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Décisions

Cass. com., 2 octobre 2019, n° 17-28.462

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Orsini

Avocats :

SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Ohl et Vexliard

Paris, du 28 sept. 2017

28 septembre 2017

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 9 avril 2015, 9 février 2017 et 28 septembre 2017), que les titres de la société Geodis étaient admis aux négociations sur le compartiment B du marché réglementé d'Euronext Paris ; que le 6 avril 2008, la société SNCF Participations, alors principal actionnaire de la société Geodis, a annoncé, par un communiqué de presse, le lancement d'une offre publique d'achat (OPA) amicale sur la totalité des actions de la société ; que le service de la surveillance des marchés de l'Autorité des marchés financiers (l'AMF) ayant constaté, avant cette annonce publique, une nette augmentation des volumes échangés sur le titre Geodis ainsi que de son cours, le secrétaire général de l'AMF a décidé d'ouvrir, le 28 avril 2008, une enquête sur le marché de ce titre à partir du 1er septembre 2007 ; qu'à la suite de cette enquête, le collège de l'AMF a notifié des griefs à M. R... et M. A..., son cousin, reprochant au premier, "managing director" au sein de la banque UBS, chargée par la société SNCF Participations de présenter l'OPA sur la société Geodis, d'avoir communiqué à M. A... une information privilégiée relative à cette opération, détenue dès le 19 mars 2008, et au second d'avoir utilisé, entre le 20 mars et le 4 avril 2008, cette information privilégiée pour acquérir, pour son compte personnel, des titres et des « contracts for difference » (CFD), instruments financiers à terme dotés d'un effet de levier, sur le titre Geodis, pour un montant total de 8 000 224 euros ; que par décision du 12 avril 2013, la Commission des sanctions de l'AMF a sursis à statuer sur les griefs notifiés à MM. A... et R... jusqu'à ce qu'il soit procédé à un supplément d'information concernant l'existence des ordres que M. A... prétendait avoir passés entre les 28 février et 18 mars 2008 ; que par décision du 18 octobre 2013, elle a retenu que les manquements reprochés étaient caractérisés et prononcé à l'encontre de M. A... une sanction pécuniaire de 14 millions d'euros et à l'encontre de M. R..., une sanction pécuniaire de 400 000 euros ; que M. A... ayant formé un recours contre ces décisions, la cour d'appel de Paris a, par un arrêt du 9 avril 2015, sursis à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir du Conseil d'Etat sur le recours formé devant lui par M. R... contre les mêmes décisions ; que par un arrêt du 6 avril 2016, le Conseil d'Etat a rejeté la requête de M. R... et porté la sanction financière à 600 000 euros ; que par un arrêt du 9 février 2017, rectifié le 23 mars 2017, la cour d'appel de Paris a dit que l'instance suspendue par son précédent arrêt du 9 avril 2015 avait valablement été rétablie au rôle ; que par un arrêt du 28 septembre 2017, elle a rejeté le recours formé par M. A... ;

Sur la recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 9 avril 2015, contestée par la défense :

Vu l'article 380-1 du code de procédure civile ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que le recours en cassation n'est ouvert contre les décisions de sursis à statuer rendues en dernier ressort que pour violation de la règle de droit gouvernant le sursis à statuer ; qu'il n'est dérogé à cette règle, comme à toute règle interdisant un recours, qu'en cas d'excès de pouvoir ;

Attendu que l'arrêt du 9 avril 2015 ordonne le sursis à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, et que M. A... n'invoque, au soutien du pourvoi formé contre cet arrêt, aucune violation de la règle gouvernant le sursis à statuer ni n'allègue l'existence d'un excès de pouvoir ;

D'où il suit que le pourvoi, en ce qu'il est formé contre cet arrêt,
n'est pas recevable ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. A... fait grief à l'arrêt du 28 septembre 2017 de rejeter son recours alors, selon le moyen :

1°/ que la coopération et les échanges d'informations entre l'AMF et l'étranger, notamment pour les besoins des contrôles et des enquêtes, sont exclusivement régis par les dispositions impératives du chapitre II du titre III du livre VI du code monétaire et financier ; qu'en ce qui a trait aux échanges d'informations avec les autorités émanant d'Etats non-membres de l'Union européenne et non-parties à l'Accord sur l'Espace économique européen, les seules dispositions pertinentes sont celles des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier ; qu'en retenant néanmoins que la collecte d'informations et de pièces par l'AMF auprès d'autorités de tels Etats pouvait valablement avoir lieu « hors [du] champ d'application » des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier, la cour d'appel a violé ces deux textes ;

2°/ que tant l'article L. 632-7 que l'article L. 632-16 du code monétaire et financier imposent la conclusion par écrit d'un accord préalablement à tout échange d'informations entre l'AMF et des autorités d'Etats non-membres de l'Union européenne et non-parties à l'Accord sur l'Espace économique européen ; qu'en particulier, l'exigence de réciprocité figurant au second de ces textes, loin d'emporter dispense de la conclusion préalable d'un accord écrit, ne peut être respectée qu'en l'état d'un tel accord ; qu'en retenant au contraire que les dispositions des textes susvisés ne faisaient pas obstacle à ce que l'Autorité des marchés financiers « sollicite » et « obtienne » d'une autorité étrangère, sans conclusion préalable d'un accord de coopération, des informations pour les besoins d'une enquête dont elle avait la responsabilité, la cour d'appel a violé lesdits textes ;

3°/ que la disposition de l'article L. 621-10 du code monétaire et financier autorisant les enquêteurs de l'AMF à « se faire communiquer tous documents », n'a pas pour objet et ne saurait avoir pour effet de permettre à celle-ci de collecter des informations auprès d'autorités d'Etats non-membres de l'Union européenne et non-parties à l'Accord sur l'Espace économique européen sans conclusion préalable d'un accord écrit de coopération ; qu'en retenant au contraire que la disposition précitée autoriserait l'AMF à demander des informations et pièces à une autorité d'un tel Etat, même en l'absence d'accord de coopération préalable, la cour d'appel a violé l'article L. 621-10 du code monétaire et financier ;

4°/ que le recours contre une décision de la Commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers n'est pas un appel, mais un recours de pleine juridiction contre une décision administrative individuelle, d'où il suit que l'office de la cour d'appel de Paris, en cette matière, ne l'autorise pas à procéder à une substitution de motifs qui n'aurait pas été demandée par ladite autorité publique indépendante ; que pour justifier la prétendue régularité de la procédure d'enquête en ce qui avait trait aux informations collectées au Liban, la décision rendue le 12 avril 2013 par l'AMF, frappée de recours, retenait exclusivement que l'article L. 632-16 du code monétaire et financier autoriserait une coopération entre les autorités françaises et libanaises, nonobstant l'absence d'accord écrit préexistant ; qu'il en allait de même des observations produites par l'AMF devant la cour d'appel dans l'instance ouverte sur le recours contre cette décision ; qu'en substituant d'office à un tel motif, des motifs distincts pris de ce que, d'une part, la collecte d'informations et de pièces par l'AMF auprès d'autorités libanaises pourrait valablement avoir lieu hors du champ d'application des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier, d'autre part, l'article L. 621-10 du même code autoriserait l'AMF à demander des informations et pièces à des autorités libanaises, même en l'absence d'accord de coopération préalable, cependant qu'une telle substitution de motifs n'avait pas été suggérée par l'autorité publique indépendante, la cour d'appel a méconnu son office et violé les articles L. 621-30 et R. 621-46 du code monétaire et financier ;

5°/ qu'en relevant d'office, et sans recueillir à tout le moins les observations de la personne mise en cause, le moyen pris de ce que, d'une part, la collecte d'informations et de pièces par l'AMF auprès d'autorités libanaises pourrait valablement avoir lieu hors du champ d'application des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier, d'autre part, l'article L. 621-10 du même code autoriserait l'AMF à demander des informations et pièces à des autorités libanaises, même en l'absence d'accord de coopération préalable, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;

