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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 7, 29 octobre 2015, n° 14/14359

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

César (SA)

Défendeur :

Autorité des Marchés Financiers

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Michel- Amsellem

Conseillers :

Mme Luc, Mme Faivre

AMF, 6 mai 2014

6 mai 2014

Faits et procédure

La société Cesar est spécialisée dans le commerce des articles de fête, activité saisonnière, liée aux fêtes de fin d'année et de carnaval. Ses titres ont été admis aux négociations sur le marché Alternext, depuis le 27 avril 2011. En 2011, Monsieur M. était directeur général de la société et Monsieur V., président du directoire. Monsieur V. et sa société holding Biscalux détenaient ensemble 18,7 % du capital de la société Cesar, après avoir racheté, le 26 janvier 2011, la participation de l'ancien actionnaire de référence, la société Butler Capital Partners.

En 2011, n'étant pas en mesure de financer les besoins en trésorerie résultant de la saisonnalité de son activité, la société Cesar a procédé à une augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription pour un montant de plus de 7M€.

Le prospectus relatif à cette opération, dont le succès a été annoncé au marché par communiqué de presse du 29 juin 2011, a été publié le 26 mai 2011 sur le site Internet de la société. Les fonds ont été perçus le 4 juillet 2011.

Un mois plus tard cependant, la société a déclaré être en cessation de paiement. Une procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 10 aout 2011, aboutissant à l'adoption d'un plan de continuation le 27 février 2013. Parallèlement, la cotation des actions, suspendue le 29 juillet 2011, a repris le 25 mars 2013.

Dans le contexte de la suspension du cours du titre et du dépôt de la déclaration de cessation des paiements, le secrétaire général de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) a procédé, le 2 aout 2011, à l'ouverture d'une enquête portant sur « l'information financière et le marché du titre Cesar à compter du 1er septembre 2008 ». Le 13 mai 2013, une notification de griefs a été communiquée par la Commission spécialisée n°2 du collège de l'AMF, à la société César ainsi qu'à M. V. et M. M. en leur qualité respective de président du directoire et directeur général. Il leur était par celle-ci reproché, sur le fondement des articles 221-1 1°, 223-1 du règlement général de l'AMF, L.621-14 et L.621-15 du code monétaire et financier, les faits suivants : « il apparaît que l'objet de l'augmentation de capital lancée par César le 28 mai 2011 tel que décrit dans le prospectus publié le 26 mai 2011 n'apparaissait ni exact ni précis ni sincère dans la mesure où il n'était pas mentionné qu'une partie des fonds levés (soit 1,9 million d'euros) serait utilisée pour (i) solder certaines factures impayées et (ii) rembourser une partie du compte courant d'associé de Monsieur V. ».

Il était de surcroit précisé dans ce document que le remboursement de la créance d'actionnaire « avait été décidé et formalisé par écrit le 24 février 2011, dans le cadre d'un courrier adressé par Biscalux SA à César » alors que le prospectus ne précisait à aucun moment que les fonds levés « seraient affectés au remboursement d'une partie du compte courant d'associé » et qu'une « analyse plus précise de l'utilisation de ces fonds a permis de constater que 913K€ ont été affectés au paiement d'anciennes factures antérieures au mois de février 2011, voire portant sur les années 2009 et 2010, restées impayées en raison des difficultés financières chroniques rencontrées par la société ».

Par la décision du 6 mai 2014, la Commission des sanctions de l'AMF a tout d'abord rejeté les deux moyens de procédure soulevés par les requérants, tirés du non-respect des principes d'impartialité et du contradictoire.

Elle a ensuite relevé, sur le fond, qu'alors qu'il était prévu, dès le 26 mai 2011, que les fonds levés serviraient, d'une part, au remboursement de la créance de la société Biscalux d'un montant de 1 million d'euros, et, d'autre part, au paiement du passif fournisseurs relatifs à la saison précédente, cette information ne figurait à aucun endroit du prospectus, lequel mentionnait que l'objectif principal de l'opération était de « financer en partie la nouvelle saison d'achat ». Elle considère que cette omission rendait l'information donnée au public par la société Cesar imprécise, inexacte et non sincère. Elle en a conclu que le manquement à l'article 223-1 du règlement général de l'AMF était caractérisé. Le manquement a été imputé à la société Cesar, ainsi qu'à M. V., en sa qualité de président du directoire de celle-ci au moment de la publication du prospectus, ainsi qu'à M. M., en sa qualité de directeur général et membre du directoire, celui-ci étant de surcroit signataire du prospectus litigieux. La société Cesar a été condamnée au paiement d'une amende de 25 000 euros, M. M. d'une amende de 25 000 euros et M. V. de 150 000 euros. A été également ordonnée la publication de la décision sur le site Internet de l'Autorité des Marchés Financiers.

