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Décisions

Cass. crim., 6 octobre 2010, n° 09-87.041

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Louvel

Rapporteur :

M. Rognon

Avocats :

Me Foussard, SCP Piwnica et Molinié

Aix-en-Provence, du 30 sept. 2009

30 septembre 2009

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Belkacem X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 30 septembre 2009, qui, pour fraude fiscale, l'a condamné à six mois d'emprisonnement, a ordonné la publication et l'affichage de la décision, et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile ;

Vu le mémoire et les observations complémentaires en demande et le mémoire en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 1741 du code général des impôts, L. 227 du livre des procédures fiscales, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Belkacem X... coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement total de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2001, en souscrivant une déclaration d'ensemble de ses revenus très fortement minorée, l'a condamné à six mois d'emprisonnement, ordonné les mesures d'affichage et de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs qu'il ressort des pièces de la procédure et des débats que Belkacem X... a souscrit au titre de l'année 2001 une déclaration d'ensemble de ses revenus comportant pour seuls revenus 6341 euros de salaires et 2152 euros de pensions ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité de la SCI Les Demeures du Val dont il était le gérant associé, l'administration fiscale a retenu un chiffre d'affaires hors taxes reconstitué de 1 582 332 euros et de 949 399 euros après déduction des charges et au titre des revenus de Belkacem X... une dissimulation des bénéfices industriels et commerciaux de 318 056 euros correspondant à 143 692 euros de droits éludés ; que durant tout le temps de la procédure fiscale, Belkacem X..., régulièrement avisé à tous les stades de cette procédure, n'a produit aucune comptabilité de la SCI ; que de la même manière le prévenu n'a pas justifié de la date de livraison des immeubles ; que ces carences ont conduit l'administration fiscale à retenir pour l'évaluation des produits le prix des cessions figurant sur les actes déposés auprès des conservations des hypothèques en appliquant une déduction forfaitaire au titre des charges de 60 % du chiffre d'affaires hors taxes et non de 40 % comme cela est indiqué dans les écritures du prévenu ; que l'administration fiscale a tenu compte des ventes conclues en 2000 avec condition suspensive réalisée en 2001 soit 7 114 365 F et des ventes conclues en 2001, sans condition suspensive soit 3 265 051 F, le total étant de 10 379 416 F soit 1 582 332 euros ; que Belkacem X... soutient que les livraisons ont eu lieu en 2003 et que c'est donc au titre de cette année que l'impôt est dû ; que toutefois lorsqu'il était entendu sur instruction du procureur de la République en février 2005, il indiquait simplement que l'administration fiscale n'avait tenu compte que des recettes de la SCI et non des charges et que c'était là l'essentiel de sa contestation ; que les documents qu'il produit aujourd'hui et notamment les documents comptables apparaissent bien tardifs ; qu'avant de prononcer le 11 janvier 2005 la liquidation de la SCI les Demeures du Var, le tribunal de grande instance de Marseille avait pourtant enjoint tout comme l'administration fiscale Belkacem X... à produire les bilans, sans succès ; que le procès-verbal d'huissier en date du 11 juin 2003 se contente de constater que la plupart des habitations étaient occupées à cette date sans qu'aucun document ne vienne attester de la date réelle de la livraison ; que le protocole d'accord entre Belkacem X... et l'ensemble des copropriétaires des Demeures du Val tel qu'il est présenté sous forme de deux documents ne permet pas plus d'attester de la date de livraison des biens immobiliers ; que le premier document qui comporte deux feuilles et les signatures des intéressés ne supporte aucune date ; que le second intitulé « délibération des copropriétaires des demeures du Val » fait référence à une réunion du 12 juin 2002 qui s'est tenue à La Ciotat et indique néanmoins la date du 12 juin 2002 ; qu'en tout état de cause, l'administration fiscale a opéré la distinction entre les ventes avec condition suspensive et celles sans condition ; que Belkacem X... a fait l'objet de redressements au titre de ses revenus personnels à la suite de la vérification de comptabilité de la SCI de construction vente dont il était également le gérant en 1991 et 2000, et les déclarations qu'il avait déposées ne faisant alors état d'aucun revenu de cette nature ; que le caractère tardif de la production de documents, par ailleurs non probants, ainsi que la connaissance des règles fiscales applicables aux profits dégagés par les sociétés de construction-ventes témoignent de sa mauvaise foi ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont retenu sa culpabilité, le délit de fraude fiscale par dissimulation de sommes sujettes à l'impôt étant parfaitement constitué en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel ;

