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Décisions

CA Paris, Pôle 2 ch. 2, 30 novembre 2012, n° 10/13824

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Buscoz et Cie (SAS), Aviva Assurances (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Vidal

Conseillers :

Mme Martini, Mme Richard

Avocats :

SCP Bommart Forster - Fromantin, Me Lacan, SCP Regnier - Bequet - Moisan, Me Levallois, SELARL Pellerin - De Maria - Guerre, Me Offenstadt

TGI Créteil, du 17 mai 2010, n° 08/02228

17 mai 2010

Exposé des faits

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Suivant acte d'huissier en date du < 10 > décembre 2007, M. K., propriétaire d'un cheval dénommé STUDIO THREE, âgé de trois ans, a fait assigner la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et son assureur, la Société AVIVA Assurances, devant le tribunal de grande instance de Créteil pour obtenir leur condamnation à lui verser une somme de 230.500 € à la suite du décès de son cheval, celui-ci ayant été retrouvé mort dans son box après une intervention chirurgicale pratiquée le 9 mai 2007.

Suivant actes d'huissier en date des 7 et 11 février 2008, la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances ont fait assigner devant ce même tribunal la Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA afin de voir dire que le véhicule de cette société, qui avait heurté le box où se trouvait le cheval quelques heures avant la constatation de son décès, était impliqué dans un accident de la circulation auquel était imputable ce décès et d'obtenir leur condamnation solidaire à les relever et garantir de toutes condamnations.

Par jugement en date du 17 mai 2010, le tribunal de grande instance de Créteil a retenu la responsabilité de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS dans la survenance du décès du cheval et a écarté la force majeure invoquée par celle-ci. Il a condamné la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances in solidum à payer à M. K. une somme de 122.000 € à titre de dommages et intérêts, assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation. Il a dit qu'il y avait lieu de faire application de la franchise prévue au contrat d'assurance dans les relations entre la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances.

Il a considéré que le lien de causalité entre l'accident dû au camion de la Société BUSCOZ et Cie et le décès du cheval était avéré et a condamné en conséquence la Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA in solidum à garantir la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances de toutes les condamnations prononcées contre elles.

Il a condamné in solidum la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances à verser à M. K. une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et a débouté les parties du surplus de leurs prétentions.

Il a assorti sa décision de l'exécution provisoire.

La Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA ont interjeté appel de cette décision suivant déclaration déposée au greffe le 5 juillet 2010. La SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances ont également interjeté appel. Ces deux appels ont été joints par ordonnance en date du 27 octobre 2011.

La Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA, aux termes de leurs conclusions déposées et signifiées le 4 novembre 2010, sollicitent l'infirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions relatives aux demandes formées par la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et par la Société AVIVA Assurances contre elles et demandent à la cour de rejeter toutes leurs demandes et de les condamner à leur verser une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font reproche au jugement déféré :

• D'avoir retenu les conclusions du rapport d'autopsie de l'Ecole Vétérinaire de Maison Alfort, intervenue 6 jours après l'autopsie partielle et non contradictoire opérée par le vétérinaire de la clinique et dont les constatations ne sont pas probantes, • D'avoir retenu l'existence d'un lien de causalité entre le décès et le choc provoqué par l'accident sur le toiture du box, alors qu'il avait été constaté dans les instants suivants cet accident que celui-ci n'avait provoqué aucune agitation chez les chevaux qui s'y trouvaient et alors que la compression à l'origine de l'étouffement du cheval résulterait de l'absence de soin et de surveillance post opératoire de la part de la Clinique sur cet animal qui sortait d'une intervention.

La SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances, en l'état de leurs écritures déposées et signifiées le 20 octobre 2010, concluent-elles aussi à l'infirmation du jugement et demandent à la cour :

1. A titre principal, de dire que la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS n'a commis aucune faute à l'égard du cheval de M. K. et qu'elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles, qu'il s'agisse de son obligation de soins ou de son obligation d'hébergement ; de dire que le décès du cheval est dû à un cas de force majeure ; de débouter en conséquence M. K. de toutes ses demandes et d'ordonner la restitution par celui-ci de la somme de 134.597,43 € versée au titre de l'exécution provisoire du jugement ;

2. A titre subsidiaire, de dire que l'accident de circulation du camion de la Société BUSCOZ et Cie est à l'origine exclusive de ce sinistre et de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA à les relever et garantir des condamnations prononcées contre elles ;

