Cass. soc., 3 décembre 1991, n° 87-43.250
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu selon l'arrêt attaqué et la procédure que cinq salariés de la société CGA-Alcatel, aux droits de laquelle est actuellement la société CGA-HBS, ont, le 15 mai 1984, chacun saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir de leur employeur pour chacun des exercices 1982-83 et 1983-84 2 jours ouvrables supplémentaires de congé dont ils estimaient pouvoir bénéficier pour avoir pris leurs vingt-quatre premiers jours de congés payés par périodes fractionnées ; que devant les juges du premier degré, ils ont réclamé des rappels de salaires correspondant aux journées dont ils prétendaient avoir été irrégulièrement privés et l'annulation, sous astreinte, des dispositions, selon eux non conformes à l'alinéa 3 de l'article L. 223-8 du Code du travail, contenues dans des notes d'informations émises unilatéralement par l'employeur les 3 mars 1983 et 14 mai 1984 ; que les juges du premier degré, joignant les cinq instances, ont condamné la société CGA-Alcatel, sous astreinte de 500 francs par jour de retard à l'annulation des dispositions des notes d'information du 3 mars 1983, 24 mai 1984, 18 février 1985 et 21 mars 1986 relatives aux modalités de fractionnement du congé annuel des années 1983 à 1986 et a débouté des salariés et de leurs demandes en paiement des sommes correspondant aux jours supplémentaires supprimés et à celles réclamées sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure ; que la société CGA-Alcatel a formé appel contre cette décision ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes des salariés, la cour d'appel, après avoir relevé qu'aucune réclamation individuelle chiffrée n'a été réitérée par les salariés, énonce qu'en renonçant à toute compensation pécuniaire de la privation prétendue de certains droits à congés payés, les salariés tendent à faire échec, en ce qui les concerne, à des directives internes applicables à l'ensemble du personnel de la société CGA-Alcatel, que la cour d'appel non seulement ne saurait se substituer à l'employeur dans l'exercice de son pouvoir d'organiser le fonctionnement de l'entreprise en censurant les notes de service, mais encore ne peut davantage faire exception, en faveur de certains salariés, au principe de l'application générale des décisions prises et que dans les deux cas cela conduisait la cour d'appel à se prononcer par voie de dispositions généraleS ou réglementaireS, ce qui lui est interdit par l'article 5 du Code civil ;
Attendu cependant qu'il résulte des énonciations de l'arrêt qu'au dernier état de la procédure orale, la cour d'appel se trouvait saisie, fût-ce à titre subsidiaire, de cinq litiges individuels relatifs chacun à l'exécution d'un contrat de travail et notamment à l'application à chaque salarié en cause, malgré les termes des notes d'information de l'employeur, des dispositions de l'article L. 223-8 du Code du travail relatives au fractionnement des congés-payés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a fait une fausse application du premier des textes susvisés et violé le second ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 avril 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée