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Décisions

AMF, 23 décembre 2008, n° SAN-2009-27

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Membres :

M. Hassan, M. Courteault, M. Surzur

Président :

M. Nocquet

AMF n° SAN-2009-27

22 décembre 2008

La 2 ème section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF »),
Vu le Code monétaire et financier, notamment ses articles L. 621-14 et L. 621-15 dans leur rédaction applicable à l’époque des faits, ainsi que ses articles R. 621-5 à R. 621-7 et R. 621-38 à R. 621-40 ;
Vu la loi n° 2003-706 du 1 er août 2003 de sécurité financière modifiée, prise notamment en ses articles 47 et 49 ;
Vu le Règlement COB n° 90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée, notamment en ses articles 1er à 5, maintenus en vigueur par l’article 47 de la loi n° 2003-706 du 1er août 2003 précitée jusqu’à leur reprise, à compter du 25 novembre 2004, par le Règlement général de
l'AMF, en ses articles 611-1, 621-1, 622-1 et 622-2 ;
Vu les notifications de griefs adressées le 15 juin 2007 à MM. A, B, C, D, J, K, L, M, N, O, I, E, F, H,
G et aux sociétés W et V ;
Vu la décision du 23 juillet 2007 du Président de la Commission des sanctions désignant
M. Jean-Pierre MORIN, Membre de la Commission des sanctions en qualité de Rapporteur ;
Vu les observations écrites en date des :
- 12 juillet 2007 par Maître Olivier BARATELLI pour M. G ;
- 13 juillet 2007 par Maître Olivier SCHNERB pour M. H ;
- 30 août 2007 par Maître Marie-Noëlle DOMPE pour M. O ;
- 13 septembre 2007 par Maître Bruno QUENTIN pour M. E ;
- 14 septembre 2007 par Maître Enrico CASTALDI pour M. N ;
- 14 septembre 2007 par Maître Arnaud GUERIN pour M. K ;
- 14 septembre 2007 par Maître Diane PASTUREL et Maître Benoit DESCOURS pour
M. B ;
- 14 septembre 2007 par Maître Emmanuel GALISTIN pour M. F ;
- 21 septembre 2007 par Maître Urs SAAL pour M. D ;
- 24 septembre 2007 par Maître Ferdinand VROOM pour M. J ;
- 28 septembre 2007 par Maître Jean-Yves GARAUD et Maître Delphine MICHOT pour
M. A ;
- 30 septembre 2007 par Maître Guilhem BREMOND et Maître Dimitri SONIER pour
M. M ;
- 11 octobre 2007 par Maître Arthur DETHOMAS pour M. L;
- 15 novembre 2007 par Maître Eric DEZEUZE pour M. C ;
- 30 novembre 2007 par Maître Frédéric BELLANCA et Maître Antoine MAFFEI pour
M. I ;
La Commission des sanctions

Vu les auditions par le Rapporteur de M. O le 2 avril 2008 et celles de MM. B et L le 15 avril 2008 ;
Vu les lettres en date des 16 et 27 octobre 2008 informant MM. A, B, C, D, J, K, L, M, N, O, I, E, F, H et G du droit de demander la récusation de M. Jean-Pierre MORIN, Rapporteur ;
Vu les lettres, en date des 21 et 27 octobre 2008, de convocation à la séance de la Commission des sanctions du 22 décembre 2008 pouvant se prolonger le 23 décembre 2008 auxquelles était annexé le rapport signé du Rapporteur, adressées à MM. A, B, C, D, J, K, L, M, N, O, I, E, F, H et G ;
Vu les lettres du 25 novembre 2008 informant MM. A, B, C, D, J, K, L, M, N, O, H, E , F, H et G de la composition de la Commission des sanctions lors de la séance et de leur faculté de demander la récusation de l’un des Membres de ladite Commission ;
Vu les observations en réponse au rapport du Rapporteur, en date du :
- 4 novembre 2008 par Maître Bruno QUENTIN pour M. E ;
- 6 novembre 2008 par Maître Emmanuel GALISTIN pour M. F ;
Vu la lettre du 6 novembre 2008 de Maître Marie-Noëlle DOMPE pour M. O ;
Vu la lettre de M. H du 7 novembre 2008 ;
Vu la lettre de Maître Eric DEZEUZE du 13 novembre 2008, ses observations en réponse au rapport du Rapporteur en date du 20 novembre 2008 et sa lettre du 3 décembre 2008 pour M. C ;
Vu les observations en réponse au rapport du Rapporteur, en date du 14 novembre 2008 par
Maître Guilhem BREMOND et Maître Dimitri SONIER pour M. M ;
Vu les observations en réponse au rapport du Rapporteur et les courriers en date des 17 novembre, 3 décembre, 5 décembre, 12 décembre, 16 décembre et 19 décembre 2008 de
Maître Olivier SCHNERB pour M. H ;
Vu les observations en réponse au rapport du Rapporteur, en date des :
- 18 novembre 2008 par Maître Olivier BARATELLI pour M. G ;
- 21 novembre 2008 par Maître Frédéric BELLANCA pour M. I ;
- 21 novembre 2008 par Maître Jean-Yves GARAUD et Maître Grégoire BERTROU pour M. A ;
- 21 novembre 2008 par Maître Diane PASTUREL et Maître Benoit DESCOURS pour M. B ;
- 21 novembre 2008 par Maître Arnaud GUERIN pour M. K ;
- 21 novembre 2008 par Maître Ferdinand VROOM pour M. J ;
- 9 décembre 2008 par Maître Enrico CASTALDI pour M. N ;
Vu les mémoires déposés le jour de la séance par M. B, M. D et Maître BARATELLI pour M. G ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Après avoir entendu au cours de la séance des 22 et 23 décembre 2008 :
- M. le Rapporteur en son rapport,
- M. Gilles PETIT, Commissaire du Gouvernement, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler,
- M. Jean-Philippe PONS-HENRY, représentant le Collège de l’AMF,
- M. Giovanni ZAMBELLI, à la requête de M. C, en application de l’article R. 621-40 II du Code monétaire et financier,
- M. A et son conseil, Maître Jean-Yves GARAUD,
- M. B et ses conseils, Maîtres Henri BRANDFORD-GRIFFITH et Benoît DESCOURS,
- M. C et son conseil Maître Eric DEZEUZE,
- M. D et son conseil, Maître Dominique DUMAS,
- M. E et son conseil Maître Bruno QUENTIN,- M. F et son conseil, Maître Emmanuel GALISTIN,
- M. G et son conseil, Maître Olivier BARATELLI,
- M. H et son conseil, Maître Olivier SCHNERB,
- Maîtres Antoine MAFFEI et Frédéric BELLANCA représentant M. I en vertu d’un pouvoir en date du 4 décembre 2008,
- M. J et son conseil, Maître Ferdinand VROOM,
- M. K et son conseil Maître Arnaud GUERIN,
- M. Let son conseil, Maître Arthur DETHOMAS,
- M. M et son conseil, Maître Guilhem BREMOND,
- M. N et son conseil, Maître Brice LAVEAU
- M. O et son conseil Maître Marie-Noëlle DOMPE,
les personnes mises en cause ayant pris la parole en dernier.
I. FAITS ET PROCEDURE
Le 7 juillet 2003 à 8h40 la société X a annoncé son intention de lancer une offre publique d’achat sur le capital de la société Y, dont les titres étaient admis sur le Premier marché d’Euronext Paris et éligibles au service de règlement différé (SRD) ainsi qu’au New-York Stock Exchange sous forme d’American depositary receipt. L’offre évaluait chaque action ordinaire Y à 41 euros. Suspendue avant l’ouverture du marché, la cotation du titre n’a été reprise qu’à partir de 13h00. L’action Y, qui cotait 39,9 euros à l’ouverture, a terminé la séance à 42 euros.
Des achats significatifs sur le marché du titre Y et des volumes inhabituels sur le marché du call warrant Y (prix d’exercice 30 euros, échéance du 19 décembre 2003) émis par Z ayant été décelés au cours du mois précédant l’annonce de cette offre publique, le Directeur général de la COB a décidé le 1er septembre 2003 de faire procéder par le Service de l’Inspection à une enquête sur « le marché du titre Y et de tout produit qui lui serait lié, à compter du 1 er juin 2003 », étendue « à compter du 1 er mai 2003 » par décision du 29 juin 2005 du Secrétaire général de l’AMF. Un rapport a été établi le 12 février 2007 par la Direction des Enquêtes et de la Surveillance des Marchés (DESM) de l’AMF et examiné par la Commission spécialisée n° 2 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du Code monétaire et financier, lors de ses séances des 13 mars et 3 avril 2007.
Le 15 juin 2007, le Président de l’AMF a notifié les griefs retenus à MM. A, B, C, D, J, K, L, M, N, O, I, E, F, H, G et aux sociétés W et V en les informant, d’une part, de la transmission des lettres de notification au Président de la Commission des sanctions pour attribution et désignation d’un Rapporteur, d’autre part, du délai d’un ou de deux mois– selon les cas – dont ils disposaient pour présenter des observations écrites en réponse aux griefs, ainsi que de la possibilité de se faire assister ou représenter de toute personne de leur choix et de prendre connaissance et copie des pièces du dossier dans les locaux de l’AMF.
Les notifications de griefs n’ayant pu être remises aux sociétés W et V, à l’égard desquelles les recherches à fin de notification demeurent en cours, la procédure de sanction visant ces deux sociétés fera l’objet d’une disjonction ;
Par lettre du 15 juin 2007, le Président de l’AMF, en application de l’article R. 621-38 du Code monétaire et financier, a informé le Président de la Commission des sanctions des notifications de griefs intervenues sur le fondement du rapport établi par la DESM.
Par une décision du 23 juillet 2007 le Président de la Commission des sanctions a désigné en qualité de Rapporteur, en application de l’article R. 621-39 du Code monétaire et financier, M. Jean-Pierre MORIN, qui en a informé les personnes mises en cause en leur rappelant la possibilité d’être entendues à leur demande.
Des observations en réponse aux notifications de griefs ont été produites en date des : 12 juillet 2007 par Maître Olivier BARATELLI pour M. G, 13 juillet 2007 par Maître Olivier SCHNERB pour M. H, 30 août 2007 par Maître Marie-Noëlle DOMPE pour M. O,13 septembre 2007 par Maître Bruno QUENTIN pour M.E, 14 septembre 2007 par Maître Enrico CASTALDI pour M. N, 14 septembre 2007 par Maître Arnaud GUERIN pour M. K, 14 septembre 2007 par Maître Diane PASTUREL et Maître Benoit DESCOURS pour M. B, 14 septembre 2007 par Maître Emmanuel GALISTIN pour M. F, 21 septembre 2007 par Maître Urs SAAL pour M. D, 24 septembre 2007 par Maître Ferdinand VROOM pour M. J, 28 septembre 2007 par Maître Jean-Yves GARAUD et Maître Delphine MICHOT pour M. A, 30 septembre 2007 par Maître Guilhem BREMOND et Maître Dimitri SONIER pour M. M, 11 octobre 2007 par Maître Arthur DETHOMAS pour M. L, 15 novembre 2007 par Maître Eric DEZEUZE pour M. C et 30 novembre 2007 par Maître Frédéric BELLANCA et Maître Antoine MAFFEI pour M. I ;
MM. O et B ayant sollicité leur audition, ils ont été entendus les 2 et 15 avril 2008 sur convocations par lettres recommandées avec demandes d’avis de réception du 12 mars 2008. Par ailleurs, le Rapporteur ayant souhaité entendre M. L, l’audition de ce dernier, également convoqué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 12 mars 2008, a eu lieu le 15 avril 2008.
M. Jean-Pierre MORIN a déposé le 9 octobre 2008 son rapport, qui a été adressé à MM. A, B, C, D, E, F, G, H, I, J, K, L, M, N et O, les 21 et 27 octobre 2008. Les 16 et 27 octobre 2008, ces personnes ont été avisées par lettres recommandées avec demandes d’avis de réception de la possibilité de récuser, dans le délai d’un mois, le Rapporteur, dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du Code monétaire et financier.
Des observations en réponse au rapport du Rapporteur ont été produites en date des 4 novembre 2008 par Maître Bruno QUENTIN pour M. E et 6 novembre 2008 par Maître Emmanuel GALISTIN pour M. F. Le 6 novembre également, Maître Marie-Noëlle DOMPE a fait savoir qu’elle n’avait pas d’observations à formuler pour M. O.
M. H a adressé des observations datées du 7 novembre 2008, tandis que Maître Olivier SCNHERB a présenté des observations complémentaires en réponse au rapport du Rapporteur pour M. H les 17 novembre, 3 décembre, 5 décembre, 12 décembre, 16 décembre et 19 décembre 2008.
Maître Eric DEZEUZE a présenté des observations complémentaires en réponse au rapport du
Rapporteur pour M. C les 13 novembre, 20 novembre et 3 décembre 2008.
Des observations en réponse au rapport du Rapporteur ont été produites en date des : 14 novembre 2008 par Maîtres Guilhem BREMOND et Dimitri SONIER pour M. M, 18 novembre 2008 par Maître Olivier BARATELLI pour M. G, 21 novembre 2008 par Maître Frédéric BELLANCA pour M. I, par Maîtres Jean-Yves GARAUD et Grégoire BERTROU pour M. A, par Maîtres Diane PASTUREL et Benoit DESCOURS pour M. B, par Maître Arnaud GUERIN pour M. K, par Maître Ferdinand VROOM pour M. J, et 9 décembre 2008 par Maître Enrico CASTALDI pour M. N ;
Le 25 novembre 2008, MM. A, B, C, D, E, F, H, G, I, K, L, J, O, M, N ont été avisés de la composition de la Commission des sanctions et de la possibilité de récuser, dans un délai de quinze jours, l’un de ses Membres en application des articles R. 621-39-2, R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du Code monétaire et financier.
Des mémoires ont été déposés le jour de la séance par M. B, M. D et Maître BARATELLI pour M. G.
II. MOTIFS DE LA DECISION
A. SUR LES MOYENS DE PROCEDURE
Considérant que les cessions litigieuses ayant porté sur des actions admises, à l’époque des faits, aux négociations sur le Premier marché d’EURONEXT Paris, les éléments d'extranéité tenant à la nationalité ou à la profession des personnes mises en cause ne sont pas de nature à exclure les opérations du champ d'application de la loi française ;
Considérant que le moyen tiré de la façon dont s’est déroulée l’audition de M. J le
15 mars 2006 doit être écarté ; qu’il résulte en effet du compte-rendu versé au dossier sous les cotes D. 0002595 à D. 0002590 :
- que cette audition s’est tenue régulièrement devant un agent habilité de la Commission de contrôle de la gestion de portefeuilles et des activités boursières assimilées de la Principauté de Monaco, assisté d’une Secrétaire à la direction du Budget et du Trésor du Département des finances et de l’économie ;
que si cette audition, à laquelle assistaient « en qualité d’observateurs » deux chargés de mission de la DESM, s’est déroulée en français, langue officielle de la Principauté de Monaco, M. J, qui ne parlait pas cette langue, a bénéficié d’un traducteur dont il ne démontre pas le défaut d’impartialité ;
- que M. J a été convoqué à cette audition par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception qui lui rappelait la faculté d’être assisté d’un conseil de son choix ; qu’à l’issue de son audition, il a procédé à la lecture de ses déclarations puis a « persisté et signé » ;

 Considérant que M. A soutient que certaines pièces du dossier ont été cancellées – en particulier la lettre des autorités monégasques du 6 avril 2004 – de sorte qu’il n’aurait pas été en mesure d’exercer ses droits de la défense ; que M. B, son frère, fait valoir que le vice résultant de la violation du principe de loyauté dans l’accusation en raison de l’absence du versement au dossier des preuves pertinentes est « flagrant » ; que M. C estime pour sa part qu’il a été privé d’un légitime accès aux informations sollicitées, de sorte que l’exercice de ses droits de la défense serait inévitablement compromis ;
Mais considérant que le Rapporteur a demandé au Directeur de la DESM, soit de lui adresser les éléments manquants ou cancellés soit, à défaut, de lui faire connaître les raisons pour lesquelles ces éléments étaient absents du dossier ; que ce dernier a notamment justifié, s’agissant du courrier du 6 avril 2004 susmentionné, du refus opposé par les autorités monégasques à la transmission à l’autorité judiciaire française des informations relatives à des personnes ou à des entités qui n’apparaissaient pas relever du champ de l’enquête ; qu’il a ajouté que ces personnes n’avaient fait l’objet d’aucune investigation de la part du service des enquêtes et n’avaient aucun lien avec les personnes mises en cause ; que le respect des règles de coopération entre les autorités françaises et les autorités monégasques, qui s’imposait aux enquêteurs, est d’autant moins de nature à vicier la procédure que la réponse apportée par ces dernières n’avait pas, contrairement à ce que prétend M. A, pour objet ou pour effet d’indiquer « d’autres sources possibles de transmission » ;
Considérant que l’existence de deux procédures, l’une pénale, l’autre administrative, est sans influence sur la régularité de la seconde, dès lors que la Commission des sanctions apprécie la caractérisation des manquements reprochés au regard des seules pièces qui lui sont soumises et qui font l’objet d’un débat contradictoire ; que M. C estime qu’il a été privé d’un légitime accès aux informations qu’il a sollicitées, ce qui aurait compromis l’exercice de ses droits de la défense ; qu’après avoir indiqué dans ses observations du 15 novembre 2007 que des pièces à décharge figureraient au dossier d’instruction pénale, sans en préciser la nature, il a sollicité, dans un courrier daté du 13 novembre 2008, la communication de la correspondance de la Commission européenne, en réponse à une lettre adressée au Président Romano PRODI le 29 septembre 2004, et des procès-verbaux d’audition et de confrontation (cotes D. 9, D. 10,
D. 3718, D. 4263, D. 4665) ; que dans ses observations du 20 novembre 2008, M. C soutient que les autorités de poursuite devaient communiquer à la défense toutes preuves pertinentes en leur possession, à charge ou à décharge, et demande la production de nouvelles pièces du dossier d’instruction (cotes D. 740, D. 815, D. 4585 et D. 4643) ; que ces demandes, intervenues dix-sept mois après la réception par M. C de la lettre de notification de griefs et un mois après la remise du rapport du Rapporteur, qui n’a jamais été sollicité en ce sens, ont été considérées comme trop tardives pour pouvoir être prises en compte ; qu’en séance, le représentant du Collège a indiqué que si la réponse à la lettre susvisée du 29 septembre 2004 n’avait pas été versée au dossier de la procédure, c’était parce qu’elle semblait dépourvue d’incidences sur la présente espèce et qu’elle fournissait en annexe l’identité de plusieurs fonctionnaires de la Commission européenne à l’égard desquels aucun soupçon n’avait été maintenu, alors qu’ils étaient susceptibles d’avoir reçu des informations sur le projet de rachat de Y par les dirigeants d’X lors de l’examen des questions de concurrence liées à cette opération ; qu’il en résulte que, si cette pièce et ses annexes ne figuraient effectivement pas au dossier, elles n’en avaient pas pour autant été « écartées de manière déloyale » ; qu’en tout état de cause, M. C fait état dans ses observations du contenu des documents dont la communication était sollicitée, et notamment de la correspondance de la Commission européenne, dont il reproduit les termes ; que ces observations ont été versées au dossier,
de sorte que M. C ne saurait plus, en l’espèce, arguer d’un quelconque grief ; considérant que, de manière plus générale, il n’est nullement démontré que l’une quelconque des pièces ne figurant pas au dossier de la présente procédure ait une incidence sur le caractère privilégié de l’information en cause et, dès lors, sur le bien-fondé de l’accusation, de sorte que les moyens ne peuvent qu’être écartés ;
Considérant que le principe de la contradiction est sans application aux enquêtes, préalables à la notification des griefs ; que le moyen selon lequel le rapport d’enquête a été rédigé de façon non contradictoire est, dès lors, inopérant ; qu’il en est de même des affirmations relatives à la conduite de l’enquête ou au contenu du rapport d’enquête ainsi que de celles relatives à d’autres procédures en cours ou passées menées par les enquêteurs ; que la circonstance alléguée que les procès-verbaux d’audition n’auraient pas été présentés aux personnes entendues après leur audition n’est pas établie ;
Considérant que la phase contradictoire ne débute qu’avec la notification des griefs, qui informe la personne mise en cause des manquements susceptibles d’être retenus contre elle ; que, s’appuyant sur les éléments de nature à caractériser ces manquements, l’énoncé des griefs, toujours formulé au conditionnel, ne saurait être regardé comme une atteinte à la présomption d’innocence ou comme un pré-jugement ;

Considérant, enfin, que le contenu et les conclusions du rapport du Rapporteur, qui ne constituent qu’un
des éléments de la procédure soumise, à l’issue d’un débat contradictoire, à l’appréciation de la Commission des sanctions, n’ont aucune incidence sur la légalité de la décision rendue ; que, par suite, le moyen soulevé notamment par MM. F et J critiquant les conclusions du rapport du Rapporteur et sa manière d’instruire sont sans effet sur la validité de la procédure ;
B. SUR LES GRIEFS
1. Sur les textes applicables Considérant que l’arrêté du 12 novembre 2004 paru au Journal officiel de la République Française du 24 novembre 2004 abroge notamment, avec effet immédiat, le Règlement COB n° 90-08 relatif à l’utilisation d’une information privilégiée, en lui substituant le Règlement général de l’AMF dont il porte homologation ;
Considérant que l’article 47 de la loi n° 2003-706 de sécurité financière dispose que les Règlements de la COB demeurent applicables jusqu’à leur abrogation ; qu’avant l’entrée en vigueur du Règlement général de l’AMF, le Règlement n° 90-08 a continué de s’appliquer aux faits et situations qu’il visait, et notamment à l’exploitation susceptible d’avoir été faite, en l'espèce, d’une information privilégiée ; qu’en effet, le nouveau texte a pour effet de maintenir les manquements objet des griefs puisque, tout en abrogeant le Règlement COB susvisé, il en reprend le contenu dans des dispositions qui, même si elles sont différentes
dans la forme, restent pour l’essentiel équivalentes au fond ; Considérant toutefois que le Règlement général a modifié deux concepts :
1. Est désormais interdite, non plus seulement « l’exploitation » prévue par le Règlement n° 90-08, mais aussi la simple « utilisation » d’une information privilégiée ;
2. l’influence sur les cours que l’information serait susceptible d’avoir si elle était rendue publique est désormais qualifiée de « sensible », alors que le Règlement n° 90-08 ne faisait référence qu’à une « incidence sur les cours » ;
Considérant que l’extension de la définition du comportement incriminé n’est pas applicable aux manquements, antérieurs à l’entrée en vigueur des articles 621-1 et 622-1 du Règlement général, reprochés en l'espèce, les mis en cause devant bénéficier de l’application des dispositions antérieures moins sévères, tandis que la qualification de « sensible » donnée à l'influence sur les cours est constitutive d'une loi plus douce, immédiatement applicable aux manquements d’initié fondés sur le Règlement n° 90-08 ;
Considérant que l’article 1 er alinéa 5, du Règlement COB n° 90-08 prévoit que « le terme ‘information privilégiée’ signifie une information non publique, précise, concernant un ou plusieurs émetteurs, une ou plusieurs valeurs mobilières, un ou plusieurs contrats à terme négociables, un ou plusieurs produits financiers cotés qui, si elle était rendue publique, pourrait avoir une incidence sur le cours de la valeur, du contrat ou du produit financier concerné » ;
Que l’article 4 du même Règlement dispose que « les personnes auxquelles a été communiquée une information privilégiée à l'occasion de l'exercice de leurs professions ou de leurs fonctions ne doivent pas exploiter, pour compte propre ou pour compte d'autrui, une telle information sur le marché ou la communiquer à des fins autres ou pour une activité autre que celles à raison desquelles elle a été communiquée » ; qu’enfin, l’article 5 dispose que « Toute personne qui, en connaissance de cause, possède une information privilégiée provenant directement ou indirectement d'une personne mentionnée aux articles 2, 3 et 4 du présent Règlement, ne doit pas exploiter, pour compte propre ou pour compte d'autrui, une telle information sur le marché » ;
Considérant que, sous la réserve concernant l’influence « sensible » sur les cours que l’information serait susceptible d’avoir, c’est en application de ces dispositions du Règlement n° 90-08, maintenues par les articles 621-1 et 622-2 du Règlement général de l’AMF, que les faits de communication et d’exploitation d’une information privilégiée poursuivis en l’espèce sont définis et demeurent susceptibles d’être sanctionnés ;
2. Sur l’existence d’une information privilégiée Considérant que, selon les notifications de griefs, l’information relative, selon les cas, au « dépôt imminent » ou « aux grandes chances de dépôt imminent » d’une offre publique d’achat de la société X sur les titres de la société Y a revêtu, dès le 3 juin 2003 et, à tout le moins, le 16 juin 2003, les caractéristiques d’une information privilégiée ;
Considérant qu’une information privilégiée est, au sens des textes susvisés, une information précise, non publique et susceptible d’avoir une influence sensible sur les cours ;
a) Sur la précision de l’information
Considérant qu’il résulte de l’article 621-1 du Règlement général de l’AMF qu’« une information est réputée précise si elle fait mention d’un ensemble de circonstances ou d’un événement qui s’est produit ou qui est susceptible de se produire et s’il est possible d’en tirer une conclusion quant à l’effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés » ; que le caractère précis de l’information se définit de façon objective, indépendamment de la personne qui la détient ;
Considérant qu’en mars 2003, le Président d’X a rencontré M. P, Président Directeur Général de Y, pour évaluer les possibilités de rapprochement entre les deux sociétés ; que, le 25 avril 2003, s’est tenue à New-York une réunion entre les représentants d’X, de U et de T ; qu’après avoir opéré une révision de la faisabilité de la transaction avec Y, la direction d’X a réuni son comité exécutif le 23 mai 2003 ; que le 28 mai 2003, une nouvelle réunion des représentants d’X, de U et de T a eu lieu, afin de discuter des conditions relatives à l’émission de l’offre d’achat ; que, le 2 juin 2003, M. A, « Senior Assignment Associate » au département des fusions et acquisitions de U, a été chargé de désigner l’équipe en charge du dossier ;
Considérant que, le 3 juin 2003, la direction d’X a présenté à son conseil d’administration un rapport sur une possible acquisition de Y par la voie d’une offre publique ; que, si rien ne permet d’affirmer que le conseil d’administration aurait alors accepté les conditions, fixées ultérieurement par la Direction de la concurrence de la Commission européenne, auxquelles était subordonné un rapprochement entre les deux sociétés, il est toutefois établi qu’ont été communiqués aux membres de ce conseil d’administration des éléments précis sur la société Y ainsi que sur les termes de l’offre publique d’achat inamicale envisagée ; qu’il a d’ailleurs été souligné que, si la société X devait maintenir son projet d’acquisition, il conviendrait d’agir vite ; que les membres du conseil d’administration n’ont formulé aucune objection sur l’acquisition proposée, plusieurs d’entre eux ayant même encouragé la société X à poursuivre dans cette voie ;
Considérant que dès le 3 juin 2003, le projet d’offre publique avait donc des chances raisonnables d’aboutir dans un délai proche, peu important l’existence d’aléas, inhérents à toute opération de cette nature ; qu’il était alors possible d’en tirer une conclusion quant aux effets qui pourraient en résulter sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers liés ; qu’il est indifférent que l’opération ait été suspendue à l’accord des autorités de la concurrence, cette circonstance laissant subsister la réalité du projet et, dès lors, le caractère précis de l’information ; qu’au demeurant, l’annonce de l’offre publique est intervenue avant la notification formelle du projet auprès des autorités de la concurrence et, a fortiori, bien avant l’accord que celles-ci ont donné à la suite de contacts qui se sont noués à partir du 16 juin 2003 ; qu’est toute aussi indifférente la circonstance qu’à la date du 3 juin 2003, n’aient été arrêtés ni le prix de l’offre ni les modalités de son financement, ou encore que celle-ci n’ait officiellement été approuvée par le conseil d’administration que le 2 juillet suivant ;
b) Sur le caractère non public de cette information
Considérant que les personnes mises en cause, pour soutenir qu’il existait, lors de la période incriminée, des rumeurs évoquant une prochaine offre publique sur la société Y, s’appuient notamment sur les propos tenus le 16 juin 2003 par le Président Directeur Général de la société Y ou sur des analyses financières ;
Mais considérant que le public n’a alors pas été informé de façon précise du projet d’offre publique déposé par la société X, puisque les recommandations de la presse financière dont il est fait état, outre qu’elles étaient contradictoires, soit n’évoquaient pas une offre publique ultérieure, soit le faisaient de manière vague ; que les propos, rapportés par la presse, qui ont été tenus par M. P le 16 juin 2003, lors d’une réunion d’investisseurs, selon lesquels le rapprochement entre les deux groupes (X et Y) pourrait être une bonne opération, n’ôtent pas son caractère privilégié à l’information ; qu’en effet, d’une part, M. P, à chaque fois qu’il a été interrogé sur un tel rapprochement, a, comme il l’a indiqué à la DESM le 2 février 2004, fait les mêmes déclarations : « un tel rapprochement conserverait le sens industriel qui avait été identifié lors du projet X-Y-S, mais il se heurterait aux mêmes objections des autorités de la concurrence et Y a désormais les moyens de sa propre politique de croissance interne et externe. Un tel rapprochement n’est pas à l’ordre du jour » (cote R. 00862) ; que, d’autre part, les articles ayant rapporté les propos tenus le 16 juin 2003 ont bien mentionné le caractère purement hypothétique d’une telle opération ; qu’il ne pouvait donc en être déduit que le rapprochement entre les deux sociétés était en train de se faire ;
Considérant que des rumeurs d’offre publique ont été rapportées par la presse, dans le sens de
l’affirmation ou du démenti, à partir du 3 juillet 2007 ; qu’à elles seules, de telles rumeurs ne suffisent toutefois pas à donner à l’information un caractère public au sens des textes précités ;
c) Sur le caractère sensible de cette information
Considérant qu’il résulte de l’article 621-1 du Règlement général de l’AMF, applicable conformément au principe de rétroactivité in mitius, qu’« une information qui si elle était rendue publique, serait susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d’instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu’un investisseur raisonnable serait susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement » ;
Considérant que l’offre publique d’achat sur les titres Y constituait une information qu’un investisseur raisonnable aurait été susceptible d’utiliser comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement ;
Considérant que l’annonce d’un projet d’offre publique est, par nature, susceptible d’avoir une influence sensible sur le cours du titre de la société cible ; que, d’ailleurs, à la suite du communiqué du 7 juillet 2003 sur l’offre publique d’achat d’X sur le titre Y, dont il a alors été précisé qu’elle a été fixée à un prix de 41 euros par action, soit une prime de 20,52 % par rapport au dernier cours coté, le volume échangé a représenté 10,9 millions de titres sur le marché (et 2,13 millions hors marché), le titre progressant de 23,46 % à la clôture pour atteindre un cours de 42 euros ; qu’il est indifférent que cette hausse ait été précédée les 3 et 4 juillet 2003 d’une autre, celle-ci s’étant alors limitée à 6,31 % (cote R. 001767) ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’existence d’une information privilégiée relative au dépôt imminent d’une offre publique d’achat de la société X sur les titres Y est caractérisée dans tous ses éléments à partir du 3 juin 2003 ;
3. Sur la communication, la détention et l’exploitation de l’information privilégiée
Considérant que, pour être retenue, la détention de l’information privilégiée doit être établie soit par une preuve objective et univoque soit, à défaut, par un faisceau d’indices concordants desquels il résulte que seule cette détention peut expliquer les opérations auxquelles le mis en cause a procédé ;
Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu :
- le recours à cette méthode du faisceau d’indices ne requiert pas la démonstration préalable de l’impossibilité d’obtenir une preuve tangible de la transmission ou de l’exploitation de l’information ;
- pour les personnes mentionnées à l’article 5 du Règlement COB n° 90-08, n’est pas indispensable à la caractérisation du manquement, l’identification de celui qui est à l’origine de l’information dès lors qu’il est avéré que cette dernière, d’une part, ne peut provenir que de l'une des personnes mentionnées aux articles 2, 3 et 4 du même Règlement, d’autre part, a été exploitée en connaissance de cause ;
3.1 Sur la communication de l’information par M. A et son exploitation par
MM. B, C et D
a) Sur les griefs notifiés à MM. B et A
Considérant qu’il est reproché à M. A d’avoir communiqué à son frère, M. B, l’information privilégiée précédemment définie ; que, selon la notification de griefs, en sa qualité de « senior assignment associate » et de professionnel des opérations de fusions et acquisitions au sein de la banque U de Londres, M. A avait été chargé de constituer les équipes opérationnelles affectées au projet d’offre publique d’achat de la société X sur les titres de la société Y ; qu’il est indiqué que la fonction de M. A impliquait qu’il suive et évalue très régulièrement les performances et les besoins des membres des équipes affectées au dossier Y-X, notamment en se tenant informé de son évolution ;

 Lesquelles, d’une part, il avait domicilié les courriers concernant ce compte chez M. C, très proche de M. A, d’autre part, il avait clôturé ce compte dans les deux mois ayant suivi les opérations incriminées ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les interventions de M. B sur le titre Y ne peuvent s’expliquer, compte tenu des circonstances dans lesquelles elles sont intervenues et de leur volume, que par sa détention de l’information privilégiée, celle-ci ne pouvant lui avoir été communiquée que par son frère, M. A ; qu’il est avéré que l’un et l’autre ont des liens étroits avec M. C, également mis en cause pour un achat commencé le lendemain du premier de ceux de M. B ; qu’au demeurant, l’existence de contacts entre les deux frères C et C’n’est pas contestée, M. A ayant indiqué en audition : « on se parle occasionnellement au téléphone. Ça peut aller d’une fois par semaine à deux ou trois fois par jour » ;
Considérant qu’ainsi, tous les éléments constitutifs des manquements reprochés à MM. B et A sont réunis ;
b) Sur les griefs notifiés à M. C et à M. D
Considérant qu’il est reproché à M. C d’avoir exploité l’information privilégiée précédemment définie en passant, à partir du 19 juin 2003, des ordres d’achat d’actions et de warrants Y pour le compte des sociétés W2, V2, R’’ et U2 dont il est l’un des principaux ayants droit économiques et d’avoir ainsi réalisé, pour son compte et pour celui de sa famille, une plus-value globale de « plus de 1,53 million d’euros » ;
que, selon la notification de griefs, ces achats ne pourraient s’expliquer que par la transmission de l’information privilégiée dont il aurait bénéficié de la part de M. A soit directement, soit par l’intermédiaire du frère de ce dernier, M. B ;
Considérant qu’il est reproché à M. D, gérant au sein de [...] en Suisse, d’avoir, en connaissance de cause, exploité la même information privilégiée en acquérant, pour le compte de trois de ses clients, 86 000 titres Y à partir du 23 juin 2003 ;
Considérant qu’il existe un faisceau d’indices concordants desquels il résulte que seule la détention de cette information peut expliquer les opérations auxquelles l’un et l’autre ont procédé ;
Considérant qu’en fait, l’investissement global effectué pour le compte de l’ensemble des sociétés offshore pour lesquelles M. C’est intervenu a dépassé quatre millions d’euros, même si, en droit, ne pourront être retenus que les 2 899 786 euros visés, par erreur, par la notification de griefs ; que ce montant de plus de quatre millions d’euros est considérable au regard de la composition des portefeuilles des sociétés à travers lesquelles il a investi : W2 INV SA (un « gros pourcentage » selon les propos de M. C lui-même),
V2 INVESTMENT INC (24,5 % du total des actifs), R’’ (44,97 %, du total des actifs) et U2 FINANCE INV (26 % du total des actifs) ;
Considérant que, de surcroît, M. C a débuté ses achats sur le titre Y le 19 juin 2003, soit le lendemain des interventions de M. B ; qu’à l’époque des faits, il connaissait M. A, détenteur de l’information privilégiée, et M. B, qui a lui-même exploité cette information ; que les liens étaient tels que M. B a fait domicilier chez M. C les relevés de comptes de la structure juridique par laquelle il opérait sur les marchés financiers (X2) ; que, dans le mois qui a suivi les faits, comme on l’a vu, M. A a quitté son employeur pour participer
à la création de RS qui fournit des conseils d’investissement à la société R’, dont les actionnaires sont MM. C et C’ ; que la société R’, qui a représenté au cours des premières années 100 % du chiffre d’affaires de la société RS, gère des fonds de fonds alternatifs dénommés [...] et enregistrés aux Iles Vierges Britanniques ; que, dès lors, les acquisitions effectuées par M. C sont à rapprocher de celles faites par M. B sur le fondement d’informations provenant de son frère ;
Considérant que M. C a en outre recommandé à M. D d’acheter des titres Y, ce que celui-ci a fait à partir du 23 juin 2003 ;
Considérant que M. D connaissait M. C depuis la fin des années 1990, lorsqu’il travaillait en tant que conseiller à la banque [...] à Monaco ; qu’il a indiqué lors de sa première audition que « les titres ont été achetés sur la base d’une recommandation qui m’a été faite par M. C. Plus précisément, il m’a proposé d’acquérir un titre sans en préciser le nom dans un premier temps, dans le but de réaliser une plus-value et de partager les bénéfices en découlant. M. C m’a appelé et il m’a dit : "que la société pourrait faire l’objet d’une opération". Pour moi il était clair que ça voulait dire une fusion ou une acquisition. Ce qui m’a intéressé c’est le fait qu’il demande une rétribution, cela donnait un poids à ses propos (...). Je n’ai pas eu de date mais de tête je me souviens que l’opération devait avoir lieu à plus ou moins brève échéance (...).
Ensuite, j’ai proposé cette opération à quelques clients sans préciser le nom de la société. Par contre, je leur ai indiqué l(e) partage de la plus-value en fonction de son montant de 25 à 50 % (...) Sur accord des clients, j’ai décidé d’acquérir les titres Y (....) J’ai eu un second contact avec M. C, il m’a à ce moment donné le nom du titre » ; que, dans un courrier adressé à la Commission fédérale des banques suisses, M.
D a précisé que des pourcentages sur les plus-values réalisées avaient été rétrocédés à M. C au moyen d’un virement en faveur de la société R’ et d’un versement complémentaire en liquide ; que M. D a intégralement confirmé ces éléments en séance, précisant avoir rémunéré M. C non seulement par le virement de 299 900 euros qui a été retrouvé, mais aussi par la remise en espèces de 100 000 francs suisses ;
Considérant que M. C a indiqué, dans un premier temps : « je peux avoir dit "regarde je suis en train de suivre le titre Y cela peut être intéressant" mais je ne me souviens pas avoir parlé avec M. D de Y et de plus je n’ai jamais demandé de rétribution à qui que ce soit » ; qu’il a soutenu que c’était au début de l’année 2003 qu’il avait pu lui donner un conseil sur le titre ; qu’il a ensuite, puis lors de la séance, reconnu que le virement dont il avait bénéficié était bien lié à l’avis donné sur Y ; qu’ainsi, il a indiqué que « les montants dont a été crédité le compte de R’ correspondent à une somme que M. D, de plein gré et sans [qu’il ne] l’exige, [lui] a versé (...) en contrepartie des services et conseils que celui[-ci] a pu lui donner » ;
qu’il a nié avoir reçu de l’argent en espèces ; que le virement de 299 900 euros a été fait le 11 juillet 2003, soit deux jours après la revente des derniers titres Y acquis par M. D pour le compte de ses trois clients ;
qu’il peut d’autant moins s’agir d’une coïncidence que ce dernier a confirmé que ce versement était la contrepartie des indications fournies par M. C ;
Considérant que, pour tenter de justifier son achat, M. C, s’il a admis ne pas suivre « particulièrement le marché français, mais le titre Y depuis plusieurs années. Je suivais les sociétés qui m’intéressaient. Je n’avais pas l’habitude d’investir dans les actions françaises », a indiqué: « j’avais des recherches qui précisaient bien qu’X allait acheter Y, l’auteur des recherches étant Y2 » ou « [j’utilisais des] recherches fondamentales, sectorielles (...) Système Bloomberg – Reuters, j’avais accès à tous les systèmes et à toutes les recherches ainsi qu’à internet » ; que ces explications sont peu convaincantes, d’autant que M. C a prétendu ne pas avoir une maîtrise suffisante du français en matière financière ; qu’il ajoute que ses interventions sur le titre seraient dues au fait que Y était un candidat isolé, contraint de se restructurer, idéal pour un rapprochement, compte tenu du signal donné en 1999-2000, les prétendants à une telle opération réitérant fréquemment leur démarche, et qu’il a commencé à revendre le 4 juillet, soit avant l’annonce de l’opération ;
Mais considérant que la plupart de ces données existaient de la même façon bien avant les interventions à l’achat de M. C en juin 2003 ; que l’argument selon lequel il aurait revendu ses titres à partir du 4 juillet 2003 manque en fait, puisqu’il ressort tant des pièces fournies par les autorités monégasques que de ses observations que M. C a cédé ses actions entre le 9 et le 14 juillet 2003 ;
Considérant que M. D a, quant à lui, admis que, s’il connaissait le titre Y, il ne s’agissait pas d’une valeur qu’il suivait ; que peu de temps après avoir reçu l’information de M. C, il a procédé à l’acquisition d’actions
Y pour le compte de ses clients, sans avoir préalablement procédé à une quelconque analyse de ce qui lui avait été dit : « J’ai dû faire faire une analyse graphique à notre analyste interne en même temps que je passais mon ordre. Je ne me souviens plus du résultat de cette analyse. Je n’ai pas fait de vérifications » ;
qu’il a confirmé ces déclarations lors de la séance ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède :
- que les achats auxquels a procédé M. C à partir du 19 juin 2003, qui ne seront retenus que pour le montant de 2 899 786 euros, ne peuvent s’expliquer que par l’exploitation de l’information privilégiée provenant directement ou indirectement de M. A, lui-même initié au sens du Règlement COB n° 90-08 ;
- que M. D a reçu de M. C la même information, dont il avait conscience, compte tenu des
circonstances ci-dessus rappelées, d’une part, qu’elle était privilégiée, peu important qu’aucune précision complémentaire ne lui ait été donnée et que la rémunération en contrepartie ait été conditionnelle, d’autre part, qu’elle provenait d'une des personnes mentionnées aux articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n°90-08 ;
Considérant qu’en exploitant en connaissance de cause l’information privilégiée, M. C et M. D ont commis le manquement visé à l’article 5 du même Règlement ;
3-2. Sur la détention et la communication de l’information par M. E et sa détention et son exploitation par MM. F, H, G et I
a) Sur les griefs notifiés à MM. E et F

 Considérant qu’il est reproché à M. E, consultant au sein de la société Z2, missionnée le 5 juin 2003 dans le cadre du projet de rapprochement entre les sociétés X et Y, s’étant trouvé lui-même « initié » dès le 17 juin 2003 sur le dépôt prochain d’une offre publique d’achat de la première sur les titres de la seconde société, d’avoir manqué aux dispositions des articles 1 à 4 du Règlement COB n° 90-08 en ayant communiqué l’information privilégiée à M. F soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire de son père, M. E’ ;
Considérant qu’il est reproché à M. F, gestionnaire chez W2, d’avoir exploité cette information privilégiée en acquérant, le 4 juillet 2003 pour le compte de divers fonds communs de placement, 150 000 itres représentant un engagement total de plus de 5,1 millions d’euros ;
Considérant, tout d’abord, que cet achat mérite d’être rapproché de celui de 4 380 titres Y effectué le même jour par M. Q, chargé au sein de la banque [...] de gérer les comptes du père de M. E, M. E’, ancien Président d’une société de gestion à la retraite, avec lequel M. F entretient des contacts professionnels depuis qu’ils s’étaient rencontrés en 1981, l’un et l’autre étant alors employés par la même banque ;
Considérant qu’il est établi et non contesté que M. E’ avait imposé à M. Q de contacter M. F pour toute décision d’investissement significative représentant environ 10 à 15 % de l’actif géré pour son compte ;
qu’il résulte de l’audition de M. Q que M. F a joué un rôle déterminant dans l’achat qu’il a effectué pour la famille E’’ ; que l’examen des listings téléphoniques montre que le 4 juillet 2003 à 11 heures 28, M. F a appelé le poste de M. Q ; que M. F a, en l’absence de M. Q, laissé le numéro de son téléphone portable en demandant que ce dernier le rappelle ; que M. Q a déclaré avoir rappelé, le même jour à 11 heures 40, M. F qui lui aurait alors « suggéré d’acheter des titres Y (...) c’est suite à la conversation avec Monsieur F que j’ai acheté les titres pour les comptes E’’ » ; que cette communication n’a pas été émise à partir du poste fixe de M. Q, de sorte qu’elle semble avoir été passée de portable à portable, ce qui excluait toute possibilité d’enregistrement ; que, tant durant l’enquête qu’en séance, M. F, s’il a reconnu avoir eu le 4 juillet 2003 des échanges par téléphone avec M. Q, a prétendu que celui-ci avait été le premier à le contacter pour lui demander conseil, ce qui paraît être démenti par les listings téléphoniques ; qu’en toute hypothèse, il n’est pas contesté que c’est à la suite d’une conversation avec M. F que M. Q a acquis les titres Y, les achats de l’un et de l’autre ayant été effectués le même jour ;
Considérant, ensuite, qu’il ressort de l’enregistrement d’une conversation téléphonique du 3 juillet 2003 à 14 heures 28 avec le spécialiste des valeurs d’actif, M. B2, contacté par M. F, que ce dernier recherchait fébrilement des études ou articles positifs sur la valorisation de la société Y ; que M. F a en effet demandé à son interlocuteur : « vous n’avez pas d’étude positive sur Y, vous ? (...) Non mais, si on n’a pas de dossier, on est bons pour être suspendus (...) il faut un dossier (...) Il parait qu’il y a un papier de Y2 (...)
Sans document on ne peut pas », tandis que M. B2 rétorquait à propos du document de Y2 : « essayez de le dégoter, s’il est relativement récent vous pouvez le faire, maintenant, si vous ne l’avez pas, ne le faites pas (...) on sait bien tous les deux avec tout ce qu’on est en train de mettre en place, on va pas s’amuser à (...) s’ajouter des histoires supplémentaires » (cotes D. 00904 à D. 00907) ; que le même jour à 17 heures 49, M. F a téléphoné à M. C2, son vendeur d’actions chez [...], société qui a fourni l’enregistrement ; que, d’emblée, M. F indiquait : « tenez-vous bien, il y a une note-là qui vient de tomber sur l’affaire dont je vous parlais (...) qui est envoyée par le bureau d’études de [...] (...) Je ne vois pas comment on peut avoir des emmerdes (...) depuis 2 heures 18 je suis couvert » ; que son interlocuteur, qui faisait en outre référence à la dépêche REUTERS dont il venait de prendre connaissance, rétorquait :
« ah ben à partir de là, Monsieur, vous êtes tranquille (...) là on a des écrits super super bétonnés (...) ça va être imprimé sur le champ, on est tranquilles avec ça » et lui conseillait de ne pas traiter hors marché, ce qu’on « pourrait trouver bizarre » (cotes D. 910 à D. 915) ; que l’ordre d’achat a donc été exécuté le lendemain matin ; qu’interrogé en séance sur ces échanges téléphoniques, M. F s’est borné à confirmer qu’il avait décidé d’acquérir des titres Y depuis un déjeuner organisé le 1er juillet 2003 au cours duquel l’intervenant se serait « longuement appesanti sur le secteur de l’aluminium et le titre Y » et à prétendre que ses conversations du 3 juillet 2003 avec MM. B2 et C2 s’expliquaient par son souci de recueillir le plus de renseignements possible avant de prendre sa décision d’achat ; qu’en réalité, il se déduit de ces échanges téléphoniques que M. F s’efforçait de trouver des justifications à l’investissement dans les titres
Y qu’il était déjà déterminé à faire ;
Considérant que les éléments qui précèdent constituent autant d’indices dont il résulte que M. F était, le 3 juillet 2003 au plus tard, en possession de l’information privilégiée qu’il a exploitée le lendemain en procédant à l’achat incriminé ; que cette acquisition massive et précipitée de 150 000 titres Y le 4 juillet 2003 ne peut en effet s’expliquer autrement, compte tenu des conversations téléphoniques qui l’ont précédée et de sa simultanéité avec l’intervention de M. Q pour le compte de M. E’ ;

Considérant qu’une communication directe de l’information à M. F de la part de M. E n’a toutefois pas été établie objectivement dès lors que, d’une part, aucune pièce du dossier ne permet de dire qu’ils se connaissaient, d’autre part, contrairement à ce qu’indiquait la notification de griefs, n’a pas été constatée l’existence d’un appel téléphonique émis le 3 juillet à 15h17 depuis le standard de la société W2 vers un télécopieur en libre-service de la société Z2 ; qu’en conséquence, le rôle qu’a pu jouer M. E dans la transmission de cette information n’est pas clairement démontré ; que celui-ci sera donc mis hors de cause au bénéfice du doute ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. F a pu recevoir l’information privilégiée dont il a fait usage en connaissance de cause, non seulement de M. E, qui la détenait depuis le 17 juin 2003, mais aussi par l’intermédiaire, notamment, du père de ce dernier, M. E’, ou de M. Q, qui ne sont mis en cause ni l’un ni l’autre ; que, du fait de sa nature et de l’importance que lui a attribuée M. F, cette information n’a en toute hypothèse pu provenir que d’une des personnes mentionnées aux articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n° 90-08 ; qu’en conséquence, le manquement reproché à M. F est caractérisé en tous ses éléments ;
b) Sur les griefs notifiés à M. G et M. H
Considérant qu’il est reproché à MM. G et H d’avoir exploité l’information privilégiée précitée en procédant, entre le 19 juin et le 1 er juillet 2003, à l’acquisition :
- M. G, du 27 juin au 1 er juillet 2003, de 25 000 actions représentant un engagement de 779 843 euros ;
- M. H, du 30 juin au 1 er juillet 2003, de 30 000 actions représentant un engagement de 952 419 euros, étant précisé qu’une erreur matérielle a conduit à inverser, dans la notification de griefs, les chiffres concernant ces titres, selon les comptes à partir desquels il est intervenu (10 000 titres indiqués, pour l’un, au lieu de 20 000, puis 20 000 indiqués, pour l’autre, au lieu de 10 000) ;
Considérant que les investigations faites en cours d’enquête auprès de l’autorité de régulation israélienne sur le fondement des dispositions de l’article L. 621-21 du Code monétaire et financier ont révélé que les achats d’actions Y faits :
- par M. G l’ont été par le biais du compte bancaire dénommé [...] dont il est titulaire, ouvert dans les livres de la V2 ;
- par M. H l’ont été par le biais de deux comptes bancaires, dénommés [...] et [...], ouverts dans les livres de la V2 et dont il est respectivement le titulaire et le co-titulaire avec sa mère ;
Considérant que ces investissements méritent d’être rapprochés de l’achat, du 19 au 30 juin 2003, par les sociétés V et W, de 202 000 CFD (« contract for difference ») Y représentant un engagement de 6,2 millions d’euros ;
Considérant, en effet, que M. G et M. H sont actionnaires de la société V, domiciliée dans les Iles vierges britanniques, au nom et pour le compte de laquelle ce dernier a signé (cotes R. 037, R. 127, R. 128 et R. 129) ; que cette société semble être la gestionnaire des investissements de W, dont M. H paraît être l’un des « directors » (cote R. 047) ;
Considérant qu’après avoir refusé de s’expliquer auprès des enquêteurs de la DESM sur les achats personnels de titres intervenus sur leurs comptes ouverts dans les livres de la V2, M. G et M. H ont, en séance, admis y avoir procédé et invoqué, à l’appui du silence gardé jusque là, des raisons fiscales ;
Considérant que, selon M. G, l’acquisition qui lui est reprochée correspondait à ses habitudes
d’investissement ; que M. H indique qu’il effectuait ses acquisitions par le biais de différents instruments afin « de ne pas désorganiser le marché par des investissements importants » et soutient avoir détenu d’autres positions au 30 juin 2003 ([...] pour environ 7,2 millions d’euros et [...] pour 1,6 million d’euros) ;
que les justifications produites montrent qu’effectivement, les méthodes de gestion de leur portefeuille par les deux mis en cause peuvent expliquer les achats incriminés, qui n’apparaissent pas atypiques au regard des autres investissements qu’ils ont effectués simultanément ; qu’il convient en outre de relever que la société V a revendu des titres Y dès le 3 juillet 2003, avant que l’information ne devienne publique ;
Considérant qu’il n’est dès lors pas établi de manière certaine que MM. G et H aient exploité une information privilégiée lorsqu’ils ont acquis des titres Y ; que, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de procédure soulevés, ils seront donc mis hors de cause ;
c) Sur le grief notifié à M. I

Considérant qu’il est reproché à M. I d’avoir exploité l’information privilégiée en acquérant, entre le 20 et le 30 juin 2003, 330 000 titres Y pour un montant s’élevant à 10 036 517 euros ; que, selon la notification de griefs, plusieurs éléments tenant aux montants investis et aux circonstances dans lesquelles le mis en cause serait intervenu, après y avoir été incité par M. D2, dirigeant de la U2 à Londres, permettraient de conclure que les achats incriminés ne pourraient s’expliquer que par la transmission de cette information privilégiée ;
Considérant que, toutefois, M. I dispose de plusieurs comptes ouverts dans les livres de la banque HAPOALIM (Suisse), de sorte que l’achat de titres Y ne constitue que 10 % de la valeur de marché brute de l’ensemble des avoirs de son groupe ; que surtout, le montant de l’acquisition n’est pas atypique au regard de ses habitudes d’investissement ;
Considérant qu’en outre, les pièces du dossier ne permettent pas d’établir que le dirigeant de la U2, qui n’est pas mis en cause mais qui a « persuadé » M. I d’acheter des actions Y, ait détenu une information privilégiée ;
Considérant que le manquement n’est donc pas caractérisé à l’égard de M. I, qui sera mis hors de cause, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de procédure soulevés par lui ;
3-3. Sur la détention et l’exploitation de l’information par MM. J, K, L, M, N et O
a) Sur le grief notifié à M. J
Considérant qu’il est reproché à M. J d’avoir exploité l’information privilégiée précitée en acquérant le 19 juin 2003 30 000 actions Y pour le compte de la société T2, dont il est l’ayant droit économique, pour des montants de l’ordre de 906 000 euros financés à 80 % par un découvert sur son compte en euros ;
qu’il est relevé que M. J, qui n’est jamais intervenu dans ces proportions sur une valeur admise aux négociations en France, a reconnu avoir rétribué M. E2 pour lui avoir conseillé d’investir en actions Y et connaissait M. K, lui-même acheteur, quelques jours plus tard, de 25 000 titres ;
Considérant que l’acquisition litigieuse était significative, puisqu’elle représentait 52,59 % du portefeuille de M. J, qui n’avait jamais acheté de titres Y ; que l’investissement a été de courte durée, les actions ayant été revendues dès le 7 juillet 2003 ;
Considérant que M. J a indiqué connaître « depuis très longtemps » M. K, l’un et l’autre étant membres du club « Circolo Cannotiere di Roma » ;
Considérant que le 10 juillet 2003, soit trois jours après la revente des titres, assortie d’une plus-value estimée à 302 354 euros, M. J a effectué, à partir du compte T2, un virement de 164 250 euros à destination du compte « [...] » dont M. E2 est le titulaire ; que, lors de sa première audition, M. J, auquel il était demandé s’il avait rétrocédé une partie de la plus-value, a indiqué : « à la suite du déroulement positif
de l’opération, j’ai fait comme d’habitude pour un bon conseil, un cadeau à mon consultant » ; qu’à la question « pouvez-vous préciser le nom du consultant et la nature du cadeau ? », il a répondu : « E2 en argent » ; que, dans ses écritures, il a ensuite prétendu que cette somme correspondait à une gratification pour les vérifications effectuées par M. E2 durant de nombreuses années ; qu’entendu en séance, celui-ci,
après avoir confirmé cette dernière version, a admis n’avoir pas établi de facture correspondant à la rémunération de l’ensemble de ses prestations ; que, confronté au fait qu’il avait reçu d’autres sommes d’argent du mis en cause, de sorte que le virement litigieux ne paraissait pas pouvoir correspondre à des conseils donnés depuis plusieurs années, il a indiqué, comme l’a fait en séance M. J, que les 164 250 euros lui avaient finalement été versés pour l’aider car il traversait une période difficile ; que ni l’un ni l’autre n’a cependant pu expliquer la raison du montant très précis de cette avance ;
Considérant qu’il se déduit de ces explications successives, confuses et contradictoires que, comme l’avait spontanément déclaré M. J dans un premier temps, M. E2 a bien bénéficié d’une rétrocession de 55 % de la plus-value de 302 354 euros dégagée à la suite des informations qu’il a fournies à M. J ;
Considérant que, d’une part, les circonstances de l’acquisition atypique opérée par M. J, qu’il convient de rapprocher de celle de M. K, d’autre part, la rétrocession accordée à M. E2 constituent autant d’indices concordants d’où il résulte que l’opération ne peut s’expliquer que par la détention en connaissance de cause de l’information privilégiée, nécessairement reçue de l'une des personnes mentionnées aux articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n° 90-08 ; que tous les éléments constitutifs du manquement reproché à M. J sont donc réunis ;
b) Sur le grief notifié à M. K
Considérant qu’il est reproché à M. K d’avoir exploité l’information privilégiée en achetant pour son compte, le 26 juin 2003, 25 000 titres Y au prix de 29,732 euros par titre, soit un investissement de 743 300 euros représentant plus de 70 % de son portefeuille ;
Considérant qu’il existe un faisceau d’indices concordants desquels il résulte que seule la détention de l’information privilégiée précitée peut expliquer les opérations auxquelles M. K a procédé ;
Considérant, en effet, que, M. K n’a jamais investi une somme aussi importante, ce qu’il a d’ailleurs implicitement reconnu en déclarant que sa plus-value dans l’opération Y « n’est pas une plus-value normale (...) sur des investissements mobiliers, je n’ai jamais réalisé de pareilles plus-values» ; qu’il a ajouté, d’une part, « par le passé, j’ai réalisé des investissements, dont je ne me souviens plus du montant, mais dans tous les cas très occasionnellement, je dirais moins d’une fois par an. [...] j’ai réalisé ces dernières années quelques opérations d’investissements en actions [...] Je procède à ces choix en me basant sur ce que je lis, en discutant, n’importe où, lors de repas ou autres, avec des amis », d’autre
part, « je n’ai pas l’habitude d’investir en actions, ni en actions étrangères. J’ai investi dans le titre Y après en avoir entendu parler à l’étranger » ;
Considérant que M. K, qui se présente comme un investisseur occasionnel prenant des « risques importants », ne savait pas à quel secteur appartenait la société X, ne suivait pas les titres français et ne s’intéressait pas à l’action Y ; qu’il a prétendu, lors de son audition, avoir décidé d’investir dans ce titre pour la seule raison qu’au cours du mois de juin 2003, il s’était rendu à une « fête » qu’il a finalement située à Monaco ; qu’il aurait alors discuté avec deux personnes françaises et une parlant italien – qu’il ne connaîtrait pas et dont il ne se rappellerait pas le nom – qui lui « ont dit d’acheter » des actions Y, que « c’était une affaire gigantesque » et que ces actions « devaient monter en peu de temps » ;
Considérant que le lieu de cette rencontre correspond à la ville de Monaco où est domicilié M. J, ami de longue date de M. K ; que, selon ses observations écrites, M. K aurait, à la suite de l’entretien avec ces trois personnes, pris contact avec le Directeur, à Rome, de la banque S2, au sein de laquelle il était alors titulaire de deux comptes, ce dernier lui ayant « rapidement confirmé l’intérêt qu’il y avait d’acheter des actions Y » ; que cet élément est nouveau, M. K n’ayant, lors de son audition, évoqué que le conseil, selon lui déterminant, que lui auraient donné les personnes rencontrées à Monaco ; que si M. K avait alors donné le nom du Directeur de S2 à Rome, ce n’était pas, comme il l’a prétendu dans ses observations
ultérieures, pour avoir recueilli son avis sur le titre Y, mais bien pour l’avoir chargé d’exécuter les ordres d’achat litigieux ;
Considérant qu’il se déduit du caractère atypique de cet achat massif effectué sur une valeur inconnue que le « conseil » d’investissement que M. K reconnaît avoir reçu ne peut avoir été formulé que sur le fondement d’une information privilégiée émanant de l'une des personnes mentionnées aux articles 2, 3 et 4 du Règlement COB n° 90-08 ; qu’il en avait bien conscience, puisqu’il a prétendu être dans l’impossibilité de donner le nom ou même de reconnaître celui ou ceux l’ayant renseigné ;
Considérant que par sa date, ses circonstances et son volume, son acquisition de 25 000 titres est comparable à celle de 30 000 actions effectuée quelques jours auparavant par M. J sur le fondement de
ce que lui avait dit M. E2, de sorte qu’elles ne sont pas nécessairement sans rapport l’une avec l’autre ;
qu’en toute hypothèse, le manquement est caractérisé en tous ses éléments, la circonstance que le titre Y ait poursuivi sa hausse après le 7 juillet 2003, date à laquelle M. K a vendu ses titres, étant inopérante ;
c) Sur le grief notifié à M. L
Considérant qu’il est reproché à M. L d’avoir exploité l’information privilégiée en achetant, du 20 au 26 juin 2003, peu après le 16 juin 2003, date à laquelle la possibilité du dépôt de l’offre a été définitivement confortée par la société X, pour le compte de la société « R2 », dont il est le principal bénéficiaire économique, 73 000 actions Y par l’intermédiaire de la banque [...] à Monaco et 26 700 actions en son nom propre par l’intermédiaire de la banque [...] à Lugano pour un montant total « de l’ordre de 3 millions d’euros », ;
Considérant que si, le 16 juin 2003, un « briefing paper » a été adressé par le cabinet d’avocats X3 à la Commission européenne, tandis qu’un entretien téléphonique avec un membre de la Commission est intervenu le même jour, l’enquête n’a pas démontré l’existence de liens rattachant M. L au cabinet X3, à la Commission européenne ou à la société X ;
Considérant que le montant de 2 224 610 euros investi par la société R2, représentant 19,44 % du portefeuille, n’est pas atypique, l’étude des relevés de compte de cette société dont M. L est le seul bénéficiaire économique montrant que durant la période 2000-2003, celui-ci a effectué de très nombreuses opérations et réalisé des investissements pour des montants identiques, voire supérieurs à ceux qui lui sont reprochés ;
Considérant que, si les achats de titres Y par M. L constituaient un premier investissement en France, le mis en cause a expliqué, tant lors de son audition par le Rapporteur que dans ses observations, comment et pourquoi son choix s’était porté sur cette valeur (suivi des valeurs via BLOOMBERG et FINECO, accès aux écrans par l’intermédiaire de CITCO, signaux sur volumes, analyses graphiques) ; que ces éléments sont corroborés par les autorités monégasques qui le décrivent comme « un professionnel de l’analyse technique, [travaillant] sur l’étude de la corrélation entre l’augmentation anormale des volumes et l’augmentation ou la diminution des prix » ; que le compte de la société R2 est décrit par les autorités monégasques, comme « un compte en gestion conseillée et transmission d’ordres avec un profil "action" agressif » ;
Considérant que les éléments venant à l’appui de la notification de griefs ne sont pas tels qu’en l’état du dossier, ils permettent de conclure que l’achat de titres Y ne pourrait s’expliquer que par la détention par M. L d’une information privilégiée ; que, dans le doute, le grief sera écarté ;
d) Sur le grief notifié à M. M
Considérant qu’il est reproché à M. M d’avoir exploité l’information privilégiée en acquérant, peu après le 16 juin 2003, date à laquelle la possibilité du dépôt de l’offre a été définitivement confortée par la société X :
- du 20 au 27 juin 2003, 220 500 titres Y,
- du 26 juin au 1 er juillet 2003, 325 000 calls warrants Y 30 ;
Considérant que, selon la notification de griefs, la situation d’initié serait établie, notamment, par la date des achats, le caractère contradictoire des explications avancées par M. M, le fait que celui-ci ne détenait pas de valeurs Y avant de réaliser les opérations litigieuses, les montants considérables (6 835 760 euros)
qu’il a investis par l’intermédiaire de différents comptes situés à l’étranger et le fait, d’une part, qu’il avait engagé les comptes [...] et [...] dans les mêmes proportions que ses comptes personnels, contrairement à ses habitudes, d’autre part, qu’il a refusé de révéler sa qualité d’ayant droit économique du fonds [...],
pour le compte duquel l’établissement Y3 (Bahamas) est intervenu ;
Considérant que si, le 16 juin 2003, un « briefing paper » a été adressé par le cabinet d’avocats X3 à la Commission européenne, tandis qu’un entretien téléphonique avec un membre de la Commission est intervenu le même jour, l’enquête n’a pas démontré l’existence de liens rattachant M. M au cabinet X3, à la Commission européenne ou à la société X ;
Considérant que M. M a fait valoir, d’un côté qu’il était « plutôt spécialisé sur des actions du marché américain », de l’autre, qu’ « acheter des actions du marché français entre dans les opérations normales qu’[il] effectue pour [son] propre compte et pour celui de [ses] clients, ainsi que des actions d’autres pays » ; qu’il a indiqué, en ce qui concerne le titre Y, à la fois qu’il suivait « le prix en bourse et l’évolution du secteur depuis 2002 », qu’ « à partir de 2002, [il] ne suivai[t] pas précisément Y, mais (...) suivai[t] tous ces secteurs qui représentaient des investissements values », qu’il s’intéressait au titre Y « dans le cadre de l’observation des principaux titres français » et qu’il s’était « basé » sur les deux rapports de Y2 des 5 et 19 juin 2003, complétés par une analyse technique ; qu’il a admis être le gérant de la fondation [...]
qui correspond à ses investissements personnels réalisés sur le compte de la Y3 ; qu’en séance, il a fourni de nombreuses précisions sur les éléments l’ayant conduit à prendre sa décision d’investissement ;
Considérant que, s’il ne possédait pas d’actions Y avant de réaliser les opérations litigieuses, celles-ci ne peuvent pour autant être considérées comme atypiques ; que les comptes « [...] » et « [...] », dont M. M est un « gérant externe », ont été engagés respectivement à hauteur de 51,5 % et 100 % ; qu’aucun élément dans le dossier ne permet cependant de contredire les déclarations de M. M sur les habitudes de gestion de ses comptes, qui auraient correspondu aux modalités de son investissement dans les titres Y ;

 Considérant qu’au vu de ces constatations, les éléments venant à l’appui de la notification de griefs ne sont pas tels qu’en l’état du dossier ils permettent de conclure de manière certaine que seule la détention par M. M de l’information privilégiée pourrait expliquer l’achat des titres Y ; que, dans le doute, et sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de procédure soulevés par M. M, le grief sera écarté ;
e) Sur le grief notifié à M. N
Considérant qu’il est reproché à M. N d’avoir exploité l’information privilégiée en acquérant, le 2 juillet 2003, 70 000 titres Y revendus le 7 juillet 2003 avec une plus-value de 604 000 euros ; que selon la notification de griefs, la situation d’initié serait établie notamment par les déclarations de M. N selon lesquelles :
- habituellement, il n’investit pas dans les actions françaises, ayant une préférence pour les valeurs « italiennes, américaines, anglaises. [...] mais en général sur le NASDAQ » et, lorsqu’il « commence à connaître certains titres, (il) essaie de faire l’investissement pour une période à moyen terme », ce qui n’a pas été le cas en l’espèce,
- « ...j’ai peut-être investi, je ne me souviens pas, peut être environ 3 millions d’euros chez Y, pour le compte de MELIORBANCA où j’avais euh, 23-24 millions d’euros, et j’ai fait ça parce que comme toujours euh, vous entendez une voix et vous observez le marché » ;
Que ces déclarations seraient en contradiction avec le fait que M. N a dû solliciter de sa banque une autorisation spécifique pour acheter les titres Y, qui représentaient son principal investissement en valeurs mobilières ;
Considérant toutefois qu’il résulte des pièces du dossier que M. N réalise des opérations d’achat et de vente de titres de sociétés admises aux négociations sur des marchés réglementés, y compris étrangers et qu’à l’époque des faits, il n’intervenait pas seulement à moyen terme ;
Considérant que l’investissement de 2 204 020 euros correspondant à l’achat incriminé n’est pas atypique, les ordres habituellement donnés par M. N étant limités en nombre mais, en valeur, élevés, voire supérieurs à ceux réalisés sur le titre Y ; qu’il est en outre inexact que M. N ait eu recours à une ligne de crédit pour réaliser son investissement, le solde de son compte étant d’environ 4 500 000 euros ;
Considérant, en définitive, qu’aucun élément du dossier ne permet d’affirmer que les achats litigieux ne pourraient s’expliquer que par la détention par M. N d’une information privilégiée ; que le grief ne peut donc qu’être écarté, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de procédure soulevés par M. N ;
f) Sur le grief notifié à M. O
Considérant qu’il est reproché à M. O d’avoir exploité l’information privilégiée précédemment définie en acquérant, à partir du 26 juin 2003 et pour un montant total de 3,4 millions d’euros, 108 500 titres Y qu’il a revendus le 7 juillet 2003 avec une plus-value de 982 000 euros ;
Considérant que si les montants investis en titres Y sont importants, ils ne sont pas pour autant atypiques au regard des habitudes d’investissement de M. O ; que la banque ([...]) par laquelle il est intervenu a d’ailleurs précisé que « l’opération en question a constitué pour lui un investissement normal au regard de la taille de son portefeuille » et qu’il figurait « au nombre des investisseurs tout à fait avertis, qu’il est un fin connaisseur du marché et qu’il dispose en outre des ressources personnelles nécessaires pour lui permettre de procéder aux diverses opérations » ;
Considérant que les modalités de financement des opérations ainsi réalisées sur le titre Y ne sont pas atypiques de la part de ce professionnel de la finance, qui a eu fréquemment recours à l’emprunt ;
qu’enfin, M. O a expliqué les raisons qui l’ont poussé à investir dans le titre Y et a fourni tous les éléments nécessaires à la manifestation de la vérité ;
Considérant, en définitive, qu’aucun élément du dossier ne permet d’affirmer que les achats litigieux ne pourraient s’expliquer que par la détention par M. O d’une information privilégiée ; que le grief ne peut donc qu’être écarté, sans qu’il soit besoin d’examiner les moyens de procédure soulevés par l’intéressé ;
C. SUR LES SANCTIONS

Considérant que l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier dans sa version en vigueur à l’époque des faits dispose que « à l’encontre des auteurs des pratiques mentionnées à l’article L. 621-14, la
Commission des opérations de bourse peut, après une procédure contradictoire, prononcer les sanctions suivantes : 1. Une sanction pécuniaire qui ne peut excéder 1 500 000 euros ; 2. Ou, lorsque des profits ont été réalisés, une sanction pécuniaire qui ne peut excéder le décuple de leur montant. Le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits tirés de ces manquements » ; que l’article L. 621-14 du Code monétaire et financier dispose pour sa part, dans sa version en vigueur à l’époque des faits, que « la Commission des opérations de bourse peut ordonner qu'il soit mis fin aux pratiques contraires à ses règlements, lorsque ces pratiques ont pour effet de : 1. Fausser le fonctionnement du marché ; 2. Procurer aux intéressés un avantage injustifié qu'ils n'auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché ; 3. Porter atteinte à l'égalité d'information et de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ; 4. Faire bénéficier les émetteurs et les investisseurs des agissements d'intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles » ;
Considérant que ces effets sont induits par la communication et l’exploitation d’une information privilégiée qui, par nature, rompent le principe d’égalité devant l’information et perturbent le bon fonctionnement des marchés, en proportion de l’ampleur des investissements réalisés sur le marché du titre concerné ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier pris dans sa version applicable au moment des faits, le montant de la sanction pécuniaire encourue par les auteurs des pratiques visées à l’article L. 621-14 du Code monétaire et financier précité est au maximum de 1 500 000 euros ou du décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; que ces dispositions ne permettent de prendre en compte que les profits qui ont été personnellement appréhendés, à un titre ou un autre, par la personne sanctionnée; que l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier ajoute que « (...) le montant de la sanction pécuniaire doit être fonction de la gravité des manquements commis et en
relation avec les avantages ou les profits tirés de ces manquements » ;
Considérant qu’en l’espèce, il sera tenu compte de la situation patrimoniale et des ressources de chacun des mis en cause, ainsi que de la gravité du manquement et de l’importance des avantages qu’il en a retirés ;
Considérant que M. A fait valoir qu’il n’a tiré aucun avantage de l’opération ; que
M. B soutient qu’il n’a personnellement pas réalisé de profit, direct ou indirect, lors de la revente des actions Y au mois de juillet 2003, l’intégralité des fonds ayant été restituée à ses beaux-parents ;
Considérant que M. A était, par sa profession, sensibilisé aux règles relatives aux marchés financiers et à l’obligation pour les professionnels de la finance de s’abstenir de communiquer ce type d’informations ; que, compte tenu de la gravité du manquement qu’il a commis, sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 100 000 euros ;
Considérant que M. B, qui a été désigné comme le bénéficiaire économique de la société pour le compte de laquelle il est intervenu, se présente comme ayant « une connaissance pointue de la finance » ; qu’il connaît donc également les règles relatives aux marchés financiers et spécialement aux initiés ; que la société X2. a réalisé une plus-value globale de 1 253 000 euros ; qu’il importe peu que le mis en cause,
qui dispose de ressources importantes, ait ou non décidé de rétrocéder cette somme à ses
beaux-parents ; que sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 1 500 000 euros ;
Considérant que M. C, qui se présente aussi comme un professionnel des marchés, est averti des règles relatives aux initiés ; que l’investissement en actions et warrants Y a été de 4 288 982 euros – qu’il convient de ramener, pour en apprécier le quantum, à 2 899 786 euros – permettant de réaliser, via les sociétés offshore agissant pour son compte et celui de sa famille ([...], [...], R’’ et [...]), une plus-value de 1 536 277 euros, qui sera évaluée, pour tenir compte de l’erreur commise dans la notification de griefs, à un peu plus d’un million d’euros ; que sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 1 300 000 euros ;
Considérant que M. D, professionnel des marchés sensibilisé aux règles relatives aux marchés financiers, a acheté pour le compte de trois de ses clients des titres Y ayant permis pour eux la réalisation d’une plus- value de 860 000 euros ; que, pour tenir compte de l’absence de profits personnels, sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 100 000 euros ;

Considérant que M. F, professionnel des marchés également sensibilisé aux règles relatives aux initiés, qui dispose de ressources importantes, n’a pas retiré de profits personnels de l’opération ; que sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 200 000 euros ;
Considérant que M. J, qui dispose d’un patrimoine important, a réalisé une plus-value de 302 534 euros ;
que sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 400 000 euros ;
Considérant que M. K, après avoir rappelé l’exigence du respect du principe de proportionnalité ainsi que du principe de légalité, soutient que son investissement a représenté une fraction minime du capital de la société, qu’il est un investisseur occasionnel et qu’il a investi en 2006 dans la société italienne [...] qui a été mise en liquidation judiciaire, si bien qu’il a perdu la totalité de son investissement ; que cette dernière circonstance est sans incidence sur la gravité du manquement commis par M. K qui a, au moins dans un
premier temps, réalisé une plus-value de 254 200 euros ; que sera prononcée à son encontre une sanction pécuniaire de 350 000 euros ;
D. S UR LA P UBLICATION DE LA DECIS ION
Considérant que l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier, dans sa dernière rédaction applicable en l’espèce, précise que « La Commission des sanctions peut rendre publique sa décision (...) à moins que cette publication ne risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause » ; que le législateur a entendu, d’une part, mettre en lumière les exigences d’intérêt général relatives à la loyauté du marché, à la transparence des opérations et à la protection des épargnants qui fondent le pouvoir de sanction de la Commission, et prendre en compte l’intérêt qui s’attache, pour la sécurité juridique de l’ensemble des opérateurs, à ce que ceux-ci puissent,
en ayant accès aux décisions rendues, mieux appréhender le contenu des règles qu’ils doivent observer, d’autre part, éviter qu’une telle mesure n’entraîne pour les mis en cause des conséquences par trop dommageables ; qu’en l’espèce, il y a lieu de prononcer la publication mais, pour préserver leur insertion sociale et professionnelle, sous une forme préservant l’anonymat des personnes mises hors de cause et des tiers ;
PAR CES MOTIFS,
Et après en avoir délibéré sous la présidence de Mme Claude NOCQUET, par
MM. Jean-Claude HASSAN, Antoine COURTEAULT et Jean-Jacques SURZUR, Membres de la 2ème section de la Commission des sanctions, en présence de la secrétaire de séance,
DECIDE DE :
- mettre hors de cause MM. E, G, H, I, L, M, N et O ;
- prononcer, à l’encontre de :
. M. A, une sanction pécuniaire de 100 000 € (cent mille euros) ;
. M. B, une sanction pécuniaire de 1 500 000 € (un million cinq cent mille euros) ;
. M. C, une sanction pécuniaire de 1 300 000 € (un million trois cent mille euros) ;
. M. D, une sanction pécuniaire de 100 000 € (cent mille euros) ;
. M. F, une sanction pécuniaire de 200 000 € (deux cent mille euros) ;
. M. J, une sanction pécuniaire de 400 000 € (quatre cent mille euros) ;
. M. K, une sanction pécuniaire de 350 000 € (trois cent cinquante mille euros) ;
- ordonner la disjonction de la procédure suivie contre les sociétés W et V ;
- publier la présente décision, sous une forme préservant l’anonymat des personnes mises hors decause et des tiers, au « Bulletin des annonces légales obligatoires », ainsi que sur le site Internetet dans la revue de l’Autorité des marchés financiers.