C de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive et de leur demande relative à publicité de la présente décision ;

Condamne in solidum la société STIEBEL ELTRON et Monsieur Claude H aux dépens de première instance et d'appel, y compris ceux e l'intervention volontaire de la société THERMOSPHERE ;

Les condamne également in solidum à payer à chacun des appelants, Monsieur Henri B, Mademoiselle Sandra B et Madame Nadine C, la somme de 4000 Euros au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;