3. A titre très subsidiaire, de constater que les préjudices réclamés par M. K. sont exorbitants, de réduire les demandes à de plus justes proportions et d'ordonner la restitution par M. K. de la différence entre la somme de 134.597,43 € et celle allouée par la cour ;

4. A titre infiniment subsidiaire, de constater l'existence d'une franchise contractuelle prévue au contrat d'assurance souscrit par la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et d'en faire application ;

5. En toute hypothèse, de condamner M. K. à verser à la Société AVIVA Assurances une somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elles font valoir, pour l'essentiel :

• Qu'en lecture du rapport d'autopsie, il ne peut être reproché à la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS aucun manquement à son obligation de soins, tant au niveau de l'intervention elle-même qu'au niveau des soins post opératoires puisque le cheval a été examiné à 15 h et qu'il ne présentait alors aucune anomalie ; • Qu'aucune faute dans l'exécution de sa mission de garde ne peut être retenue, le box dans lequel le cheval était hébergé étant parfaitement adapté à un animal en convalescence ; qu'en tout état de cause, le dépositaire est exonéré en cas de force majeure, ici caractérisée par l'accident du camion, événement à la fois imprévisible et irrésistible dans sa soudaineté et sa violence, directement à l'origine du stress de l'animal et de l'hémorragie consécutive à son agitation ; • Que l'accident du camion constitue un accident de la circulation au sens de la loi du 5 juillet 1985, étant intervenu sur une voie privée ouverte à la circulation, et qu'il existe une présomption d'imputabilité du dommage à l'accident puisqu'il est avéré que l'hémorragie a été déclenchée par les mouvements brutaux du cheval ; • Que le préjudice matériel de M. K. a été surévalué, le coût du voyage du cheval des USA en France et les frais d'entretien depuis son départ jusqu'à son décès étant sans lien avec son décès ; que le prix d'acquisition ne reflète pas la valeur réelle du cheval, s'agissant d'une acquisition aux enchères ; que la perte de chance de gain aux courses a été justement rejetée par le tribunal, s'agissant d'un événement simplement virtuel au regard de ses médiocres performances.

M. K., suivant conclusions en date du 8 avril 2011, sollicite la confirmation du jugement sur le principe de la responsabilité de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS, mais sa réformation sur le quantum de l'indemnisation et demande en conséquence à la cour :

1. De débouter la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances de l'ensemble de leurs demandes,

2. De les condamner solidairement à lui payer la somme de 230.000 € à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, outre une somme de 12.000 €

sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il invoque la responsabilité de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS au titre de son obligation de dépositaire à titre onéreux et rappelle :

• qu'elle ne peut, en cette qualité, s'exonérer de sa responsabilité qu'en rapportant la preuve de l'absence de faute ou d'un événement de force majeure ; • que la clinique a gravement failli à ses obligations de garde et de surveillance du cheval, s'agissant d'un pur-sang fragile et de grande valeur, au surplus convalescent, en ne le plaçant pas dans un box calme et isolé et en laissant circuler à proximité un camion qui procédait à l'enlèvement du fumier puis, après l'accident, en n'ayant pas surveillé l'animal avec une vigilance accrue ; • qu'elle ne peut invoquer un cas de force majeure, dès lors que l'accident est le fait de son prestataire de services, la Société BUSCOZ et Cie, auquel elle avait confié l'enlèvement du fumier ; qu'au demeurant la force majeure n'est pas caractérisée, à défaut d'imprévisibilité le camion circulant habituellement devant le box et d extériorité s’agissant d’un accident provoqué par une personne qui n'est pas extérieure à l'entreprise.

Il fait valoir que son préjudice est ainsi constitué :

• préjudice moral : < 10 >.000 € , • préjudice matériel comprenant la valeur du cheval composée du prix d'achat (75.375 € ), du prix du voyage des USA en France (12.300 € ), des frais d'entretien depuis son arrivée en France (39.654,37 € ) et du coût de l'intervention (1.787 € ), et pouvant être fixée, eu égard aux évaluations proposées par l'entraîneur du cheval et par le Dr L., expert, à une somme de 150.000 € , • perte de chance de gains aux courses : 70.000 € , le cheval devant être engagé en 2007 et 2008 dans des épreuves devant générer des gains potentiels de l'ordre de 45.500 € et l'existence d'un aléa sur le gain n'excluant pas l'indemnisation du préjudice lié à une perte de chance.

