CE, 1re sous-sect. réunie, 3 février 2016, n° 369198
CONSEIL D'ÉTAT
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Rapporteur :
M. Ribes
Rapporteur public :
M. de Lesquen
Avocats :
SCP Vincent, Ohl, SCP Foussard, Froger
Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 10 juin et 3 septembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le président de l'Autorité des marchés financiers (AMF) demande au Conseil d'État :
1°) de réformer la décision du 9 avril 2013 par laquelle la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a, d'une part, mis hors de cause la société Exane et, d'autre part, prononcé un avertissement à l'encontre de M. B...A..., en prononçant à l'encontre de ce dernier, un blâme et une sanction pécuniaire de 100 000 euros et en prononçant à l'encontre de la société Exane un avertissement et une sanction pécuniaire de 300 000 euros ;
2°) d'ordonner la publication de la décision à intervenir sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code monétaire et financier ;
- le règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Vincent, Ohl, avocat du président de l'Autorité des marchés financiers (AMF) et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Exane et autre ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige : " I.-Le collège examine le rapport d'enquête ou de contrôle établi par les services de l'Autorité des marchés financiers, ou la demande formulée par le président de l'Autorité de contrôle prudentiel. / S'il décide l'ouverture d'une procédure de sanction, il notifie les griefs aux personnes concernées. Il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions, qui désigne un rapporteur parmi ses membres. La commission des sanctions ne peut être saisie de faits remontant à plus de trois ans s'il n'a été fait pendant ce délai aucun acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction (...) / II.-La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l'encontre des personnes suivantes : / a) Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 15° du II de l'article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l'Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l'article L. 612-39 ; (...) " ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, sur le fondement de ces dispositions, l'Autorité des marchés financiers a notifié, le 2 décembre 2011, à la société Exane et à M.A..., salarié de cette société, des griefs tirés notamment de la méconnaissance des dispositions des articles 315-16, 315-73 et 313-2 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers et des dispositions du code de déontologie d'Exane imposant d'informer le responsable de la conformité de la détention d'une information privilégiée et des articles 313-1 et 315-16 du règlement de l'Autorité des marchés financiers, relatifs à l'obligation d'établir et de maintenir opérationnelles des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles, de mettre en place une fonction de conformité efficace et indépendante destinée à contrôler et évaluer ces procédures ainsi que de prévenir, remédier et sanctionner toute violation de ces obligations professionnelles ; que la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a prononcé, le 9 avril 2013, à l'encontre de M. A...un avertissement et a mis hors de cause la société Exane ; qu'elle a également décidé que sa décision serait publiée sur le site internet de l'Autorité des marchés financiers ; que le président de l'Autorité des marchés financiers demande au Conseil d'État de réformer cette décision en prononçant à l'encontre de M. A...un blâme et une sanction pécuniaire de 100 000 euros et, à l'encontre de la société Exane, un avertissement et une sanction pécuniaire de 300 000 euros ; que, par un recours incident, M. A...demande l'annulation de cette décision, en tant que l'Autorité des marchés financiers a prononcé à son encontre un avertissement ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. A...:
3. Considérant, d'une part, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 621-30 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Les décisions prononcées par la commission des sanctions peuvent faire l'objet d'un recours par les personnes sanctionnées et par le président de l'Autorité des marchés financiers, après accord du collège. En cas de recours d'une personne sanctionnée, le président de l'autorité peut, dans les mêmes conditions, former un recours. " ; que l'article R. 621-45 du même code précise : " Le Conseil d'État peut, sur le recours principal ou incident du président de l'Autorité des marchés financiers, soit confirmer la décision de la commission des sanctions, soit l'annuler ou la réformer en tout ou en partie, dans un sens favorable ou défavorable à la personne mise en cause. " ; que, d'autre part, aux termes du II de l'article R. 621-40 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au litige : " Lors de la séance, le rapporteur présente son rapport. Le directeur général du Trésor ou son représentant peut présenter des observations. Le membre du collège mentionné au troisième alinéa