La Cour,

Vu le recours en annulation et en réformation formé le 10 juillet 2014 par la société Cesar et Monsieur V., enregistré sous le numéro 14/14359 ;

Vu le recours en annulation formé le 11 juillet par Monsieur M., enregistré sous le numéro 14/14360 ;

Vu l'ordonnance de jonction du 22 juillet 2014 des deux recours sous le numéro 14/15359 ;

Vu les observations de Monsieur M. déposées au greffe de la cour le 15 avril 2015 ;

Vu les observations de la société Cesar et Monsieur V. déposées au greffe de la cour le 16 avril 2015 ;

Vu les observations de l'AMF déposées au greffe de la cour le 27 février 2015 ;

Après avoir entendu à l'audience publique du 17 septembre 2015, les conseils des parties, ainsi que le représentant de l'Autorité des Marchés Financiers et le ministère public ;

SUR CE,

La société Cesar et M. V. exposent qu'ils n'ont pas bénéficié d'un procès équitable et demandent à la cour de prononcer la nullité de la procédure et d'annuler la décision rendue par l'AMF. Ils soutiennent que la décision d'ouverture de l'enquête constitue un détournement de procédure et que l'AMF a violé le principe d'impartialité, tant dans la décision de poursuivre prise par le collège, que lors de la phase d'instruction.

Sur le fond, ils sollicitent la réformation de la décision. Ils reprochent en premier lieu à l'AMF de ne pas rapporter la preuve que les fonds provenant de l'augmentation de capital ont été affectés au remboursement de dettes passées et de la créance de Biscalux. M. V. soutient en second lieu qu'il n'a été, à aucun moment, associé à la rédaction des documents relatifs à l'augmentation de capital, destinés à l'information du public. Les deux requérants soutiennent ensuite que l'affectation minoritaire de la trésorerie de Cesar aux dettes passées ne rend pas l'information du prospectus contraire aux exigences de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF, car le prospectus prévoyait que les fonds financeraient « en partie » la nouvelle saison et mentionnait la pression économique des fournisseurs. Enfin, ils excluent toute intention, au moment de l'émission du prospectus, de procéder aux affectations litigieuses.

M. M. demande à la cour de juger qu'il n'a commis aucun manquement aux dispositions de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF, d'annuler la décision de l'AMF du 6 mai 2014 en ce qu'elle l'a condamné sur ce fondement à une amende de 25 000€ et d'ordonner, d'une part, la publication de la décision à venir sur le site de l'AMF, ainsi que, d'autre part, la restitution de l'intégralité des sommes versées par lui-même en exécution de la décision. Il sollicite, enfin, la condamnation de l'AMF au versement d'une somme de 10 000€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient que le grief tiré de l'omission, dans le prospectus, d'un prétendu paiement de factures anciennes au moyen des fonds levés par l'augmentation de capital, est dénué de fondement, celui-ci n'ayant pas été démontré par l'AMF. Il conteste le montant retenu par la Commission des sanctions et, notamment, certaines factures classées dans les dettes fournisseurs anciennes.

Il prétend que rien ne permet d'affirmer que les fonds dégagés à l'issue de l'augmentation de capital ont été affectés au paiement de la créance de Biscalux et de ces factures anciennes, faisant en ce sens grief à l'AMF de s'être appuyée sur un document comptable ne tenant pas compte des encaissements effectués par la société postérieurement à l'opération litigieuse, entre les mois de juin et juillet 2011.

Enfin, il soutient qu'il n'était pas au courant du remboursement prévu de la créance Biscalux.

L'AMF sollicite le rejet pur et simple des recours et s'en remet à l'appréciation de la cour quant à une éventuelle publication de l'arrêt à intervenir sur le site internet de l'AMF.

Sur la demande d'annulation de la procédure et subséquemment, de la décision de sanction

Sur l'enquête

La société Cesar et Monsieur V. prétendent que l'AMF aurait commis un détournement de procédure en décidant d'ouvrir une enquête, au seul motif d'une proximité temporelle entre l'augmentation de capital et la déclaration de cessation des paiements de la société Cesar. Ils reprochent à l'AMF d'avoir outrepassé sa compétence en déclenchant une enquête sur des pratiques relevant de la compétence exclusive du tribunal de commerce.

Mais il doit être rappelé que les procédures d'enquête et de poursuite, distinctes de la procédure de décision, incombant à la Commission des sanctions, ne sauraient affecter la validité de la décision de sanction, que si une atteinte irrémédiable aux droits de la défense avait été constatée ou en présence de comportements déloyaux.

La décision du secrétaire général de l'AMF d'ouvrir une enquête relève de son appréciation discrétionnaire. Il lui était donc loisible d'enquêter sur la proximité entre l'augmentation de capital et la déclaration de cessation des paiements, qui pouvait laisser suspecter que des informations mensongères ou lacunaires avaient été communiquées lors de l'appel public à l'épargne. Aucun vice n'affecte donc cette décision ab initio. Par la suite, au vu du rapport d'enquête confirmant les soupçons et révélant une méconnaissance des dispositions de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF, la Commission spécialisée du collège a pu notifier un grief sans encourir la critique d'un détournement de procédure. Elle n'a, à aucun moment, eu à se prononcer sur la procédure de redressement de la société Cesar et à outrepasser ses compétences.

La société Cesar et Monsieur V. soutiennent que l'AMF aurait manqué à l'exigence d'impartialité de l'article 6-1 de la CESDH en décidant de les poursuivre en dépit de la carence qui lui était imputable dans la surveillance de l'information économique et financière diffusée par la société César auprès du public au cours des années 2008, 2009 et 2010. Cette carence aurait permis à la société César de bénéficier du crédit attaché aux entreprises faisant appel public à l'épargne, alors qu'elle poursuivait une activité déficitaire, étant en état de cessation des paiements patent depuis plusieurs années. Ils soutiennent que l'AMF aurait ainsi concouru à la commission du grief notifié, étant juge et partie.

Mais il convient de rappeler que la décision de poursuite de l'AMF, formulée par la Commission spécialisée du collège, devant la Commission des sanctions, est indépendante de l'activité administrative de régulation incombant à l'Autorité. Les mis en cause ne sauraient donc échapper aux poursuites en prétextant que l'Autorité aurait du les mettre en garde sur la situation obérée de l'entreprise, dans le cadre de sa mission de surveillance générale du marché. Enfin, la Commission des sanctions relève à juste titre qu'à supposer la décision de poursuite affectée de partialité, ce qui n'est pas démontré en l'espèce, ce vice n'affecterait pas la décision de sanction prise par la Commission des sanctions, organe indépendant.

Les requérants soutiennent encore que le projet de prospectus incriminé a été soumis à l'avis préalable de l'AMF, qui n'a pas formulé de réserve sur le degré de précision du prospectus relativement à l'affectation des fonds devant provenir de l'augmentation de capital et qui a donc nécessairement considéré que l'information contenue était conforme aux exigences de l'article 223-1 du règlement général. L'objet des poursuites contrevenait donc au principe d'impartialité en ce que l'AMF a été conduite à juger de son propre agrément.

Mais la Commission des sanctions relève à juste titre que « en sa qualité de régulateur, l'AMF examine les documents qui lui sont soumis par les émetteurs, qui restent seuls responsables de l'information communiquée au marché et débiteurs de l'obligation de délivrer au public une information exacte, précise et sincère aux tiers, sans que l'apposition de son visa sur un document qui lui est soumis au vu des seuls éléments dont elle a connaissance puisse ultérieurement faire obstacle à l'ouverture d'une procédure d'enquête, puis éventuellement de sanction ». Au moment de la délivrance du visa, il n'est nullement établi que le service de l'AMF ait été informé que la société Cesar comptait affecter une partie des fonds levés à des fins non mentionnées dans le prospectus.

Sur l'instruction

La société Cesar et M. V. prétendent que la phase d'instruction serait entachée d'un défaut d'impartialité, en ce que le principe de séparation des organes de l'AMF n'aurait pas été respecté. Mme G., chargée de mission au sein de la direction de l'instruction et du contentieux des sanctions (DICS), aurait en effet pris une part active à la phase de jugement de la procédure. Ils reprochent de surcroit à cette dernière d'être intervenue en 2010 en qualité de conseil de la société Cesar, alors qu'elle était élève avocat. Une telle proximité aurait, selon eux, du conduire cette dernière à se déporter, d'autant plus que celle-ci serait renforcée par les liens personnels unissant les anciens dirigeants de la société Cesar et, notamment, M.M., avec l'avocat dont cette dernière était la collaboratrice, ainsi que par les liens personnels l'unissant au mandataire judiciaire chargé en 2010 de la procédure de conciliation de la société. Ils se prévalent de surcroit du double préjudice que leur porterait cette situation, en ce que celle-ci avantagerait, d'abord, M. M., celui-ci étant la personne dont Mme G. fut le conseil. Ils précisent en ce sens que trois conflits d'intérêts les opposent à ce dernier : en premier lieu, une contestation dans le cadre de la présente procédure sur les responsabilités respectives dans la rédaction du prospectus ; en deuxième lieu, un contentieux devant le tribunal de commerce de Bobigny dirigé contre M. M. en qualité d'ancien dirigeant de Cesar et, enfin, un contentieux prudhommal en cours initié par ce dernier dans le cadre duquel la société Cesar conteste son lien de subordination juridique. Enfin, ils affirment que la position de Mme G. contredit celle de M. V. en ce que cette première, intervenue lors de la procédure de conciliation de 2010, considère nécessairement celle-ci comme légitime et opportune alors que le second soutient que toutes les mesures mises en œuvre depuis 2009 avaient pour objet de permettre la poursuite de l'activité d'une entreprise en état de cessation des paiements. Cette opposition d'intérêts expliquerait, selon eux, l'absence d'investigation de l'AMF pour la période antérieure à 2011.

Mais il ressort des articles R-621-39 et R.621- 40 du code monétaire et financier , que la phase d'instruction de l'affaire, menée par le rapporteur, est distincte de la phase de jugement devant la Commission des sanctions de l'AMF. Dès lors, les auditions réalisées par le rapporteur, pendant la phase d'instruction de la procédure, ne relèvent pas de la procédure de jugement, de sorte qu'il ne peut être retenu, ainsi que la Commission des sanctions l'a, à juste titre, souligné, « que la participation, par quelque personne que ce soit, à l'une de ces auditions est assimilable à une participation active à la phase de jugement ». Par ailleurs, si les services de l'AMF apportent une assistance technique au rapporteur, c'est sous l'autorité de ce rapporteur que l'instruction de l'affaire est menée. Il en résulte donc que la Commission des sanctions a valablement pu considérer que « la circonstance qu'un membre des services de l'AMF ait assisté aux auditions menées par le rapporteur et ait pu, sous le contrôle de ce dernier, intervenir au cours de celles-ci n'est pas de nature à entacher la procédure de sanction de partialité ni à porter atteinte aux droits de la défense des mis en cause ».

De plus, il n'est pas démontré que Mme G. ait pris une part déterminante dans l'instruction du rapporteur, celui-ci étant maître de la conduite de ses diligences. La circonstance qu'elle ait été stagiaire, en qualité d'élève avocat, au sein d'un cabinet ayant conseillé la société César et M. M. ne saurait, en soi, susciter la suspicion et entâcher la procédure de partialité. Il ne saurait en effet être présumé que M. M. aurait été avantagé, à cause de ses relations antérieures avec Mme G., quatre ans auparavant. De plus, les instances opposant M. M. à la société César sont sans rapport avec les faits de la cause. Par ailleurs, aucun lien n'a pu être établi entre le mandat ad hoc de 2010 à l'occasion duquel le cabinet d'avocats dont Mme G. était stagiaire est intervenu et la qualité de l'information donnée au public le 26 mai 2011, objet du présent litige.

Enfin, il n'est pas démontré en quoi des diligences complémentaires portant sur la période antérieure à 2011 auraient été de nature à modifier l'appréciation du grief tiré de la communication au marché d'une information non exacte, précise et sincère.

En définitive, la cour rejette les moyens de nullité relatifs à la phase d'enquête et d'instruction et, par voie de conséquence la demande d'annulation de la décision pour procédure irrégulière.

Sur la demande de réformation de la décision

La société Cesar et Monsieur V. reprochent à l'AMF de ne pas rapporter la preuve que les fonds provenant de l'augmentation de capital aient été affectés au remboursement de dettes passées et de la créance de la société Biscalux. Ils soutiennent qu'au cours de la période considérée, de janvier à juillet 2011, la société a enregistré des apports en compte courant d'associé (2 millions d'€) ainsi que des encaissements au titre de son chiffre d'affaires (6.57 millions d'€ de janvier à juillet 2011 dont 1.008.708 € de mai à juillet 2011), de sorte que le paiement des dettes litigieuses a pu intervenir au moyen d'autres ressources de trésorerie que l'augmentation de capital. Ils en concluent qu'il est impossible de soutenir que l'information transmise au public sur l'affectation desdits fonds était imprécise, inexacte ou non sincère.

Monsieur M. affirme que le grief tiré d'un prétendu paiement de factures anciennes au moyen des fonds levés par l'augmentation de capital est dénué de fondement, celui-ci n'ayant pas été démontré par l'AMF. Il soutient qu'aucun élément du dossier ne permet de déterminer avec précision le montant du passif relatif à la saison passée au 26 mai 2011, la somme de 262 569,51euros retenue par la Commission des sanctions reposant sur une interprétation erronée des factures versées, et notamment celles des sociétés Amethyst, Idee Spiel, IMPS et Turner. Par ailleurs, rien ne permettrait d'affirmer, selon lui, que les fonds dégagés à l'issue de l'augmentation de capital auraient été effectivement affectés au paiement de ces factures anciennes, faisant à cet égard reproche à la Commission des sanctions de s'être appuyée sur un document comptable ne tenant pas compte des encaissements effectués par la société postérieurement à l'opération litigieuse, entre les mois de juin et juillet 2011. Ces autres sources de financement, parmi lesquelles figuraient les encaissements de créances au titre de la saison de carnaval 2011 et ceux de créances anciennes, ainsi que les remises au factor de nouvelles livraisons, ont ainsi pu servir à financer les factures restantes de la saison passée.

L'AMF soutient que la preuve de l'affectation effective des fonds au règlement du passif n'est pas exigée pour établir l'infraction et que ces moyens doivent être rejetés.

L'obligation de bonne information du public de l'émetteur posée à l'article 223-1 du règlement général de l'AMF précise que : « l'information donnée au public par l'émetteur doit être exacte, précise et sincère ». Ce manquement présente un caractère objectif qui ne requiert pas la recherche de l'intention de son auteur lors de l'opération incriminée et la qualité de l'information donnée s'apprécie au moment où elle est délivrée au public. C'est à la date de la publication du prospectus qu'il convient de se placer pour déterminer si l'information donnée au public concernant l'objet de l'augmentation de capital était exacte, précise et sincère.

Il est reproché aux trois mis en cause, sur le fondement de l'article 223-3 du règlement précité, d'avoir communiqué une information qui n'était pas exacte, précise et sincère sur l'objet de l'augmentation de capital, tel que décrit dans le prospectus publié le 26 mai 2011, « dans la mesure où il n'était pas mentionné qu'une partie des fonds levés (soit 1,9 million d'euros) serait utilisée pour (i) solder certaine factures impayées et (ii) rembourser une partie du compte courant d'associé de Monsieur V. ».