La procédure a été clôturée par ordonnance en date du 11 octobre 2012.

Motifs

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Considérant que le cheval STUDIO THREE, acquis par M. K. aux USA le 19 juillet 2005 moyennant le prix de 90.450 $ et confié par celui-ci à un entraîneur de Chantilly en vue de le faire concourir, a subi, le 9 mai 2007, une intervention chirurgicale à la clinique vétérinaire de GROSBOIS en vue de remédier à un déplacement du voile du palais ;

Que l'anesthésie et le réveil se sont bien passés mais que vers 17h, il a été découvert mort dans le box dans lequel il avait été placé ;

Qu'il soit constant que vers 15h30, le camion de la Société BUSCOZ et Cie, chargée de ramasser le fumier, avait heurté le toit du bâtiment dans lequel se trouvait ce box, provoquant des dégâts matériels, dont le déplacement et la chute de tuiles devant le box occupé par STUDIO THREE ;

Qu'une autopsie partielle du cheval a été opérée immédiatement par le Dr R., vétérinaire ayant pratiqué l'intervention chirurgicale, pour rechercher les causes du décès ; qu'il a alors été noté que le cheval présentait un hématome modéré au niveau de la plaie chirurgicale mais pas de signes obstructifs hauts ;

Que le rapport de sinistre établi par le Dr R. le lendemain du décès indique :

#1 • que le cheval avait été observé à 15 h et ne présentait alors aucune anomalie, excepté un léger dème sous laryngé, • que cinq minutes après l'accident, survenu à 15h30 et ayant provoqué la chute de plusieurs tuiles devant le box de l'animal, aucune anomalie sur le cheval STUDIO THREE n'avait été constatée par le vétérinaire, • que, lors de la découverte de sa mort, à 17h, il était relevé la présence de sang devant le box et sur les murs et des traces de sang sur le nez de l'animal ;

Qu'une autopsie plus complète ait été réalisée par l'école vétérinaire de Maisons Alfort le < 10 mai 2007 et qu'il en ressort :

- que la mort brutale du cheval était due à un collapsus cardio vasculaire,

- que l'exploration de la région d'intervention chirurgicale ne permettait pas de relever d'anomalie caractérisant un défaut de cette intervention,

- que le tableau lésionnel était dominé par la présence d'un volumineux hématome jugulaire périlaryngé et sus trachéal et que la mort de l'animal pouvait être rapportée au développement de cette lésion hémorragique qui avait provoqué une compression de la région laryngo trachéale, très possiblement à l'occasion de mouvements brutaux et désordonnés du cheval après son réveil ;

Sur la responsabilité contractuelle de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS :

#2 Considérant que la responsabilité de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS est mise en jeu par M. K. sur le fondement contractuel, non pas tant au regard de son obligation de soins dans le cadre de l'intervention chirurgicale elle-même, qu'à raison de son obligation de dépositaire pour l'hébergement et les soins post opératoires ;

Qu'aux termes de l'article 1928 du code civil, le dépositaire est tenu d'une obligation de soins renforcée lorsque le contrat a été conclu à titre onéreux et qu'il ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'à la condition de prouver que le dommage survenu n'est pas imputable à sa faute ;

Que le tribunal a à juste titre retenu en l'espèce que la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS avait la qualité de dépositaire à titre onéreux, le dépôt étant l'accessoire du contrat de soins conclu à titre onéreux avec le propriétaire du cheval, et qu'il lui appartenait d'établir l'absence de faute de sa part dans le décès de l'animal ;

#3 Qu'il a justement considéré qu'il appartenait à la clinique vétérinaire de prendre toutes les précautions nécessaires et d'apporter tous ses soins pour que le cheval en convalescence soit placé dans un box parfaitement adapté à son état, s'agissant d'un cheval pur-sang dont le caractère craintif et impusif est avéré et qui est susceptible, comme cela a été le cas, d'avoir des mouvements désordonnés et brutaux ;