du I de l'article L. 621-15 ou son représentant désigné en application de cette disposition peut présenter des observations au soutien des griefs notifiés et proposer une sanction. La personne mise en cause et, le cas échéant, son conseil présente la défense de celle-ci. (...) " ; que la faculté ouverte à un membre du collège ayant pris part à la phase d'instruction préalable à l'instance disciplinaire de présenter des observations et de proposer une sanction doit être regardée comme celle d'émettre un avis, qui ne lie la commission des sanctions ni quant au principe même du prononcé d'une sanction, ni quant au quantum de celle-ci ; qu'il résulte de ces dispositions que le président de l'Autorité des marchés financiers peut présenter devant le Conseil d'Etat, sur le fondement des dispositions des articles L. 621-30 et R. 621-45 du code monétaire et financier, des conclusions tendant la réformation de la décision de la commission des sanctions afin de prononcer une sanction plus sévère, sans que le Président de l'Autorité des marchés financiers soit lié à ce titre par la sanction qui avait, le cas échéant, été proposée à la commission des sanctions par le membre du collège de l'Autorité des marchés financiers dans le cadre des dispositions du II de l'article R. 621-40 du code monétaire et financier ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'un membre du collège de l'AMF a présenté devant la commission des sanctions, le 6 décembre 2012, des observations au soutien des griefs notifiés et proposé, en application du II de l'article R. 621-40 cité au point 3, qu'un blâme soit infligé à M. A...; que le président de l'Autorité des marchés financiers, après accord du collège, demande notamment au Conseil d'État de réformer la décision attaquée de la commission des sanctions, en ce qui concerne M.A..., d'une part, en substituant un blâme à l'avertissement prononcé à son encontre, d'autre part, en lui infligeant une sanction pécuniaire de 100 000 euros ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent que de telles conclusions sont recevables ; que, dès lors, la fin de non-recevoir opposée par M. A...à la requête du président de l'Autorité des marchés financiers doit être écartée ;
Sur la régularité de la décision :
5. Considérant, en premier lieu, que si, lorsqu'elle est saisie d'agissements pouvant donner lieu aux sanctions prévues par le code monétaire et financier, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers doit être regardée comme décidant du bien-fondé d'accusations en matière pénale au sens des stipulations de l'article 6 § 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le principe des droits de la défense, rappelé tant par l'article 6 § 1 de cette convention et précisé par son article 6 § 3 que par l'article L. 621-15 du code monétaire et financier, s'applique seulement à la procédure de sanction ouverte par la notification de griefs par le collège de l'Autorité des marchés financiers et par la saisine de la commission des sanctions, et non à la phase préalable des enquêtes et contrôles réalisés par les agents de l'Autorité des marchés financiers ; que, les enquêtes réalisées par les agents de l'Autorité des marchés financiers, ou par toute personne habilitée par elle, doivent se dérouler dans des conditions garantissant qu'il ne soit pas porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense des personnes auxquelles des griefs sont ensuite notifiés ;
6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le rapport d'enquête fait mention de déclarations faites par un ancien salarié d'Exane, dans le cadre d'une autre procédure, distincte de la procédure ayant conduit à la décision litigieuse ; que le procès-verbal comportant ces déclarations a été annexé au rapport d'enquête communiqué à M.A..., sur lequel il a pu présenter toutes observations ; qu'ainsi, M. A...n'est pas fondé à soutenir que l'enquête se serait déroulée dans des conditions de nature à porter une atteinte irrémédiable aux droits de la défense ; qu'au demeurant, d'une part, si ces déclarations étaient relatives aux pratiques professionnelles de M.A..., elles ne fondaient pas les conclusions du rapport d'enquête, ni d'ailleurs la notification des griefs et, d'autre part, la commission des sanctions a précisé dans la décision attaquée que ces déclarations ne devaient pas être prises en compte dans le cadre de la procédure ouverte à l'encontre de M. A...;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier citées au point 1 que la commission des sanctions ne peut infliger une sanction que sur le fondement de griefs ayant été préalablement notifiés ;