"1) alors que la cour d'appel a constaté d'un côté que l'administration a retenu un chiffre d'affaires hors taxes de la SCI les Demeures du Val d'un montant de 1 582 332 euros et après déduction des charges un bénéfice d'un montant de 949 399 euros, ce qui implique un taux de charges de 40 %, relever que l'administration a appliqué une déduction forfaitaire de charges de 60 % de ce même chiffre d'affaires, ce qui conduit à un bénéfice de 632 932 euros, mais a constaté d'un autre côté que le bénéfice de Belkacem X..., associé de cette SCI à hauteur de la moitié de son capital, s'élève à 318.056 euros, montant qui ne correspond ni à 50 % de 949.333 euros, ni à 50 % de 632.932 euros ; que les constatations opérées par la cour d'appel, contradictoires, ne peuvent donner une base légale à sa décision ;

"2) alors que toute personne dont la culpabilité est recherchée doit pouvoir produire à tout moment de son procès pénal des pièces qui sont de nature à établir son innocence ; qu'en décidant que le caractère tardif de la production de documents comptables, témoignait de la mauvaise foi de Belkacem X..., la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

"3) alors qu'enfin, en cas de poursuites pénales pour fraude fiscale, le ministère public et l'administration doivent apporter la preuve du caractère intentionnel de la soustraction à l'établissement ou au paiement de l'impôt ; qu'en retenant que le caractère tardif de la production de documents comptables, non probants ainsi que la connaissance des règles fiscales applicables aux profits dégagés par les sociétés de construction vente témoignaient de la mauvaise foi de Belkacem X..., la cour d'appel n'a pas caractérisé l'élément intentionnel de l'infraction et derechef méconnu les textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X... est poursuivi pour s'être frauduleusement soustrait à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu en souscrivant, pour les revenus perçus en 2001, une déclaration annuelle dissimulant, au titre des bénéfices commerciaux, les sommes distribuées par une société civile immobilière de construction-vente dont il était le gérant majoritaire ;

Attendu que, pour le déclarer coupable de fraude fiscale, l'arrêt prononce par le motifs propres et adoptés partiellement repris au moyen ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, et dès lors que suffisent à caractériser le délit de fraude fiscale, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, la constatation de l'omission délibérée de souscrire la déclaration propre à une catégorie de revenus professionnels et celle d'une dissimulation volontaire de sommes sujettes à l'impôt d'un montant supérieur à 153 euros, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1741 du code général des impôts, L. 227 du livre des procédures fiscales, 132-19,132-24 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Belkacem X... coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement total de l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2001, en souscrivant une déclaration d'ensemble de ses revenus très fortement minorée, l'a condamné à six mois d'emprisonnement, ordonné les mesures d'affichage et de publication et a prononcé sur les intérêts civils ;

"aux motifs que le tribunal a prononcé une peine proportionnée à la gravité des faits reprochés au prévenu et prenant en compte la personnalité de celui-ci ;

"alors que les peines prononcées doivent être proportionnées aux faits dont le prévenu a été reconnu coupable ; que Belkacem X... a été poursuivi pour soustraction frauduleuse à l'établissement et au paiement de l'impôt sur le revenu et pour omission d'écritures comptables ; que le tribunal l'a déclaré coupable de ces deux délits ; qu'en revanche la cour d'appel a relaxé Belkacem X... du délit d'omission d'écritures comptables ; qu'en confirmant la peine prononcée par le tribunal, soit six mois d'emprisonnement ferme, aux motifs que le tribunal avait prononcé une peine proportionnée aux faits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a méconnu le principe et les textes susvisés" ;

Attendu qu'en condamnant M. X..., déclaré coupable de fraude fiscale, à la peine de six mois d'emprisonnement, par des motifs propres et adoptés qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du code pénal, dans les limites fixées par la loi, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi.