Cass. com., 23 janvier 2019, n° 17-21.481
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Bertrand, SCP Boutet et Hourdeaux
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 juin 2017), que la société Acumass, qui intervient auprès de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) pour effectuer, pour le compte de ses clients, le paiement des annuités afférentes aux brevets, a émis à cette fin, le 30 juin 2016 sur le site internet de l'INPI, un ordre de prélèvement d'un montant de 389 400 euros, à partir de son compte client, qui n'a pas été suivi d'effet, faute de provision suffisante ; qu'elle a, le 7 juillet 2016, formé un recours gracieux et demandé à l'INPI de prendre en compte un règlement à la date du 30 juin 2016 et de l'exonérer du paiement du supplément de redevance pour paiement tardif ; que, par décision du 29 juillet 2016, le directeur général de l'INPI a rejeté cette demande ; que la société Acumass a formé un recours contre cette décision ;
Attendu que la société Acumass fait grief à l'arrêt de rejeter son recours alors, selon le moyen :
1°/ que le moment de la réception est celui où l'ordre de paiement est reçu par la prestataire de service de paiement du payeur, que le montant de l'opération de paiement est crédité sur le compte du prestataire de services de paiement du bénéficiaire au plus tard à la fin du premier jour ouvrable suivant le moment de réception de l'ordre de paiement et que la date de valeur d'une somme portée au crédit du compte du bénéficiaire ne peut être postérieure à celle du jour ouvrable au cours duquel le montant de l'opération de paiement est crédité sur le compte du prestataire de services de paiement du bénéficiaire ; qu'en décidant que le compte de la société Acumass ouvert auprès du Trésor public ne pouvait en aucun cas être crédité à la date du 30 juin 2016, et qu'il l'avait été le 1er juillet 2016 afin de retenir un paiement tardif des annuités, la cour d'appel a fixé au 30 juin la date de l'ordre de paiement donné par la société Acumass, cependant qu'il résultait clairement du relevé bancaire régulièrement produit, ainsi que du détail de l'eurovirement sepa, que la « date opération » attribuée au virement de 410 000 euros en faveur du compte INPI était le « 28/06/2016 » et qu'il avait été porté en date de valeur au « 30/06/2016 », de sorte que l'ordre de paiement avait été reçu par l'établissement teneur de compte de la société Acumass le 28 juin, date opération, et devait être crédité sur le compte de la société Acumass ouvert auprès du Trésor public au plus tard le 30 juin, date de valeur ; d'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 612-9 du code de la propriété intellectuelle, L. 133-9, alinéa 1, L. 133-13 I et L. 113-14 I du code monétaire et financier ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, la société Acumass invoquait l'illégalité de la décision n° 2016-36 du 26 février 2016 du directeur de l'INPI en ce qu'elle ne soumettait le compte client intermédiaire sur lequel les règlements des annuités de brevet transitaient à aucune règle de date d'opération ni aucun moyen de contrôle en violation des règles édictées par le code monétaire et financier ; qu'en estimant que la société Acumass soutenait que la décision critiquée était illégale « en ce qu'elle imposait de payer par prélèvement sur un compte client de sorte que seule la date de crédit au compte interne de l'usager permet de procéder à un règlement dans les délais », la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société Acumass et violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
3°/ que constitue une pénalité assimilable à une sanction administrative, la fixation du supplément de redevance dû par le breveté prévu par l'article L. 612-9 du code de la propriété intellectuelle à un taux de 50 % du montant de la redevance impayée devant être acquitté au cours du délai de grâce, de sorte qu'en décidant le contraire pour refuser de reconnaître que l'arrêté du 24 avril 2008 relatif aux redevances de procédures perçues par l'INPI méconnaissait le principe de proportionnalité et devait s'appliquer, la cour d'appel a violé l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que les relevés bancaires produits par la société Acumass mettaient en évidence qu'elle avait procédé à deux virements et que les dates de débit de ceux-ci étaient différentes, 28 juin pour celui de 100 000 euros et 30 juin pour celui de 410 000 euros, de sorte que ce dernier virement ne pouvait pas figurer sur son compte ouvert sur le portail de l'INPI le même jour, la cour d'appel en a exactement déduit que le compte client de la société Acumass à l'INPI, ouvert auprès du Trésor public, avait été crédité le 1er juillet 2016 et ne pouvait l'avoir été à la date du 30 juin 2016, comme il eût été nécessaire pour payer à temps les annuités dues ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir indiqué que la société Acumass prétendait que la décision du directeur général de l'INPI du 26 février 2016 fixant les modalités de paiement des annuités de brevet était illégale, en ce qu'elle imposait de payer celles-ci par prélèvement sur un compte client, de sorte que seule la date de crédit au compte interne de l'usager permettait de procéder à un règlement dans les délais, c'est sans dénaturer ces écritures que la cour d'appel, ayant relevé que cette décision prévoyait une alternative, à savoir un prélèvement sur compte client ou un règlement par carte bancaire, et que, par ailleurs, le compte client pouvait être alimenté en numéraire ou par carte bancaire auprès des guichets de l'INPI, ou encore par chèque libellé à l'ordre de l'agent comptable de l'INPI, ou enfin par virement à son ordre, a retenu qu'il n'était pas démontré que ces modalités de paiement fussent contraires aux dispositions du code monétaire et financier et qu'il appartenait à la société Acumass de tenir compte des dates d'effet différentes des modes de paiement, prévues par ce code ;
Et attendu, enfin, qu'ayant retenu que le supplément de redevance pour paiement tardif n'avait pas pour objet de sanctionner une faute du titulaire du brevet mais de lui permettre de conserver ses droits, dont il encourait la déchéance, et que, fixée à 50 % du montant de la redevance impayée, ce supplément suivait dans une proportion identique les annuités de maintien en vigueur, qui augmentent avec l'âge du brevet, la cour d'appel en a à juste titre déduit qu'il ne portait pas atteinte au principe de proportionnalité ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.