Pour caractériser le manquement, il y a donc lieu de vérifier si la Commission des sanctions a bien établi qu'au moment où le prospectus a été publié, il était envisagé de rembourser, à l'aide des fonds à lever, des dettes fournisseurs anciennes et la créance de la société Biscalux (A), alors que le prospectus litigieux n'en faisait pas mention (B).

•           Sur la prévision de remboursement des dettes antérieures

•           La créance de la société Biscalux

La société Cesar et M. V. font valoir que l' « avance relais » de 1 million d'€, consentie par M. V. en février 2011 à la société Cesar, dans l'attente de l'augmentation de capital, et remboursable à l'issue de celle-ci, ne peut juridiquement être assimilée à un apport en compte courant d'associé. En effet, ils prétendent que son régime différerait de celui des apports en compte courant d'associé de 2 millions d'euros consentis les 28 et 30 janvier 2011 par M. V. par l'intermédiaire de Biscalux, lesquels avaient donné lieu à une convention de compte courant qui fixait une limite aux apports (2 millions), prévoyait une rémunération de l'apporteur par application d'un taux d'intérêt et établissait une date de remboursement, sans lien avec l'augmentation de capital. A l'inverse, le remboursement de l' « avance relais » devait intervenir à la suite de l'opération sans qu'aucune rémunération en faveur de Biscalux ne soit prévue. Elle était de surcroit remboursable avec une condition et un terme, la réalisation de l'augmentation de capital, cette seule circonstance ne permettant pas de déduire automatiquement qu'elle serait remboursable au moyen des fonds levés, l'entreprise ayant son propre chiffre d'affaire. Ils affirment, en conséquence, que cette somme ne venait pas en déduction de l'augmentation de capital, mais en faisait partie intégrante.

M. M. prétend que ce serait M. V. seul qui, à l'insu de tous, aurait décidé de procéder au remboursement de la somme de 1 million d'euros à la société Biscalux à l'aide des fonds levés.

La requalification proposée par la société Cesar et M. V. pour l'avance consentie le 24 février 2011 par la société Biscalux est indifférente à la caractérisation du grief.

Il convient seulement de vérifier si la société Cesar avait prévu, lors de la publication du prospectus, que sur les fonds levés par l'augmentation de capital, 1 million d'euros serait affecté au remboursement de la créance de la société Biscalux. Ce remboursement a été effectué le 18 juillet 2011 par virement du compte BRED de la société César auquel seul M.V. avait accès.

Il résulte d'un courrier adressé par la société Biscalux, le 24 février 2011 à la société Cesar, que la société Biscalux consentait à Cesar une avance de 1 million d'euros, à charge pour elle de lui rembourser cette avance, dès la réalisation de l'opération d'augmentation de capital. Ce document indique : « Nous avons pris bonne note que l'augmentation de capital (') sera retardée de plus d'un mois. Dans ces conditions, nous vous confirmons que nous acceptons de consentir une avance de 1 million d'euros pour faire le relais jusqu'à la réalisation de cette augmentation de capital. Bien entendu, cette avance relais devra nous être remboursée dès le débouclage de l'opération ».

Dans son audition du 10 janvier 2014 par le rapporteur de la Commission des sanctions, Monsieur V. a reconnu que le remboursement de l'avance de Biscalux était convenu au moment de la rédaction du prospectus : « Fin février, en raison des difficultés de trésorerie, j'ai consenti une nouvelle avance de 1 million d'euros, mais comme je garantissais également l'augmentation de capital, cette avance ne venait pas en plus. J'ai donc fait un courrier qui prévoyait le remboursement de cette avance avec les fonds de l'augmentation de capital. Ce courrier du 24 février 2011 était dans la comptabilité de César et a été trouvé par le directeur financier de César qui l'a transmis aux enquêteurs». M. V. était le signataire du courrier du 24 février 2011, en sa qualité de représentant légal de Biscalux. Par ailleurs, M. V. a pris ses fonctions de président du directoire de César le lendemain de la rédaction de ce courrier, le 25 février 2011.

C'est donc par d'exacts motif que la Commission des sanctions a relevé « qu'au moment de la publication du prospectus, César avait déjà prévu que, sur les fonds levés par l'augmentation du capital, 1 million serait affecté au remboursement de la créance d'actionnaire de Biscalux ».

Les observations de M. M. tendent à contester que cette branche du grief lui soit imputable. Elles seront donc examinées avec l'imputabilité.

2. Le règlement des dettes fournisseurs anciennes

La société Cesar et M. V. contestent toute intention préalable d'affectation des fonds levés aux dettes passées, soutenant qu'à supposer que cela se soit produit, ce ne serait alors que sous l'effet de trois phénomènes irrésistibles à savoir, le fait que les fonds provenant de l'augmentation de capital se sont confondus dans la trésorerie générale, l'effondrement du chiffre d'affaires de mai à juillet 2011 et, enfin, la rupture brutale, par les banques, des négociations en cours, aux fins de nouveaux crédits.