6°/ que ce faisant, la cour d'appel a aussi méconnu le droit à un procès équitable et violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, en premier lieu, que, contrairement à ce que postule le moyen, en ses première et deuxième branches, les dispositions des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier ne régissent pas les modalités de recueil d'informations reçues de l'étranger mais seulement celles de la transmission d'informations à l'étranger et ne font pas obstacle à ce que l'AMF utilise, pour les besoins d'une enquête dont elle a la responsabilité, des informations obtenues d'autorités étrangères en dehors de tout accord de coopération préalable ;

Attendu, en deuxième lieu, que la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'inviter les parties à formuler leurs observations dès lors qu'elle se bornait à vérifier l'absence ou la réunion des conditions d'application des articles L. 632-7 et L. 632-16 du code monétaire et financier, n'a pas substitué d'office un motif relatif à ces dispositions et n'a violé ni le principe de la contradiction ni l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Et attendu, en dernier lieu, que les griefs des troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, qui critiquent des motifs surabondants en ce qu'ils sont relatifs à l'article L. 621-10 du code monétaire et financier, sont inopérants ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches :

Attendu que M. A... fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que l'office du rapporteur désigné par le président de la Commission des sanctions de l'AMF est non seulement de procéder à des investigations en vue de réunir des preuves, mais aussi de prendre parti dans son rapport sur la réalité des manquements susceptibles d'être retenus ; que l'instruction doit avoir lieu à charge et à décharge et ne peut donc valablement être le fait d'un rapporteur qui ne serait pas exempt de tout soupçon de partialité, par exemple pour avoir déjà opiné dans l'affaire concernée ; qu'il suit de là que, dans le cas où, après dépôt d'un rapport comportant l'expression d'une opinion sur la culpabilité de la personne mise en cause, la Commission des sanctions estime utile de faire procéder à des investigations complémentaires, celles-ci ne peuvent être valablement confiées au rapporteur auteur de ce premier rapport ; qu'en retenant au contraire que la Commission des sanctions avait pu régulièrement confier au rapporteur initial une instruction complémentaire, la cour d'appel a méconnu le principe d'impartialité et violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

