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Décisions

AMF, 6 août 2013, n° SAN-2013-21

AUTORITÉ DES MARCHÉS FINANCIERS

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Membres :

Mme Tric, M. Field, Mme Drummond, M. Jalenques de Labeau

Président :

M. Hassan

AMF n° SAN-2013-21

5 août 2013

La 2e section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») ;

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 533-12, L. 612-27, L. 621-9, L. 621-9-2, L. 621-14, L. 621-15, R. 621-5 à R. 621-7, R. 621-31, R. 621-32 et R. 621-38 à R. 621-40 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 143-5, 144-2-1, 313-25, 313-28 et 314-10 à 314-12 ;

Vu le mandat du secrétaire général de l’AMF au secrétaire général de la Commission bancaire du 1er décembre 2009 ;

Vu la notification de griefs adressée le 26 avril 2012 à la société X, prise en la personne de son président, M. [...] ;

Vu la décision de la présidente de la Commission des sanctions du 25 mai 2012 désignant M. Pierre Lasserre, membre de la Commission des sanctions, en qualité de rapporteur ;

Vu la lettre du 31 mai 2012 informant la société X de la nomination de M. Pierre Lasserre en qualité de rapporteur et lui rappelant la faculté d’être entendue, à sa demande, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier ;

Vu la lettre du 4 juin 2012 adressée à la société X, l’informant de ce qu’elle disposait d’un délai d’un mois, pour demander la récusation du rapporteur ;

Vu les observations écrites de Maître Anne Maréchal, du cabinet DLA Piper, reçues à l’AMF le 25 juin 2012, présentées pour le compte de la société X en réponse à la notification de griefs ;

Vu le procès-verbal d’audition de la société X du 19 avril 2013 ;

Vu le rapport de M. Pierre Lasserre en date du 26 avril 2013 ;

Vu la lettre de convocation à la séance de la Commission des sanctions du 6 juin 2013, adressée le 26 avril 2013 à la société X, à laquelle était joint le rapport du rapporteur ;

Vu les observations écrites formulées pour la société X en réponse au rapport du rapporteur, reçues à l’AMF le 7 mai 2013 ;

Vu la lettre du 10 mai 2013 informant la société X de la composition de la Commission des sanctions pour la séance et du délai de quinze jours dont elle disposait pour demander la récusation d’un ou de plusieurs des membres de cette Commission ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance du 6 juin 2013 :

- M. Pierre Lasserre en son rapport ;

- M. Hubert Gasztowtt, représentant le directeur général du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- M. Pierre Walckenaer, représentant le Collège de l’AMF ;

- La société X, représentée par son président M. [...], assisté de Mme [...], responsable de la conformité ;

- Maître Anne Maréchal, conseil de la société X ;

La personne mise en cause ayant eu la parole en dernier.

FAITS ET PROCÉDURE

La société X (ci-après « société X ») est une société par actions simplifiée, filiale à 100 % de la banque d’investissement Y, ayant pour activité de proposer aux intermédiaires financiers et aux particuliers l’accès à une plate-forme électronique de trading développée et gérée par Y sur le marché des changes et, depuis le mois de septembre 2008, sur le marché des contrats financiers avec paiement d’un différentiel dénommés contracts for difference (ci-après « CFD »). Son activité sur les CFD a régulièrement progressé pour atteindre, fin 2009, 33% de ses résultats globaux – contre 63% pour son activité sur le marché des changes.

Les CFD sont des contrats financiers négociés de gré à gré entrant dans la catégorie des instruments financiers à terme dotés d’un effet de levier, ayant pour objet le règlement de la différence entre le prix du sous-jacent à la date de conclusion du contrat et son prix à la date d’exercice. L’investisseur ne débourse qu’une partie de la valeur du sous-jacent, dont il ne devient pas propriétaire, mais il est exposé à son évolution. L’achat et la vente de CFD sont réalisés face à des prestataires de services d’investissement spécialisés.

Ce type de contrat financier entre dans la catégorie des instruments financiers complexes définie par le règlement général de l’AMF dans la mesure où il peut entraîner pour le client une perte d’un montant supérieur aux sommes investies en raison de l’effet de levier qui multiplie aussi bien les gains que les pertes selon l’évolution du marché.

A l’époque des faits, la société X était dirigée par M. [...].

Le 1er décembre 2009, le secrétaire général de l’AMF a donné mandat au secrétaire général de la Commission bancaire, devenue l’Autorité de contrôle prudentiel (ci-après : « ACP »), en application des articles L. 621-9-2, R. 621-31 et R. 621-32 du code monétaire et financier, de procéder, pour le compte de l’AMF, « au contrôle du respect de ses obligations professionnelles par le prestataire de service d’investissements société X (France) ».

Le rapport de contrôle sur place a été établi le 2 août 2011 et communiqué le 30 août 2011 à la société X, qui a produit des observations en réponse le 28 octobre 2011.

La commission spécialisée n° 1 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, s’est réunie le 12 avril 2012 et a décidé de notifier à la société X deux griefs, qui retenaient en substance, d’une part, que celle-ci avait manqué, à l’occasion de la diffusion de documents commerciaux, à son obligation de fournir une information exacte, claire et non trompeuse et, d’autre part, qu’elle n’avait pas identifié clairement ses supports commerciaux comme relevant d’une communication à caractère promotionnel, ces griefs pouvant constituer des manquements aux obligations établies par les articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 314-10, 314-11, 314-12 et 313-28 du règlement général de l’AMF.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 26 avril 2012, le président de l’AMF a notifié ces griefs à la société X en l’informant, d’une part, de la transmission de la lettre de notification à la présidente de la Commission des sanctions pour attribution et désignation d’un rapporteur, d’autre part, du délai de deux mois dont elle disposait pour présenter des observations écrites en réponse, ainsi que de la possibilité de se faire assister de toute personne de son choix et de prendre connaissance des pièces du dossier dans les locaux de l’AMF.

Par lettre du même jour, le président de l’AMF, en application de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, a transmis la notification de griefs à la présidente de la Commission des sanctions qui, par décision du 25 mai 2012, a désigné M. Pierre Lasserre en qualité de rapporteur, ce dont la société mise en cause a été informée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 31 mai 2012 lui rappelant la possibilité d’être entendue, à sa demande, en application du I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 4 juin 2012, la société mise en cause a également été informée du délai d’un mois dont elle disposait, en application de l’article R. 621-39-1 du code monétaire et financier, pour demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code.

Par courrier remis par porteur le 25 juin 2012, la société X a présenté des observations écrites concluant à ce que tous les griefs soient écartés.

Le 19 avril 2013, le rapporteur a procédé, à sa demande, à l’audition de la société X, représentée par son président M. [...].

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 26 avril 2013, à laquelle était joint le rapport de M. Pierre Lasserre, la société mise en cause a été convoquée à la séance de la Commission des sanctions.

Par courrier du 7 mai 2013, la société X a présenté des observations en réponse au rapport du rapporteur.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 10 mai 2013, elle a été informée de la composition de la formation de la Commission des sanctions lors de la séance, ainsi que du délai de quinze jours dont elle disposait en application de l’article R. 621-39-2 du code monétaire et financier pour demander la récusation, conformément aux articles R. 621-39-3 et R. 621-39-4 du même code, d’un ou de plusieurs de ses membres.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I. SUR LES MOYENS DE PROCEDURE

I.1. Sur le respect du principe du contradictoire

Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 143-5 du règlement général de l’AMF, « Tout rapport établi aux termes d’un contrôle est communiqué à l’entité ou à la personne morale contrôlée. (...) L’entité ou la personne morale à laquelle le rapport a été transmis est invitée à faire part au secrétaire général de l’AMF de ses observations dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours. Les observations sont transmises au collège lorsque celui-ci examine le rapport en application de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier » ; que, s’il est constant que ces dispositions ont bien été respectées en l’espèce, la mise en cause conclut néanmoins à l’irrégularité de la procédure au motif que ne lui aurait en revanche pas été adressée la lettre circonstanciée rendue obligatoire par l’article 144-2-1 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction issue de l’arrêté du 8 décembre 2010, qui constituerait une disposition pénale plus douce devant s’appliquer aux procédures déjà en cours avant l’entrée en vigueur de cet arrêté ;

Considérant qu’aux termes de l’article 144-2-1 du règlement général de l’AMF, « Avant la rédaction finale du rapport d'enquête, une lettre circonstanciée relatant les éléments de fait et de droit recueillis par les enquêteurs est communiquée aux personnes susceptibles d'être ultérieurement mises en cause » ; que ces dispositions invoquées par la mise en cause ne sont applicables qu’aux procédures d’enquête et non à celles de contrôle ; que le moyen tiré du défaut de communication d’une lettre circonstanciée ne saurait par suite être utilement soulevé à propos du déroulement d’une procédure de contrôle ;

Considérant, en second lieu, que la mise en cause soutient qu’en application des dispositions du premier alinéa de l’article L. 612-27 du code monétaire et financier aux termes desquelles « En cas de contrôle sur place, un rapport est établi. Le projet de rapport est porté à la connaissance des dirigeants de la personne contrôlée, qui peuvent faire part de leurs observations, dont il est fait état dans le rapport définitif », le projet de rapport de contrôle aurait dû lui être communiqué afin qu’elle puisse faire valoir ses observations avant que soit établi le rapport définitif ; qu’à défaut d’avoir eu communication d’un tel projet, elle a été privée de la possibilité de faire connaître ses observations avant l’établissement du rapport de contrôle définitif, ce qui constituerait une atteinte au principe du contradictoire ;

Considérant, toutefois, que les dispositions de l’article L. 612-27 du code monétaire et financier régissent la procédure applicable devant l’ACP et que le recours par l’AMF aux services de contrôle de l’ACP n’a pas pour effet d’étendre leur champ d’application, les contrôles auxquels il est procédé pour le compte de l’AMF demeurant soumis aux dispositions régissant les contrôles effectués par les propres services de l’AMF ; qu’au demeurant la société X a été en mesure de présenter – et l’a effectivement fait – dès la communication du rapport de contrôle, des observations lui permettant d’analyser et de discuter le contenu et la portée des éléments susceptibles de fonder les griefs qui lui ont été ensuite notifiés ; que le moyen sera donc écarté ;

I.2. Sur le paragraphe 1 de l’article 6 de la CEDH

Considérant que la société X soutient qu’en violation du paragraphe 1 de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après « CEDH »), la procédure de contrôle qui a été conduite durant 28 mois, entre le début de la mission de contrôle et la date de communication de la notification des griefs, n’aurait pas respecté l’exigence d’un délai raisonnable ; que, selon elle, ni la complexité de l’affaire, ni les difficultés matérielles rencontrées lors de la réalisation du contrôle ne peuvent justifier un tel délai ;

Considérant que la durée excessive d’une procédure n’en justifie l’annulation que lorsqu’il est démontré concrètement qu’elle a fait obstacle à l’exercice normal des droits de la défense ;

Considérant qu’en l’espèce, la mise en cause ne fait état d’aucun élément concret permettant de considérer que la durée de la procédure de contrôle aurait fait obstacle à l’exercice normal de ses droits ; que le moyen sera donc écarté ;

II. SUR LES GRIEFS NOTIFIES

Considérant qu’il est reproché à la société X, d’une part, d’avoir manqué à son obligation de fournir une information exacte, claire et non trompeuse dans le cadre de sa communication à caractère promotionnel consacré aux CFD, constituée notamment de deux brochures intitulées « La bourse avec la société X » et « Le trading avec la société X » et, d’autre part, de ne pas avoir clairement identifié certains supports commerciaux comme relevant d’une communication à caractère promotionnel ;

Considérant que la mission de contrôle s’étant déroulée entre le 8 décembre 2009 et le 12 mars 2010, les faits retenus seront examinés au regard des textes dans leur rédaction en vigueur durant la même période, qui n’ont pas été remplacés par des dispositions plus douces ;

II.1 Sur le grief relatif à l’obligation d’identifier clairement certains supports commerciaux comme relevant d’une communication à caractère promotionnel

Considérant qu’il est reproché à la société X d’avoir, en omettant de mentionner de façon clairement identifiée que les documents intitulés « Le trading avec la société X » et « La bourse avec la société X » revêtaient un caractère promotionnel, manqué aux exigences des articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 313-28 du règlement général de l’AMF ; que, pour sa défense, la société X soutient que le contenu des encarts, ainsi que l’utilisation de couleurs et de photos commerciales, permettraient de déduire que les documents dont il s’agit sont de nature promotionnelle ;

Considérant que l’article L. 533-12 du code monétaire et financier dispose : « Les communications à caractère promotionnel sont clairement identifiables en tant que telles » ; qu’aux termes de l’article 313-25 du règlement général de l’AMF, « Lorsqu’elle est diffusée par un prestataire de services d’investissement, une recommandation d’investissement au sens du 1 de l’article R. 621-30-1 du code monétaire et financier, ci-après dénommée recommandation d’investissement à caractère général, constitue : / 1° Soit une analyse financière ou une recherche en investissement (...) ; / 2° Soit, dans les autres cas, une communication à caractère promotionnel soumise aux dispositions de l’article 313-28 » ; qu’aux termes de l’article 313-28 du même règlement, « La recommandation d'investissement à caractère général mentionnée à l'article 313-25 est soumise aux dispositions législatives et règlementaires applicables aux communications à caractère promotionnel ainsi qu'aux conditions suivantes : 1° Elle est clairement identifiée comme telle (...) » ;

Considérant qu’en l’absence de toute mention relative au caractère promotionnel des documents en cause, le manquement aux exigences des articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 313-28 du règlement général de l’AMF est objectivement caractérisé ;

II.2 Sur le grief relatif à la communication d’une information exacte, claire et non trompeuse

II. 2 .1 Textes applicables

Considérant que l’article L. 533-12 du code monétaire et financier dispose : « I. - Toutes les informations, y compris les communications à caractère promotionnel, adressées par un prestataire de services d'investissement à des clients, notamment des clients potentiels, présentent un contenu exact, clair et non trompeur. Les communications à caractère promotionnel sont clairement identifiables en tant que telles. / II. - Les prestataires de services d'investissement communiquent à leurs clients, notamment leurs clients potentiels, les informations leur permettant raisonnablement de comprendre la nature du service d'investissement et du type spécifique d'instrument financier proposé ainsi que les risques y afférents, afin que les clients soient en mesure de prendre leurs décisions d'investissement en connaissance de cause » ;

Considérant que l’article 314-10 du règlement général de l’AMF prévoit : « Le prestataire de services d'investissement veille à ce que toute l'information, y compris à caractère promotionnel, qu'il adresse à des clients, remplisse les conditions posées au I de l'article L. 533-12 du code monétaire et financier. Le prestataire veille également à ce que toute l'information, y compris à caractère promotionnel, qu'il adresse à des clients non professionnels ou qui parviendra probablement à de tels destinataires remplisse les conditions posées aux articles 314-11 à 314-17 » ; que, parmi les dispositions du même règlement auxquelles il est ainsi fait référence, l’article 314-11 dispose : « L'information inclut le nom du prestataire de services d'investissement. / Elle est exacte et s'abstient en particulier de mettre l'accent sur les avantages potentiels d'un service d'investissement ou d'un instrument financier sans indiquer aussi, correctement et de façon très apparente, les risques éventuels correspondants. / Elle est suffisante et présentée d'une manière qui soit compréhensible par un investisseur moyen de la catégorie (Arrêté du 24 décembre 2009) « à laquelle » elle s'adresse ou (Arrêté du 24 décembre 2009) « à laquelle » il est probable qu'elle parvienne. / Elle ne travestit, ni ne minimise, ni n'occulte certains éléments, déclarations ou avertissements importants » ; que l’article 314-12 ajoute : « Lorsque l'information compare des services d'investissement ou des services connexes, des instruments financiers ou des personnes fournissant des services d'investissement ou des services connexes, elle doit remplir les conditions suivantes : /

1° La comparaison est pertinente et présentée de manière correcte et équilibrée ; / 2° Les sources d'information utilisées pour cette comparaison sont précisées ; / 3° Les principaux faits et hypothèses utilisés pour la comparaison sont mentionnés » ;

II. 2. 2 Examen du grief

Considérant que les cinq branches du grief sont relatives à l’information générale des clients sur les CFD, à l’information relative aux risques liés à l’utilisation de l’effet de levier lors de la souscription à des CFD ainsi qu’au caractère équilibré des comparaisons entre l’investissement en CFD et l’investissement direct en sous-jacent ; qu’il y a lieu d’apprécier l’information fournie par la société X en tenant compte de la nature et de la complexité des CFD, au regard notamment de celle de leurs sous-jacents ;

a) Sur l’information relative à la comparaison de l’investissement en CFD avec le trading en actions

Considérant qu’il est reproché à la société X d’avoir procédé, dans la brochure intitulée « Le trading avec la société X », à une comparaison entre un investissement en CFD et un investissement en titres de capital qui laissait croire que les risques attachés à la souscription de CFD étaient de nature et d’importance comparables à la souscription de titres de capital ; que l’information délivrée par la société X n’aurait pas présenté, de ce fait, un contenu exact, clair et non trompeur, en violation des dispositions des articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 314-12 du règlement général de l’AMF ;

Considérant que la brochure intitulée « Le trading avec la société X » précisait « Les CFD (...) sont exempts des inconvénients liés au trading d’actions tels que le délai d’exécution, d’échange ou de transfert et aucun frais de droit de garde est appliqué » ; que les termes de la comparaison entre les CFD et les titres en capital étaient clairement circonscrits aux modalités et aux conditions d’exécution des investissements dans les instruments financiers dont il s’agit et ne comportaient pas d’inexactitudes ; que le manquement à l’article L. 533-12 du code monétaire et financier et à l’article 314-12 du règlement général de l’AMF n’est pas suffisamment caractérisé ;

b) Le défaut d’information relatif aux risques de liquidité et de perte en capital excédant la mise de fonds initiale

Considérant qu’il est reproché à la société X d’avoir fourni une information imprécise voire trompeuse en ne mentionnant pas les caractéristiques relatives à la volatilité et à la liquidité des sous-jacents des CFD ; que, selon la notification de griefs, la mise en cause aurait également dû attirer l’attention des investisseurs potentiels en CFD sur le risque de liquidité ainsi que sur le risque de perte en capital pouvant excéder la mise de fonds initiale ;

Considérant que les brochures « Le trading avec la société X » et « La bourse avec la société X » ne mentionnent pas les caractéristiques de volatilité et de liquidité des sous-jacents des CFD ;

Considérant que le « Guide des CFD », édité sur le portail internet de la société X, indique pour sa part que « Les CFDs reflètent la performance d’un indice. Achetez 1 CFD de l’indice allemand DAX à 6492 points, revient à acheter l’indice une fois. Cela signifie que tout mouvement d’un point de l’indice allemand DAX équivaut à un gain ou une perte d’1 euro. De même si vous achetez 10 CFDs du DAX, cela équivaut à un gain ou une perte de 10 euros. Le gain ou la perte correspond à la différence entre le prix d’achat et le prix de vente du CFD » ; que, toutefois, les documents commerciaux doivent s’analyser indépendamment les uns des autres et chacun d’entre eux doit répondre, par lui-même, aux prescriptions législatives et règlementaires ; qu’en l’espèce, le fort effet de levier inhérent aux CFD, accentué par la volatilité de leurs sous-jacents, induisait des risques qui devaient être portés à l’attention des investisseurs dans l’ensemble de la documentation commerciale ;