M. M. reproche à la Commission des sanctions de l'AMF d'avoir considéré que le manquement à l'obligation d'information était constitué, même en l'absence de preuve de la matérialité de celui-ci. Ce raisonnement, contraire selon lui à l'article 6-1 de la CESDH, serait dénué de fondement. Il soutient que l'objectif n'était pas de financer les factures anciennes au moyen des fonds levés lors de l'augmentation de capital. Par ailleurs, il souligne que s'il a évoqué le paiement de factures anciennes au moyen des fonds levés dans la note datée du 8 avril 2011, adressée à Euroland Finance, celui-ci ne devait intervenir qu'à titre temporaire, un décalage temporel pouvant intervenir entre le moment de l'encaissement des ventes relatives au carnaval 2011, dont le règlement différé était destiné à payer les factures anciennes et la livraison des fonds de l'augmentation de capital. Enfin, il considère comme inopérant l'argument de l'AMF selon lequel le tableau de prévisions de trésorerie mentionnait, la veille de l'élaboration du prospectus, des recettes de 5 millions d'€ pour juin et juillet 2011 et des paiements de dettes fournisseurs s'élevant à 6.6 millions d'€ pour la même période, celui-ci ne constituant, selon lui, qu'une prévision sans garantie d'exactitude. Il soutient au surplus, qu'en raison des faibles montants concernés par ce grief, entre 160 161.98€ et 262 569.51€, il est probable que la société Cesar a pu éponger ces dettes fournisseurs anciennes par des fonds autres que ceux levés par l'augmentation de capital.

L'AMF souligne qu'il était prévu, dès le 26 mai 2011, qu'une partie des fonds levés par l'augmentation de capital serait consacrée au paiement du passif fournisseur relatif à la saison précédente. Elle relève en ce sens que M. M. et M. V. ont tous deux reconnu au cours de leurs auditions que la société anticipait qu'elle serait contrainte de payer une partie de ses dettes passées avec les fonds levés, avant la publication du prospectus.

M. M. a ainsi déclaré, devant le rapporteur le 8 janvier 2014 : « Dans mon esprit, les fonds levés ne devaient pas servir à payer des montants importants du passif fournisseur. (') Néanmoins, nous avions conscience qu'il pouvait y avoir un décalage temporel entre le moment de ces encaissements et la livraison des fonds de l'augmentation de capital. C'est la raison pour laquelle j'ai indiqué à Euroland Finance par un e-mail du 1er avril 2011, communiqué à l'AMF, qu'il était possible qu'une petite partie des fonds levés par l'augmentation de capital soit affectée au paiement d'anciens fournisseurs ».

De même, interrogé par les enquêteurs, sur le point de savoir s'il avait prévu, au moment de l'élaboration du prospectus, de payer des factures anciennes avec les fonds levés, M. V. a répondu par l'affirmative : « oui, je le savais ».

Si les deux mis en cause tentent de revenir sur la portée de leurs déclarations, il y a lieu de souligner que cette intention ressort de plusieurs pièces du dossier.

Les premières pièces consistent dans des notes du 8 avril 2011 , adressées à Euroland Finance et à Alternext, dans lesquelles la société César présentait l'opération d'augmentation de capital en ces termes : « l'augmentation de capital envisagée par le nouvel actionnaire de référence Biscalux est décisive pour le groupe César afin de terminer au plus tôt le règlement des fournisseurs de la saison précédente et financer la nouvelle saison d'achat ».

Par ailleurs, un tableau de prévisions de trésorerie de la société Cesar, du 25 mai 2011, établi la veille de la publication du prospectus, mentionnait des recettes d'un montant cumulé de 5 millions d'euros pour le mois de juin et juillet 2011, alors que les paiements de dettes fournisseurs s'élevaient à un montant cumulé de 6,6 millions d'euros pour la même période. Il résulte de ce tableau de prévision qu'il existait, la veille de la publication du prospectus, un solde d'arriérés fournisseurs. Quand bien même ce tableau de prévision n'ait été que prévisionnel, il démontre qu'il était néanmoins connu que les recettes ne couvriraient pas les dettes fournisseurs.

Il résulte de ce qui précède que la Commission des sanctions a valablement retenu « qu'il était prévu dès le 26 mai 2011 qu'une partie des fonds levés par l'augmentation de capital serait consacrée au remboursement de la créance d'actionnaires de Biscalux de 1 million d'euros, et au paiement du passif fournisseur relatif à la saison précédente ».