8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la lettre de notification des griefs adressée à M. A...lui notifiait notamment un grief tiré d'une méconnaissance des dispositions de l'article 315-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, aux termes desquelles " les entités concernées informent le responsable de la conformité dès qu'elles estiment détenir des informations privilégiées ", précisait qu'il appartenait à M. A...en application de ces dispositions d'informer le service de la conformité d'Exane dès qu'il avait eu connaissance de l'information privilégiée relative au projet d'augmentation de capital de Lafarge, et relevait qu'il avait méconnu ses obligations en tant que préposé d'Exane en n'informant pas le service de la conformité à cette date ; que si la notification de griefs ajoutait, par erreur, que M. A...n'avait pas informé ultérieurement le service de la conformité, cette circonstance est sans incidence sur la caractérisation du grief notifié ; qu'en retenant à l'encontre de M. A...un manquement aux obligations prévues par l'article 315-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers pour avoir avisé le service de la conformité d'Exane le 9 février 2009 de l'information privilégiée qu'il détenait depuis le 3 février, la commission des sanctions n'a pas, contrairement à ce qui est soutenu, retenu un manquement qui ne figurait pas dans la notification des griefs, ni entaché sa décision d'insuffisance de motivation ;
9. Considérant, en dernier lieu, que la circonstance que le président de l'Autorité des marchés financiers aurait méconnu l'obligation de secret professionnel s'imposant à lui en application de l'article L. 621-4 du code monétaire et financier en informant, postérieurement à la notification des griefs, la société BNP Paribas, en sa qualité de personne sollicitée au cours de l'enquête, des griefs notifiés à M. A...et à la société Exane, est en tout état de cause sans incidence sur la régularité de la procédure de sanction, dès lors qu'il n'est aucunement établi que la communication d'une telle information aurait porté atteinte à l'exercice, par M.A..., des droits de la défense ; que, par suite, la commission des sanctions a pu à bon droit estimer que cette communication n'avait pas vicié la procédure ;
Sur le bien-fondé de la décision :
En ce qui concerne les manquements :
Quant à l'existence d'une information privilégiée :
10. Considérant qu'aux termes de l'article 621-1 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : " Une information privilégiée est une information précise qui n'a pas été rendue publique, qui concerne, directement ou indirectement, un ou plusieurs émetteurs d'instruments financiers, ou un ou plusieurs instruments financiers, et qui si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers qui leur sont liés. / Une information est réputée précise si elle fait mention d'un ensemble de circonstances ou d'un événement qui s'est produit ou qui est susceptible de se produire et s'il est possible d'en tirer une conclusion quant à l'effet possible de ces circonstances ou de cet événement sur le cours des instruments financiers concernés ou des instruments financiers qui leur sont liés. / Une information, qui si elle était rendue publique, serait susceptible d'avoir une influence sensible sur le cours des instruments financiers concernés ou le cours d'instruments financiers dérivés qui leur sont liés est une information qu'un investisseur raisonnable serait susceptible d'utiliser comme l'un des fondements de ses décisions d'investissement. " ;
11. Considérant que M. A...soutient que le projet d'augmentation de capital de la société Lafarge devait être considéré comme public, ne présentait pas de probabilité suffisante de réalisation et que les informations relatives à ce projet étaient sans effet identifiable sur les cours des instruments financiers concernés, et en déduit que les informations qui étaient à sa disposition ne sauraient, en raison de leur manque de précision, être regardées comme des informations privilégiées au sens des dispositions précitées ;
12. Considérant, tout d'abord, que si M. A...soutient que les analystes pouvaient déduire des besoins de financement de la société Lafarge que cette société pourrait procéder à une augmentation de capital au cours du mois de février 2009, une telle circonstance n'était, en tout état de cause, pas de nature à priver de son caractère non public l'information relative aux caractéristiques précises du projet de refinancement élaboré pour la société Lafarge ; que, par suite, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a pu à bon droit estimer que, la société Lafarge n'ayant, antérieurement au 20 février 2009, délivré au public aucune information sur une telle augmentation de capital, le caractère prévisible, pour certains analystes financiers, de la réalisation d'une opération de cette nature au cours de la même période n'ôtait pas à l'information communiquée son caractère non public au sens de l'article 621-1 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ;