2°/ qu'aux termes de la décision rendue le 12 avril 2013 par la Commission des sanctions de l'AMF, la mission d'instruction complémentaire confiée au même rapporteur avait pour objet de mettre celle-ci « en mesure de porter, en toute connaissance de cause, une appréciation sur l'existence et, le cas échéant, sur la date [des] ordres » que M. A..., pour contester l'existence d'un manquement d'initié, disait avoir passés antérieurement à la date de la prétendue information privilégiée ; que M. A... faisait valoir que, dans son rapport antérieur du 29 janvier 2013, le rapporteur de la Commission des sanctions de l'AMF avait écrit que les extraits du registre des ordres de la société de courtage AIDI, produits pour démontrer l'existence de ces ordres, étaient « sujets à caution », qu'il convenait de « les écarter des débats » et qu'ils n'étaient « produits par le mise en cause qu'à raison d'une thèse qui sembl[ait] avoir été construite à rebours pour les besoins de la cause » ; qu'en l'état d'une telle contestation, il incombait à la cour d'appel d'examiner si l'opinion déjà émise par le rapporteur, dans un sens défavorable à la personne mise en cause, relativement à la sincérité des extraits du registre des ordres produits par cette dernière et même à son honnêteté procédurale, n'excluait pas que l'on pût confier valablement au même rapporteur une mesure d'instruction complémentaire destinée à éclairer la Commission des sanctions sur l'existence des ordres concernés ; qu'en se fondant, pour en déduire que le principe d'impartialité n'aurait pas été méconnu, sur le caractère exclusivement factuel des recherches complémentaires confiées au même rapporteur, cependant que la question à trancher était celle, distincte, de la possibilité ou non de confier une instruction sur l'existence des ordres passés par le mis en cause à un rapporteur ayant déjà retenu la prétendue fausseté des pièces les constatant et l'improbité procédurale du mis en cause à cet égard, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que l'impartialité n'est respectée qu'en l'absence de tout doute légitime de la personne mise en cause sur la neutralité du rapporteur tenu d'instruire l'affaire à charge et à décharge ; que, dès lors que le rapporteur a déjà opiné, un tel doute légitime existe nécessairement, quand bien même le rapporteur n'aurait pas excédé les limites de sa mission ; qu'en se fondant néanmoins, pour exclure tout manquement à l'exigence d'impartialité, sur le respect par le rapporteur du cadre et des limites de sa mission, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que la circonstance que la Commission des sanctions de l'AMF désigne, pour effectuer un complément d'instruction, le rapporteur qui, conformément à sa mission, s'est déjà prononcé, dans son rapport initial, sur les éléments de preuve apportés par la personne mise en cause et a porté une appréciation, en l'état de l'instruction, sur les faits reprochés et sur la valeur des arguments en défense, n'est pas par elle-même contraire au principe d'impartialité ; qu'ayant relevé que, par décision du 12 avril 2013, la Commission des sanctions de l'AMF a demandé au rapporteur de procéder à un supplément d'information concernant l'existence des ordres que M. A... prétendait avoir passés entre les 28 février et 18 mars 2008 sur les actions et CFD Geodis et a, en conséquence, sursis à statuer sur les griefs notifiés à MM. A... et R..., l'arrêt retient que, faisant application de l'article R. 621-40 du code monétaire et financier, elle a défini précisément la mission du rapporteur, limitée à la recherche d'éléments exclusivement factuels et objectifs, et que le rapporteur en a strictement respecté le cadre et les limites ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, c'est sans méconnaître le principe d'impartialité que la cour d'appel a retenu que la Commission des sanctions avait valablement confié au rapporteur initial une instruction complémentaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. A... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours alors, selon le moyen :

1°/ que le recours contre une décision de la Commission des sanctions de l'AMF est un recours de pleine juridiction par l'effet duquel la cour d'appel de Paris peut soit confirmer la décision de la Commission des sanctions, soit l'annuler ou la réformer en tout ou partie ; qu'il suit de là que l'office de la cour d'appel de Paris, en cette matière, lui impose de procéder elle-même à un réexamen effectif et concret des faits de la cause, en vue de porter une appréciation sur la culpabilité du mis en cause, et lui interdit de tenir pour acquis les faits retenus par la décision frappée de recours ; qu'en s'estimant néanmoins liée par l'« élément déterminant » retenu au plan factuel par la Commission des sanctions à l'encontre de M. A..., élément tenant à la détention et la prétendue transmission à ce dernier d'une information privilégiée par M. R..., et en en déduisant la nécessité de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du Conseil d'Etat sur le recours parallèle exercé par M. R... à raison des mêmes faits, la cour d'appel, qui s'est abstenue de porter elle-même une appréciation concrète et effective sur les faits dont elle était saisie et à l'égard desquels elle ne pouvait valablement se contenter de démarquer l'analyse de la Commission des sanctions, a méconnu son office, en violation des articles L. 621-30 et R. 621-46 du code monétaire et financier ;

2°/ que l'office de la cour d'appel de Paris, saisie du recours contre une décision de la Commission des sanctions de l'AMF, lui interdit de s'en remettre, sur les faits dont elle a à connaître, à l'appréciation d'une autre juridiction, fût-elle le Conseil d'Etat saisi du recours d'une autre personne mise en cause dans la même affaire à propos des mêmes faits ; qu'en estimant qu'il ne lui appartenait pas de se prononcer elle-même sur la détention et la prétendue transmission à M. A... de l'information privilégiée par M. R... et qu'il lui fallait au contraire attendre sur ce point de connaître la position du Conseil d'Etat, saisi du recours parallèle de M. R..., la cour d'appel, qui a abdiqué son pouvoir d'appréciation des faits, a de plus fort méconnu son office, en violation des textes susvisés ;