B. Sur l'information communiquée au public

La société Cesar et M. V. soutiennent, en premier lieu, que la notice d'information du public prévoyait une affectation des fonds au financement de trois objectifs : le financement en partie de la nouvelle saison d'achat, l'accroissement significatif des capitaux propres et l'autorisation de la recherche de nouveaux partenaires bancaires. Ils font ainsi grief à la Commission des sanctions de l'AMF d'avoir interprété celle-ci comme signifiant que les fonds levés seraient exclusivement affectés au paiement de nouvelles factures, une telle interprétation heurtant, en premier lieu, la lettre même du texte, lequel précisait que les fonds financeraient « en partie » la nouvelle saison et, en deuxième lieu, le principe juridique et économique de la continuité d'exploitation des entreprises, le paiement des factures anciennes étant un préalable nécessaire à l'engagement de commandes nouvelles auprès des fournisseurs. Ils reprochent de surcroit à la Commission des sanctions d'avoir fondé ses griefs sur la seule proportion que représentaient le paiement d'arriérés fournisseurs et le remboursement de l'avance de Biscalux par rapport au montant de l'augmentation total de capital (15%), se livrant ainsi à une appréciation subjective et aléatoire. Ce seul constat ne peut en effet, selon eux, suffire à qualifier l'information en cause d'inexacte, imprécise et non sincère.

Ils affirment en deuxième lieu, que la notice d'information, offre de contrat, devait être interprétée en fonction du contexte, conformément à l'article 1161 du code civil . L'affectation prioritaire des fonds (« financer en partie la nouvelle saison d'achat ») devait ainsi être analysée à la lumière des autres informations du prospectus, lequel précisait que Cesar « subissait actuellement une forte pression de ses fournisseurs », ce qui devait s'interpréter comme démontrant que la société avait des dettes fournisseurs dont le règlement devait intervenir immédiatement aux fins de permettre la poursuite de l'activité. Ils soutiennent en conséquence que l'affectation minoritaire de la trésorerie de Cesar aux dettes passées ne rend pas l'information contraire aux exigences de l'article 223-1 du règlement général de l'AMF.

Le prospectus litigieux publié par la société César le 26 mai 2011 indiquait que l'augmentation de capital envisagé poursuivait trois objectifs : « financer en partie la nouvelle saison d'achat ; accroître significativement ses capitaux propres ; autoriser la recherche de nouveaux partenaires bancaires afin de sécuriser de manière pérenne le financement de la société». À aucun endroit du prospectus, ne figure l'information selon laquelle les fonds levés serviraient à payer des dettes fournisseurs relatives à la saison précédente ou à rembourser la créance de la société Biscalux à hauteur de 1 million d'euros.

Les requérants ne peuvent interpréter l'expression « financer en partie la nouvelle saison d'achat » comme signifiant a contrario que les fonds levés pourraient pour partie financer les dettes fournisseurs anciennes ou la créance Biscalux. En effet, l'expression « en partie » est à lire dans son contexte et renvoie aux deux objectifs complémentaires qui sont énumérés à la suite du premier. Les fonds ne servent qu'en partie à financer la nouvelle saison d'achat et en partie aux deux objectifs suivants : augmenter les capitaux propres et rechercher de nouveaux partenaires.

La lecture de l'intégralité du prospectus ne donne à cet égard pas d'information contraire. Il est même mentionné, à la page 22, à l'inverse de ce que voudraient lui faire dire les requérants, qu' « à la date du présent Prospectus, les ressources disponibles de Cesar lui permettent de couvrir ses besoins jusqu'au second trimestre 2011 ». Les investisseurs qui ont souscrit à l'augmentation de capital étaient donc entretenus dans la certitude qu'ils investissaient dans une société qui avait besoin de leur aide pour financer la continuité de son exploitation. Mais aucune information du prospectus ne leur donnait à penser que ces fonds seraient utilisés, même partiellement, pour payer les arriérés de la société et rembourser l'avance de la société Biscalux.

En définitive, était caché aux futurs souscripteurs le projet d'affecter 1 million d'euros, sur les 6,6 levés, au remboursement d'une avance, et une autre partie au paiement de dettes fournisseurs anciennes pour un montant, qui, pour n'avoir pas pu être précisément évalué, oscillait entre 100 000 et 200 000 €. Ce montant a été confirmé par M. M. qui a déclaré au rapporteur : « le paiement des factures anciennes représente pour nous 2 à 3 % du montant total des fonds levés ». Il a évalué les factures anciennes réglées grâce aux fonds levés à un montant global de 160 161,98 euros. Par ailleurs, les contestations de M. M. et M. V. ont été à juste titre réfutées par la Commission des sanctions. Les factures d'avril, mai, et juin 2011, bien que relatives à Halloween 2011 (octobre 2011), Noël et carnaval, ne pouvaient être relatives à la nouvelle saison d'achat évoquée dans le prospectus, qui correspond uniquement aux nouvelles commandes passées par César auprès de ses fournisseurs pour les fêtes de fin d'année 2011 et le carnaval 2012.

M. M. résume bien que son intention était de dissimuler cette affectation dans le prospectus, ainsi qu'il l'explique dans sa déclaration du 8 janvier 2014 : « je considère que seul un montant limité de passif ancien fournisseur pouvait être payé par l'augmentation de capital et qu'il n'était pas nécessaire de préciser ce point. L'utilisation des fonds telle que décrite dans le prospectus m'apparaît suffisamment précise ».