13. Considérant, également, qu'il résulte de l'instruction qu'en décembre 2008, la société Lafarge avait décidé, en raison de la dégradation de la situation économique et du risque de non-respect de ses obligations bancaires, de l'adoption de mesures permettant de renforcer sa structure financière ; que le projet d'augmentation de capital répondait à cette finalité ; que la circonstance que des solutions alternatives, au demeurant dotées d'une très faible probabilité compte tenu de leurs caractéristiques, notamment de leur coût, n'avaient pas encore été écartées, n'était pas de nature à retirer au projet d'augmentation de capital son caractère suffisamment défini pour avoir des chances raisonnables d'aboutir ; qu'eu égard aux circonstances rappelées, et alors même que la taille de l'opération n'était pas entièrement définie et qu'elle devait s'inscrire dans un projet global de renforcement de la structure financière de la société, il était possible, comme l'a relevé la commission des sanctions, de tirer une conclusion quant à l'effet possible d'une augmentation de capital décidée par la société Lafarge sur l'appréciation de la qualité de crédit de cette société et sur le cours des instruments financiers qui dépendent de cette appréciation ; qu'ainsi, la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers a pu à bon droit estimer que l'information relative au projet d'augmentation de capital était suffisamment précise ;
14. Considérant, enfin, que les instruments financiers dénommés " credit default swap " (CDS) destinés à couvrir le risque de crédit d'une entreprise, impliquent le versement d'une prime, dénommée " spread ", au moment de la vente ou à intervalles réguliers ; que les " CDS " sont au nombre des instruments financiers liés au sens des dispositions précitées de l'article 621-1 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ; qu'il résulte de l'instruction qu'une augmentation de capital de la société Lafarge, ayant pour effet d'accroître sa solvabilité, était de nature, comme l'a relevé la commission des sanctions, à répondre aux interrogations des marchés financiers sur le niveau d'endettement de la société et à avoir une influence sur l'évolution des primes attachées aux " CDS " ; que, par suite, les informations relatives au projet d'augmentation de capital de la société Lafarge étaient susceptibles d'être utilisées par un investisseur raisonnable comme l'un des fondements de ses décisions d'investissement au sens de l'article 621-1 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers ; qu'ainsi, la commission des sanctions a pu estimer à bon droit que les informations communiquées étaient susceptibles d'avoir une influence sensible sur les instruments de dette de la société Lafarge ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit aux points 12 à 14 que la commission des sanctions a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en estimant que les informations en cause avaient le caractère d'informations privilégiées ;
Quant à la caractérisation des manquements imputés à M. A...:
16. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, comme l'a relevé la commission des sanctions dans la décision attaquée, que la société Lafarge avait décidé en décembre 2008 de l'adoption de mesures nécessaires au renforcement de sa structure financière ; que, le 21 janvier 2009, M. A...était informé de la programmation d'une prochaine réunion entre la société BNP Paribas et la société Lafarge portant sur une éventuelle augmentation de capital ; que le 27 janvier 2009, M. A...consultait, à la demande de BNP Paribas, des analystes financiers sur la perception par les investisseurs, notamment les quinze principaux actionnaires de la société Lafarge, d'une éventuelle augmentation du capital de cette société ; que le 3 février 2009, M. A...participait à une réunion, organisée par la société BNP Paribas, au cours de laquelle il était informé de ce que, selon la présentation faite la veille par BNP Paribas à la société Lafarge, les solutions alternatives envisagées étaient dotées d'une très faible probabilité compte tenu de leurs caractéristiques, notamment de leur coût ; que la commission des sanctions a pu à bon droit, estimer, au vu de l'ensemble de ces faits, qu'à la date du 3 février 2009, M. A...avait connaissance de l'information privilégiée relative au projet d'augmentation de capital de la société Lafarge ;
17. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient M.A..., la commission des sanctions n'a pas relevé qu'il n'avait " à aucun moment " informé le service de la conformité de l'information privilégiée qu'il détenait et n'a, par suite, pas entaché sa décision, qui est suffisamment motivée, d'erreur de fait sur ce point ;
Quant à la caractérisation du manquement non imputé à la société Exane :
18. Considérant qu'aux termes de l'article 315-1 du règlement général de l'AMF : " Le prestataire de services d'investissement établit et maintient opérationnelles des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier ainsi que les risques en découlant et à minimiser ces risques. / Pour l'application de l'alinéa précédent, le prestataire de services d'investissement tient compte de la nature, de l'importance, de la complexité et de la diversité des services d'investissement qu'il fournit et des activités qu'il exerce. " ; qu'aux termes de l'article 315-16 du même règlement : " Afin d'assurer le respect de l'obligation d'abstention prévue aux articles 622-1 et 622-2, le prestataire de services d'investissement établit et garde opérationnelle une procédure