Que les constatations rapportées dans la déclaration de sinistre et les conclusions de l'autopsie sus rappelées permettent de retenir que le cheval s'est blessé mortellement en s'agitant dans son box et que la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS ne justifie pas avoir apporté la surveillance et les diligences nécessaires pour éviter les conséquences dommageables de cette agitation, notamment en plaçant le cheval dans un box adapté et en assurant une surveillance suffisante de l'animal après son réveil ;

#4 Considérant qu'en application de l'article 1929 du code civil, le dépositaire n'est tenu en aucun cas des accidents de force majeure ; qu'il lui appartient donc, pour s'exonérer, d'établir l'existence d'un événement directement à l'origine du dommage ayant les caractères d'imprévisibilité, d'irrésistibilité et d'extériorité par rapport au débiteur de l'obligation ;

Qu'en l'espèce, la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances soutiennent que l'accident provoqué par le camion de la Société BUSCOZ et Cie à 15h30 constituerait un événement ayant les caractères de la force majeure, de nature à l'exonérer de sa responsabilité ;

Qu'à supposer que l'accident soit la cause directe et certaine du décès du cheval, ce qui sera examiné plus loin, force est de constater, comme l'a fait le tribunal, que cet événement n'était pas imprévisible, le camion de la Société BUSCOZ et Cie circulant de manière habituelle dans la cour de la clinique et la survenance d'un accident matériel, même s'il n'y en avait eu aucun jusque-là, ne pouvant pas être totalement exclue au cours de ses manoeuvres fréquentes devant le box ;

Qu'au surplus, la cour constate que l'accident est le fait de la Société BUSCOZ et Cie dont il n'est pas contesté qu'elle était le prestataire de service de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS pour le ramassage du fumier ; que le prestataire de service auquel le dépositaire a eu recours pour l'exécution d'une partie de sa mission ne constitue pas un tiers par rapport au contrat et que sa faute ne peut constituer un cas de force majeure pour celui-ci ;

Que le jugement soit donc confirmé en ce qu'il a retenu la responsabilité de la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS dans la réalisation du dommage et a condamné celle-ci et la Société AVIVA Assurances in solidum à indemniser M. K. de son préjudice ;

Sur le préjudice indemnisable :

#5 Considérant que c'est par des motifs pertinents et précis que la cour adopte que le tribunal a, au regard des pièces versées aux débats par M. K. et notamment de l'attestation de M. L., vétérinaire à Chantilly et expert auprès des tribunaux, estimant la valeur du cheval STUDIO THREE à 120.000 €, et compte tenu du caractère très subjectif de l'estimation faite par M. C., entraîneur du cheval, évalué le préjudice matériel subi par M. K. à la somme de 120.000 € ;

#6 Considérant que M. K. réclame l'attribution d'une somme de 10.000 € en réparation de son préjudice moral ; mais que la somme de 2.000 € attribuée en première instance au titre du préjudice moral apparaît suffisante, le tribunal ayant justement rappelé que M. K., qui demeure aux USA, avait envoyé son cheval dans un élevage en France quelques mois seulement après son acquisition ;

#7 Considérant que M. K. fait grief aux premiers juges d'avoir rejeté sa demande en dommages et intérêts pour perte de gains aux courses en retenant l'existence d'un aléa, alors, dit-il, que l'existence d'un aléa n'exclut pas l'indemnisation d'un préjudice sous la forme d'une perte de chance ;

#8 Mais que la perte de chance ne peut donner lieu à indemnisation que si elle présente un caractère sérieux qui, en matière de perte de gains aux courses, s'apprécie en fonction des performances du cheval avant son décès ;

Qu'il est établi que le cheval STUDIO THREE avait couru plusieurs courses sans obtenir aucun résultat ; que l'intervention chirurgicale sur le voile du palais était certes destinée à supprimer un problème respiratoire constaté lors des entraînements, mais qu'il n'est pas démontré qu'une fois ce problème résolu, les résultats de STUDIO THREE auraient été améliorés dans des proportions telles qu'elles lui auraient permis de participer avec de réelles chances de succès aux courses auxquelles son entraîneur avait projeté de l'inscrire pour les saisons 2007 et 2008 ;

Que le jugement soit donc confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. K. au titre des pertes de gains aux courses, à défaut de démonstration d'une perte de chance réelle et sérieuse de gagner des courses avec le cheval STUDIO THREE ;

