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Décisions

Cass. crim., 19 mars 1979, n° 78-92.575

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mongin

Rapporteur :

M. Pucheus

Avocat général :

M. Clerget

Avocat :

Me Foussard

Dijon, ch. corr., du 29 juin 1978

29 juin 1978

Attendu que la prescription spéciale de l'action publique prévue par l'article 1741 du Code général des Impôts, en matière de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt, ne commence à courir que du jour où l'infraction a été commise, ce jour étant soit celui où, en cas d'omission des déclarations prescrites par la loi, ces déclarations auraient dû être faites, soit celui, en cas de dissimulations de sommes sujettes à l'impôt, où une déclaration inexacte est produite auprès des services fiscaux chargés de la détermination de l'assiette et de la liquidation des droits ;

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué et de celles du jugement qu'il a confirmé et dont il a adopté les motifs non contraires que, par acte notarié en date du 27 décembre 1971, X... Henri a acquis de sa tante, dame Y... Veuve Louis X..., un ensemble immobilier moyennant le prix déclaré de 225 000 francs et que cet acte a été présenté à " la formalité fusionnée " de l'enregistrement et de la publicité foncière, le 3 février 1972 ; qu'il a été établi que cette opération immobilière n'avait que l'apparence d'une vente et déguisait, en réalité, une donation qui aurait dû entraîner, outre le paiement de droits d'enregistrement plus élevés, la déclaration obligatoire par X...Henri, en application des dispositions de l'article 784 du Code général des impôts, des donations qui lui avaient été consenties antérieurement par les époux Y... Louis X... ;

Attendu que X... Henri et un autre de ses oncles, X... Georges, ayant été poursuivis, à raison de ces faits, sur le fondement de l'article 1741 du Code général des impôts pour soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt, et complicité, les juges du fond ont déclaré que l'action publique était éteinte par la prescription aux motifs que les infractions qui leur étaient reprochées avaient été commises, non pas le 3 février 1972, date de la présentation de l'acte à l'enregistrement, mais le 27 décembre 1971, date à laquelle " cet acte avait été établi ; qu'en effet, précisent les juges, cet acte existait en tous ses éléments avant son enregistrement et sa nature déterminait l'assiette des droits à percevoir " ; que, d'ailleurs, il résulte de l'article 1973 du Code général des Impôts qu'au regard de la prescription, les actes ayant date certaine, ce qui est le cas en l'espèce de l'acte authentique en cause, sont opposables au Trésor, que, dès lors, la plainte de l'Administration des Impôts n'ayant été déposée que le 30 décembre 1975 alors qu'elle aurait dû l'être avant le 31 décembre 1974, l'action publique se trouvait éteinte par la prescription spéciale édictée par l'article 1741 du Code général des Impôts ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que, d'une part, la dissimulation de sommes soumises à l'impôt résultait de la fausse déclaration commise lors de la présentation de l'acte à l'enregistrement, l'établissement même de cet acte ne constituant qu'une manoeuvre préparatoire à cette dissimulation et que, d'autre part, les dispositions de l'article 1973 du Code général des Impôts qui ne concernent que l'action en répétition des droits dont dispose l'Administration, sont étrangères à la prescription de l'action publique en matière de soustraction frauduleuse, à l'établissement ou au paiement de l'impôt, laquelle prescription est exclusivement soumise aux dispositions de l'article 1741 du même Code, la Cour d'appel a violé ce texte de loi et le principe ci-dessus rappelé ; Que l'arrêt encourt la cassation de ce chef ;

Par ces motifs :

Casse et annule l'arrêt précité de la Cour d'appel de Dijon du 29 juin 1978 et, pour être statué à nouveau, conformément à la loi ;

Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Lyon.