3°/ que le principe de l'égalité des armes, qui est l'un des éléments de la notion plus large de procès équitable, requiert que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions ne la plaçant pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que la cour d'appel, sursoyant à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du Conseil d'Etat concernant la prétendue transmission à M. A... de l'information privilégiée par M. R..., a manifesté l'intention de prendre en considération ladite décision sur le point concerné ; que le Conseil d'Etat - au terme d'une instance dans laquelle M. A..., dénué de la qualité de partie et n'ayant pu former qu'une intervention volontaire accessoire au soutien de la requête de M. R..., n'avait pu défendre ses propres intérêts - a statué défavorablement à l'égard de M. R... et retenu, en particulier, la prétendue transmission par ce dernier de l'information privilégiée à M. A... ; que cette décision du Conseil d'Etat a donc constitué, dès la reprise de l'instance devant la cour d'appel de Paris, un élément à charge, plaçant M. A... dans une situation de net désavantage par rapport à l'AMF ; que l'arrêt attaqué du 28 septembre 2017 a dès lors été rendu en méconnaissance du principe de l'égalité des armes et de l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en raison de l'irrecevabilité du pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 9 avril 2015, le moyen, pris en ses première et deuxième branches, est sans portée ;

Et attendu, en second lieu, qu'après avoir relevé que le Conseil d'Etat, s'il a admis l'intervention de M. A..., n'a statué qu'à l'égard de M. R..., en rejetant sa requête et en aggravant les sanctions prononcées à son encontre, et retenu que l'AMF ne saurait opposer à M. A... l'autorité de la chose jugée par cette décision, l'arrêt énonce exactement qu'il relève de l'office de la cour d'appel, conformément aux règles de répartition des compétences juridictionnelles prévues par le code monétaire et financier, d'apprécier le bien-fondé de l'intégralité des moyens de fait et de droit soulevés par M. A... à l'appui du recours qu'il a formé le 26 décembre 2013 contre les décisions de la Commission des sanctions de l'AMF ; qu'il en résulte que le seul fait que la cour d'appel ait pris en considération la décision du Conseil d'Etat, parmi tous les éléments du débat apportés par les parties, n'a pas porté atteinte au principe de l'égalité des armes ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le cinquième moyen :

Attendu que M. A... fait grief à l'arrêt du 28 septembre 2017 de rejeter son recours alors, selon le moyen, que si la sanction pécuniaire infligée par l'AMF peut et doit être dissuasive, elle ne peut en revanche valablement revêtir un caractère confiscatoire, à peine d'enfreindre le principe de proportionnalité ; qu'en relevant, pour justifier la sanction de quatorze millions d'euros infligée à M. A..., que celui-ci détenait « un patrimoine de plusieurs dizaines de millions d'euros, qu'il ne prétend[ait] ni ne démontr[ait] avoir perdu », la cour d'appel s'est fondée sur une considération impropre, en raison de son imprécision, à exclure le caractère confiscatoire de la sanction rapportée au patrimoine de l'intéressé ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 621-15 du code monétaire et financier ;

Mais attendu qu'après avoir constaté que le manquement d'initié commis par M. A... lui a permis de réaliser, en moins d'une dizaine de jours, un bénéfice de 6 248 593 euros, l'arrêt relève que, bien que M. A... n'ait pas donné d'informations complètes durant l'enquête ou l'instruction sur le montant de son patrimoine, il ressort néanmoins de ses comptes bancaires, ainsi que de l'historique des opérations boursières effectuées à titre personnel quasi quotidiennement, qu'il détenait un patrimoine de plusieurs dizaines de millions d'euros, qu'il ne prétend ni ne démontre avoir perdu ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit que la sanction pécuniaire prononcée à l'encontre de M. A... n'était pas excessive au regard de sa capacité financière, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié la proportionnalité de la sanction, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et cinquième branches, ni sur le quatrième moyen, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt du 9 avril 2015 ;

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est formé contre les arrêts du 9 février 2017 et du 28 septembre 2017.