Considérant que l’expression « liquidité supérieure », figurant en gras et en majuscules sur la brochure « Le trading avec la société X », si elle est imprécise, reflète cependant le fait que la liquidité des sous-jacents ne détermine pas celle des CFD, laquelle résulte de l’engagement de la société X de se porter systématiquement contrepartie de ses clients investisseurs en CFD ou vendeurs de ces derniers ; qu’en revanche, l’avertissement légal, situé au verso et en bas de la première page de cette brochure, était très peu lisible en raison de la petite taille des caractères utilisée et n’avertissait par suite que de manière insuffisante du risque de perte en capital excédant la mise de fonds initiale ;

Considérant, dès lors, que l’information délivrée dans les différents documents promotionnels en cause sur les risques de perte en capital excédant la mise de fonds initiale n’était pas exacte, claire et non trompeuse et que le manquement aux dispositions de l’article L. 533-12 du code monétaire et financier est caractérisé en tant qu’il concerne le risque de perte en capital pouvant excéder l’investissement initial ;

c) L’insuffisance de l’information relative à l’effet de levier

d) La mise en exergue des avantages potentiels de l’investissement en CFD

e) La minimisation de certains avertissements importants

Considérant qu’il est d’abord reproché à la mise en cause l’absence de précisions sur le mécanisme ou les implications de l’effet de levier dans les CFD, caractéristique pourtant essentielle de ce type d’investissement, dont seule l’existence était mentionnée dans le document « Le trading avec la société X » ; qu’il est ensuite reproché à la société X d’avoir manqué à son obligation d’abstention de fournir une information mettant en exergue les avantages potentiels des CFD sans en préciser clairement les risques éventuels, mentionnant dans la brochure intitulée « Le trading avec la société X » la possibilité de « multiplie(r) vos investissements jusqu’à 20 fois » sans préciser les risques, notamment de perte en capital, induits par cet effet de levier ; qu’enfin, il est reproché à la mise en cause d’avoir, en contradiction avec les exigences de l’article 311-14 du règlement général de l’AMF, minimisé certains avertissements importants dans la mesure où un seul avertissement, par ailleurs incomplet, figurait sur les supports commerciaux au verso de la première page des brochures et dans une typographie rendant l’information relative aux risques inhérents aux opérations sur CFD difficilement intelligible ; qu’en raison des liens étroits qu’elles entretiennent entre elles, il y a lieu d’examiner ensemble ces trois branches du grief ;

Considérant, en premier lieu, que la société X soutient que l’information sur l’effet de levier était présente dans l’ensemble de sa documentation, le risque lié à l’effet de levier étant particulièrement signalé sur le formulaire d’ouverture de compte de négociation, et qu’une plateforme de démonstration pour se familiariser avec les CFD et leur effet de levier a été mise en place ; que cependant, l'effet de levier, caractéristique d'un investissement en CFD, n’était mentionné que dans la brochure intitulée « Le trading avec la société X »; qu’elle ne contenait aucune explication ni sur son mécanisme, ni sur ses implications en termes d'engagement financier ; que mis à part l’avertissement – au demeurant insuffisant – mentionné ci-dessus, aucune autre information relative au risque de perte en capital pouvant théoriquement excéder la mise de fonds initiale ne figurait dans les documents à caractère promotionnel, de sorte que les clients existants ou potentiels n’étaient pas en position de prendre une décision d'investissement en toute connaissance de cause ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la société X fait justement valoir que le risque en capital était indiqué au verso de la première page de la brochure en cause, cet « avertissement légal », situé en bas de page et indiquant, entre autres avertissements, un haut niveau de risque et une possibilité de pertes importantes, était très peu lisible en raison de la petite taille des caractères utilisée ; qu’en revanche, la mention « multiplie(r) vos investissements jusqu’à 20 fois » était indiquée dans le corps de la présentation du placement, en caractères identiques au reste du texte et sans précision sur le risque de perte ; que l’information en cause mettait donc bien « l'accent sur les avantages potentiels d'un service d'investissement ou d'un instrument financier sans indiquer aussi, correctement et de façon très apparente, les risques éventuels correspondants » en violation des dispositions de l’article 314-11 du règlement général de l’AMF ;