#9 Considérant que si le principe posé par l'article 1153-1 du code civil est que la créance indemnitaire emporte intérêts à compter de la décision qui en évalue le montant, il n'en demeure pas moins que le juge peut décider de manière discrétionnaire de faire courir les intérêts à compter de l'assignation à titre de complément d'indemnisation ;

Que le tribunal ait justement constaté que la franchise prévue au contrat d'assurance souscrit par la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS auprès de la Société AVIVA Assurances était opposable à l'assurée ;

Sur l'appel en garantie de la Société BUSCOZ et Cie :

#10 Considérant qu'il est avéré que le camion de la Société BUSCOZ et Cie a heurté le toit du bâtiment de la clinique, à proximité du box où se trouvait le cheval ; qu'aux termes de la loi de 1985, dès lors qu'un véhicule est impliqué dans un accident, l'imputation du dommage à cet accident est présumée, mais qu'il en va différemment lorsque le préjudice s'est révélé postérieurement, la victime devant alors prouver l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et le dommage dont elle entend solliciter réparation ;

#11 Que le Dr R. indique, dans son rapport de sinistre, qu'à la suite du choc de la benne du camion sur le toit, de nombreuses tuiles avaient été détruites et étaient tombées devant le box, alors que le chauffeur du camion, M. N., déclare que moins d'une douzaine de tuiles avait été déplacée et qu'une seule d'entre elles était tombée au sol devant le box ; qu'aucun autre élément n'est produit permettant d'apprécier l'importance du choc et l'étendue des dégâts, notamment un justificatif de la prise en charge des frais de réparation de la toiture ; qu'il est par contre constant, tant en lecture du rapport du Dr R. qu'au travers du témoignage de M. N. que, lors de leur passage dans le box, quelques minutes après le choc, le cheval ne présentait aucune agitation anormale ; et que ce n'est qu'une heure et demi plus tard que le décès a été constaté ; qu'il appartient en conséquence à la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS de rapporter la preuve de l'existence d'un lien de causalité entre l'accident et le décès du cheval ;

Que la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances se fondent sur le rapport d'autopsie de l'école vétérinaire de Maisons Alfort pour voir dire que le bruit causé par le choc aurait provoqué l'agitation du cheval, elle-même à l'origine de l'hémorragie dont il est décédé ;

Mais que la cour relève que le rapport d'autopsie ne fait qu'émettre des suppositions sur la cause de l'hémorragie et sur l'éventuelle agitation du cheval ; qu'il y est en effet indiqué : « L'importance de l'hématome (') incite à penser que l'hémorragie a pu survenir bien après l'intervention (') très possiblement à l'occasion de mouvements brutaux et désordonnés de l'animal après son réveil - de tels mouvements peuvent survenir sur un animal effrayé (rôle possible des bruits anormaux occasionnés par l'accident signalé ) » ; que, quelques minutes après le choc, le cheval, examiné par le vétérinaire, ne présentait aucune anomalie et aucun signe d'agitation, alors qu'à 17h, lors de la découverte de son décès, il portait des traces de sang sur le nez et du sang se trouvait également sur les murs, signe que les mouvements désordonnés et agités du cheval se seraient produits postérieurement à l'accident, sans aucun lien avéré avec lui ;

Qu'il convient en conséquence de retenir qu'à défaut d'établir l'imputation du décès du cheval STUDIO THREE à l'accident matériel survenu une heure et demie auparavant, la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances doivent être déboutées de leur appel en garantie contre la Société BUSCOZ et Cie et son assureur, la Cie AXA ;

Vu les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 696 du code de procédure civile,

Dispositif

PAR CES MOTIFS, La cour, statuant publiquement, contradictoirement,

en matière civile et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de Créteil déféré en ce qu'il a condamné la Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA in solidum à relever et garantir la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances des condamnations prononcées contre elles au profit de M. K. et à supporter les dépens ;

Déboute la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances de toutes leurs demandes à l'encontre de la Société BUSCOZ et Cie et de la Cie AXA ;

Le confirme en toutes ses autres dispositions et y ajoutant,

Condamne la SCP VETERINAIRE DE GROSBOIS et la Société AVIVA Assurances in solidum à payer à M. K. une somme de 3.000 € et à la Société BUSCOZ et Cie et la Cie AXA ensemble une somme de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Les condamne in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel et dit que ceux d'appel seront recouvrés dans les formes et conditions de l'article 699 du code de procédure civile.