La circonstance que les fonds levés affectés au paiement de dettes fournisseurs anciennes aient été surévalués durant l'enquête, n'enlève rien au caractère répréhensible de cette dissimulation, qui s'ajoute à celle concernant le remboursement de l'avance de Biscalux.

Sur l'imputabilité du manquement à MM. M. et V. et les sanctions

M. V. soutient qu'il n'a été, à aucun moment, associé à la rédaction des documents relatifs à l'augmentation de capital, destinés à l'information du public.

M. M. allègue d'abord que le manquement qui lui est imputé ne repose sur aucune preuve tangible, mais sur la simple supposition de sa connaissance du courrier du 24 février 2011 adressé par la société Biscalux à la société Cesar, par lequel la première a consenti une avance de 1 million d'euros à la seconde et invoque le principe de personnalité des peines des  articles 8 et 9 de la CESDH . Si ce document a force probante pour caractériser le manquement de M. V. et de la société Cesar, il récuse toutefois qu'il puisse lui être opposé, n'étant ni signataire ni destinataire de cette lettre et n'en ayant eu connaissance qu'au cours de l'enquête. Il soutient qu'au moment de la publication du prospectus, il n'avait aucunement prévu de rembourser une quelconque créance d'actionnaire et se défend donc de tout manquement à l'article 223-1 du règlement général de l'AMF. Enfin, il se prévaut de « circonstances particulières », en ce que du fait des agissements de M. V. dont il n'a pas eu connaissance, il s'est trouvé privé de « l'exercice total ou partiel de ses fonctions », ce qui l'exonérerait de toute culpabilité, même présumée, au titre du manquement prévu à l'article 223-1 précité.

La Commission des sanctions a imputé le grief à MM. V. et M., sur le fondement du dernier alinéa de l'article 221-1 du règlement général de l'AMF. Cet alinéa prévoit que « les dispositions du présent titre (dont l'article 223-1) sont également applicables aux dirigeants de l'émetteur, de l'entité ou de la personne morale concernée».

La responsabilité personnelle des dirigeants de la société responsable est engagée, à moins que des circonstances particulières les aient privés de l'exercice total ou partiel de leurs fonctions. Il est en revanche possible à la Commission des sanctions de prendre en compte le rôle réel joué par ces dirigeants dans la commission de l'infraction, mais au seul titre de la détermination du montant de la sanction encourue.

Il résulte  du c du III de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier , dans sa version en vigueur au moment des faits, que « Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements ». Par ailleurs, les a et b du III du même article prévoient que la Commission des sanctions peut prononcer, contre les personnes morales, des sanctions pécuniaires dont le montant ne peut être supérieur à 100 millions d'euros ou au décuple des profits éventuellement réalisés, et contre les personnes physiques des sanctions pécuniaires dont le montant ne peut être supérieur à 15 millions d'euros.

La société Cesar doit répondre du grief de manquement à l'article 223-1 du règlement général de l'AMF.

C'est par une exacte appréciation des faits de la cause que la Commission des sanctions lui a infligé une sanction pécuniaire de 25 000 euros.

M. V. occupait la fonction de président du directoire de Cesar à la date de la publication du prospectus et avait donc la qualité de dirigeant au sens de l'article 221-1 du règlement général de l'AMF. Il lui appartenait en conséquence de répondre des irrégularités commises du seul fait de ses fonctions.

De surcroit, il était signataire du prospectus litigieux, duquel il s'est déclaré responsable, tout comme du courrier du 24 février 2011. Il était ainsi pleinement informé des problématiques relatives au remboursement de la créance d'actionnaire et à même de détecter un défaut d'information du public dans le prospectus sur ce point.

Il y a donc lieu d'approuver la Commission des sanctions en ce qu'elle a prononcé à l'encontre de M. V. une sanction de 150 000 euros.

M. M. doit répondre des pratiques commises, en sa qualité de directeur général et membre du directoire de la société César. Il a en outre signé le prospectus litigieux, s'en est déclaré responsable et a participé à son élaboration. Il a également admis avoir envisagé de rembourser une partie des dettes anciennes fournisseurs au moyen des fonds levés. Enfin, s'agissant de la créance de la société Biscalux, il ne peut prétendre avoir été tenu dans l'ignorance d'un remboursement à celle-ci, à l'aide des fonds levés, alors qu'il sollicitait lui-même de M. V., dans un courriel adressé le 4 mai 2011, une avance supplémentaire qui serait convertie « si l'AK marche » (« augmentation de capital »). Il ne peut dès lors invoquer des « circonstances particulières » exonératoires, ne justifiant pas qu'il ait ignoré le caractère insuffisant et tronqué des informations transmises dans le prospectus.

C'est donc par une exacte appréciation des faits de la cause que la Commission des sanctions lui a infligé une amende de 25 000 €.

Sur la publication

Aucun obstacle ne s'oppose à ce que l'AMF publie le présent arrêt sur son site Internet.

PAR CES MOTIFS

-rejette le recours de la société Cesar, de Monsieur V. et de Monsieur M.,

- fait droit à la demande de publication de l'AMF,

-condamne la société Cesar, Monsieur V. et Monsieur M. aux dépens de l'instance.