Considérant par ailleurs que cette information doit également, aux termes de l’article précité, être « suffisante et présentée d'une manière qui soit compréhensible par un investisseur moyen de la catégorie à laquelle elle s'adresse ou à laquelle il est probable qu'elle parvienne » ; que si la clientèle de la mise en cause était majoritairement constituée de particuliers, non professionnels, il s’agissait en grande partie d’investisseurs ayant déjà détenu des instruments constituant les sous-jacents des CFD en cause ; qu’il convenait cependant de les avertir des risques éventuels propres à ces instruments financiers complexes par rapport à un investissement direct dans les produits sous-jacents, notamment lors de la communication au public d’un document commercial portant sur un placement présentant un risque de perte pouvant excéder la mise de fonds initiale ;

Considérant en troisième lieu que, contrairement à ce que soutient la mise en cause, en présentant les risques de manière générale et non spécifiquement ceux inhérents à l’investissement en CFD, lesquels figuraient pourtant en en-tête des brochures commerciales, et en n’indiquant ces risques qu’en bas de page dans une police rendant peu lisible et intelligible l’information diffusée, la société X a minimisé certains avertissements importants au sens de l’article 314-11 du règlement général de l’AMF ;

Considérant dès lors que le manquement aux articles L. 533-12 du code monétaire et financier et 314-11 du règlement général de l’AMF est caractérisé sur l’ensemble de ces trois points ;

III. SUR LA SANCTION ET LA PUBLICATION

Considérant que la société X est un établissement de crédit faisant l’objet d’un agrément de l’ACP, qu’elle est à ce titre « un prestataire de services d’investissement agréé en France » au sens du 1° du II de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier ;

Considérant qu’aux termes du III de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa version en vigueur à l’époque des faits : « III.- Les sanctions applicables sont : / (...) a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°, 11°, 12° et 15° du II de l'article L. 621-9, l'avertissement, le blâme, l'interdiction à titre temporaire ou définitif de l'exercice de tout ou partie des services fournis ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 10 millions d'euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; (...) » ;

Considérant qu’il y a lieu de prendre en compte, pour l’appréciation des sanctions à prononcer à l’encontre de la société mise en cause en raison des manquements relevés ci-dessus, que celle-ci n’exerçait que depuis peu l’activité nouvelle en France qui a fait l’objet du contrôle à l’origine de la présente procédure, et que le début de l’exercice de cette activité n’était postérieur que de quelques mois tant à l’obtention de son agrément qu’à son intégration en tant que filiale à 100 % dans le groupe X; qu’elle s’adressait de fait à une clientèle de particuliers ayant déjà détenu des instruments financiers et à laquelle elle proposait un accès aux CFD ; qu’elle a adopté rapidement des mesures correctrices avant la fin du contrôle puis à la suite de celui-ci ; qu’il ne résulte pas de l’instruction que les manquements retenus ci-dessus ont conduit à ce que certains clients de la société mise en cause soient lésés ; que l’ensemble de ces circonstances conduisent à prononcer à l’encontre de la société X une sanction pécuniaire de 30 000 euros ;

Considérant que la publication de la présente décision n’est pas de nature à perturber gravement les marchés financiers ; que cette publication, dans des conditions propres à assurer l’anonymat de la société X, ne risque pas de causer à cette dernière un préjudice disproportionné ; que la publication sera donc ordonnée dans ces conditions ;

PAR CES MOTIFS,

Et après en avoir délibéré sous la présidence de M. Jean-Claude Hassan, par Mme Marie-Hélène Tric et M. Bernard Field, membres de la 2 ème section de la Commission des sanctions et Mme France Drummond, membre de la 1 ère section de la Commission des sanctions suppléant M. Guillaume Jalenques de Labeau, par application du I de l’article R. 621-7 du code monétaire et financier, en présence de la secrétaire de séance,

DECIDE DE :

- prononcer à l’encontre de la société X une sanction pécuniaire de 30 000 € (Trente mille euros) ;

- publier la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers dans des conditions propres à assurer l’anonymat de la société X.