appropriée organisant la surveillance des émetteurs et des instruments financiers sur lesquels il dispose d'une information privilégiée. Cette surveillance porte sur : / 1° Les transactions sur instruments financiers effectuées par le prestataire de services d'investissement pour son compte propre ; / 2° Les transactions personnelles, définies à l'article 313-9, réalisées par ou pour le compte des personnes concernées mentionnées au premier alinéa de l'article 313-10 ; / 3° Les recommandations d'investissement à caractère général, au sens de l'article 313-25, diffusées par le prestataire de services d'investissement. / À cette fin, le responsable de la conformité établit une liste de surveillance recensant les émetteurs et les instruments financiers sur lesquels le prestataire de services d'investissement dispose d'une information privilégiée. / Les entités concernées informent le responsable de la conformité dès qu'elles estiment détenir des informations privilégiées. / Dans ce cas, l'émetteur ou les instruments financiers concernés sont inscrits, sous le contrôle du responsable de la conformité, sur la liste de surveillance. / La liste de surveillance comporte le motif de l'inscription d'un émetteur ou d'un instrument financier sur la liste de surveillance et les noms des personnes ayant accès à l'information privilégiée. (...) " ;
19. Considérant qu'il résulte de l'article 315-16 du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, d'une part, l'obligation pour le prestataire d'investissement d'établir une procédure appropriée organisant la surveillance des émetteurs et des instruments financiers sur lesquels il dispose d'une information privilégiée et, d'autre part, l'obligation de maintenir opérationnelle la procédure appropriée qu'il a mise en place ; que le non-respect par les professionnels concernés de leur obligation d'informer le responsable de la conformité dès qu'ils estiment détenir une information privilégiée ou le défaut d'inscription des émetteurs et instruments financiers concernés sur la liste de surveillance établie par le responsable de la conformité caractérisent un manquement à l'obligation de maintenir opérationnelle la procédure appropriée de tenue d'une liste de surveillance ;
20. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le grief notifié à la société Exane était d'avoir établi, en méconnaissance des dispositions des articles 313-1 et 315-16 du règlement général de l'AMF, une procédure n'ayant pas permis d'effectuer l'inscription requise de la société Lafarge sur la liste de surveillance dès que l'information privilégiée concernant cette société était détenue par M. A...; que ce grief était fondé sur le constat de la détention par M. A...de l'information privilégiée dès le 3 février 2009 alors que l'inscription de Lafarge sur la liste de surveillance d'Exane n'était intervenue que le 9 février 2009 ; qu'il résulte de l'instruction, ainsi que l'a relevé la commission des sanctions, que la société Exane a établi une procédure conforme aux dispositions de l'article L. 315-16 et que la société Lafarge a pu être inscrite sur la liste de surveillance dès que M. A...a communiqué au responsable de la conformité l'information dont il était détenteur ; que, par suite, et contrairement à ce qui est soutenu par le président de l'Autorité des marchés financiers, la commission des sanctions a pu, sans erreur de qualification juridique, écarter le grief tiré du défaut d'établissement d'une procédure appropriée et mettre hors de cause la société Exane ; qu'ainsi, le président de l'Autorité des marchés financiers n'est pas fondé à demander qu'une sanction soit infligée pour ce motif à la société Exane ;
En ce qui concerne la sanction prononcée :
21. Considérant qu'en infligeant à M. A...un avertissement, la commission des sanctions n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, infligé une sanction disproportionnée au regard de la gravité et de la nature du manquement reproché ; que, contrairement à ce que soutient le président de l'AMF, la sanction infligée à M. A...n'est pas insuffisamment proportionnée au regard de l'exigence de répression des manquements commis par les prestataires d'investissement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles ;
22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le président de l'Autorité des marchés financiers et M. A...ne sont pas fondés à demander l'annulation, ni la réformation de la décision de la commission des sanctions ; que, par voie de conséquence, les conclusions du président de l'Autorité des marchés financiers tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. A...et par la société Exane au titre des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du président de l'Autorité des marchés financiers et les conclusions du recours incident de M. A...sont rejetées.
Article 2 Les conclusions présentées par M. A...et par la société Exane au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au président de l'Autorité des marchés financiers, à M. B...A..., à la société Exane et à l'Autorité des marchés financiers.